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CHAPITRE III.

De Clovis et des Francs.

Dans cette décadence universelle, la Gaule conserva plus de vitalité que les autres provinces, Souvent elle essaya de se donner un chefindépendant et de se séparer de cet empire qui l'épuisait sans la gouverner; c'étaient toujours ces Gaulois inconstans, peu soucieux de la nationalité romaine et impatiens des mauvais princes'.

Plus d'une fois ces tyrans que la Gaule mit à sa tête sauvèrent de la barbarie l'État perdu par la mollesse ou la lâcheté des empereurs *.

Romanos tributariam sollicitudinem sustinere.-Isidore, Chron., ar. 447. Unde et huc usque Romani, qui in regno Gothorum consistunt, adeo amplectuntur, ut melius sit illis cum Gothis pauperes vivere, quam inter Romanos potentes esse, et grave jugum tributi portare.

Paulin., in Eucharistico:

Nam quosdam scimus summa humanitate Gothorum

Hospitibus studuisse suis, prodesse tuendis.

Sidonius Apollin., VIII, Ep. 6 et 9.

' Galli quibus insitum est esse leves, ac degenerantes a civitate romana, et luxuriosos principes ferre non posse. Treb. Pollio, Vie des deux Galliens.

• Gallieno perdente rempublicam, in Gallia primum Posthumius, deinde Lollianus, Victorinus deinceps, postremo Tetricus

Livrée à ses propres forces, la Gaule se relevait de ses blessures avec une insurmontable énergie; réunie à l'Empire, elle retombait vaincue par une faiblesse qui n'était pas la sienne : c'était le supplice de Mézence.

Quand parut Clovis, les Wisigoths et les Bourguignons s'étaient emparés des belles provinces méridionales; du reste de la Gaule, une partie s'était rendue indépendante, l'autre reconnaissait nominalement l'Empire; mais il n'y avait plus de pouvoir central, plus de lien commun, plus de vie.

Ce fut alors que se fit un mouvement remarquable et qu'on n'a point encore étudié d'assez près. Le chef d'une de ces petites bandes de Barbares éparses sur les frontières de l'Empire, Clovis, un roi franc, qui à l'époque où il embrasse la foi chrétienne ne compte autour de lui que six mille fidèles, tout d'un coup est le maître du pays, jusqu'à la Loire, le roi reconnu par toutes les cités, le chef adopté par tout ce qui reste de troupes auxiliaires ou romaines, en un mot le véritable empereur des Gaules; et

assertores romani nominis extiterunt: quos omnes datos divinitus credo: ne cum illa pestis inaudita luxuria impediretur in aliis possidendi romanum solum Germanis daretur facultas ; qui si eo genere tunc evasissent quo Gothi et Persæ, consentientibus in romano solo gentibus, venerabile hoc romani nominis. finitum erat imperium. Treb. Pollio, in Lollian.

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Dion, Hist ent., at IV, ch 16

Any Your, Hot, hb. II, e. 37. — Fortun., lin. II. de Mi

Collot Epis coram rege Gondobaldo, dans les œuvres debe de Toms, p. 1322 b martyre de sont Volumen, Hist. du Languedoc, t. I, preuves Greg. Tur., Hist., II. 36. — Et

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fit la fortune, c'était quelque Barbare ignorant, mais docile à la voix du clergé, mais brave, mais bon capitaine et sous lequel on pût rallier toutes ces forces éparses. C'était un bras qu'il fallait pour sauver l'Église et la Gaule; ce bras, ce fut

Clovis.

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CHAPITRE IV.

Partage des terres.

Les Barbares, maîtres de l'Empire, se contentèrent partout d'une part du sol, laissant le reste aux anciens possesseurs. Les Bourguignons et les Wisigoths prirent les deux tiers des terres à leur convenance; les Hérules s'emparèrent d'un tiers de l'Italie; les Ostrogoths prirent la part des Hérules ; les Lombards, après avoir pris les terres du domaine et tout ce qui fut à leur convenance, exigèrent en outre le tiers des fruits des propriétés qu'on laissait aux Romains".

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2

Mancipiorum tertiam, et duas terrarum partes, mais ils laissèrent aux Romains medietatem sylvarum. V. la Loi des Bourguignons, lit. 54 et 55. Loi des Wisigoths, lib. X, tit. 1, §8, 9, 16.

2

Cassiodore, II, 16. — Procope, Guerre gothique, I, 1.

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3 Paul. Diac., II, 31. His diebus multi nobilium Romanorum ob cupiditatem interfecti sunt, reliqui vero per hostes (hospites)

tandis que la puissance des Wisigoths est inquiète et mal assise, la sienne n'est jamais ébranlée. Toutes les portes s'ouvrent pour lui, les murailles tombent quand il s'approche des villes assiégées; la nuit, une lumière divine guide ses pas ; c'est le favori des évêques et le protégé de Dieu 3.

C'est qu'évidemment Clovis ne fut qu'un instrument dont se servirent les chefs réels du pays, les évêques, maîtres des cités, où s'était retiré tout ce qu'il y avait de vie dans la nation.

Il Y avait dans tous les cœurs ce besoin d'unité, sans laquelle il semble que ne puisse vivre ce beau pays; cette unité que demandait la Gaule catholique, les Wisigoths ne pouvaient la lui donner, car ils étaient ariens. D'ailleurs ils se tenaient à l'écart et comme au-dessus des provinciaux, qu'ils n'admettaient point dans leurs légions. C'étaient des vainqueurs en pays conquis, dont la puissance portait ombrage. Ce qu'il fallait aux cités gauloises, qui ne manquaient ni de courage ni de lumière, c'était un chef de bande dont on

1

Greg. Tur., II, 31.

2

Dubos, Hist. crit., liv. IV, ch. 16. Greg. Tur., Hist., lib. II, c. 37. - Fortun., lib. II, de Miracul. Hilarii.

-

5 Collat. Epis. coram rege Gondobaldo, dans les œuvres de Grég, de Tours, p. 1322. · Greg. Tur., Hist., II. 36. — Et le martyre de saint Volusien, Hist. du Languedoc, t. I, preuves

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