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monstrueux. Comme la voix et la locomotion ne sont pas anéanties, il peut agir d'après les fausses impressions qu'il reçoit, et ses actions peuvent être contraires à toutes les lois de la société. »

Il est évident que, dans ces circonstances, l'homme n'est plus dans les conditions de liberté morale semblables à celles où il se trouverait dans l'état de veille; aussi, au point de vue médico-légal, l'expert, sans admettre l'irresponsabilité absolue, doit-il dans son rapport conclure le plus ordinairement à la responsabilité limitée et atténuée dans une certaine mesure. C'est au moins l'opinion de Tardieu, Lasègue et Mesnet. Casper va plus loin, et pense que, dans les cas de cette espèce, la règle à suivre est la même que pour les cas de manie.

Il admet également que certaines passions, comme la colère, peuvent faire perdre momentanément à l'homme la conscience de ses actes, et que les actions violentes, commises en état d'ivresse de colère, doivent jouir, dans certaines mesures, du bénéfice de l'irresponsabilité limitée. Sensation de la faim. La sensation de la faim, arrivée à un état d'acuité exceptionnelle, dans certains cas, trouble momentanément l'intelligence et pousse à des actes irraisonnés. M. Folet en cite quelques exemples, et pense que dans ces conditions la responsabilité est sinon absolument abolie, du moins considérablement atténuée. Il n'est pas ici question, bien entendu, des hallucinations accompagnées d'impulsions criminelles ou des troubles cérébraux qu'on a observés dans les cas de famine, à la suite d'une abstinence complète et prolongée d'aliments, mais des troubles intellectuels provoqués passagèrement par la sensation suraiguë de la faim.

DES MALADIES DANS LEURS RAPPORTS AVEC LA JUSTICE: MALADIES SIMULÉES, DISSIMULÉES, PRÉTEXTÉES, IMPUTÉES, PROVOQUÉES OU COMMUNIQUÉES.

On entend, par maladie simulée, celle que l'on feint d'avoir; -maladie dissimulée, celle que l'on a, mais que l'on cache;

maladie prétextée, celle dont on cherche à se prévaloir, pour en tirer un avantage quelconque; maladie imputée, celle qu'on suppose exister chez un individu qui n'en est réellement pas atteint; maladie provoquée, celle que l'on fait naître ; enfin maladie communiquée, celle qui, par sa transmission, peut être cause d'un dommage direct ou indirect.

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Legrand du Saule rejette cette classification des maladies à conséquences judiciaires comme n'ayant aucune utilité pratique, et admet seulement trois grandes divisions : les maladies simulées, les maladies dissimulées et les maladies communiquées.

Législation.

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C. C. Art. 1382.- Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Art. 1383.

Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou son imprudence.

Art. 1384. On est responsable non seulement du dommage que l'on causepar son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre ou des choses que l'on a sous sa garde. Le père et la mère, après le décès du mari, sont responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux; les maitres et commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils sont employés; les instituteurs et les artisans, du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance. La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les pères, mères, instituteurs et artisans ne prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité.

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Art. 1385. Le propriétaire d'un animal, ou celui qui s'en sert, pendant qu'il est à son usage, est responsable du dommage que l'animal a causé, soit que l'animal fût sous sa garde, soit qu'il fût égaré ou échappé.

C. P. Art. 27. - Si une femme condamnée à mort se déclare enceinte, et s'il est vérifié qu'elle l'est réellement, elle ne subira sa peine qu'après sa délivrance.

Voir encore plus loin les articles 319 et 320, relatifs aux plaies, contusions et blessures.

La simulation et la dissimulation, dit Legrand du Saulle,

jouent un grand rôle en médecine légale. On simule une maladie, pour exciter la compassion, pour se soustraire au service militaire ou se faire réformer, pour s'affranchir de certains devoirs civils, comme ceux de tuteur, de témoin, de juré; on dissimule une maladie, pour contracter une assurance sur la vie, pour entrer dans l'armée ou dans certaines écoles du gouvernement, pour ne pas perdre un emploi avantageux, pour obtenir une pension ou ne pas manquer un mariage, etc., etc.

Nous suivrons dans cette étude l'ordre proposé par Legrand du Saulle, et nous verrons successivement la simulation et la dissimulation: 1o des affections nerveuses, - 2o de la fièvre, 3o des hémorrhagies, -4° des maladies de la peau, 5o des maladies des régions, 6o les mutilations, 7° les maladies communiquées; 8o enfin, nous terminerons par les maladies produites accidentellement ou involontairement, par imprudence ou négligence, et pouvant donner lieu soit à des poursuites correctionnelles, soit à des réclamations d'indemnités.

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1° Affections nerveuses. Celles qui sont le plus fréquemment simulées sont l'épilepsie, la folie, les convulsions, l'hystérie, le somnambulisme, puis la chorée, le tremblement et la paralysie agitante.

a. Epilepsie. La simulation de l'épilepsie est fréquente; sur cent jeunes gens appelés au service militaire, dit Percy, il en est quelquefois vingt qui se prétendent atteints de cette maladie, tandis que, dans les circonstances ordinaires, on trouve tout au plus un véritable épileptique sur mille individus.

Des deux principales formes de l'épilepsie, grand mal et petit mal, c'est la première qui est le plus souvent imitée, comme étant la plus facile à reproduire.

Voici à quels signes on distinguera la véritable attaque d'épilepsie de l'attaque simulée.

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Dans l'épilepsie vraie, le sujet pålit subitemement et tombe Dans très souvent en avant, après avoir poussé un cri. l'épilepsie simulée, l'individu ne pálit pas et tombe en arrière.

Dans l'épilepsie vraie, les convulsions sont d'abord toni

ques; le malade, raide comme une barre de fer, a presque toujours la tête portée en arrière ou d'un côté, les dents fortement serrées, les yeux convulsés en haut et cachés derrière la paupière supérieure; les pupilles immobiles et déjà dilatées; le pouce est convulsé dans la paume de la main et caché sous les autres doigts, et, si l'on cherche à le redresser, on n'y parvient qu'en employant une certaine force; mais, une fois le redressement obtenu, le pouce reste dans sa nouvelle position. - Dans l'épilepsie simulée, le simulateur débute souvent immédiatement par des convulsions cloniques; mais il n'y a ni dilatation, ni insensibilité de la pupille à la lumière; le pouce est bien replié dans la paume de la main, mais, une fois redressé, le simulateur le replie immédiatement au lieu de le laisser étendu, comme dans l'attaque vraie. Dans celle-ci, le spasme tétaniquue des muscles du thorax produit des phénomènes d'asphyxie et de petites ecchymoses punctiformes au front, au cou, à la partie antérieure et supérieure du thorax, ce qu'on n'observe jamais chez le simulateur. Dans l'épilepsie vraie, les convulsions débutent par des secousses fortes, rapides, séparées par des intervalles de calme et dont la fréquence va en augmentant. Presque toujours, elles prédominent d'un côté du corps. Le simulateur au contraire se livre, dès le début, aux convulsions les plus violentes, et s'agite également des deux côtés du corps. Dans l'épilepsie vraie, la salive sort écumante et ensanglantée de la bouche, ordinairement par suite de morsures de la langue. Le simulateur produit, en machant un morceau de savon, une écume rarement ou très peu ensanglantée, parce que les morsures de la langue sont le plus ordinairement insignifiantes. Dans l'épilepsie vraie, il y a perte de connaissance complète et abolition de la sensibilité, qui persiste dans la fausse. Enfin, l'épilepsie vraie est suivie d'une période de stertor, de sommeil avec ronflement presque caractéristique; l'attaque terminée, l'épileptique n'a pas conservé le moindre souvenir de ce qui s'est passé, regarde autour de lui d'un air hébété, et s'éloigne confus des personnes qui l'environnent. Ces signes font défaut chez le simulateur, qui, l'attaque une fois passée, revient presque immédiatement à l'état normal.

Avec un peu d'habitude, le diagnostic est facile à faire; en cas de doute, on peut recourir au sphygmographe. Suivant A. Voisin, le pouls, dans l'attaque d'épilepsie, présente un tracé caractéristique qu'on ne trouve pas chez le simulateur deux ou trois secondes avant l'attaque, les courbes sphygmographiques sont moins hautes, plus arrondies, plus rapprochées. L'attaque survenue, on voit cinq ou six petites ondulations successives et disposées suivant une ligne ascendante, puis une série de courbes très peu élevées. Ces courbes se prononcent davantage, forment une convexité supérieure très accusée, donnant presque l'idée d'une moitié de sphère; puis, au bout de quelques minutes, les lignes s'élèvent presque perpendiculairement à une hauteur trois ou quatre fois plus grande qu'avant l'attaque. Elles présentent au sommet un angle plus ou moins aigu, puis redescendent en offrant les caractères les plus accusés du dicrotisme. La durée de cette forme du pouls varie d'une demi-heure à une heure et demie; on l'a vue se prolonger quelquefois six heures après l'attaque. On l'observe également dans le vertige épileptique (Legrand du Saulle). Ce caractère sphygmographique du pouls peut être regardé comme un symptôme véritablement pathognomonique de l'attaque d'épilepsie.

Ajoutons, à ces caractères pathognomoniques du pouls, un autre signe indiqué par M. Méricamp, et qui consiste en une déformation acquise de l'arcade orbitaire, due aux chutes répétées des épileptiques sur la face. « Si l'on presse, dit-il, sur le rebord orbitaire supérieur, en allant de dedans en dehors, on s'aperçoit que rapidement ce bord se relève et que, au voisinage de l'apophyse orbitaire externe, il est remplacé par une saillie, non plus à bord tranchant, mais à bord mousse, saillie dure, osseuse, de forme sensiblement pyramidale, et qui s'arrête au voisinage de l'apophyse malaire. La pression sur ce point ne provoque aucune douleur. Au niveau de la saillie, les téguments portent la trace de cicatrices ou bien sont contus. Le tissu cellulaire sous-cutané lui-même est modifié; en saisissant la peau entre les doigts, on constate que ce tissu forme une sorte de peloton de consistance assez ferme, comme s'il s'était

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