Descendant à l'agriculture, Sur tes secrets autels rapportoient leurs lauriers. Trop heureux, déité paisible, Le mortel sagement sensible Qui jamais loin de toi n'a porté ses desirs! Sauvé de l'humaine folie, Dans la vérité seule il cherche ses plaisirs. Ignoré de la multitude, Libre de toute servitude, Il n'envia jamais les grands biens, les grands noms; Il n'ignore point que la foudre A plus souvent réduit en poudre Le pin des monts altiers, que l'ormeau des vallons. Sourd aux censures populaires, Il ne craint point les yeux vulgaires, Son œil perce au-delà de leur foible horizon; Quelques bruits que la foule en seme, Il est satisfait de lui-même S'il a su mériter l'aveu de la Raison. Il rit du sort, quand les conquêtes Les couronnes du nord, ou celles du midi: Et les derniers instants du monde N'épouvanteroient point son cœur encor hardi. Amitié, charmante immortelle, Peu d'amis, mais constants, vertueux comme lui : Que l'intérêt les désunisse, Ou verse sur leurs jours les poisons de l'ennui. Ami des frugales demeures, Qui, parmi l'effroi des ténebres, C'est pour ce bonheur légitime Et plus heureux qu'il ne sut l'être C'est par ces vertus pacifiques, Par ces plaisirs philosophiques, Que tu sais, cher R***, remplir d'utiles jours Où le Cher de son onde claire Vient à l'aimable Loire associer le cours. Fidele à ce sage systême, Là, dans l'étude de toi-même, Chaque soleil te voit occuper tes loisirs : Dans le brillant fracas du monde, Ton nom, ta probité profonde T'eût donné plus d'éclat, mais moins de vrais plaisirs. XI. A VIRGILE, SUR LA POÉSIE CHAMPETRE. SUSPENDS tes flots, heureuse Loire, Jamais votre onde fortunée Ne coula sous de plus beaux cieux. Ingénieuses Rêveries, Songes riants, sages Loisirs, Venez sous ces ombres chéries, Plaisirs brillants, troublez les villes; Mais pourquoi ce triste silence? Ces lieux charmants sont-ils déserts ? En éloigne les doux concerts? Quel son me frappe? une voix tendre Seuls confidents de sa retraite, D'Euterpe tu reçois les larmes : Je vais quitter ces beaux vergers; Aux champs françois perdant mes charmes, Je fuis sur des bords étrangers. Tu n'entends point dans ces prairies |