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jours pour aller au Phase, qui conduisait dans le Pont-Euxin. C'est sans doute par les nations qui peuplaient ces divers pays que les grands empires des Assyriens, des Mèdes et des Perses, avaient une communication avec les parties de l'Orient et de l'Occident les plus reculées.

Cette communication n'est plus. Tous ces pays ont été dévastés par les Tartares, et cette nation destructrice les habite encore pour les infester. L'Oxus ne va plus à la mer Caspienne; les Tartares l'ont détourné pour des raisons particulières ; il se perd dans des sables arides.

Le Jaxarte, qui formait autrefois une barrière entre les nations policées et les nations barbares, a été tout de même détourné3 par les Tartares, et ne va plus jusqu'à la mer.

Seleucus Nicator forma le projet de joindre le Pont-Euxin à la mer Caspienne. Ce dessein, qui eût donné bien des facilités au commerce qui se faisait dans ce temps-là, s'évanouit à sa mort 5. On ne sait s'il aurait pu l'exécuter dans l'isthme qui sépare les deux mers. Ce pays est aujourd'hui très-peu connu; il est dépeuplé et plein de forêts. Les eaux n'y manquent pas, car une infinité de rivières y descendent du mont Caucase; mais ce Caucase, qui forme le nord de l'isthme, et qui étend des espèces de bras au midi, aurait été un grand obstacle, surtout dans ces temps-là, où l'on n'avait point l'art de faire des écluses.

On pourrait croire que Séleucus voulait faire la jonction des deux mers dans le lieu même où le czar Pierre Ier l'a faite depuis, c'est-à-dire dans cette langue de terre où le Tanais s'approche du Volga mais le nord de la mer Caspienne n'était pas encore découvert.

Pendant que dans les empires d'Asie il y avait un commerce de luxe, les Tyriens faisaient par toute la terre un commerce d'économie. Bochard a employé le premier livre de son Chanaan à faire l'énumération des colonies qu'ils envoyèrent dans tous les pays qui sont près de la mer; ils passèrent

les colonnes d'Hercule, et firent des établissements? sur les côtes de l'Océan.

Dans ces temps-là, les navigateurs étaient obli

Il faut que, depuis le temps de Ptolomée, qui nous décrit tant de rivieres qui se jettent dans la partie orientale de la mer Caspienne, il y ait eu de grands changements dans ce pays. La carte du czar ne met de ce cóté-là que la rivière d'Astrabat; et celle de M. Bathalsi, rien du tout.

2 Voyez la relation de Genkinson, dans le Recueil des voyages du nord, tom. IV.

3 Je crois que de là s'est formé le lac Aral.

4 Claude Cesar, dans Pline, liv. VI, chap. XI.

5 Il fut tué par Ptolomée Céranus.

6 Voyez Strabon, liv. XI.

7 Ils fondèrent Tartèse, et s'établirent à Cadix.

[gés de suivre les côtes, qui étaient pour ainsi dire leur boussole. Les voyages étaient longs et pénibles. Les travaux de la navigation d'Ulysse ont été un sujet fertile pour le plus beau poëme du monde, après celui qui est le premier de tous.

Le peu de connaissance que la plupart des peuples avaient de ceux qui étaient éloignés d'eux, favorisait les nations qui faisaient le commerce d'économie. Elles mettaient dans leur négoce les obscurités qu'elles voulaient elles avaient tous les avantages que les nations intelligentes prennent sur les peuples ignorants.

L'Égypte, éloignée par la religion et par les mœurs de toute communication avec les étrangers, ne faisait guère de commerce au dehors : elle jouissait d'un terrain fertile et d'une extrême abondance. C'était le Japon de ces temps-là : elle se suffisait à elle-même.

Les Égyptiens furent si peu jaloux du commerce du dehors, qu'ils laissèrent celui de la mer Rouge à toutes les petites nations qui y eurent quelque part. Ils souffrirent que les Iduméens, les Juifs et les Syriens y eussent des flottes. Salomon employa à cette navigation des Tyriens qui connaissaient ces mers.

pée de l'agriculture, connaissait peu la mer : aussi Josèphe dit que sa nation, uniquement occune fut-ce que par occasion que les Juifs négocièrent dans la mer Rouge. Ils conquirent, sur les Iduméens, Elath et Asiongaber, qui leur donnèrent ce commerce : ils perdirent ces deux villes, et perdirent ce commerce aussi.

Il n'en fut pas de même des Phéniciens : ils ne faisaient pas un commerce de luxe; ils ne négohabileté, leur industrie, leurs périls, leurs faticiaient point par la conquête; leur frugalité, leur

gues, les rendaient nécessaires à toutes les nations du monde.

Les nations voisines de la mer Rouge ne négo

ciaient que dans cette mer et celle d'Afrique. L'é

tonnement de l'univers, à la découverte de la mer des Indes, faite sous Alexandre, le prouve assez. Nous avons dit 3 qu'on porte toujours aux Indes des métaux précieux, et que l'on n'en rapporte point 4; les flottes juives, qui rapportaient par la mer Rouge de l'or et de l'argent, revenaient d'Afrique, et non pas des Indes.

Je dis plus cette navigation se faisait sur la

Liv. III, des Rois, chap. Ix; Paralip. liv. II, chap. viii.
Contre Appion.

3 Au chap. I de ce livre.

4 La proportion établie en Europe entre l'or et l'argent peut quelquefois faire trouver du profit à prendre dans les Indes de l'or pour de l'argent; mais c'est peu de chose.

côte orientale de l'Afrique; et l'état où était la marine pour lors prouve assez qu'on n'allait pas dans des lieux plus reculés.

Je sais que les flottes de Salomon et de Jozaphat ne revenaient que la troisième année; mais je ne vois pas que la longueur du voyage prouve la grandeur de l'éloignement.

Pline et Strabon nous disent que le chemin qu'un navire des Indes et de la mer Rouge, fabriqué de joncs, faisait en vingt jours, un navire grec ou romain le faisait en sept1. Dans cette proportion, un voyage d'un an pour les flottes grecques et romaines était à peu près de trois pour celles de Salomon.

Deux navires d'une vitesse inégale ne font pas leur voyage dans un temps proportionné à leur vitesse: la lenteur produit souvent une plus grande lenteur. Quand il s'agit de suivre les côtes, et qu'on se trouve sans cesse dans une différente position; qu'il faut attendre un bon vent pour sortir d'un golfe, en avoir un autre pour aller en avant, un navire bon voilier profite de tous les temps favorables; tandis que l'autre reste dans un endroit difficile, et attend plusieurs jours un autre changement.

Cette lenteur des navires des Indes, qui, dans un temps égal, ne pouvaient faire que le tiers du chemin que faisaient les vaisseaux grecs et romains, peut s'expliquer par ce que nous voyons aujourd'hui dans notre marine. Les navires des Indes, qui étaient de jonc, tiraient moins d'eau que les vaisseaux grecs et romains, qui étaient de bois, et joints avec du fer.

On peut comparer ces navires des Indes à ceux de quelques nations d'aujourd'hui, dont les ports ont peu de fond: tels sont ceux de Venise, et même en général de l'Italie, de la mer Baltique, et de la province de Hollande 3. Leurs navires, qui doivent en sortir et y rentrer, sont d'une fabrique ronde et large de fond; au lieu que les navires d'autres nations qui ont de bons ports sont, par le bas, d'une forme qui les fait entrer profondément dans l'eau. Cette mécanique fait que ces derniers navires naviguent plus près du vent, et que les premiers ne naviguent presque que quand ils ont le vent en poupe. Un navire qui entre beaucoup dans l'eau navigue vers le même côté à presque tous les vents: ce qui vient de la résis

Voyez Pline, liv. VI, chap. xx11; et Strabon, liv. XV. Elle n'a presque que des rades; mais la Sicile a de trèsbons ports.

3 Je dis de la province de Hollande; car les ports de celle de Zélande sont assez profonds.

tance que trouve dans l'eau le vaisseau poussé par le vent, qui fait un point d'appui, et de la forme longue du vaisseau qui est présenté au vent par son côté; pendant que, par l'effet de la figure du gouvernail, on tourne la proue vers le côté que l'on se propose; en sorte qu'on peut aller très-près du vent, c'est-à-dire très-près du côté d'où vient le vent. Mais quand le navire est d'une figure ronde et large de fond, et que par conséquent il enfonce peu dans l'eau, il n'y a plus de point d'appui; le vent chasse le vaisseau, qui ne peut résister, ni guère aller que du côté opposé au vent. D'où il suit que les vaisseaux d'une construction ronde de fond sont plus lents dans leurs voyages : 1° ils perdent beaucoup de temps à attendre le vent, surtout s'ils sont obligés de changer souvent de direction; 2o ils vont plus lentement, parce que, n'ayant pas de point d'appui, ils ne sauraient porter autant de voiles que les autres. Que si, dans un temps où la marine s'est si fort perfectionnée, dans un temps où les arts se communiquent, dans un temps où l'on corrige par l'art, et les défauts de la nature, et les défauts de l'art même, on sent ces différences, que devait-ce être dans la marine des anciens?

Je ne saurais quitter ce sujet. Les navires des Indes étaient petits, et ceux des Grecs et des Romains, si l'on en excepte ces machines que l'ostentation fit faire, étaient moins grands que les nôtres. Or, plus un navire est petit, plus il est en danger dans les gros temps. Telle tempête submerge un navire, qui ne ferait que le tourmenter, s'il était plus grand. Plus un corps en surpasse un autre en grandeur, plus sa surface est relativement petite; d'où il suit que dans un petit navire il y a une moindre raison, c'est-à-dire une plus grande différence de la surface du navire au poids ou à la charge qu'il peut porter, que dans un grand. On sait que, par une pratique à peu près générale, on met dans un navire une charge d'un poids égal à celui de la moitié de l'eau qu'il pourrait contenir. Supposons qu'un navire tînt huit cents tonneaux d'eau, sa charge serait de quatre cents tonneaux; celle d'un navire qui ne tiendrait que quatre cents tonneaux d'eau serait de deux cents tonneaux. Ainsi la grandeur du premier navire serait, au poids qu'il porterait, comme 8 est à 4; et celle du second, comme 4 est à 2. Supposons que la surface du grand soit à la surface du petit comme 8 est à 6, la surface de

C'est-à-dire, pour comparer les grandeurs de même genre, l'action ou la prise du fluide sur le navire sera a la résistance du même navire comme, etc.

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Il faut que je parle de cet empire de la mer qu'eut Athènes. « Athènes, dit Xénophon, a l'empire de << la mer; mais, comme l'Attique tient à la terre, « les ennemis la ravagent, tandis qu'elle fait ses a expéditions au loin. Les principaux laissent détruire leurs terres, et mettent leurs biens en sû« reté dans quelque île : la populace, qui n'a point a de terres, vit sans aucune inquiétude. Mais, si a les Athéniens habitaient une île, et avaient outre << cela l'empire de la mer, ils auraient le pouvoir a de nuire aux autres sans qu'on pût leur nuire, a tandis qu'ils seraient les maîtres de la mer. »> Vous diriez que Xénophon a voulu parler de l'Angleterre.

Athènes, remplie de projets de gloire; Athènes, qui augmentait la jalousie, au lieu d'augmenter l'influence; plus attentive à étendre son empire maritime qu'à en jouir; avec un tel gouvernement politique, que le bas peuple se distribuait les revenus publics, tandis que les riches étaient dans l'oppression, ne fit point ce grand commerce que lui promettaient le travail de ses mines, la multitude de ses esclaves, le nombre de ses gens de mer, son autorité sur les villes grecques, et, plus que tout cela, les belles institutions de Solon. Son négoce fut presque borné à la Grèce et au Pont-Euxin, d'où

elle tira sa subsistance.

Corinthe fut admirablement bien située : elle sé

Le roi de Perse.

De republ. Athen. - Ici Montesquieu intervertit un peu l'ordre des idées de Xénophon en transposant divers passages de deux ou trois paragraphes différents; mais, au fond, ce n'est qu'une simple transposition qui ne change rien aux faits; et tout ce que dit ici Montesquieu se trouve dans Xénophon. (P.)

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I

para deux mers, ouvrit et ferma le Péloponèse, et ouvrit et ferma la Grèce. Elle fut une ville de la plus grande importance dans un temps ou le peuple grec était un monde, et les villes grecques des nations. Elle fit un plus grand commerce qu'Athènes. Elle avait un port pour recevoir les marchandises d'Asie; elle en avait un autre pour recevoir celles d'Italie car, comme il y avait de grandes difficultés à tourner le promontoire Malée, où des vents opposés se rencontrent et causent des naufrages, on aimait mieux aller à Corinthe, et l'on pouvait même faire passer par terre les vaisseaux d'une mer à l'autre. Dans aucune ville on ne porta si loin les ouvrages de l'art. La religion acheva de corrompre ce que son opulence lui avait laissé de mœurs. Elle érigea un temple à Vénus, où plus de mille courtisanes furent consacrées. C'est de ce séminaire que sortirent la plupart de ces beautés célèbres dont Athénée a osé écrire l'histoire.

Il paraît que, du temps d'Homère, l'opulence de la Grèce était à Rhodes, à Corinthe et à Orchomène. « Jupiter, dit-il 3, aima les Rhodiens, et leur << donna de grandes richesses. » Il donne à Corinthe 4 l'épithète de riche.

De même, quand il veut parler des villes qui ont beaucoup d'or, il cite Orchomènes, qu'il joint à Thèbes d'Égypte. Rhodes et Corinthe conservèrent leur puissance, et Orchomène la perdit. La position d'Orchomène, près de l'Hellespont, de la Propontide et du Pont-Euxin, fait naturellement penser qu'elle tirait ses richesses d'un commerce sur les côtes de ces mers, qui avaient donné lieu à la fable de la toison d'or. Et effectivement le nom de Miniares est donné à Orchomène 6, et encore aux Argonautes. Mais comme dans la suite ces mers devinrent plus connues; que les Grecs y établirent un très-grand nombre de colonies; que ces colonies négocièrent avec les peuples barbares; qu'elles communiquèrent avec leur métropole; Orchomène commença à déchoir, et elle rentra dans la foule des autres villes grecques.

Les Grecs, avant Homère, n'avaient guère négocié qu'entre eux, et chez quelque peuple barbare; mais ils étendirent leur domination à mesure qu'ils formèrent de nouveaux peuples. La Grèce était une grande péninsule dont les caps semblaient avoir fait reculer les mers, et les golfes s'ouvrir de tous

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côtés, comme pour les recevoir encore. Si l'on jette les yeux sur la Grèce, on verra, dans un pays assez resserré, une vaste étendue de côtes. Ses colonies innombrables faisaient une immense circonférence autour d'elle; et elle y voyait, pour ainsi dire, tout le monde qui n'était pas barbare. Pénétra-t-elle en Sicile et en Italie, elle y forma des nations. Navigua-t-elle vers les mers du Pont, vers les côtes de l'Asie mineure, vers celles d'Afrique; | elle en fit de même. Ses villes acquirent de la prospérité à mesure qu'elles se trouvèrent près de nouveaux peuples. Et, ce qu'il y avait d'admirable, des îles sans nombre, situées comme en première ligne, l'entouraient encore.

Quelles causes de prospérité pour la Grèce, que des jeux qu'elle donnait pour ainsi dire à l'univers, des temples où tous les rois envoyaient des offrandes, des fêtes où l'on s'assemblait de toutes parts, des oracles qui faisaient l'attention de toute la curiosité humaine, enfin le goût et les arts portés à un point que de croire les surpasser sera toujours ne les pas connaître!

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Quatre événements arrivés sous Alexandre firent dans le commerce une grande révolution : la prise de Tyr, la conquête de l'Égypte, celle des Indes, et la découverte de la mer qui est au midi de ce pays.

L'empire des Perses s'étendait jusqu'à l'Indus1. Longtemps avant Alexandre, Darius avait envoyé des navigateurs qui descendirent ce fleuve, et allèrent jusqu'à la mer Rouge. Comment donc les Grecs furent-ils les premiers qui firent par le midi le commerce des Indes? Comment les Perses ne l'avaient-ils pas fait auparavant? Que leur servaient des mers qui étaient si proches d'eux, des mers qui baignaient leur empire? Il est vrai qu'Alexandre conquit les Indes mais faut-il conquérir un pays pour y négocier? J'examinerai ceci.

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mées de Sémiramis et de Cyrus' avaient péri dans ces déserts; et Alexandre, qui se fit suivre par sa flotte, ne laissa pas d'y perdre une grande partie de son armée. Les Perses laissaient toute la côte au pouvoir des Ichtyophages 2, des Orittes, et autres peuples barbares. D'ailleurs les Perses n'étaient pas navigateurs, et leur religion même leur ôtait toute idée de commerce maritime 3. La navigation que Darius fit faire sur l'Indus et la mer des Indes fut plutôt une fantaisie d'un prince qui veut montrer sa puissance, que le projet réglé d'un monarque qui veut l'employer. Elle n'eut de suite ni pour le commerce ni pour la marine; et, si l'on sortit de l'ignorance, ce fut pour y retomber.

Il y a plus : il était reçu 4 avant l'expédition d'Alexandre, que la partie méridionale des Indes était inhabitable 5; ce qui suivait de la tradition que Sémiramis 6 n'en avait ramené que vingt hommes, et Cyrus que sept.

Alexandre entra par le nord. Son dessein était de marcher vers l'orient: mais, ayant trouvé la partie du midi pleine de grandes nations, de villes et de rivières, il en tenta la conquête, et la fit.

Pour lors il forma le dessein d'unir les Indes avec l'Occident par un commerce maritime, comme il les avait unies par des colonies qu'il avait établies dans les terres.

Il fit construire une flotte sur l'Hydaspe, descendit cette rivière, entra dans l'Indus, et navigua jusqu'à son embouchure. Il laissa son armée et sa flotte à Patale, alla lui-même avec quelques vaisseaux reconnaître la mer, marqua les lieux où il voulut que l'on construisît des ports, des havres, des arsenaux. De retour à Patale, il se sépara de sa flotte, et prit la route de terre pour lui donner du secours et en recevoir. La flotte suivit la côte depuis l'embouchure de l'Indus, le long du rivage des pays des Orittes, des Ichtyophages, de la Caramanie et de la Perse. Il fit creuser des puits, bâtir des villes; il défendit aux Ichtyophages 7 de vivre de poisson;

I STRABON, liv. XV.

2 PLINE, liv. VI, chap. XXIII; STRABON, liv. XV.

3 Pour ne point souiller les éléments, ils ne naviguaient pas sur les fleuves. (M. Hyde, Religion des Perses.) Encore aujourd'hui ils n'ont point de commerce maritime, et ils traitent d'athées ceux qui vont sur mer.

4 STRABON, liv. XV.

5 Hérodote, in Melpomene, dit que Darius conquit les Indes. Cela ne peut être entendu que de l'Ariane : encore ne futce qu'une conquête en idée. (P.)

6 STRABON, liv. XV.

7 Ceci ne saurait s'entendre de tous les Ichtyophages, qui habitaient une côte de dix mille stades. Comment Alexandre aurait-il pu leur donner la subsistance? Comment se serait-il fait obéir? Il ne peut être ici question que de quelques peuples particuliers. Néarque, dans le livre Rerum indicarum, dit qu'à l'extrémité de cette côte, du côté de la Perse, il avait

il voulait que les bords de cette mer fussent habités, plus incommode : il se serait séparé de son empar des nations civilisées. Néarque et Onésicrite pire. Les califes, qui conquirent au loin, quittèont fait le journal de cette navigation, qui fut de rent d'abord l'Arabie pour s'établir ailleurs. dix mois. Ils arrivèrent à Suse; ils y trouvèrent Alexandre, qui donnait des fêtes à son armée.

Ce conquérant avait fondé Alexandrie dans la vue de s'assurer de l'Égypte : c'était une clef pour l'ouvrir dans le lieu même où les rois ses prédécesseurs avaient une clef pour la fermer; et il ne songeait point à un commerce dont la découverte de la mer des Indes pouvait seule lui faire naître la pensée.

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CHAPITRE IX.

Du commerce des rois grecs après Alexandre.

Lorsque Alexandre conquit l'Égypte, on connaissait très-peu la mer Rouge, et rien de cette partie de l'Océan qui se joint à cette mer, et qui baigne d'un côté la côte d'Afrique, et de l'autre celle de l'Arabie on crut même depuis qu'il était impossible de faire le tour de la presqu'île d'Arabie. Ceux qui l'avaient tenté de chaque côté avaient abandonné leur entreprise. On disait : « Com«ment serait-il possible de naviguer au midi des «< côtes de l'Arabie, puisque l'armée de Cambyse, qui la traversa du côté du nord, périt presque « toute, et que celle que Ptolomée, fils de Lagus, « envoya au secours de Séleucus Nicator à Babylone, souffrit des maux incroyables, et, à cause

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« de la chaleur, ne put marcher que la nuit? >>
Les Perses n'avaient aucune sorte de navigation.

Il paraît même qu'après cette découverte il n'eut aucune vue nouvelle sur Alexandrie. Il avait bien, en général, le projet d'établir un commerce entre les Indes et les parties occidentales de son empire; mais, pour le projet de faire ce commerce par l'Égypte, il lui manquait trop de connaissances pour pouvoir le former. Il avait vu l'Indus, il avait vu le Nil; mais il ne connaissait point les mers d'Arabie, qui sont entre deux. A peine fut-il arrivé des Indes, qu'il fit construire de nouvelles flottes, et navigua sur l'Euléus, le Tigre, l'Euphrate et la mer : il ôta les cataractes que les Perses avaient mises sur ces fleuves; il découvrit que Quand ils conquirent l'Egypte, ils y apportèrent le même esprit qu'ils avaient eu chez eux et la le sein Persique était un golfe de l'Océan. Comme il alla reconnaître 3 cette mer, ainsi qu'il avait re-négligence fut si extraordinaire que les rois grecs trouvèrent que non-seulement les navigations des connu celle des Indes; comme il fit construire un port à Babylone pour mille vaisseaux, et des arse- Tyriens, des Iduméens et des Juifs dans l'Océan naux; comme il envoya cinq cents talents en Phé- étaient ignorées, mais que celles même de la mer nicie et en Syrie, pour en faire venir des nauton-Rouge l'étaient. Je crois que la destruction de la niers, qu'il voulait placer dans les colonies qu'il répandait sur les côtes; comme enfin il fit des travaux immenses sur l'Euphrate et les autres fleuves de l'Assyrie, on ne peut douter que son dessein ne fût de faire le commerce des Indes par Babylone et le golfe Persique.

Quelques gens, sous prétexte qu'Alexandre voulait conquérir l'Arabie 4, ont dit qu'il avait formé le dessein d'y mettre le siége de son empire: mais comment aurait-il choisi un lieu qu'il ne connaissait pas ? D'ailleurs c'était le pays du monde le

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première Tyr par Nabuchodonosor, et celle de plusieurs petites nations et villes voisines de la mer Rouge, firent perdre les connaissances que l'on avait acquises.

L'Égypte, du temps des Perses, ne confrontait point à la mer Rouge : elle ne contenait que cette lisière de terre longue et étroite que le Nil couvre par ses inondations, et qui est resserrée des deux côtés par des chaînes de montagnes. Il fallut donc découvrir la mer Rouge une seconde fois, et l'Océan une seconde fois; et cette découverte appartint à la curiosité des rois grecs.

On remonta le Nil; on fit la chasse des éléphants dans les pays qui sont entre le Nil et la mer; on découvrit les bords de cette mer par les terres; et comme cette découverte se fit sous les Grecs, les noms en sont grecs, et les temples sont consacrés 3 à des divinités grecques.

Les Grecs d'Égypte purent faire un commerce

Voyez le livre Rerum indicarum.

2 STRABON, liv. XVI.
3 Ibid.

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