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sable que de peines de simple police, suivant les dispositions de l'art. 311 du Code pénal.

Des formes légales du témoignage. En déterminant les formes solennelles qui doivent donner à la déposition des témoins foi en justice, le Code d'instruction criminelle a voulu assurer l'observation de ces formes par une sanction pénale. L'art. 77 de ce Code prononce la peine de 50 fr. d'amende contre le greffier négligent. Si la faute est du fait du juge d'instruction, le même article autorise la prise à partie contre ce magistrat.

L'ordre logique appellerait à reparaître ici, envisagés sous un autre point de vue, la dénonciation calomnieuse et les crimes de faux, dont l'effet est de tromper la justice par l'apparence d'accusations ou de titres qui en réalité n'existent pas. Nous croyons inutile de revenir ici sur ces infractions. Nous renvoyons, en ce qui en concerne les éléments constitutifs, à ce que nous en avons dit à leur sujet, et, en ce qui en touche la portée morale, aux considérations que nous venons de développer au sujet du faux témoignage.

Destruction de titres. Nous avons examiné, sous le rapport du dommage matériel qu'il cause aux intérêts des personnes, le délit de destruction de titres appartenant à autrui. La conséquence de ce délit n'est pas seulement de priver un particulier d'un titre qui lui appartient légitimement, elle est encore de le mettre dans l'impossibilité de réclamer, et la justice, de lui accorder les droits qui résultent pour lui du titre détruit. Il y a donc là destruction d'une preuve judiciaire ou légale et partant, atteinte directe à la justice, parce qu'on a fait ainsi disparaître un de ces témoignages écrits auxquels elle accorde une confiance privilégiée. Sous ce rapport nous devons, comme nous venons de le faire tout à l'heure, rattacher à l'ordre des infractions contre la justice le délit qui nous occupe (P. art. 439).

Soustraction d'un titre par celui qui l'a produit. — L'art. 409 du Code pénal a dû prévoir un délit tout particulier, qui ne peut se commettre qu'au cours d'une contestation judiciaire, et que la mauvaise foi peut inspirer aux parties c'est la soustraction d'un titre commise par celui-là même qui l'a produit.

C'est un délit tout particulier, car si la pièce appartient à l'adversaire de celui qui la soustrait, il y a vol.

Comme on ne peut voler sa propre chose, la partie qui aurait soustrait une pièce produite par elle-même n'aurait pu être poursuivie. Il peut cependant arriver que, voyant le tort qu'une pièce peut faire à sa cause, la partie la fasse disparaître du dossier: c'est le délit spécial prévu par l'art. 409 du Code pénal, et puni d'une amende de 25 à 300 fr.

Par une exception que la nature même des choses justifie, la loi charge de prononcer cette peine toute juridiction, sans distinction, devant laquelle aura été commis le délit.

En ne punissant que d'une amende une soustraction qui, au fond, a la même portée de quelque partie qu'elle émane, le Code pénal n'a pas seulement marqué la différence de criminalité intrinsèque résultant de la propriété du titre détourné : il a tenu compte encore de ce que le préjudice doit, en général, être toujours moindre dans le cas qu'il prévoit. L'intérêt des parties les mettra en effet presque

toujours en garde contre la production inopportune d'un titre nuisible à leurs intérêts; leurs conseils seront là pour les éclairer là-dessus, et enfin on doit supposer que, si l'imprudence est assez légère pour tromper la sollicitude de l'intéressé, il n'en pourra être tiré un bien grand avantage par la partie adverse. Au contraire le seul fait d'oser recourir au vol pour désarmer son adversaire d'une pièce qu'on redoute suffit, en démontrant l'importance qu'on attache à cette pièce, à justifier la sévérité plus grande de la loi. En tout état de cause, un pareil fait devait être puni comme un vol; mais on voit comment le délit prévu par l'art. 409 ne pouvait l'être aussi sévèrement.

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Il ne suffisait pas de protéger le magistrat sur son siége contre l'outrage, la violence, le tumulte, la haine, le parjure et le faux. La liberté du jugement assurée, restait à en consacrer l'exécution.

Les lois sur la rébellion, sur l'outrage aux officiers de justice, protégent, à titre général d'agents de l'autorité, les personnes agissant pour l'exécution des jugements. Nous nous bornerons, sans revenir sur ce point, à rappeler la protection désormais assurée à ces personnes.

Mais la justice ne se manifeste pas seulement par l'exécution d'actes accomplis, dans un instant donné, par des agents munis de pouvoirs judiciaires : certaines mesures, dont le caractère est de se prolonger pendant un temps qui peut être indéfini, et dont la durée n'a d'ailleurs pour limite que la décision du juge, placent certaines personnes ou certaines choses dans un état juridique permanent et dont il n'est pas permis de les tirer tant que l'acte qui les y place n'a pas été révoqué. La détention, pour les personnes; la saisie, pour les choses, sont des exemples de ces positions de droit. Nous verrons même un cas où le simple refus de concourir, par une action spontanée, à l'exécution d'un arrêt, devient punissable aux yeux de la loi.

Examinons ces diverses espèces d'infractions.

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De l'évasion.- L'individu arrêté ou détenu en exécution d'un mandat de justice n'est tenu qu'à une seule chose subir sans résistance l'arrestation décrétée contre lui. Sauf cela, en principe, il a le droit de s'échapper s'il en trouve l'occasion le sentiment de la liberté personnelle, l'ardeur de la délivrance, sont un élan de la nature qu'on ne saurait punir sans injustice. C'est donc, d'une part, aux agents de la force publique, aux gardiens des prisons à se mettre en garde contre les tentatives d'évasion; c'est, de l'autre, à la société à construire et à

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entretenir des prisons suffisamment solides. Si donc les gardiens ne veillent pas, si on laisse une libre issue, le prisonnier qui s'évade n'encourt aucune peine. Mais si le prisonnier use de violence contre ses gardiens; s'il brise ses liens out détruit l'un des obstacles matériels qui constituent la prison, alors il est punissable, aux termes de l'art. 245 du Code pénal. Il n'est pas en effet d'homme qu'on ne puisse vaincre, de porte qu'on ne puisse ouvrir, de mur qu'on ne puisse percer, et la garde des détenus serait impossible si la force morale de la loi n'était là pour étayer ces sombres édifices, si formidables aux yeux de l'homme en liberté, si frêles sous l'ongle du prisonnier!

Évasion par bris de prison ou par violence. La loi prononce la peine de l'emprisonnement de six mois à un an, laquelle ne se confond pas avec celle encourue pour le crime ou délit principal. Si le prévenu est acquitté, la peine commence au moment du jugement d'acquittement (P. art. 245).

Le délit doit réunir trois conditions: premièrement, que la personne soit détenue à raison d'un fait punissable par une loi pénale française, ou détenue comme prisonnière de guerre; secondement, que le lieu d'où elle s'évade soit légalement un lieu de détention ou, si elle est entre les mains des agents de la force publique, que ces agents soient investis de pouvoirs réguliers; troisièmement, que l'évasion ait lieu par violence ou bris de prison. L'évasion d'un individu détenu par voie de discipline n'est pas punissable, ni celle d'un étranger arrêté pour être extradé. Au contraire l'art. 245 est applicable à l'individu détenu par suite d'une contrainte en payement d'une amende correctionnelle, puisque cette contrainte est instituée par la loi pour obliger à l'exécution de la peine d'amende ou y suppléer. Il en serait autrement, il me semble, à l'égard de l'individu détenu par voie de contrainte pour le payement des frais de justice criminelle à raison d'une condamnation prononcée contre lui, parce que les frais ne sont pas une peine. En ce qui touche le caractère légal de la prison ou du mandat, les juges apprécieront.

Le troisième élément du délit est que l'évasion ait lieu par bris de prison ou par violence. Ainsi, sauter par une fenêtre ouverte, ouvrir une serrure avec la véritable clef, s'enfuir en courant ou s'évader par supercherie, ne constitue aucun délit; mais toute rupture, tout déplacement violent, fait naître le délit par exemple, dévisser les écrous des serrures, les crocheter, les ouvrir même avec une fausse clef. De même, à l'égard des gardiens ou de la force armée, le plus léger acte de violence suffit.

Le détenu qui tue un chien de garde ou le cheval d'un gendarme afin de rendre la poursuite moins prompte ou moins facile, commet-il un acte de violence dans le sens de la loi? Évidemment oui : la loi ne spécifie pas ici les caractères de la violence nécessaire pour constituer le délit; elle ne dit pas qu'il n'y ait de punissable que la violence envers les personnes.

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Responsabilité des gardiens. Si la loi n'a pas cru pouvoir punir le détenu de son évasion accomplie sans violence ni bris de prison, elle ne pouvait accorder la même indulgence aux agents chargés précisément de la garde du détenu.

Ils seront donc punis si l'évasion a lieu par suite de leur négligence; ils le seront, à plus forte raison, s'ils trahissent la confiance qu'on leur accorde; ils

n'ont pas à invoquer pour excuse, comme le prisonnier lui-même, ce sentiment de liberté où la loi trouve une raison de pardonner, pas plus qu'ils ne sauraient alléguer l'oubli de leurs devoirs.

Mais comme la responsabilité des gardiens peut être plus ou moins grave selon les circonstances de l'évasion, le degré de la faute ou les motifs déterminants de la connivence, la loi proportionne la peine suivant les cas.

L'art. 237 du Code pénal commence par poser ce principe que toute évasion devra entraîner des peines contre les gardiens. Il ne dit pas qu'il faut qu'il y ait faute le seul fait que l'évasion est qualifiée crime ou délit suffit pour écarter toute difficulté à cet égard, tout fait ainsi qualifié supposant nécessairement la conscience ou l'intention. Il faut donc, pour l'application de la peine, qu'il y ait négligence, c'est-à-dire infraction à ses devoirs, ou connivence, de la part du gardien.

L'art. 237 énumère les agents responsables : ce sont « les huissiers, les commandants en chef ou en sous-ordre, soit de la gendarmerie, soit de la force armée servant d'escorte ou garnissant les postes, les concierges, gardiens, geôliers et tous autres préposés à la conduite, au transport ou à la garde des détenus. »>

Cette énumération n'est pas limitative: ainsi il n'est pas douteux que les personnes chargées de la police d'un hospice ne soient responsables de l'évasion d'un détenu momentanément placé dans cet hospice, puisque la destination de l'administration dorme à la salle où est le détenu le caractère légal de prison, et aux surveillants de l'établissement la garde du prisonnier. Evasion par négligence des gardiens. La loi, ainsi que nous venons de le dire, a fait une grande différence entre le gardien coupable ou seulement négligent. Nous parlerons d'abord de ce dernier cas.

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Bien qu'il ait été jugé nécessaire d'aggraver la peine à proportion de ce que l'évadé est réputé plus dangereux, le gardien négligent n'encourt que des peines correctionnelles.

« Si l'évadé était prévenu de délits de police, ou de crimes simplement infamants, ou condamné pour l'un de ces crimes, ou s'il était prisonnier de guerre », la peine est de six jours à deux mois d'emprisonnement (P. art. 238, § 1o).

L'art. 238 a été modifié par la loi du 18 avril 1863, dans le but d'atteindre, comme le faisaient déjà les art. 239 et 240, la négligence ou la connivence en cas d'évasion d'un condamné; l'ancien texte de l'art. 238 n'incriminait en effet que la connivence à l'évasion d'un prévenu il y avait là une omission à réparer. Malheureusement (et cela prouve combien il est difficile de modifier partiellement un texte de loi, même par quelques mots), on a reproduit dans la nouvelle rédaction les mots de « délit de police», qui laissent dans le vague un des éléments de l'incrimination; et en introduisant les mots « condamné pour l'un de ces crimes », on a laissé impunie la connivence à l'évasion d'un condamné pour « délit de police».

En effet les mots de « délit de police », si l'on s'attache à l'idée principale qu'ils expriment, signifient sans aucun doute « délits correctionnels ». Or si, pour laisser effet à l'intention certaine du législateur, on met de côté les mots a de police» comme dénaturant le véritable sens de la loi, pourra-t-on les re

prendre isolément lorsqu'il s'agira de l'évasion d'un détenu prévenu de contravention de police, et prétendre que les mots « de police » rendent l'art. 238 applicable au cas de contravention? Une seule désignation ne pouvant s'appliquer à deux choses aussi essentiellement distinctes qu'un délit et une contravention, il ne nous paraît pas possible d'admettre que la négligence ou la connivence d'un gardien, en cas d'évasion d'un détenu prévenu de contravention de simple police, tombe sous le coup de l'art. 238.

Quant aux «< condamnés » pour délits de police, l'art. 238 n'en parle pas plus qu'avant la loi du 18 avril 1863 : « Si l'évadé était prévenu de délits de police ou de crimes simplement infamants, ou condamné pour l'un de ces crimes » en présence d'un texte aussi formel, il n'y a pas d'interprétation possible, et il faut reconnaître que si le gardien est passible des peines de l'art. 238 quand il laisse évader un détenu prévenu, soit de délit de police, soit de crimes simplement infamants; que s'il l'est encore quand il laisse évader un détenu condamné pour crimes simplement infamants, il n'est pas punissable quand le détenu évadé était «< condamné » pour délit de police.

« Si les détenus évadés, ou l'un d'eux, étaient prévenus ou accusés d'un crime de nature à entraîner une peine afflictive à temps, ou condamnés pour l'un de ces crimes, la peine sera..... un emprisonnement de deux mois à six mois (art. 239, § 1er).

« Si les évadés, ou l'un d'eux, sont prévenus ou accusés de crimes de nature à entraîner la peine de mort ou des peines perpétuelles, ou s'ils sont condamnés à l'une de ces peines », la peine sera d'un an à deux ans d'emprisonnement (art. 240, § 1o).

Cessation de la peine prononcée contre les gardiens négligents, en cas de reprise de l'évadé. — La loi fait cesser la peine prononcée contre les gardiens négligents si l'évadé, quelle que soit la peine qu'il aurait encourue ou subissait, est repris dans les quatre mois de l'évasion.

On a pensé avec raison que la condamnation, par elle-même, était déjà une répression suffisante d'une simple négligence. Cette grâce légale était d'ailleurs le plus puissant aiguillon qu'on pût trouver pour exciter à la recherche de l'évadé ; et dès que le mal est réparé, on n'a plus d'intérêt à être sévère. Remarquons du reste que la loi n'exige pas que l'évadé soit repris par les soins du gardien condamné: il suffit qu'il soit réintégré en prison.

Mais si pendant son évasion l'évadé commet de nouveaux crimes ou délits, en vain serait-il repris: la peine du gardien qui par sa négligence a rendu possibles de nouvelles infractions, devra être intégralement subie. La remise de peine, en effet, est une pure faveur, motivée sur ce que la reprise du prévenu fait disparaître le préjudice porté à la société par l'évasion; les crimes ou délits que l'évadé a commis sont un autre préjudice dont le gardien est encore cause, et celui-là, la reprise du fugitif ne l'efface pas (P., art. 247). Evasion simple, avec connivence des gardiens. Ici l'infraction change complétement de caractère, et le danger que courrait la société, si les malfaiteurs trouvaient des complices d'évasion dans ceux-là mêmes qui doivent les garder,

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