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les violer ouvertement, on a eu la malheureuse adresse de les éluder.

Après avoir annoncé à ses apôtres la longue suite d'afflictions qui les attend, Jésus-Christ leur promet qu'elles se changeront en joie. La perspective de cette félicité qui devoit remplacer leurs traverses, les animoit, et les soutenoit dans leur pénible et périlleuse carrière. Si nos espérances, disoient-ils, étoient bornées à cette vie transitoire, nous serions les plus misérables des hommes (1); mais nous souffrons sans relâche, et nous ne sommes jamais abattus, parce que nous regardons nos souffrances comme un trésor que nous déposons, à mesure qu'il s'amasse, dans des mains sûres qui nous le conservent avec fidélité, et que nous sommes certains de retrouver avec abondance dans le grand jour (2). Si à l'exemple de ces grands personnages, à chaque tribulation qui nous survient, à chaque chagrin que nous éprouvons, à chaque douleur que nous ressentons, nous élevions nos pensées vers celui qui nous les envoie, loin d'en être abalius, nous en serions comme eux encouragés, loin d'en être attristés, nous en serions consolés; loin d'en murmurer, nous bénirions la main paternelle qui nous éprouve, ou

(1) Si in hâc vitâ tantùm in Christo sperantes sumus, miscrabiliores sumus omnibus hominibus. 1. Cor. xv. 19.

(2) Ob quam causam etiam hæc patior, sed non confundor. Scio enim cui credidi, et certus sum quia potens est depositum meum servare in illum diem. 2. Timoth. 1. 12.

nous châtie, ou nous épure, et qui sait bien mieux que nous ce qui nous est convenable. C'est notre peu de foi qui cause nos foiblesses, nos découragemens, nos afflictions, nos désespoirs dans l'adversité. Aux yeux de la foi, il n'y a d'autre mal que le péché, parce qu'il n'y a que le péché dont elle ne puisse pas faire un bien. Un ancien philosophe trouvoit que le plus beau des spectacles, est le sage aux prises avec le malheur. C'est le chrétien qu'il faut y voir. Quelle différence immense entre la sagesse humaine la plus pure, la plus parfaite, et la sagesse chrétienne! L'une fuit les peines, l'autre les recherche; l'une les reçoit quand elles arrivent, l'autre va au-devant et les appelle; l'une se console de les subir, l'autre gémiroit de n'en pas avoir; l'une a pour motifl'impossibilité d'éviter le mal, l'autre est excitée par l'espoir du bien suprême. Ainsi, l'une est patiente par impuissance, l'autre résignée par sentiment, et par conséquent la première pourra quelquefois être tranquille dans les douleurs, la seconde s'y montrera constamment satisfaite et joyeuse.

Jésus-Christ assimile les alternatives de douleur et de joie que doivent éprouver ses apôtres, et après eux, tous ses fidèles disciples, à celles que ressent une mère qui met au monde un fils. Les douleurs de l'enfantement sont vives et aiguës, comme celles qui attendoient les apôtres, et qui sont aussi destinées à un grand nombre de

chrétiens; mais les unes et les autres sont d'une durée bien courte, en comparaison des temps qui doivent suivre. Le travail de l'enfantement n'est pas sans danger; le ministère des apôtres les jetoit dans les plus grands périls; et les justes peuvent, dans beaucoup d'occasions, s'y trouver exposés. Les souffrances sont nécessaires à la délivrance de la femme, qui ne peut devenir mère sans en être atteinte ; et nous n'avons pas non plus d'autre moyen d'être délivrés de nos péchés, et de parvenir au salut. Les douleurs de l'enfantement sont désirées et préférées à la stérilité; de même le vrai chrétien désire avec ardeur de souffrir pour Jésus-Christ : le vrai malheur seroit pour lui de n'en éprouver aucun. Dans son travail pénible, la femme souhaite ardemment d'en voir la fin, pour avoir la satisfaction d'être mère; le disciple de JésusChrist sollicite de tous ses vœux la fin de ses épreuves, et attend avec impatience le moment qui les couronnera. Enfin, comme le dit le divin Sauveur, la femme qui a donné au monde un fils, oublie tout ce qu'elle a souffert; elle ne s'occupe plus que de sa joie. Il en sera de même dans le séjour heureux, où nous auront conduits nos tribulations passagères; où, comme dit l'apôtre saint Jean, toutes nos larmes ayant été essuyées de la main de Dieu même, nous ne connoîtrons plus ni la mort ni le chagrin, ni les

gémissemens, ni la douleur (1) Ayons constamment les yeux fixés sur ce terme de nos vœux, et nous sentirons beaucoup moins les difficultés et les peines qui nous en séparent. Le désir de l'arrivée tempérera la fatigue de la route; l'espoir du bonheur futur adoucira la douleur des maux présens; et ces maux, de pénibles et d'affligeans qu'ils étoient,nous deviendront précieux et désirables, quand ils seront le gage et le prix d'une éternelle félicité.

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DU QUATRIÈME DIMANCHE APRÈS PAQUES,

Jésus-Christ prédit à ses apôtres qu'il va s'éloigner d'eux pour leur envoyer le S. Esprit.

JESUS

Esus dit à ses disciples: Je vais à celui qui m'a envoyé, et personne d'entre vous ne me demande: Où allez-vous? Mais parce que je vous ai parlé ainsi, votre cœur est rempli de tristesse. Cependant ce que je vous dis est la vérité. Il est utile pour vous que je m'en aille : car si je ne m'en vais pas, le Consolateur ne viendra point à vous mais si je m'en vais, je vous l'enverrai;

(1) Et absterget Deus omnem lacrymam ab oculis eorum; et mors ultrà non erit, neque luctus, neque clamor, neque dolor erit ultrà. Apocal. xxi. 4.

et lorsqu'il sera venu, il convaincra le monde touchant le péché, touchant la justice, el touchant le jugement. Touchant le péché, parce qu'ils n'auront pas cru en moi; touchant la justice, parce que je m'en vais à mon Père, et que vous ne me verrez plus; touchant le jugement, parce que le Prince de ce monde est déjà jugé. J'aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais présentement vous ne pouvez pas les comprendre mais lorsque cet Esprit de vérité sera venu, il vous enseignera toute vérité; car il ne parlera pas de lui-même, mais il dira ce qu'il aura entendu, et il vous annoncera les choses futures. Il me glorifiera, parce qu'il recevra de ce qui est à moi, et il vous l'annoncera. (Jean, XVI. 5

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14.

EXPLICATION.

Jésus dit à ses disciples: Je vais à celui qui m'a envoyé, et personne d'entre vous ne me demande: Où allez vous? Mais parce que je vous ai parlé ainsi, votre cœur est rempli de tristesse. Est-ce, comme le pensent la plupart des interprètes, un reproche que fait Jésus-Christ à ses apôtres; ou bien, comme le croient plusieurs autres, approuve-t-il le silence qu'ils gardent dans cette circonstance? Sans entrer dans cette question, nous pouvons observer que si c'est un reproche, il est du moins bien doux et bien ternel. C'est une plainte d'amitié et de tendresse ;

pa

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