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« 5. Quand li hom vent par l'assentiment de son >> hoir, il convient premièrement qu'il soit su > dou seigneur de qui li hiretaige est tenu, et >> des hommes qui ont à jugier se li venderes y a >> ou non fait about ou assenement ', car se li >> sire et li hommes dient qu'ils n'y sevent about, >> ne assenement, aller poet on avantou vendage.

>> 6. Et convient le vendeur rapporter tout

>> l'hiritaige par 2 raim et par baston, en le main >> dou seigneur, pour adheriter l'achateur.

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>> 7. Et convient que li hoir, si c'est fies, le >> rapporte aussi, et die quel droit il a en cel hi» retage, ou que en icelui li pooit échaer, et qu'il > le raporte en le main dou seigneur pour l'acha>>teur, et le doit nommer.

» 8. Le raport fait en ceste manière, li sire. >> doit conjurer ses hommes, s'ils en ont tant fait >> qu'il n'y ait mais droit; demander leur doit, » qu'il en a à faire, et ils doivent dire par juge>> ment, que li sire en adhirète l'acateur.

» 9. Li sire le doist tantôt adhireter, mais >> demander avant au vendeur s'il se tient por

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Assignation, telle que douaire, hypothèque, etc.

2 Ramus, Rameau. Au Roman de la Rose :

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mes.

Rose sur rain et nois sur branche

N'est si vermeille ni si franche.

Adhériter, ensaisiner, investir, vétir, tous mots synony

» paiee, et lui seur de sa droiture, puis saisir >> l'achateur en disant : JE VOUS EN SAISI, SAUF » TOUS DROITS, en lui mettant le baton en mains, » comme ceste figure le monstre '.

» 10. Ce fait li sire doit conjurer ses hommes, >> si l'acheteur en est bien adhireté et à loy: li >> hommes doivent dire qu'il en est bien adhi>>>reté et à loy.

>> 14. S'il en ensi fait, il est fait bien, et solem>>nement, et si comme droit et coustume le re» querent.

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» 12. Et en ceste manière convient il faire de >> terre censive par les rentiers qui à jugier >> l'ont. >>>

Toute aliénation faite en dehors de ces solennités coutumières, de cette in jure cessio germaine, ne conférait que la saisine de fait, espèce de possession naturelle, le domaine restant jusqu'à un certain point entre le mains du vendeur.

La vente solennelle pouvait seule conférer la saisine de droit, qui dépouillait complètement le vendeur, et quand à cette saisine s'était jointe la possession d'an et jour, l'acquéreur avait la

'La figure qui se trouve au manuscrit (bibliothèque du roi) représente le juge assis sur son siége et tenant en sa main droite un bâton dont l'acheteur, à genoux devant lui, tient de sa main gauche l'autre bout. Derrière l'acheteur et en face du juge sont quatre hommes qui représentent sans doute le vendeur et les hommes on jugeurs.

pleine et entière propriété de sa chose, personne n'avait plus le droit de l'inquiéter '.

<< Si quis teneuram aliquam in pace anno et >>> die tenuerit, deinceps libere et quiete possi» deat, nisi aliquis extra provinciam egressus » fuerit, aut aliquis nundum emancipatus super >> hoc clamorem fecerit. (Charte de Roye de l'an » 1183, art. 3) 2. »

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« Si aucun acquiert ou achète d'autres anciens héritages ou >> ayt eu lesdits héritages en assiette de certaines rentes ou hypothèques qu'il avait acquises dessus et les tienne et possède par >> an et par jour paisiblement, sans adjournement à interruption » ou autre inquiétation; tel acquest est exempt de toutes rentes, > charges ou hypothèques, constituées sur ledit heritage par le >> vendeur depuis trente ans. » Anciennes coutumes d'Anjou citées par Laurière, Diss. sur le tènement de cinq ans, p. 84. - Ce droit était pareillement observé en Hollande. Matthæus, de Nobilit., II, 17. Venditis olim prædiis nisi creditor de hypotheca fidem faceret intra annum et diem jus in re amittebat..... Imo et amittebat dominium vel quasi, si de eo non doceret intra annum et diem, unde et emptionem signo dato per campanam quotannis ter publicabant, ut actionem non instituenti intra tempus, jam dictum silentium etiam deinceps imponeretur. Nec tantum per campanam, ad valvas curiæ etiam scripto.

" Ordonnances des rois de France, t. XI, p. 228. Charte de Pontoise de l'an 1188, art. 11 et 12, même vol. p. 254. Charte de Saint-Quentin de l'an 1195, art. 7, loc. cit. p. 270.

Le Miroir de Saxe parle comme nos coutumes: Svelk gut en man in geweren hevet jar unde dach ane rechte wedersprake, die hevet dar an ene rechte gewere, II, 44. Et la coutume de Soest, la plus ancienne loi municipale de l'Allemagne : Quicumque de manu Schulteti, vel ab eo qui auctoritatem habet domum vel aream, vel mausum, vel mansi partem receperit, et per annum et diem legitimum quiete possederit, si quis in eum agere voluerit

Dans une société naissante, où toute la preuve est testimoniale, preuve de sa nature incertaine et passagère, la marque la plus certaine de la propriété, c'est la possession, c'est là le fait que la loi doit respecter avant tout. Dans une civilisation plus avancée, où la preuve est écrite, le fait important, ce n'est plus la détention du sol, c'est l'ACTE. La possession ne vaut plus qu'autant que par sa durée elle est une preuve d'abandon, de renonciation du droit que l'acte conférait.

Telle fut la marche de la législation romaine, l'usucapion d'abord, ou la prise de possession du sol et la propriété à la suite de cette prise de possession, puis, plus tard, la prescription ou l'exception qu'oppose le détenteur du sol à celui qu'un acte reconnaît pour ancien propriétaire, exception qui ne détruit pas son droit de propriété, mais qui le paralyse.

Telle fut aussi la marche parallèle des législations modernes; la saisine d'an et jour d'abord, saisine dont se prolongent les délais à mesure que la civilisation fait des progrès '; puis après

possessor tactis reliquiis sola manu obtinebit, et sic de cetero sui warandus erit, nec amplius supra prædicta gravari poterit (art. 34). Publié par Eminghaus, dans ses Memorabilia Susat., 1755, in-4°.

'Haynault, ch. 27, art. 1: Là où on pouvait par cy-devant en héritages et rentes de main ferme acquérir possession valable

cette usucapion germaine, reparaît la prescription romaine de dix et vingt ans, qui fait la loi d'aujourd'hui.

CHAPITRE V.

Des changemens introduits par l'édit du préteur dans le droit de propriété 1.

Ce fut surtout par l'édit du préteur que se modifia la législation de la propriété. Le préteur donna des effets analogues à ceux qu'auraient amenés cette solennelle aliénation, à la simple tradition des choses qui ne devaient s'aliéner que dans la forme quiritaire. Mais comme cette tradition ne pouvait dessaisir aux yeux de la loi le

par en jouir an et jour paisiblement, contre personne puissante de four faire lesdits héritages ou rentes, au présent nul ne s'en pourra venter en telle possession, s'ainsi n'est, que en lieu d'ung an, il ayt joui et possédé le terme de trois ans entiers. - Laurière, du Tènement de cinq ans, p. 87 et 88.

'Unterholzner, Sur les diverses espèces de propriété (dans le Rhein. Muséum, première année, p. 129 et ss.)-Zimmern, Sur le caractère de la propriété in bonis, (même rec., troisième année. p. 311 et ss.) Mayer, Sur le double domaine du D. R., (dans le journal de Savigny, t. VIII, p. 1 et ss.)- Schilling, Lehrburch, § 146. Walter, Rechtsgesch., p. 591.

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