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Moins sensible aux conquêtes vastes
Qu'à l'heureux sort de tes sujets,
Tu faisois écrire tes fastes

Par la main seule de la Paix;
Mais le Souverain des armées
Veut que tes mains plus renommées
De lauriers chargent ses autels.
Prends la foudre, et montre à la terre
Que ton cœur n'épargnoit la guerre
Que pour épargner les mortels.

Quels plus équitables trophées
Que ceux que va dresser ton bras
Sur les discordes étouffées*,
Sur un reste de cœurs ingrats!
En vain l'envie, au pas oblique,
D'une suprême république
Vient tenter la fidélité,
Et lui porte d'indignes chaînes
Sous les apparences trop vaines
De secourir sa liberté:

Tu ne parois dans la carriere
Que pour dissiper ces complots,
Et lever l'injuste barriere

Qui ferme un trône à son héros :

* La Pologne.

Secondé par d'heureux ministres,
Tu brises ces trames sinistres.
Qu'il regne, ce roi vertueux!

Sa gloire étoit moins bien fondée,
Et sa vertu moins décidée,
S'il n'avoit été malheureux.

Tel qu'après l'éclipse légere
De son empire étincelant
Du sein de l'ombre passagere
L'astre du jour sort plus brillant;
Tel, vers les régions de l'Ourse
Stanislas reprenant sa course
Éclate enfin dans tout son jour:
Nos cœurs s'envolent à sa suite,
Et jusqu'aux chars errants du Scythe
Portent la voix de notre amour.

Toi, que la Suede-en vain desire*,
Si quelque soin touche les morts,
Ombre, que la Vistule admire,
Que ne reviens-tu sur ses bords?
Ton aspect domtant la furie
Dans les antres de Sibérie
Replongeroit leurs habitants:
Mais tandis que je te rappelle,

* Charles XII.

Stanislas dans l'ombre éternelle
A précipité ces Titans.

Il regne. Agile Renommée,
J'entends ta triomphante voix;
La Rebellion désarmée

Tombe, et se range sous ses lois.
Que la brigue s'anéantisse!
Dissipe, céleste Justice,
Un fantôme de royauté;
Assure à son unique maître,
Au seul qui mérite de l'être,
Un trône deux fois mérité.

Noble

compagne des disgraces Et des splendeurs d'un tendre époux, Les cieux t'appellent sur ses traces, Va partager des jours plus doux: Ton goût, tes vertus révérées, Tes graces, paroient nos contrées; Tu vas emporter nos regrets. Heureux, en perdant ta présence, Que l'Esther qu'adore la France Te retrace dans ses attraits!

Ainsi des rois ton nom suprême,
Puissant Louis, est le soutien;
En défendant leur diadême

Tu releves l'éclat du tien.
Où sont ces rivaux indomtables
Qui bravoient tes vœux équitables?
Qu'ils paroissent à nos regards!
Mais quoi! leurs cohortes craintives
Ont déja déserté leurs rives,
Et tu regnes sur leurs remparts.

Doutoient-ils donc que ce tonnerre
Ne fût encor celui d'un roi
Qui sut imposer à la terre
Un silence rempli d'effroi?
France, si long-temps assoupie,
Va foudroyer leur ligue impie
En souveraine des combats;

Et compte encor sur leurs murailles
Tes triomphes par tes batailles,
Et tes héros par tes soldats.

Mânes françois, mânes illustres,
Vous vainquez dans vos nourrissons;

Dans un loisir de quatre lustres
Vos faits ont été leurs leçons:
Ils rentrent, héritiers fideles,
Dans ces altieres citadelles
Où la gloire porta vos lois;
Au sein des palmes de nos peres
De leurs fils les destins prosperes

Ont fait éclore les exploits.

Guidés par ces foudres rapides
Que toujours Mars favorisa,

Ils marchent, vainqueurs intrépides,
Aux yeux du héros d'Almanza.
Tributaire encor de la Seine,
Superbe Rhin, calme ta peine,
Console tes flots.en courroux;
De l'Eridan l'onde enchaînée
Va partager ta destinée,

Et ne plus couler que pour nous.

Je vois Villars, c'est la victoire;
Il fut héros, il l'est encor:

Un nouveau trait s'offre à l'histoire,
Un Achille dans un Nestor:
Sûr de remettre l'aigle en fuite,
Fait à vaincre, il mene à sa suite
Les Amours, devenus guerriers;
Et les Ris, en casques de roses,
Dans son second printemps écloses,
Portent sa foudre et ses lauriers.

A sa belliqueuse alégresse

Les vieux vainqueurs qu'il a formés
Sentent renaître leur jeunesse
Et leurs courages ranimés.

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