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déblais étaient traînés par 40 chevaux. Les mineurs étaient éclairés par 300 lampes, et chaque jour éclataient 720 trous de mine consommant 250 kilogrammes de poudre.

La partie en cours d'exécution avait été divisée en trois sections : Dans la première, à partir de l'entrée du tunnel, celle de l'achèvement, on maçonne la galerie. Dans la deuxième, celle de l'élargissement, on enlève par les moyens ordinaires le strauss, la partie du massif laissée par les perforatrices; la galerie est divisée en deux par un plancher; les ouvriers travaillant à l'étage supérieur font tomber les déblais par des trappes dans les wagons roulant au-dessous sur les voies de service. La troisième section est celle de l'avancement. La galerie se réduit en ce point à un couloir de 2 mètres 70 de largeur, sur 2 mètres 60 de hauteur.

Le chemin de fer se prolonge à voie unique jusqu'au front d'attaque; entre les rails, est ménagée la fouille de l'aqueduc et de chaque côté sont établies des voies de terrassement, de 60 centimètres d'écartement, sur lesquelles roulent les wagonnets chargés de déblais. Sur la voie principale s'avance, animé par une mąchine aéromotrice, l'affût, portant dix perforatrices, suivi de son tender.

La perforatrice se compose d'un corps de pompe dont la tige du piston est armée d'un fleuret de mineur, qui, lancé avec le piston par l'air comprimé, frappe le roc 200 fois par minute, en exerçant une pression instantanée de 90 kilogrammes. Une petite machine aéromotrice, qui fait partie de la perforatrice, ouvre et ferme la communication du corps de pompe avec l'air comprimé, fait tourner le piston avec son burin, fait avancer le corps de pompe quand le trou de mine s'approfondit et le fait reculer lorsqu'il faut changer l'outil, Le trou est incessamment lavé par un jet d'eau, provenant d'un réservoir mis en pression par l'air comprimé et porté par le tender. Une machine aéromotrice dont le tender est muni pompe cette eau dans des puits ménagés de distance en distance et alimentés par les conduites.

Les trous sont séchés par un jet d'air et chargés. On fait reculer les mineurs et l'affût derrière des portières de chêne et l'on tire les mines, puis l'air comprimé de la conduite à faible pression balaye la fumée et les wagonnets enlèvent les débris.

Pour s'assurer que le percement s'exécute bien dans la direction voulue, on a relié les deux têtes par une file de jalons passant tous dans un même plan vertical (c'est-à-dire en ligne droite à vol d'oiseau); et, de deux observatoires établis vis-à-vis des entrées du tunnel, de l'autre côté des vallées, on vise successivement l'un des jalons et une lumière placée au fond du tunnel; si le signal et le point lumi

neux sont sur une même ligne perpendiculaire, on est certain de suivre la bonne direction.

IX. CONCLUSION.

LES GRANDS TRAVAUX DEPUIS DEUX ANS.

Les misères de l'heure actuelle ne doivent pas nous empêcher d'admirer les travaux accomplis sur tous les points du globe, d'observer les progrès constants qui, peu à peu, tendent à annuler l'espace et le temps, à triompher des obstacles naturels qui séparaient les nations, à rendre notre existence indépendante de la configuration des lieux et des vicissitudes des saisons,-à donner à l'homme mortel une partie de la souveraine liberté de sa pensée impérissable.

Les deux années qui viennent de s'écouler ont été particulièrement fécondes en travaux qui ont renouvelé et changé de face les relations internationales. Le 10 mai 1869, les deux Compagnies du Central pacific et de l'Union pacific se joignaient au milieu du désert américain, et le plus grand chemin de fer du globe unissait New-York à San-Francisco. Le 17 novembre 1869, le canal de Suez était inauguré, et le 9 février 1870 les grands steamers pouvaient le traverser. Le 7 mars 1870, l'East Indian et le Great Indian Peninsular soudaient leurs rails à Jubbulpore, et reliaient ainsi Bombay à Calcutta par une voie ferrée traversant tout le haut Indhoustan, plongeant au centre des régions que la civilisation éclairait de sa première aurore il y a quatre mille ans, des régions d'où la race aryaque, en essaimant, l'a transportée d'abord en Asie mineure, puis en Europe, puis en Amérique, d'où elle est revenue à son berceau, après avoir fait le tour du monde.

Le 25 décembre 1870, le tunnel des Alpes était percé, et le voyageur parti de Paris peut, sans avoir changé de voiture, s'embarquer à Brindisi pour aller à Bombay par la ligne directe, traversant le détroit de Suez, inaugurée le lendemain 26 décembre, et faire en 81 jours ce voyage autour de la terre que notre race a mis quatre mille ans à accomplir.

CHARLES BOISSAY.

LES

MINISTRES DES FINANCES EN FRANCE

DEPUIS SULLY

Ce n'est qu'à partir de François Ier (1523) que l'administration des finances fut centralisée sous le titre d'Epargne, « qui fut comme la mer à laquelle les autres recettes générales et particulières se vinrent rendre. » Ajoutons, pour compléter la comparaison, que l'évaporation tend généralement à diminuer le volume des eaux. Le Trésorier de l'épargne, que l'on ne tarda pas à appeler Surintendant (1524), fut le chef de ce puissant rouage gouvernemental. Ce n'est pas que le titre de surintendant n'ait existé antérieurement; mais alors il ne répondait pas aux mêmes attributions qu'à partir de 1524.

De 1523 à 1594, cette charge fut occupée par des noms obscurs, au mcins au point de vue des intérêts du pays. Cependant François Ier, à son lit de mort, ne craignait pas de dire, en parlant de l'un d'eux, Claude d'ANNEBAUT : « Je vous le recommande comme le seul homme de la Cour qui n'ait jamais eu en vue que le bien de l'Etat et qui se soit appauvri dans le maniement des affaires publiques. » L'un de ses successeurs, François D'O, était, au contraire, renommé pour sa dissipation, son goût pour le jeu et ses mœurs scandaleuses; il leur dut, assure-t-on, la protection de Henri III; Henri IV dut le conserver, réduit qu'il fut, pendant plusieurs années, aux expédients ruineux pour l'avenir, peu productifs pour le présent.

A la mort de François d'O (1594), un conseil de finances, présidé nominalement par le duc de NEVERS, puis le prince de CONTI, effectivement par Nicolas HARLAY DE SANCY, fut loin de rétablir l'ordre; ce rôle échut à Maximilien de Béthune, marquis de Rosny, duc de SULLY, en faveur de qui Henri IV rétablit, en 1596, la charge de surintendant des finances qu'il occupa jusqu'à la mort du Béarnais, et même quelques mois au-delà (février 1611); il était né le 13 décembre 1560 et mourut le 22 décembre 1641. Les courtisans avides l'appelaient monsieur Négatif: «Paturage et labourage, écrivait ce grand citoyen, sont les mamelles de l'Etat. » N'oublions pas néanmoins de dire qu'il ne s'appauvrit pas comme le maréchal

d'Annebaut dans le maniement des affaires publiques; mais la grande fortune qu'il laissa après lui ne fut due ni à des dilapidations, ni à d'autres moyens détournés, mais bien aux libéralités de son roi et ami.

De nouveau, lors de sa retraite, un conseil de finances est constitué et fonctionne de février 1611 à mai 1616. A partir de cette dernière époque, la charge de surintendant des finances est de nouveau rétablie et dévolue successivement aux titulaires suivants :

Pierre JEANNIN, mai 1616 à 1622 (Claude BARBIER fut sous lui contrôleur-général de 1616 au 14 mai 1617).

Henri DE SCHOMBERG, septembre 1619 (1) à janvier 1623.
Charles DE LA VIEUVILLE, janvier 1623 à août 1624.
Michel DE MARILLAC, août 1624 à juin 1626.

Jean BOSCHART, août 1624 à janvier 1626.

D'EFFIAT, juin 1626 au 26 juillet 1632.

Claude BOUTHILLIER, du 27 juillet 1632 au 9 juin 1643.

Claude DE BULLION, du 27 juillet 1632 au 22 décembre 1640.

Claude D'AVAUX, du 10 juin 1643 au 17 juillet 1647.

Nicolas BAILLEUL, du 10 juin 1643 au 17 juillet 1647.

Michel D'EMERY, du 18 juillet 1647 au 8 juillet 1648. « Les surintendants des finances sont faits pour être maudits, disait-il. » Il parlait de son temps et de lui-même.

Charles DE LA MEILLERAYE, du 9 juillet 1648 au 8 nov. 1649. Michel D'EMERY (déjà nommé), du 9 nov. 1649 au 24 mai 1650. Claude D'AVAUX (déjà nommé), du 9 nov. 1649 au 24 mai 1650. René DE LONGEUIL, du 25 mai 1650 au 7 septembre 1651. « Le roi a bien tort, dit-il avec cynisme lorsqu'il apprit que sa charge lui était retirée, j'avais fini mes affaires et j'allais m'occuper des siennes. >>

Charles DE LA VIEUVILLE (déjà nommé), du 8 septembre 1651 au 2 janvier 1653.

Enfin Nicolas FOUQUET, fameux par son faste, ses mœurs faciles, sa légèreté et ses malheurs, avec Abel SERVIEN, tous deux possédant le même titre. Ils exercèrent dès le 8 février 1653; le premier cessa le 5 septembre 1661 (jour de son arrestation) et mourut le 23 mars 1680 à l'âge de 65 ans; le second mourut en février 1659 âgé de 66 ans.

(1) L'ordre administratif est loin d'avoir régné avant 1789 dans la gestion de nos finances; il ne faut donc pas trop s'étonner des irrégularités inexplicables que nous trouverons dans l'allocation des titres et l'attribution des fonctions.

3 SÉRIE, T. XXI.

15 février 1871.

19

Les fonctions de surintendant, trop omnipotentes avec un souve rain tel que Louis XIV, furent supprimées en 1661 (1), et sous le couvert d'un conseil de finances d'abord, puis, directement, à partir de 1666, Jean-Baptiste COLBERT, marquis de Seignelay, dirigea les finances avec le titre de Contrôleur général. Cet homme de bien (quoiqu'un peu dur) a plus justement que son souverain mérité le surnom de grand, car il eut le courage de lutter contre Louvois, qui, pour être bien avec le maître, flattait sa passion pour les conquêtes et lui en facilitait les moyens par des emprunts. Né le 29 août 1619, il mourut presque dans la disgrâce, quoique en fonctions, le 6 septembre 1683. Ses successeurs ont été :

LE PELETIER (Claude), du 7 septembre 1683 au 19 septembre 1689; mort le 10 août 1711. « Je ne le tiens pas propre pour les finances, disait de lui le jésuite Le Tellier; il est trop doux. »

PHÉLYPEAUX (Louis, comte de Pontchartrain), du 20 septembre 1689 au 4 septembre 1699; né en 1643, mort le 22 décembre 1727.

DE CHAMILLART (Michel), du 5 septembre 1699 au 14 février 1708. Né le 16 janvier 1652, mort le 14 avril 1724. « Il fut un héros au billard, un zéro dans le ministère. » Chanson de l'époque.

DES MARETS (Nicolas, marquis de Maillebois), du 22 février 1708 au 1er septembre 1715; mort en 1721.

Un conseil de finances, composé comme suit, fut alors institué: Due D'ORLÉANS, régent, ordonnateur;

DUC DE VILLEROI, maréchal de France, président (nominal);

DUC DE NOAILLES (Adrien-Maurice), remplacé le 28 janvier 1718 par le chancelier D'ARGENSON (Marc-Réné de Voyer de Paulmy marquis), président (de fait). Le duc de Noailles, qui a laissé un bon souvenir de son passage aux finances, mourut le 24 juin 1766, à l'âge de 87 ans. Le marquis d'Argenson, né en 1652, mourut le 3 avril 1721.

D'EFFIAT (marquis), vice-président. Il était le fils du surintendant précédemment nommé.

LEFEBVRE et DE LA BLINIÈRE, Secrétaires.

LE PELETIER-DESFORTS, H. ROUILLÉ DU COUDRAY, LEFEBVRE D'OR

(1) Louis XIV, en supprimant la place de surintendant et la remplaçant quelque temps après par celle de contrôleur général, stipula qu'à partir de cette époque les mandats de dépense au-dessus de 1,000 livres, contresignés par le contrôleur général, devaient être préalablement signés par le roi et délivrés en son nom.

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