DORANTE. Il dit, Madame, qu'il vous trouve la plus belle personne du monde. DORIMÈNE. C'est bien de la grâce qu'il me fait. M. JOURDAIN. Madame, c'est vous qui faites les grâces, et... DORANTE. Songeons à manger. SCÈNE XX. M. JOURDAIN, DORIMÈNE, DORANTE, UN LAQUAIS. LE LAQUAIS, à M. Jourdain. Tout est prêt, Monsieur. DORANTE. Allons donc nous mettre à table; et qu'on fasse venir les musiciens. SCÈNE XXI. ENTRÉE DE BALLET. Six cuisiniers qui ont préparé le festin dansent ensemblent; après quoi ils apportent une table couverte de plusieurs mets. FIN DU TROISIÈME ACTE. ACTE QUATRIÈME. SCÈNE PREMIÈRE. DORIMÈNE, M. JOURDAIN, DORANTE, TROIS MUSICIENS, UN LAQUAIS. DORIMÈNE. COMMENT! Dorante, voilà un repas tout-à-fait magnifique! M. JOURDAIN. Vous vous moquez, Madame; et je voudrais qu'il fût plus digne de vous être offert. (Dorimène, M. Jourdain, Dorante et les trois musiciens se mettent à table.) DORANTE. Monsieur Jourdain a raison, Madame, de parler de la sorte; et il m'oblige de vous faire si bien les honneurs de chez lui. Je demeure d'accord avec lui que le repas n'est pas digne de vous, Comme c'est moi qui l'ai ordonné, et que je n'ai pas, sur cette matière, les lumières de nos amis, vous n'avez pas ici un repas fort savant, et vous y trouverez des incongruités de bonne chère et des barbarismes de bon goût. Si Damis s'en était mêlé, tout serait dans les règles; il y aurait partout de l'élégance et de l'érudition; et il ne manquerait pas de vous exagérer lui-même toutes les pièces du repas qu'il vous donnerait, et de vous faire tomber d'accord de sa haute capacité dans la science des bons morceaux; de vous parler d'un pain de rive à biseau doré, relevé de croûte partout, croquant tendrement sous la dent; d'un vin à sève veloutée, armé d'un vert qui n'est point trop commandant; d'un carré de mouton gourmandé de persil; d'une longe de veau de rivière, longue comme cela, blanche, délicate, et qui, sous les dents, est une vraie pâte d'amande; de perdrix relevées d'un fumet surprenant; et pour son opéra, d'une soupe à bouillon perlé, soutenue d'un jeune gros dindon, cantonnée de pigeonneaux, et couronnée d'oignons blancs mariés avec la chicorée. Mais, pour moi, je vous avoue mon ignorance; et, comme M. Jourdain a fort bien dit, je voudrais que le repas fût plus digne de vous être offert. DORIMÈNE. Je ne réponds à ce compliment qu'en mangeant comme je fais. Les mains sont médiocres, M. Jourdain ; mais vous voulez parler du diamant, qui est fort beau. M. JOURDAIN.. Moi, Madame, Dieu me garde d'en vouloir parler! Ce ne serait pas agir en galant homme; et le diamant est fort peu de chose. DORIMÈNE. Vous êtes bien dégoûté. M. JOURDAIN. Vous avez trop de bonté. DORANTE, après avoir fait signe à M. Jourdain. Allons, qu'on donne du vin à monsieur Jourdain, et à ces Messieurs, qui nous feront la grâce de nous chanter un air à boire. DORIMÈNE. C'est merveilleusement assaisonner la bonne chère, que d'y mêler la musique; et je me vois ici admirablement régalée. M. JOURDAIN. Madame, ce n'est pas... DORANTE. Monsieur Jourdain, prêtons silence à ces Messieurs ; ce qu'ils nous diront vaudra mieux que tout ce que nous pourrions dire. PREMIER ET SECOND MUSICIENS ensemble, Un petit doigt, Philis, pour commencer le tour. Entre lui, vous et moi, jurons, jurons, ma belle, Une ardeur éternelle. Qu'en mouillant votre bouche il en reçoit d'attraits! SECOND ET TROISIÈME MUSICIENS ensemble. Autant que nous pouvons. Le met parmi les pots. Les biens, le savoir et la gloire TOUS TROIS ENSEMBLE. Sus, sus, du vin partout; versez, garçon, versez; Versez, versez toujours tant qu'on vous dise assez. |