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Que l'article 1798 C. Nap., qui accorde aux ouvriers une action directe contre le propriétaire,à concurrence de ce qu'il doit à l'entrepreneur, est une preuve que l'ouvrier n'a pas de privilége sur la chose à laquelle il applique son travail, lorsqu'il sait qu'elle n'est pas la propriété de celui avec lequel il a contracté ;

Attendu qu'il reste à vérifier si Colombier et Ducassou ont su que Valaise jeune construisait le navire l'Eugène-et-Marie pour compte d'Allard et Comp.;

Attendu, en fait, que Colombier et Ducassou ont fait à Valaise, constructeur du navire l'Eugène-et-Marie, des fournitures montant à 8,573 fr. 75 c.; que ces fournitures ont eu lieu du 5 avril au 3 décembre 1855;

Que, le 7 novembre 1855, Allard et Comp. ont compté à Colombier et Ducassou, à l'acquit de Valaise, la somme de F. 2,000; qu'il est donc certain qu'à ce moment-là Colombier et Ducassou ont su que Valaise construisait le navire l'Eugène-et-Marie pour compte d'Allard et Comp.;

Qu'en vain Colombier et Ducassou prétendraient qu'ils n'avaient pas su, antérieurement au 7 novembre, que Valaise ne construisait pas le navire pour son propre compte, et que les fournitures antérieures au 7 novembre devraient être déclarées privilégiées; que Colombier et Ducassou ont fait pour le même navire des fournitures directes à Allard et Comp.; que ces fournitures ont été l'objet d'nn compte particu lier acquitté par ces derniers ; que ce compte prouve qu'ils savaient que le navire était construit pour Allard et comp.et que le premier article de ce compte remonte au 10 février 1855, époque où les premières fournitures ont été faites à Valaise;

Par ces motifs, la Cour met au néant l'appel interjeté par Colombier et Ducassou du jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux, le 7 avril 1856; ordonne que се jugement sera exécuté selon sa forme et teneur.

Du 4 août 1856. Cour de Bordeaux, 1re Chamb. Prés. M. DE LA SEIGLIÈRE; Concl. M. PEYROT, av. gén.; Plaid. MM. GOUBEAU et FAYE,

2o Espèce.

(TEURLAY CONTRE COURRIAN ET POUPON).

Attendu que

ARRÊT.

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les fournisseurs et ouvriers ne peuvent se

prévaloir du privilége établi par l'art. 191, n° 8, C. comm., lorsque le navire a été construit pour le compte d'un tiers, que les ouvriers et fournisseurs en ont eu connaissance, et qu'avant toute opposition ou demande de leur part, le propriétaire s'est libéré de bonne foi dans les mains du constructeur;

Qu'ils ont alors suivi volontairement la foi du constructeur, puisque, d'une part, instruits que le navire ne lui appartenait pas, ils n'ont pu le considérer comme le gage des avances qu'ils lui faisaient, et que, de l'autre, il ne tenait qu'à eux de former opposition dans les mains du propriétaire; que cette solution est donc conforme à l'équité, aussi bien qu'aux intérêts du commerce maritime; qu'elle est, d'ailleurs, en harmonie avec la disposition de l'article 1798 Code Napoléon ;

Attendu, enfin, qu'il était notoire, dans la petite bourgade de St-Denis, que le navire dont il s'agit au procès était construit pour le compte des intimés; que les appelants, qui étaient sur les lieux, n'ont pu l'ignorer; que le capitaine Bodard, chargé par les armateurs de surveiller la construction, était journellement dans le chantier, et que les frères Teurlay ont dû, comme les autres ouvriers et fournisseurs, se mettre en rapport avec lui;

Par ces motifs, la Cour, sans s'arrêter à l'appel interjeté par les frères Teurlay du jugement rendu par le Tribunal de commerce de Libourne, le 10 mai dernier, confirme ce juge

ment.

Du 18 août 1856. Cour de Bordeaux; re Chamb. Prés. M. DE LA SEIGLIÈRE ; Plaid. M. BRAS-LAFFITTE.

3me Espèce.

(ALLARD ET Cie CONTRE SOULÉ).

ARRÊT.

Attendu que, bien qu'il soit très vraisemblable que Soulé n'a pas ignoré que le navire l'Eugène-et-Marie était construit pour le compte d'Allard et Comp., néanmoins on est réduit à cet égard à des présomptions qui ne sont pas assez précises et assez concluantes pour former une preuve juridique et

complète; que Soulé, qui habite Bordeaux et ne paraît pas s'être rendu à Saint-Denis, a pu ignorer ce qui était notoire pour les fournisseurs qui étaient sur les lieux;

Par ces motifs, la COUR met l'appel au néant (1).

Du 19 août 1856. COUR de Bordeaux. ire chambre. Prés. M. de LA SEIGLIERE;-Plaid. MM. FAYE et CARCAud.

(1) Le jugement que la Cour confirme ici, émane du Tribunal civil de Bordeaux; nous rapportons quelques-uns des motifs par lesquels il a accueilli la demande de Soulé et déclaré ce fournisseur privilégié sur le navire pour le montant de ses fournitures:

>>Attendu que, dans le cas d'une construction sur le territoire d'autrui, les ouvriers qui n'ont pu ignorer cette circonstance ont, par cela même, nécessairement connu le marché à forfait et suivi la foi de l'entrepreneur; que c'est pour cette raison que l'art. 1798 C. N. ne leur accorde privilége sur la chose que comme subrogés au droit de leur débiteur, et, par conséquent, jusqu'à concurrence seulement de ce qui reste dû à celui-ci par le propriétaire ;

» Mais que, dans le cas de la construction d'un navire dans le chantier du constructeur, la présomption étant au contraire qu'elle se fait pour le compte du constructeur lui-même, tant que celui pour lequel elle est réellement faite ne se fait pas connaître, on ne peut dire que les ouvriers et fournisseurs ont suivi la foi du constructeur; qu'il est plus naturel d'admettre qu'ils ont ignoré le marché à forfait et compté sur le gage apparent que leur offrait le navire; qu'ils sont donc fondés à réclamer le bénéfice de i'art. 191 C. comm., puisqu'ils sont dans les conditions qui ont fait admettre le privilége qu'il établit;

» Attendu que, d'après cette interprétation sur laquelle la doctrine et la jurisprudence sont d'accord, le privilége, dans le cas de construction d'un navire à forfait, dépend uniquement de savoir si les ouvriers et fournisseurs ont connu ou non le marché à forfait, connaissance qui doit être justifiée contre eux, la présomption contraire étant en leur faveur;

>> Attendu, sur ce point, qu'il n'est établi par aucun acte ou document écrit que Soulé, lorsqu'il a fait des fournitures à Valaise pour le navire Eugène-et-Marie, ait su qu'il construisait à forfait pour le compte d'Allard et Comp. ; que le navire étant construit à Saint-Denis, dans les chantiers appartenant à Valaise, alors que Soulé habite Bordeaux, c'est une raison de pus pour croire qu'il n'a pas connu le traité qui en avait transmis à l'avance la propriété à Allard et Comp.; qu'on ne peut donc pas dire qu'en livrant sa marchandise, il a suivi la foi du constructeur; qu'il a dû compter, an contraire, sur le gage apparent que lui présentait le navire; d'où il suit qu'il est fondé à réclamer le privilége établi par l'art. 191 C. comm. à l'encontre du propriétaire quel qu'il soit, l'imprudence qu'Allard et Comp. ont commise en ne faisant pas connaître leur marché avec Valaise, ne pouvant préjudiciar qu'à eux-mêmes et non aux tiers de bonne foi. >>

FIN DE LA DEUXIÈME PARTIE.

TABLE ALPHABÉTIQUE

DES MATIÈRES

CONTENUES DANS LE TOME TRENTE-QUATRIÈME,

I ET IIme PARTIES.

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Le chiffre romain désigne la partie, et le chiffre arabe la page.

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4. (Salaires de l'équipage. Supplément de solde. Frais de

nourriture). L'armateur ne peut se libérer, par l'abandon du na-
vire et du fret, des salaires dus à l'équipage du navire.
Il peut,
au contraire, s'affranchir par cet abandon du supplément de solde
accordé au deuxième capitaine par le premier qui lui a cédé le com-
mandement, ainsi que du prix des vivres de bord achetés par celui-ci,
après le premier voyage. Mais il en est autrement des dépenses
pour nourriture faites à terre par l'équipage, par suite du dénuement
du navire. Jude de Beauséjour et administration de la marine
c. Marsaud et Comp. et Devaulx ...

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1. (Bateaux à vapeur.

Faute). Il est de règle gé-

nérale, en navigation, que lorsque deux navires à vapeur arrivent
l'un sur l'autre, chacun des deux capitaines doit venir sur tribord.
Le capitaine qui ne se conforme pas à cette règle commet une faute
qui le rend responsable de l'abordage survenu entre les deux navi-
Capitaine Chausse et Services maritimes des Messageries

impériales c. capitaine Camboulive et Jourfier Picasso et Comp.

1

8. (Navire ayant vent arrière. Au plus près du vent). - Il est de règle générale, en navigation, que lorsque deux navires à voiles se dirigent l'un sur l'autre, l'un vent arrière, l'autre au plus près du vent, c'est au premier à manoeuvrer pour éviter le second, sous peine de supporter toutes les conséquences de l'abordage qui vient à se produire. Capitaine Cordiller c. capitaine Calzada. I. 242 4. (Compétence. Navire partant. Navire restant. Port de destination commune). — Lorsqu'un abordage a eu lieu entre un navire partant, qui a continué sa route, et un autre restant à l'ancre dans un port où le capitaine pouvait agir, et où il s'est borné à faire constater par experts les avaries souffertes par son navire, le Tribunal du port de destination commune, dans lequel se sont ultérieurement rejoints les deux navires, n'est pas compétent pour connaître de l'action en indemnité pour les dommages causés par l'abordage. Capitaine Furber c. capitaine Bruce... I. — 273

5. (Compétence. - Tribunal du lieu de reste du navire abordeur).· Si, lorsqu'il s'agit d'une action en indemnité pour dommages causés par un abordage entre navires, la jurisprudence a admis, par dérogation au principe de l'art. 59 Cod. procéd. civ., et par extension des oxceptions apportées à ce principe par l'art. 420 du même code, la compétence du Tribunal le plus voisin du lieu du sinistre, ou même du Tribunal du lieu où le navire abordé a terminé son voyage, pareille compétence ne saurait être attribuée au Tribunal du lieu où s'est terminé le voyage du navire abordeur, quand le domicile des armateurs de ce navire est ailleurs. Bento José y Viera c. Lemagnonet. I. - 326

6. (Navire ayant vent sous vergues. - Vent au plus près). Il est de principe, en matière de navigation maritime, que c'est au navire qui navigue avec le vent sous vergues à manoeuvrer pour éviter celui qui, venant en sens contraire, serre le vent au plus près. Capitaine Artaud c. capitaine Liccioni..

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I. 334

7. (Compétence. Pleine mer. - Navire inconnu. Délai). — Le capitaine dont le navire a été abordé en pleine mer par un autre naviro qui s'est éloigné sans avoir été reconnu, n'encourt pas la fin de non-recevoir des articles 433 et 436 du Cod. de Comm., pour n'avoir pas protesté dans les 2 heures de son arrivée au premier port, et formé dans le mois sa demande en justice. Il ne doit être considéré comme ayant pu agir dans sa réclamation pour les dommages causés par l'abordage, que du jour où il est parvenu à découvrir le navire auteur de ces dommages. Cap. Artaud c. cap. Liccioni. I. — 334

8. (Compétence. Tribunal le plus voisin du lieu du sinistre). En matière d'abordage maritime, l'action en réparation du dommage souffert doit être portée exclusivement devant le Tribunal du lieu le plus voisin du sinistre, lorsqu'il est possible au réclamant d'agir dans ce lieu. L'absence du défendeur ou de représentants chargés de ses intérêts dans le ressort du Tribunal le plus voisin du sinistre, ne peut pas changer la compétence territoriale de ce Tribunal, et n'est pas, d'ailleurs, un obstacle légal à ce que le réclamant puisse agir devant ce Tribunal. Le Tribunal du domicile du défendeur est, en pareille matière, et lorsque le sinistre n'est pas arrivé dans son res

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