QUEMENT DE LA CARGAISON.-FRAIS A LA CHARGE DU NAVIRE. Ce n'est pas à la délibération de l'équipage, mais aux événements de la navigation qu'il faut s'attacher pour déterminer le caractère des avaries souffertes par le navire, et décider si elles sont particulières ou communes. Lorsque, à la suite d'une voie d'eau occasionnée par une pure fortune de mer, sans que la volonté de l'homme y ait en rien contribué, le navire a dú, pour se réparer, entrer dans un port de relâche et y décharger, pendant la réparation, une partie de sa cargaison, les frais de ce débarquement et du rembarquement qui a suivi, n'ayant été que la conséquence nécessaire et forcée de la voie d'eau à réparer, doivent, tout aussi bien que les autres frais de la relâche et ceux de la réparation, élre considérés comme des avaries particulières à la charge du navire, nonobstant la circonstance que la relâche a été effectuée après délibération de l'équipage motivée sur le salut commun. (1) (CAPITAINE HECTOR CONTRE DEVILLE ET ST-ALARY JUGEMENT. Attendu qu'il résulte, en fait, du journal d'habitacle et des rapports de mer produits par le capitaine Hector, que le (1) Ce jugement est important en ce qu'il met fin à la dissidence qui existait entre notre Tribunal et la Cour d'Aix, sur une question dont la solution intéresse grandement le commerce maritime. Nous avons rapporté dans ce recueil (18551-66. 166, 331; 1854-1-256; 1852-1853-1-371) les divers jugements et arrêts qui ont successivement marqué l'antagonisme qui, sur ce point, s'était déclaré entre nos juges consulaires et la juridiction supérieure. Notre Tribunal a renoncé à considérer plus long-temps comme avaries communes des frais que la Cour persistait à laisser à la charge du navire comme avaries particulières. Du reste un jugement précédent, du 12 décembre dernier, avait déjà fait pressentir très-clairement le changement de jurisprudence qui allait bientôt s'accomplir; nous le transcrivons ci-après in extenso: Attendu, en fait, qu'il résulte des documents produits et notamment du procès verbal de la délibération de l'équipage du navire Le Druide, capitaine His: Que, parti de Fernambouc pour Marseille le 13 juin dernier, avec un chargement de sucre, le vent qui était au sud, passa variable du sud-est à l'est, temps à grains; Que le lendemain 14 fesant route au nord avec forte brise du sud-est, la mer très-grosse, le navire fatiguait beaucoup et fesait de l'eau depuis sa sortie du port; Que le capitaine attribuant cette eau à l'état de la mer et à la sécheresse des précintes (le navire ne fesant pas d'eau dans le port), n'en continua pas moins sa route, persuadé qu'il était que l'eau ne pouvait tarder à diminuer ; Mais que, dans la même journée, la mer étant devenue plus grosse et par suite le navire fatiguant davantage, l'on fut obligé d'avoir constamment les pompes en jeu sans pouvoir les franchir; Que, le capitaine ayant diminué de voile et fait visiter le navire dans ses hauts, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, l'on s'aperçut que la rablure de tribord au-dessous des jottereaux était entièrement vide d'étoupe dans la longuenr d'un pied environ, que l'on fit boucher, et l'on continua la route n'ayant découvert aucune autre partie du navire en mauvais état; Mais que, dans la nuit du 14 au 15, la voie que l'on croyait bouchée donnant encore davantage, il fût décidé unanimement, vu la longueur du Voyage et pour le bien et le salut commun du navire et de la cargaison, de faire route pour le port le plus voisin ; Attendu qu'il est également établi qu'en exécution de ladite délibération, le navire Le Druide relacha à Céara où, après l'avoir fait visiter par des experts nommés par l'autorité compétente, avoir fait exécuter les réparations par eux prescrites et les avoir payées, ainsi que les dépenses dans ledit port, au moyen de la vente d'une partie du sucre de la cargaison à laquelle il s'était navire Tacna a employé 54 jours de navigation ou de séjour dans diverses rades foraines des îles de la Réunion, pour y compléter son chargement; Qne, pendant ce laps de temps, il a essuyé dans ces eaux fait autoriser, le capitaine His repartit de Ceara et arriva à Marseille sans autre événement remarquable; Attendu que c'est en l'état de ces faits que le capitaine His a introduit à l'encontre de Pagès, son affréteur et consignataire de sa cargaison, une demande en règlement d'avaries communes et en condamnation des frais par lui faits à Fernambouc pour la marchandise; Que Pagès, qui a appelé ses assureurs au procès, conteste la demande comme non recevable et conclut reconventionnellement, à l'encontre du capitaine His, au paiement de la somme de F. 19,000 80 montant de la partie sucre par lui vendue à Céara pour payer les dépenses de la relàche; Et sur ce, attendu qu'il résulte en fait, pour le Tribunal, des documents ci-dessus que la relâche du navire Le Druide à Céara a eu pour cause unique une voie d'eau à réparer ; Qu'en droit et d'après les dispositions formelles du 3° paragraphe de l'article 403 et de l'article 404, les dépenses en résultant ne sauraient constituer que des avaries particulières qui doivent être supportées et payées par le propriétaire de la chose qui a essuyé le dommage ou occasionné la dépense; Qu'inutilement le capitaine His soutient que cette voie d'eau, qui était considérable et allait toujours en augmentant par suite de la grosse mer qui fatiguait toujours plus le navire et qui aurait fini par le faire sombrer, le place évidemment dans la disposition finale de l'article 400; Que cette argumentation que le Tribunal a consacrée dans des circonstances de tempête obligeant le navire à chercher un refuge, ne se rencontre-pas dans l'espèce, où il est évident au contraire que le navire Le Druide, à sa sortie de Fernambouc pour Marseille, n'était pas en état de supporter les événements ordinaires d'un pareil voyage; Que la présomption que le capitaine veut tirer du certificat de visite avant de prendre charge à Fernambouc. est détruite par l'évidence du fait; D'où la conséquence, que l'action en contribution que le capitaine His forme à l'encontre de Léonidas Pagès ne saurait être accueillie; Attendu, quant au chef de la demande du capitaine His relatif aux frais faits à Fernambouc et qui d'après lui seraient à la charge de la marchandise d'après ses accords avec le sieur Pagès, qu'il résulte du parère et autres documents produits que, d'après l'usage de Fernambouc, le transport des marchandises à bord est à la charge du navire; En ce qui tonche les fins reconventionnelles du sieur Pagès; attendu que les sucres du chargement qui en font l'objet, ayant servi à payer les dépenses relatives au navire rentrant dans les dispositions finales de l'article 403 et de l'article 404, doivent être payés sur les bases ordonnées par l'article 234 du Code de Commerce; que la cause n'étant pas instruite sur ce point, il y a lieu de renvoyer quant à ce ; Par ces motifs, le Tribunal, sans s'arrêter à la demande en avaries communes du capitaine His envers Pagès, non plus qu'au chef de la demande en paiement de la somme de quatre cent vingt-deux mille Reis, dans lesquels il est déclaré tout à la fois non-recevable et mal fondé, renvoie à quinzaine pour les fins reconventionnelles, condamne le capitainc His aux dépens. Du 12 décembre 1855. - Prés. M. POURTAL; Plaid. MM. COURNAND, pour le capitaine; LECOURT, pour Léonidas Pagès. des tempêtes et une grosse mer qui ont fait éprouver une grande fatigue au navire; Que, parti le 4 mars 1855 de Saint-Denis, avec une cargaison de sucre et de girofle, il a rencontré le 6 une mer houleuse et de forts roulis à la suite desquels, dans la journée du 7, une voie d'eau s'est déclarée; Que le 8, la houle ayant encore tourmenté le navire, l'augmentation de l'eau a été constante et que, l'équipage assemblé, il a été déclaré d'un accord unanime que, dans l'intérêt du navire et de la cargaison, il y avait lieu de gagner le port le plus voisin ; Attendu qu'à la suite de cette décision, le navire fit sa relâche à Port-Louis; Que le navire parti de Port-Louis, le 29 mai 1855, a rencontré une mer furieuse qui submergeait à chaque instant le pont du navire; Qu'après avoir relâché à Sainte-Hélène le 8 juillet 1855, il en est reparti le lendemain ; Que, dans le golfe de Lyon, il a été exposé encore à des temps horribles, le pont constamment submergé par les vagues; Qu'il est également établi par les mêmes documents que, sur l'ordre du pilote en rade de Port-Louis, le capitaine Hector a fait abandon d'une chaîne, d'une aucre ainsi que des basses voiles; Attendu que c'est en l'état de ces faits que le capitaine Hector, arrivé à Marseille le 1er octobre 1855, a introduit à l'encontre de ses consignataires une demande en règlement d'avaries communes et de tous comptes avec les parties à raison de la relâche forcée à Port-Louis; Que lesdits consignataires contestant la demande de règlement en avaries communes, tant pour cause du vice propre du navire que par le motif que les dépenses comprises dans l'état des avaries du capitaine Hector ont eu pour cause la relâche du navire Tacna à la suite d'une voie d'eau, le Tribunal est appelé à statuer sur le mérite de ces prétentions; Sur ce et sur le premier chef du vice propre du navire : Attendu que le long espace de temps employé par le navire dans les îles de la Réunion, pour y compléter son chargement, les temps mauvais qu'il a essuyés sur les diverses |