Images de page
PDF
ePub

Mais il y en eut encore un assez grand nombre qui, tout en l'admettant pour la ligne directe, la rejetérent en collatérale 1.

CHAPITRE XIII.

De la succession collatérale ".

3

A défaut de descendans en ligne directe, la succession est dévolue au père 3; à son défaut aux collatéraux les plus proches. Cette proximité n'est point calculée comme dans le droit romain. La législation justinienne appelle à la succession les parens les plus rapprochés en degré du défunt; c'est le lien du sang qui prévaut. Dans la coutume germaine la succession est lignagère; c'est l'esprit de famille qui domine la législation de l'héritage ou, comme on dit plus tard, des propres.

Anc. Cout. de Paris. Senlis, art. 140. Beauvoisis, 155 et 156. Montargis, tit. des successions, art. 4. — Blois, 139.- Lille, 15.- Namur, 78.- Tournay, tit. des successions, art. 3.-Voyez le Traité du droit de représentation, par F. Guyné, Paris, 1779 in-12.

2

Eichorn, R. G., § 19, 65; 373. Sydow, Erbrecht des Sachsen spiegels, § 45, § 69 et ss. Bluntschli, R. G., § 27.

3 Lex Alam., tit. 92. Neugart, no 71.

Les plus proches ne sont pas toujours, comme dans le droit romain, ceux que le sang unit le plus étroitement au défunt; ce sont ceux qui sont les plus rapprochés de la souche commune. Ainsi on appelle d'abord à la succession les descendans du père, à leur défaut les descendans de l'aïeul, à défaut de ceux-ci les descendans du bisaïeul, etc. La ligne la plus proche exclut la plus reculée, et dans la ligne même, le parent le plus proche passe avant le plus éloigné, sans qu'il y ait jamais lieu à représentation.

Dans ce systéme, le neveu ne vient qu'en seconde ligne et l'oncle en première; car le neveu est à deux degrés du père commun, et l'oncle à un seul ; mais le neveu hérite avant l'oncle du défunt, car il est dans la parenté, dans la ligne du père, tandis que l'oncle du défunt n'est que dans la ligne de l'aïeul'.

La préférence des mâles se retrouve en collatérale, du moins en ce qui concerne les alleux. La succession lignagère étant (qu'on le remarque

'Le mot de degré ne donne qu'une notion imparfaite de la position requise pour succéder dans la loi germaine, celui de ligne en donne une plus juste idée. Tirez de la souche commune une perpendiculaire sur les descendans, ceux qui hériteront se trouveront tous sur une mème ligne; tandis que dans le droit romain il y a souvent des personnes au mème degré, dont quelques-unes cependant n'héritent pas, parce qu'elles ne sont point sur la même ligne. 'Bluntschli, p. 117. — Gans, Erbrecht, t. III, p. 10.

--

bien) toujours ramenée à une succession directe, il était naturel que le frère eût le rôle du fils, la sœur celui de la fille. Je vois souvent dans les diplômes les fils du frère préférés à la sœur, ce qui porterait à croire que chez certains peuples les enfans du fils passaient mème avant la fille '.

Quant à une préférence des parens paternels sur les parens maternels, rien ne l'indique assez positivement pour qu'on puisse l'affirmer avec quelque certitude. Néanmoins, comme on voit plus tard cette préférence se développer dans toute l'Europe barbare, il est probable qu'elle était contenue au moins en germe dans ces premières coutumes 2.

CHAPITRE XIV.

Du testament.

Les Germains ne connaissaient point la succession testamentaire. Dieu seul peut faire un héri

[ocr errors]

Neugart, no 397. Post ejus (matris) vero obitum, si tamen ego legitimum heredem non relinquo, tunc frater meus Hagano et legitimi ejus heredes si forte ― procreati fuerint, res supradictas-possideant. Quod si ipsi non redemerint, tunc sorores meæ legitimis viris nuptæ easdem res habeant - et similiter-redimendi facultatem habeant, similiter et legitimi earum filii. Si autem neque ipsæ redemerint, nec earum filii tunc filii avunculi mei Amalung. V. ibid. no 250.— Bluntschli, p. 117.

[ocr errors][merged small]

tier, dit Glanville'. Tacite avait dit, douze siècles avant lui, que les Barbares ne faisaient point de testament: Heredes successoresque sui cuique liberi et nullum testamentum; si liberi non sunt, proximus gradus in successione fratres, patrui, avunculi.

Cette prohibition de tester subsista longtemps en Allemagne ; mais en Gaule, en Espagne, en Italie, les conquérans empruntèrent aux Romains le testament et ses formes diverses. Le clergé, rédacteur ordinaire de formules, dut pousser vivement à naturaliser chez les Germains cette facilité de disposition; car ces Barbares, peu sou→ cieux de se dépouiller de leur vivant au profit de l'Église, étaient fort généreux après leur mort.

Le premier résultat des testamens fut donc l'immense richesse des églises; le second fut une modification sensible dans la rigueur du droit de succession.

Ce fut en invoquant la loi romaine, et par la forme d'un testament, qu'un père appela ses petits-enfans à représenter le fils prédécédé et à venir partager la succession avec les fils survivans. Ce fut également par la faveur de la loi ro

'Glanvilla (Houard, I, p. 464.)

*V.le diplôme du pape Lucius, de l'au 1184, donné par Moser, Osnab. Gesch., dipl. 76. t. II, p. 317.

3

Marculf, Form. III, 10; appendix, 49.-Lex Burgund, tit. 43. Je trouve un testament fait de vive voix au lit de mort, preuve 36, Hist. du Languedoc, t. I.

maine et du testament qu'un père appela sa fille à partager avec ses frères; et cette déclaration de derniére volonté prévalut sur la loi, qui n'avait point fait de l'ordre des successions une question d'intérêt public.

Marculf nous a conservé la formule touchante par laquelle on annulait les duretés de la loi salique.

« Il règne parmi nous une coutume ancienne, >> mais impie, qui refuse aux sœurs de partager » avec les frères la terre paternelle. Mais moi, >> pensant à cette impiété, vous aimant tous éga>>>lement, puisque Dieu vous a tous également » donnés à moi, j'ai voulu qu'après ma mort >> vous jouissiez tous également de mon bien. » Ainsi, et par cet écrit, ma chère fille, je t'insti» tue mon héritière légitime et te donne dans >> toute ma succession part égale avec tes frères, » mes fils. Je veux que tu partages également » avec eux l'alleu et ce que j'ai acquis, et que tu » n'aies en aucune façon une portion moindre » que la leur. Mais si, etc... »

Le rôle qu'ont joué les formules dans la législation du sixième au dixième siècle n'a point encore été étudié d'assez près. Les lois saliques et ripuaires, rédigées sur des souvenirs antérieurs à la conquête, sont bonnes pour y rechercher les

* Marculf, 11, 10, 12 (appendix, form. 47). — Cujas, Obss., VIII, 7. - Eichorn, 1, 148 (appendix, M.).

« PrécédentContinuer »