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visité une personne de sa connaissance ayant la scarlatine, en fut atteinte peu de temps après; son enfant fut pris à peu près en même temps qu'elle, et mourut en vingt-quatre heures: la bonne de la maison en fut également atteinte. Ainsi, ce n'est pas seulement sous l'influence épidémique, mais même à l'état sporadique, que la scarlatine se communique si facilement, soit directement d'individu à individu, soit par l'intermédiaire d'autres personnes qui peuvent répandre la maladie sans en être nécessairement atteintes. L'atmosphère, les vêtemens et autres objets peuvent ainsi devenir des voies de transmission. La belladone est un des moyens préconisés comme préservatifs de la scarlatine. On l'administre, soit en extrait, soit mieux en teinture, de quatre à huit gouttes par jour chez les enfans, de douze à dix-huit chez les adultes. L'usage doit en être continué plusieurs jours. Thomassin a conseillé aussi l'hydrosulfure sulfuré d'antimoine uni au protochlorure à parties égales, à la dose d'un huitième à un quart de grain, suivant l'âge. Sur quatre-vingt-dix enfans auxquels ce médicament a été administré, quatre-vingt-cinq ont été préservés.

Ces moyens préservatifs ont réussi dans certains pays et ont échoué ailleurs. Ils ont pu réussir dans les lieux où la scarlatine était franchement épidémique, et où, d'ordinaire, elle ne régnait pas sporadiquement; mais dans les grandes cités, comme Paris, par exemple, où la maladie est permanente, si elle prend parfois un caractère épidémique, ce n'est, en réalité, qu'un accroissement un peu plus considérable dans le nombre habituel des malades, par l'influence de causes dont l'action est activée, mais n'est jamais complétement suspendue. Aussi, dans les grande villes, le traitement préservatif est-il moins efficace, et l'isolement le plus complet devient alors le préservatif le plus certain. J. C. SABATIER.

THÉRAPEUTIQUE CHIRURGICALE.

CONSIDÉRATIONS PRATIQUES SUR QUELQUES ESPÈCES DE POLYPES
UtÉrins, et sUR LEUR ABLATION.

Parmi un grand nombre d'affections qui peuvent simuler en quelque sorte des affections organiques de la matrice, il faut placer en première ligne les polypes du col et du corps de l'utérius, qui par la nature des accidens qu'ils produisent amènent souvent des erreurs de diagnostic dont les conséquences peuvent être fatales.

Les polypes les plus fréquens sont sans contredit les celluloso-vasculaires, petites végétations muqueuses qui se forment dans la commissure du museau de tanche, et sur quelques solutions de continuité du col utérin. Ces petites productions, très-peu appréciables au doigt, ressemblant à un bourgeon charnu, scrophuleux et blafard, ne sont souvent reconnues que par la vue au moyen du spéculum, encore faut-il souvent avec une grande sonde à poitrine écarter les lèvres de l'orifice utérin pour les apercevoir. Cependant ceux qui pratiquent le toucher avec toutes les précautions indiquées par M. Lisfranc, dans ses leçons, pourront, ainsi qu'il le fait dans la plupart des cas, reconnaître la présence de ces petits corps vasculaires et celluleux. Si l'on calculait en pathologie la gravité ou la violence des effets par les causes, on tomberait souvent dans de grandes erreurs. J'ai vu dans le service de M. Lisfranc, et dans la pratique privée de ce chirurgien dont j'ai eu l'honneur d'être chargé à plusieurs reprises, que les symptômes produits par les polypes dont nous nous entretenons étaient souvent aussi alarmans que ceux produits, soit par les grands polypes fibreux, soit par les engorgemens du col et du corps de l'utérus. Ainsi, les douleurs de dos, les pesanteurs de lombes, les coliques utérines, avec ou sans écoulemens muqueux et sanguins; la sensation d'un poids incommode sur le rectum, les tiraillemens des aines, sont des symptômes qui accompagnent les polypes celluloso-vasculaires. Ajoutez à cela'une anomalie du cours des menstrues, souvent des suppressions, des gastralgies continuelles, et un amaigrissement considérable.

Il est, certes, des engorgemens squirreux à l'utérus qui sont arrivés à un point de gravité extrême avant d'avoir produit de pareils symptômes. Il est d'autant plus important de s'assurer de la présence de ces polypes, qu'ils grossissent et forment certainement le noyau des polypes fibreux. Leur grosseur varie; dans la plupart des cas, ils sont gros comme des semences de chénevis, ou comme une groseille à grappes. M. Lisfranc en a extrait plusieurs chez la même personne, de grosseur variée, dont quelques-uns égalaient déjà le volume d'une olive, et dont la base commençait à s'organiser en substance fibreuse. Il faut donc aussitôt que l'on a reconnu de semblables végétations, procéder à leur extraction. Les instrumens nécessaires sont un spéculum plein, un peu large, des pinceaux de charpie pour essuyer, et des pinces à polypes droites; mais très-longues, aussi longues que le tire-balle ordinaire adopté par les ambulances de l'armée. La malade placée sur une table élevée, comme pour l'opération de la cystotomie, les jambes soutenues par des aides, l'opérateur placé entre les cuisses de l'opérée, introduit ce spéculum avec les précautions ordinaires, et le confie à un aide aus

sitôt qu'il est placé convenablement. Le chirurgien charge alors avec les grandes pinces les polypes, et les extrait après avoir exercé sur eux une torsion assez forte pour pouvoir les arracher en entier avec leur pédicule aussitôt qu'ils sont extraits on aperçoit à leur place une petite cavité assez semblable au trou que laisse dans les tissus le bourbillon qui vient de sortir d'un petit furoncle. Souvent le polype est dans le col, il faut alors avoir soin en le chargeant de pousser les pinces en avant, pour suivre le mouvement de recul que la matrice fait au-devant des mors de l'instrument. A peine quelques gouttelettes de sang s'échappent-elles; la malade est replacée dans son lit s'il se manifeste quelques légers accidens inflammatoires, une ou deux saignées révulsives en font justice dans la majorité des cas, il n'en survient

aucun.

:

Quelques jours après l'on examine la malade avec le spéculum, et l'on cautérise légèrement les solutions de continuité avec un petit pinceau imbibé de proto-nitrate, acide de mercure liquide.

Ainsi, comme on vient de le voir, rien de plus simple et de plus facile que cette opération, qui est à la portée de tous les hommes de l'art, et qui peut ainsi empêcher de graves accidens consécutifs.

Quand on a affaire à des polypes fibreux, les choses ne se passent pas aussi facilement. Le diagnostic est souvent bien plus difficile, surtout quand ces végétations sont encore entièrement enfermées dans la cavité de l'utérus, sans qu'il y ait encore de dilatation avancée au col pour leur accouchement : c'est le mot, car si on surveille attentivement leur marche, on voit qu'à des époques plus ou moins fixes, dans le moment des menstrues, surtout, la malade est en proie à des douleurs utérines que toutes les femmes qui ont enfanté comparent à celles d'un véritable accouchement ; qu'à chaque travail le col se dilate, et si l'on touche alors, on ne tarde pas à rencontrer un corps rond, lisse ou bosselé, qui en obstrue l'orifice interne. Après plusieurs mois, les femmes ressentent souvent tout-à-coup, pendant ces douleurs ou quelques jours après, le passage d'un corps plus ou moins volumineux qui reste dans le vagin.

Tous les polypes fibreux sont en général accompagnés de métrorrhagies très-abondantes au moment des règles, et, dans leur intervalle, d'écoulemens muqueux, sanguinolens, plus ou moins fétides. La santé générale de la femme s'ébranle, fléchit rapidement, et souvent le chirurgien est appelé au moment où elle est presque anémique.

Dans la plupart des cas, dans les provinces surtout, l'on considère ces symptômes comme des précurseurs de l'âge critique bien plus souvent encore l'on traite les malades pour une affection utérine. Ce

pendant si l'on touche avec soin, avec les précautions ordinaires par le vagin, le rectum et l'hypogastre, il sera facile de se convaincre que le col utérin bien loin d'être dur, bosselé ou saillant, est plutôt effacé, comme vers les derniers mois de la gestation : quand il commence à se dilater, il est facile d'y introduire le doigt assez profondément pour reconnaître le corps étranger. Pourquoi les chirurgiens modernes ontils presque abandonné le cathétérisme de la cavité utérine, dont le père de la médecine recommandait l'usage avec tant de soin? Quel danger y a-t-il à introduire une sonde mousse dans la cavité de cet organe, tandis que le même instrument est souvent promené dans des cavités dont la sensibilité et la susceptibilité sont bien plus grandes que celle de l'utérus? Il me semble cependant qu'une exploration méthodique de la cavité de cet organe pourrait, dans un grand nombre de cas, éclairer la conscience du chirurgien et lui apprendre que les accidens auxquels une femme est en proie sont produits par des corps étrangers, dévéloppés dans l'intérieur de l'utérus. En effet, dans l'état ordinaire de vacuité, la cavité de la matrice est réduite à un canal longitudinal qui offre à sa partie supérieure un léger renflement. Ainsi une sonde de femme graissée et introduite dans ce canal ne peut pas parcourir un grand trajet; tandis que si un corps étranger dilate l'utérus, on peut calculer son volume par les mouvemens que l'on peut imprimer au catheter, par le mouvement de hausse et de baisse qu'éprouve l'instrument en refoulant le corps étranger, enfin par la plus ou moins grande profondeur où il peut pénétrer dans l'organe.

Cette exploration devrait, du reste, être pratiquée à un intervalle assez éloigné des règles, car les recherches sur l'utérus, l'application même du spéculum, provoquent et hâtent l'écoulement menstruel.

Les polypes renfermés dans l'utérus sont quelquefois pédiculés, d'autres fois ils existent à l'état de tumeur fibreuse ovoïde, sans pédicule, et ce n'est que par les efforts graduels d'expulsion et de contraction du col utérin qu'ils s'étranglent et se pédiculent : cette théorie admise par M. Hervez de Chegoin, dans un mémoire inséré dans le recueil de la Société de médecine, en 1829, est vraie dans un grand nombre de cas; mais il est plus fréquent encore de trouver les polypes flottans et pédi culés dans l'intérieur de l'utérus. C'est surtout quand il en existe plusieurs que les opinions de M. Hervez de Chegoin sont inadmissibles, puisque tous sont pédiculés à la fois, ainsi que j'ai eu occasion de l'observer à l'amphithéâtre de la Pitié, sur les vieilles femmes mortes à la Salpêtrière, et sur une dame de Nevers que M. Lisfranc a opérée dernièrement dans une maison de santé de Paris.

J'ai rencontré par contre, sur une femme que j'ai opéré en pro

vince, un polype analogue à celui rapporté pár M. Hervé de Chegoin; il avait été long-temps à être expulsé; dans les premiers jours de son accouchement le pédicule n'était presque pas appréciable, des circonstances ayant fait ajourner l'opération à six semaines environ, je fus tout étonné de trouver alors un pédicule gros comme le pouce à la tumeur qui égalait le volume d'un gros œuf d'oie. L'excision en fut faite, et la tumeur fibreuse lisse et dure me parut avoir été seulement retenue en place, ainsi que le dit M. Hervé, par la membrane interne seule de l'utérus.

Il se présente ici une réflexion aussi grave que complexe : faut-il chercher à opérer les polypes pendant qu'ils sont encore enfermés dans la cavité utérine, ou attendre leur expulsion? Il serait assez difficile ici de donner une règle fixe et générale sans courir le risque d'être taxé d'un empirisme aveugle.

Si on mettait en balance la facilité d'opérer les polypes parvenus dans le vagin avec la difficulté du manuel opératoire pour ceux enfermés dans l'utérus, on se déciderait sans doute pour attendre qu'ils fussent descendus dans le vagin; mais les accidens se pressent quelquefois, la fréquence des hémorrhagies détruit la constitution des malades, qui prennent un teint cancéreux. Il faut alors se décider à opérer pendant que les polypes sont enfermés dans la cavité utérine, il est presque impossible de recourir à l'excision. Le col utérin est souvent si peu dilaté que l'opérateur est obligé de recourir à la dilatation par l'instrument tranchant avec un bistouri droit boutonné, ou avec un lithotome du frère Côme, dont la lame peut même se rompre; tant l'orifice est dur, ainsi qu'en rapporte un cas M. Hervé de Chegoin dans son mémoire cité. L'orifice une fois dilaté, les difficultés ne sont encore qu'à moitié vaincues. Comment porter la ligature sur un polype dont en ignore la nature? Son pédicule est-il pédiculé ou ne l'est-il pas ? Dans le premier cas un étranglement progressif obtient sa mortification. Dans le cas contraire le lien peut intéresser la substance de la matrice et produire les accidens signalés par M. Hervé. Faut-il alors, comme le recommande ce praticien, relâcher la ligature aussitôt qu'il se manifeste des accidens pour la resserrer quand les accidens sont dissipés? Il me semblerait plus raisonnable, quand on a à les redouter, d'étrangler tout-à-coup avec force la partie comprise dans la ligature, d'y éteindre la vie et la sensibilité avec le barrillet à globules de M. Bouchet de Lyon, ou le cabestan de M. Mayor de Lausanne. Les succès obtenus par ce dernier sur des organes très-sensibles, tels que la langue et le pénis, et un grand nombre de tumeurs, ne peuvent laisser aucun doute à cet égard.

Quant à moi, je crois qu'il ne faut porter la ligature sur les polypes
TOME V. 4 LIV.

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