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Telle est la suite de ce mauvais calcul. M. Seillière multiplie ici les chiffres en preuve. On produit ainsi plus chèrement qu'en 1860. - De cette inintelligente et trop « rapide transformation » sont résultés des embarras qui font que beaucoup d'industriels ont été « désargentés » au moment de la crise cotonnière (!!).

Le tissage de Senones comprend 910 métiers, avec double force motrice comme la filature. On emploie comme en Alsace 73 ouvriers pour 100 métiers, dont 1/2 homme à un salaire moyen de 2 fr. Travail trop éparpillé pour être d'un bon rapport, à la différence de Mulhouse et des Anglais qui s'appliquent « exclusivement à une sorte. »> Production médiocre relativement: 25 mètres au lieu de 28 et 30 par jour, chiffres courants et ordinaires (!). - Prix de revient du calicot 60 portées à 20 fils, 9 centimes 03. 247,000 fr. dépensés en améliorations au tissage qui lui ont mieux profité qu'à la filature.

Résumant la situation de sa fabrique, l'honorable déposant conclut à une perte totale en cinq ans de 797,000 fr. sur un capital engagé de 25,000,000 fr.. dont 1,600,000 du chef de sa filature. Voici comment s'établirait ce déficit. Revenu brut, 794,000 fr., dont 715,000 appartenant à la filature. A déduire, comme négociant, le bénéfice réalisé dans des achats de coton, soit 216,000 fr. (!); resterait 578,000 pour faire face à 1,375,000 fr. d'intérêts et d'amortissement pendant cinq années : soit une perte sèche ou différence de près de 800,000 fr. Le tissage entrerait là-dedans pour 416,000 fr. (1).

Après cette audition, M. CLAUDE, représentant de la maison J. T. GEHIN, ayant désiré fournir « quelques indications, » la parole lui est donnée.

Le déposant déclare s'exprimer au nom d'une maison qui, à la différence du préopinant, aurait conservé « son ancien outillage de filature. » Cet établissement compte 29,000 broches et 534 mé

(1) Si l'industriel, contrairement à ce qui a lieu en Angleterre, est ici doublé « du négociant » ou spéculateur, on a peine à s'expliquer pourquoi les 216,000 fr. gagnés sur le coton ne feraient point masse de bénéfice? Cela réduirait d'autant le déficit de 800,000 fr. allégué ? Du reste, que représenterait la véritable différence de 581,000 fr. qui persiste? moins que l'intérêt de cinq années à 5 0,0. Ce serait beaucoup sans doute; mais pour un capital si considérablement amélioré, qui ne voit que l'avoir conservé intact, c'est quelque chose en temps de crise et d'affaires généralement mauvaises ?.... P. C.

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tiers de tissage, où la force hydraulique se combine avec la vapeur. Excellence de la force motrice hydraulique. On y consomme peu de houille, mais, par le prix élevé du transport,' ce combustible coûte « horriblement cher. » Cette question des frais de transport paraît à M. Claude a capitale. » Il donne des chiffres concluants relativement aux cotons qu'on tire du Havre et auxquels on est forcé de faire subir de longs détours. L'honorable déposant revient à diverses fois sur cette question des transports. Les compagnies elles-mêmes reconnaissent le taux abusif de leurs tarifs. On est placé par ce fait seul vis-à-vis du concurrent étranger dans des conditions d'infériorité notable. C'est la moitié de la question (textuel.) La protection nécessaire devrait être par broche de 6 à 4.50 « extrême limite. » L'instruction obligatoire des enfants est de droit dans la fabrique; c'est un bien à généraliser. Quant au nivellement des salaires, il n'y faut pas songer; ce n'est qu'au détriment des nationaux qu'il s'établira. Si la fabrique de Saulsures n'a pas modifié son outillage il y a dix ans, c'est qu'on s'est défié des conditions de vitalité de notre industrie cotonnière. On s'est ainsi épargné plus d'un regret (?). Dans le tissage, le nombre des hommes s'accroît journellement aux dépens de l'autre sexe. C'est une tendance qui « malheureusement s'universalise. » L'ou vrier fileur gagne 3 fr. et celui du band à broches, de la carderie 1 fr. 90 à 1 fr. 95. Dans le tissage les prix sont moindres : 2 fr. 15 à 2 fr, 75, et l'ouvrière 4 fr. 50 à 2 fr. Dans les Vosges la main-d'œuvre tend à se niveler avec Mulhouse.

SÉANCE DU MERCREDI 23 MARS.

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SOMMAIRE, Déposition de M. Jean Dollfus, de la maison Dollfus, Mieg et C, à Mulhouse. Filature, tissage, impression et blanchiment de tissus. Importance de l'admission temporaire en franchise pour l'industrie cotonnière et pour le pays; états de douane fatalement fautifs. Déclarations conformes de MM, H. Fould, Engel Dollfus et Thierry Mieg. Substitution désirable du système de l'équivalent à l'identique. MM. Keller, Géliot, membres de la Commission, et M. Amé, directeur général des douanes, prennent part au débat. M. Georges Steinbach, de la maison Steinbach, Koechlin et Ce, à Mulhouse, filature et impression de tissus. Données statistiques sur cette dernière industrie dans le Haut-Rhin. Prix des transports généralement exagérés. Se réfère à la déposition de M. Jean Dollfus et aux observations de M. Thierry Mieg, touchant l'admission temporaire en franchise et les états de douane. Profits de la filature et de l'impression comparés. Question posée par M. Quesné.

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M. Edouard Gros, de la maison Gros, Roman, Marozeau à Wesserling

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(Haut-Rhin). Filature, tissage et impression. Exportation notable de toiles peintes, fabriquées tant au rouleau qu'à la main; salaire moyen de 2 fr. par jour. Chiffres fournis à l'appui du système des admissions temporaires qui profitent au tissage loin de lui nuire. M. Grosjean, filateur à Guebwiller (Haut-Rhin), membre du Syndicat cotonnier de l'Est. Il a pris part au projet de tarifs présenté par M. Aug. Dollfus, et regarde ce tarif comme insuffisant, surtout à l'endroit de la Normandie. L'admission temporaire a pour effet de détruire l'efficacité de la protection dont on jouit. Pertes réalisées dans le cours de son exploitation. Observations en sens contraire de M. Engel Dollfus.

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Avant que M. Jean Dollfus, imprimeur sur étoffes dans le Haut-Rhin, soit entendu, suivant que l'indique l'ordre du jour de la dernière séance, la parole est donnée à M. Auguste DOLLFUS, appelé à fournir quelques éclaircissements.

L'honorable déposant annonce que, déférant au vou exprimé par la Commission, il a été dressé un tableau donnant les prix actuels « de différentes sortes de filés et de tissus. » On y trouvera les cours pour les numéros 40 à 150 depuis 1865 à 1870, le mois courant compris. Ce tableau est déposé. - Quant au projet de tarif, pour la filature et le tissage, il en sera remis prochainement des exemplaires imprimés. M. A. Dollfus donne des chiffres desquels il résulterait que pour la filature le remplacement, par le self-acting, des broches mull-Jenny est allé croissant depuis 1859. Il n'en resterait plus à cette heure, sur les 2,140,000 broches d'Alsace qu'environ 350,000 ancien système. Quant aux avantages de cette transformation, ils varient selon le numéro, mais se réduisent en somme à peu de chose (?). Pour ce qui est du plus grand nombre de broches depuis 1861, M. Auguste Dollfus part ici de 1856 et laisse en dehors, sans qu'on se l'explique, 1869 et une portion de 1870. Il résulterait de cette méthode que l'accroissement de 1856 à 1861 semble supérieur à celui des périodes qui]suivent, ce qui n'est pas. Quant à la proportion que donnait et que donne le travail des broches en numéros fins, mi-fins et gros, M. Auguste Dollfus croit difficile d'établir cela « d'une facon précise. » Il ne peut que fixer approximativement des chiffres; il en résulte que la masse des numéros supérieurs à 42, qui était d'un tiers, serait tombée à moins de moitié.

Déposition de M. Jean DOLLFUS, fabricant de tissus imprimés à Mulhouse, et réunissant sous la même main des ateliers de filature et de tissage.-M. Dollfus est, en outre, on le sait, président du Comité d'impression de l'Est.

La question des admissions temporaires des tissus a pour l'industrie cotonnière en général et pour le pays la plus grande importance. L'industrie des toiles peintes est surtout intéressée au maintien de ce régime, vu que le marché français tend pour elle à se restreindre. Il n'y a donc que l'exportation qui puisse la faire vivre; or, pour exporter, il faut pouvoir acheter le tissu, cette matière première de l'impression, aussi bon marché que le fabricant étranger. De là, l'impérieuse nécessité des admissions temporaires en franchise. C'est d'autant plus nécessaire qu'on paie la houille et les machines plus cher que l'étranger. L'outillage anglais l'emporte ici à tel point qu'on peut voir à Manchester une fabrique d'impression qui a autant de machines que la Normandie « tout entière.»> Il faut donc égaliser le plus possible les conditions de travail. Cependant, depuis quelques années, l'impression nationale lutte avec des avantages qui se développent. Si elle a décliné antérieurement, elle tend à se remettre, grâce à l'admission en franchise. Les chiffres le prouvent. Ce système favorise la fabrication des sortes communes, sans lesquelles des produits plus fins deviendraient ruineux. En achetant le tissu écru au dehors et à plus bas prix, on est parvenu à égaler et évincer la fabrique étrangère, soit dans l'Inde, soit ailleurs. Du reste, il est des articles, la percale, par exemple, pour lesquels le marché intérieur suffit; aussi en consomme-t-on deux fois plus qu'avant, par suite des bas prix obtenus: Le travail indigène a donc ici gagné. Quant aux jaconas qui excitent par leur introduction de si vives plaintes, le tableau des cours français et suisse, dressé pour la période de 1861 à 1869, démontre la persistance d'un écart qui varie de 3 1/2 à 5 centimes. Pour le calicot 60 portées qu'on tire souvent de Suisse, il est constant qu'à des époques de crise les prix français se sont encore plus abaissés que les prix suisses. L'écart se traduit par 5 et 2 1/2 centimes à certains moments. Suit une série de chiffres et de tableaux qui montrent que, pour le bas prix, Mulhouse conserve en ce qui touche les 60 portées l'avantage. Ces prix sont appuyés de certificats suisses de toute créance, et l'Industriel alsacien a pu constater leur exactitude pour le tissu indigène..

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Au reproche tiré de l'exiguité de l'exportation de façon à conclure à l'encontre de l'admission temporaire, M. Dollfus oppose les chiffres en progrès de la période à partir de laquelle on a pu user de cette faculté à charge de réexportation. S'il fallait acquitter un droit de 4 à 5 centimes par mètre d'étoffe, l'industrie de l'imprimeur qui réalise à peine un profit de 3 1/2 à 5 centimes ne pourrait subsister. Avant l'admission temporaire, M. Jean Dollfus avait dû établir, dans e duché de Bade, une fabrique de toiles peintes qui bénéficiait des

facilités données par le Zollverein. Plus tard, il a dú renoncer à ce moyen de concurrencer avec avantage l'étranger, et l'on a liquidé l'établissement. Si l'on supprimait définitivement l'admission temporaire, il serait indispensable de relever à l'étranger cette industrie longtemps si maltraitée par les tarifs français. - Le grand duché de Bade est le siége d'une concurrence active à cet égard.

L'honorable déposant termine en déclarant que les fabricants d'impression ne réclament aucune réduction de tarif sur les tissus écrus et les filés, en admettant le principe de l'admission temporaire en franchise; il repousse hautement toute aggravation de tarif; mais, si le régime de l'introduction en franchise devait succomber, et qu'on admit le retrait des droits qui protégent soit le filage, le tissage ou les fabricants de couleurs et produits chimiques, l'impression sur étoffes renoncerait à tout droit protecteur, malgré les désavantages existant du côté de l'Angleterre pour l'outillage et le combustible.

A propos du bénéfice de 3 centimes et demi par mètre d'impression accusé par M. J. Dollfus, plusieurs membres de la Commission désirent savoir quel est le prix moyen du mètre dont on parle? La réponse porte exclusivement ici sur les jaconas suisses ordinaires, lesquels ressortiraient actuellement à 70 c. le mètre. Cela représenterait 5 0/0, mais le prix de 70 c. est loin d'être un prix moyen, surtout pour les produits exportés.

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Un membre de la Commission, M. Keller, émettant quelques doutes sur l'accroissement du chiffre d'exportation des toiles peintes sous le régime de l'admission temporaire en franchise, M. Jean Dollfus s'empresse de fournir, à ce propos, de plus amples lumières. C'est ainsi que de 1860 à 1869 inclusivement l'exportation se traduisait par 42 millions de francs au lieu de 25, tandis que la vente à l'intérieur reste stationnaire. D'autre part, la production totale en 1860 serait de 63 millions et demi de mètres contre 89 millions et demi en 1869. - L'introduction temporaire figurerait là pour près de 11 millions de mètres d'une valeur d'ensemble de 4 millions environ. A ce dernier chiffre vient s'ajouter la dépense des drogues, produits chimiques, frais de gravure, impôts, etc., qu'entraîne l'impression des tissus. Cela monte pour 1869 à plus de 10 millions et demi.-Ces chiffres sont attestés le 18 mars 1870 par le syndicat dont M. J. Dollfus est président. Ils excéderaient de plus de moitié ceux relevés aux environs de 1860. - Il y aurait d'autant moins lieu de se référer pour l'exportation aux chiffres de la douane, que les toiles peintes sont souvent déclarées comme tissus de coton, à titre de « produits divers. » Un des grands acheteurs

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