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de Pierre Valdo, appellés Vaudois ou Pauvres de Lyon, fe joignirent aux Sectateurs de Pierre de Bruys, & d'Arnaud de Breffe & ces deux Sectes furent généralement appellées du nom d'Albigeois, de la Ville d'Alby, où ils s'étoient établis. Je paffe le détail de leurs erreurs, & je viens à l'histoire qui rapporte que Gilbert de Lyon les condamna pour la premiere fois dans un Concile tenu à Lombés en 1176. Deux ans après, Pierre Cardinal, accompagné des Archevêques de Bourges, de Narbonne & des autres Miffionaires, vinrent dans Languedoc, à deffein de les ramener à leur devoir : & l'année fuivante, le Concile de Latran employa encore toutes les foudres de l'Eglife contre ces Novateurs. Le mal s'étoit long-tems caché, l'héréfie s'étoit couverte d'une fauffe apparence de piété, & lorfqu'on voulut s'y oppofer, elle avoit déja pris de fi fortes racines, qu'il fallut employer le fer & le feu pour l'exterminer. En 1206. Diego Evêque d'Ofme en Efpagne, fuivi de S. Dominique fon diocéfain, d'Arnaud Abbé de Câteaux, de Pierre

de Châteauneuf, Evêque de Carcaffonne & d'autres, entreprirent de prêcher contre les Albigeois: quoique ceux-ci euffent pour protecteurs les Comtes de Touloufe, & tous les Princes voifins qui les foûtenoient ou par intérêt, ou par inclination, ou par politique. Pierre de Châteauneuf avoit le titre de Légat du Saint Siége Raymond IV. du nom, Comte de Toulouse, le chaffa du Languedoc, & le fit affaffiner lorfqu'il fe jettoit dans un bateau pour paffer le Rhône. Cette affaire eut des fuites fâcheufes, mais comme elle ne regarde plus notre hiftoire, nous nous arrêterons feulement fur ce fait, qui eft l'époque de la piéce de Faydit. Boniface étoit ami & fauteur de l'héréfie que le Comte de Toulouse foûtenoit. Ainfi il y a grande apparence que le Poëte pour plaire à fon bienfaiteur, forma le deffein de tourner en ridicule les auteurs des Conciles qui avoient condamné les Albigeois ; & pour cela il falloit les traiter eux-mêmes d'hérétiques; c'eft ce que le titre de Héréfie des Peres promet, & que Comédie éxécuta. Noftradamus

la

mus.

Noftrada

nous apprend que Faydit avoit compofé cette piéce très-fécretement, & qu'il ne la montra qu'à Boniface, mais que ce Prince charmé de ce morceau fatirique, la fit jouer publiquement dans fes Etats. On ne fçait pas pourquoi Faydit fe retira en Provence, chez le Marquis de Sault, mais on fçait feulement que ce Marquis lui fit beaucoup de bien, & qu'il mourut à Agoult, Terre appartenante à ce Seigneur, en 1220. Pétrarque a parlé de ce Poëte dans fon IV. chapitre du Triomphe de l'amour.

BRUNET(HUGUES,) Gentilhomme de la Ville de Rhodez, fut fimplement Poëte Comique,c'eftà-dire qu'il ne compofa point de piéces, & qu'il fe contenta d'exécuter celles qu'on lui difoit de joüer; mais il faifoit de jolies chanfons, que les Chanteurs débitoient; car Brunet n'avoit point de voix. Le Roi d'Arragon l'appella à fa Cour, & lui fit du bien : Brunet y demeura quelque tems, & pafla fucceffivement du Comte de Toulouse, au Comte de Rhodez, & enfin au Dauphin d'Auvergne. Il devint amou

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reux d'une Dame nommée Julienne de Monteil qui paffoit pour la plus belle, & la plus fpirituelle de toutes les Dames de Provence, mais le peu de progrès que ce Poëte fit fur fon cœur, l'obligea à quitter la Cour du Dauphin d'Auvergne, il revint chez le Comte de Rhodez, où il adreffa fes hommages à la Comteffe fon épouse. Le Comte qui connoiffoit fa vertu, ne s'allarma pas de l'amour que Brunet avoit pour elle, & ne lui en' fit pas un moindre accueil. Brunet mourut en 1223. il avoit compofé un Poëme intitulé les Traverfes de l'Amour. (*)

USEŹ(GUYD') Seigneur en partie du lieu dont il portoit le nom, puîné de deux freres qui n'avoient pas plus de bien que lui, puifque tout l'héritage de leur Pere confiftoit en ce petit Fief. L'aîné nommé Ebles, remontra à Guy, & à Pierre fes cadets, qu'il leur étoit honteux de refter ainfi enterrés dans une Chaumiere, tandis que la Nature leur avoit donné le moyen de vivre dans l'abondance: que fon fentiment étoit qu'ils allaffent tous (*) Las Drudarias d'Amour.

Duverdier.

Vauprivas

trois de compagnie promener leurs talens à la Cour des Princes de l'Europe. Cet avis fut goûté, & pour augmenter la bonne compagnie, ils engagerent Elias, leur coufin, bon Poëte Comique, & qui n'étoit pas plus riche, à voyager avec eux. Avant le départ, ils convinrent, que les Chanfons de Guy & les Syrventes d'Ebles, feroient chantées par Pierre, qui fçavoit la Mufique, & qui avoit la voix fort belle: qu' 'Elias représenteroit les Comédies, & que le profit feroit partagé également entr'eux. Il fut de plus convenu, qu'il ne fe quitteroient qu'après leur retour. Ces conventions, faites ils partirent, & arriverent à la Cour de Reynauld Vicomte d'Albuzon, qui les reçût avec plaifir, auffi-bien que Marguerite fa femme, étant tous deux grands amateurs de la Poëfie Provençale. Nos Poëtes firent des merveilles, & furent bien récompenfés de leurs productions. Aubout d'un certain tems ils prirent congé de leurs bienfacteurs, & montés comme des Paladins, ils pafferent dans les Etats de la Comteffe de Montferrat, qui ne leur fit pas

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