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Allez, un verd naissant couronne ces prairies;
Ce bord vous offrira de plus tendres gazons.

DAMETE.

Je conduis ces troupeaux au meilleur pâturage,
Cependant je les vois dépérir chaque jour:
Moi-même je languis au printemps de mon âge;
Tout languit dans nos champs sous les fers de l'Amour.
MÉNALQUE.

L'Amour ne me nuit point; j'ignore ses alarmes;
Jamais il n'a rendu mes troupeaux languissants:
Mais un sombre enchanteur, par ses funestes charmes,
Fait périr sans pitié mes agneaux innocents.

DAMETE.

De ce douteux débat la palme vous est due
Si vous savez m'expliquer en quels lieux
L'oeil ne peut découvrir que six pieds d'étendue
De ce vaste horizon qui termine les cieux.

MÉNALQUE.

Au prix de vos chansons je souscris sans murmure
ure,
Et sur Chloris je vous cede mes droits,

Si vous savez me dire en quel lieu la nature
Sur de naissantes fleurs grave le nom des rois.
PALÉMON.

Je ne puis entre vous décider la victoire;
L'un et l'autre à mes yeux en emportent la gloire;
Et tout berger qui peut égaler vos beaux sons
Mérite comme vous la palme des chansons:
Renouvelez souvent en cadences égales

Le paisible combat de vos muses rivales;
Et quand vous formerez ces gracieux récits,
Que toujours entre vous le prix reste indécis.

NOTES.

Deux bergers chantent tour-à-tour des couplets égaux, se disputent une victoire champêtre; Palémon est le juge de ce

combat.

Du célebre Conon l'un ranime les traits;

Géometre fameux de l'isle de Samos.

L'autre peint ce mortel dont l'adresse féconde...

Archimede de Syracuse.

Puisque Pollion veut bien être...

Il étoit alors consul, l'an 724 de Rome.

Si vous savez m'expliquer en quels lieux...

Le fond d'un puits.

Sur de naissantes fleurs grave le nom des rois.

La jacinthe, fleur sur laquelle on s'imaginoit lire les deux premieres lettres du nom d'Ajax, fils de Télamon, rói de Salamine. Ajax, selon la fable, fut métamorphosé en jacinthe, après s'être tué de rage de n'avoir point obtenu les armes d'Achille.

IV.

L'HOROSCOPE

DE MARCELLUS,

FILS D'OCTAVIE, SOEUR D'AUGUSTE.

Un dieu

MUSES, pour ce beau jour cessez d'être bergeres ;
Osez porter vos voix au-dessus des fougeres:
Un consul à vos jeux s'intéresse aujourd'hui ;
Rendez par vos beaux airs les champs dignés de lui.
Cieux! où suis-je enlevé? Quels superbes spectacles!
mes accents va
par
rendre ses oracles.
Je vois éclore enfin ce nouvel univers
Qu'a chanté la Sibylle en prophétiques vers;
Je vois un nouveau peuple orner cette contrée;
Du sein des cieux Thémis descend avec Astrée ;
Saturne sur nos champs revient régner encor,
Et ramene aux mortels les jours de l'âge d'or.
Il est né ce héros pour qui les destinées
Marquoient un nouvel ordre et de mois et d'années:
Tendre divinité, compagne des amours,

Lucine, à son enfance accordez vos secours,

Descendez sur ces bords; Apollon votre frere
Des Graces et des Arts y tient le sanctuaire.

Illustre Pollion, ton brillant consulat
Va des siecles dorés voir renaître l'éclat.
Les vertus de retour, par d'aimables prodiges
Des antiques forfaits effacent les vestiges:
Jupiter nous promet un heureux avenir;
Il ne lui reste plus de crimes à punir.
Un jour dans cet enfant d'immortelle origine
Revivront les héros de sa race divine:

Sur l'univers paisible il régnera comme eux;
Il tiendra même rang dans le conseil des dieux.
Aimable Marcellus, la reine de la terre
Vient déja vous offrir l'acanthe et le lierre;
Elle pare son front des plus vives couleurs,
Et vous forme un berceau de verdure et de fleurs;
Le lait coule à grands flots dans chaque bergerie;
On voit naître en tous lieux les parfums d'Assyrie;
Les bois ne portent plus les funestes poisons;
Le loup moins affamé laisse en paix nos moutons.
d'autres bienfaits enrichiront le monde;
Les fruits seront plus beaux, la moisson plus féconde,
Lorsque vous apprendrez de vos aïeux vainqueurs
L'héroïsme guerrier, et la loi des grands cœurs;
Chaque Naïade alors versera de son urne

C'est

peu:

Des flots de pur nectar, comme aux jours de Saturne; Une riche vendange, après d'amples moissons,

Offrira des raisins jusque sur les buissons:

C'est ainsi qu'aux mortels les faveurs destinées
S'accroîtront par degrés et suivront vos années.
Pendant ces premiers temps d'un plus bel univers
Des vaisseaux couvriront encor les vastes mers,

Nos
campagnes encor se verront labourées,
Nos villes de remparts resteront entourées:
Peut-être un autre Argo, sous un nouveau Tiphys,
Portera des guerriers sur les champs de Thétis;
Peut-être verra-t-on les murs d'une autre Troie
Au fer d'un autre Achille abandonnés en proie:
Mais ces restés légers de nos malheurs passés
Disparoîtront enfin, pour toujours effacés,
Dès qu'après l'heureux cours d'une jeunesse illustre
La Parque filera votre cinquieme lustre ;

Et quand, passant des jeux aux soins de votre rang,
Vous marcherez égal aux dieux de votre sang,
Rien ne manquera plus au bonheur de la terre;
La paix au fond du Styx replongera la guerre;
Féconde également pour tous ses citoyens,
La terre en tous climats produira tous les biens:
A travers les périls des vagues incertaines
Nous n'irons rien chercher sur des plages lointaines;
Sans exiger nos soins, les côteaux, les guérets
Fixeront en tout temps et Bacchus et Cérès;
Les arts laborieux deviendront inutiles;
Les moutons, en paissant sur nos rives fertiles,
Brilleront revêtus des plus riches couleurs;
Sur eux la pourpre et l'or formeront mille fleurs;

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