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CHAPITRE

XIV.

Cinquiéme confideration fur l'amour éternel de Dieu.

Onfiderez l'amour éternel que Dieus cu pour vous. Avant l'in carnation & la mort de Jefus-Christ, fa divine Majefté vous aimoit infiniment,& vous predeftinoit à fon amour. Mais quand commença-t'il à vous aimer? Il commença quand il commença d'être Dieu. Et quand commença t'il d'être Dieu ? Jamais: Car il a toûjours été fans commencement & fans fin; & fon amour qui n'a jamais eû de commencement pour vous, vous a preparé de toute éternité les graces & les faveurs qu'ils vous a faites. Il le dit pour nous tous par le Prophete Jeremie. Je t'ai aimé d'une charité perpetuelle,& je t'ai attiré mifericordieufement à moi il parle à Vous auffi-bien qu'à tout autre ; vous devez donc à fon amour les bonnes refolutions que vous aurez faites.

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O Dieu! Quelles refolutions donc que celles-ci, que Dieu a eu prefent à fa divine fageffe & à fa bontées

fon éternité! Combien nous doivent

elles être cheres & precieufes ? Que ne devrions-nous pas fouffrir, plûtôt que d'en rien perdre, quand même tout le monde devroit perir? Car tout le monde enfemble ne vaut pas une ame; & une ame ne vaut rien fans ces faintes refolutions.

CHAPITRE XV.

Affections generales fur les confiderations precedentes pour conclure tout cet Exercice.

Cheres Refolutions! je vous re

Ogarde comme le bel Arbre de Vie

que mon Dieu a planté au milieu de mon cœur; & que mon Sauveur veut arrofer de fon Sang, pour lui faire porter de bons fruits. Plâtôt mille morts que de permettre qu'il foit déraciné de mon cœur. Non, ni la vanité, ni les délices de la vie, ni les richesses ; ni les afflictions,ne me feront pas changer de deffein.

Hélas,Seigneur? Je dois cet avantage à vôtre paternelle bonté, qui a choifi mon cœur, toute méchante terre qu'il

êtoit, pour porter des fruits dignes de vous. Combien y a t'il d'ames qui n'ont pas eu ce bonheur ? Et puis-je jamais m'humilier affez fous la main de vôtre mifericorde

O délicieufes & faintes Refolutions! Si je vous conferve, vous me conferverez, fi vous vivez en mon ame, mon ame vivra en vous. Subfiftez donc à jamais dans mon caur aimables Refolution, qui êtes éternelles en la mifericorde de mon Dieu : Soyez & vivez éternellement en moi, & que jamais je ne vous abandonne.

Après ces affections, il faut particularifer ici les moyens de bien foûtenir vos cheres refolutions. Ce font principalement, le frequent ufage de l'Oraifon & des Sacremens, les bonnes œuvres,le foin de vous corriger des fautes que vous avez reconnues, la fuite des mauvaises occafions,& la fidelité à fuivre les avis qu'on vous donnera.

Enfin proteftez vivement & mille fois, que vous perfevererez en vos refolutions,comme fi vous teniez votre cœur entre vos mains, prefentez-le à Dieu pour le lui confacrer & facrifier entierement,lui difant que vous le laiffez entre les fiennes, que yous ne voulez jamais

le reprendre,& que vous voulez fuivre en tout & par tout fa fainte volonté. Priez Dieu qu'il vous renouvelle en tierement,qn'il beniffe & qu'il foûtienne par la force de fon efprit cette renovation: Et invoquez fur cela la fainte Vierge, votre Ange, les Saints: faint Louis & les autres.

Allez dans cette difpofition d'un cœur ému par la grace,aux pieds de vôtre Pere fpirituel. Accufez vous des fautes principales que vous aurez remarquées dans votre confeffion generale; & ayant prononcé devant lui & figné la même proteftation que vous fites alors recevez-en l'abfolution avec les mêmes fentimens. Enfin allez unir vótre cœ ir ainfi renouvellé à fon principe & à fon Sauveur, dans la participation du faint Sacrement de l'Euchariftie.

CHAPITRE XVI. Les fentimens qu'il faut conferver après cet Exercice.

LE jour que vous aurez fait cette renovation,& les jours fuivans, vous devez prononcer fouvent de cœur & de bouche ces ferventes paroles de faint

Paul, de S. Auguftin,& de fainte Catherine de Gennes: Non, je ne fuis plus à moi, foit que je vive, foit que je meure je fuis à mon Sauveur ; je n'ai plus rien de moi, ni rien à moi. C'est Jefus qui vit en moi, & tout ce que je puis apeller mon bien, c'est d'être à lui. O monde, vous êtes toûjours vous-même. Et moi j'ai toûjours été auffi moimême; mais dorénavant je ne ferai plus moi-même. Non, nous ne ferons plus nous-mêmes; car nous aurons le cœur changé: Et le monde qui nous a trompé, fera trompé en nous; car ne s'apercevant de nôtre changement que peu à peu, il nous croira toûjours femblable à Efau, & il nous trouvera enfin femblable à 'acob.

Il faut que nôtre cœur conferve bien l'impreffion de cet exercice,& que nous paffions doucement de la meditation aux affaires & aux conversations; de peur que l'onction des bonnes refolutions ne fe perde tout d'un coup: Parce qu'il faut que nôtre ame en foit bien penetrée en toutes fes parties; mais fans qu'il vous en coûte aucun effort violeut, ni d'efprit ni de corps.

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