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MADEMOISELLE MOLIÈRE.

Ni moi.

MADEMOISELLE HERVÉ.

Ni moi.

MADEMOISELLE DU CROISY.

Ni moi.

MOLIÈRE.

Que pensez-vous donc faire? Vous moquez-vous toutes de moi?

SCÈNE IV.

BÉJART, MOLIÈRE, LAGRANGE, DU CROISY; MESDEMOISELLES DU PARC, BÉJART, DE BRIE, MOLIÈRE, DU CROISY, HERVÉ.

BÉJART.

MESSIEURS, je viens vous avertir que le roi est venu, et qu'il attend que vous commenciez.

MOLIÈRE.

Ah! monsieur, vous me voyez dans la plus grande peine du monde; je suis désespéré à l'heure que je vous parle. Voici des femmes qui s'effraient et qui disent qu'il leur faut répéter leurs rôles avant que d'aller commencer. Nous demandons, de grâce, encore un moment. Le roi a de la bonté, et il sait bien que la chose a été précipitée.

SCÈNE V.

MOLIÈRE, ET LES MÊMES ACTEURS, A L'Exception

DE BÉJART.

MOLIÈRE.

HÉ! de grâce, tâchez de vous remettre; prenez cou

rage, je vous prie.

MADEMOISELLE DU PARC.

Vous devez vous aller excuser.

MOLIÈRE.

Comment m'excuser?

SCÈNE VI.

MOLIÈRE, ET LES MÊMES ACTEURS; UN NÉCESSAIRE.

LE NÉCESSAIRE.

MESSIEURS, Commencez donc.

MOLIÈRE.

Tout à l'heure, monsieur. Je crois que je perdrai l'esprit de cette affaire-ci, et...

SCÈNE VII.

MOLIÈRE, ET LES MÈMES ACTEURS; UN SECOND NÉCESSAIRE.

LE SECOND NÉCESSAIRE.

MESSIEURS, Commencez donc.

MOLIÈRE.

Dans un moment, monsieur. (à ses camarades. ) Hé quoi donc! voulez-vous que j'aie l'affront...?

SCÈNE VIII.

MOLIÈRE, ET LES MÊMES ACTEURS; UN TROISIÈME NÉCESSAIRE.

LE TROISIÈME NÉCESSAIRE.

MESSIEURS, Commencez donc.

MOLIÈRE.

Oui, monsieur, nous y allons. Hé! que de gens se font fête,' et viennent dire, Commencez donc, à qui le roi ne l'a pas commandé!

SCÈNE IX.

MOLIÈRE, ET LES MÊMES ACTEURS; UN QUATRIÈME NÉCESSAIRE.

LE QUATRIÈME NÉCESSAIRE.

MESSIEURS, Commencez donc.

MOLIÈRE.

Voilà qui est fait, monsieur. (à ses camarades.) Quoi donc! recevrai-je la confusion...?

SCÈNE X.

BÉJART, MOLIÈRE, ET LES MÊMES ACteurs.

MOLIÈRE.

MONSIEUR, Vous venez pour nous dire de commencer,

mais...

'On disoit proverbialement que des gens se faisoient fête, pour dire qu'ils vouloient se rendre nécessaires, se mêler d'affaires où ils n'étoient point appelés.

BÉJART.

Non, messieurs; je viens pour vous dire qu'on a dit au roi l'embarras où vous vous trouviez, et que, par une bonté toute particulière, il remet votre nouvelle comédie à une autre fois, et se contente, pour aujourd'hui, de la première que vous pourrez donner.

MOLIÈRE.

Ah! monsieur, vous me redonnez la vie. Le roi nous fait la plus grande grâce du monde de nous donner du temps pour ce qu'il a souhaité; et nous allons tous le remercier des extrêmes bontés qu'il nous fait paroître.

FIN DE L'IMPROMPTU DE VERSAILLES.

SUR

L'IMPROMPTU DE VERSAILLES.

O'N a vu, dans la vie de Molière, que Boursault, ayant cru se reconnoître dans le personnage du poëte Lysidas, composa Le Portrait du PEINTRE, pièce où il chercha à tourner en ridicule quelques vers de L'ÉCOLE DES FEMMES. Cette comédie, écrite avec assez d'élégance, mais dont l'ironie est foible et la plaisanterie sans sel, affligea beaucoup Molière, parce qu'elle servit en quelque sorte de point de ralliement à tous ses ennemis, qui étoient nombreux. Ses protecteurs et ses partisans, parmi lesquels on pouvoit compter les hommes les plus distingués de la cour, en parlèrent au roi, qui permit verbalement

que

l'auteur répondît à ses adversaires dans une comédie qui seroit jouée à la cour.

Molière, enhardi par cette marque inouie de bienveillance, céda au désir de se venger, et nomma Boursault avec le plus grand mépris, quoique la pièce de ce dernier n'offrit aucune personnalité. L'IMPROMPTU DE VERSAILLES fut très-goûté : c'étoit une affaire de parti. Toute la jeunesse de la cour, excepté quelques marquis, voyoit avec plaisir qu'on attaquât les prudes, les précieuses et l'hôtel de Rambouillet, qu'elle regardoit comme la vieille cour. Cependant l'auteur, plus juste que ses partisans, retira sa pièce après le cours des premières

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