Images de page
PDF
ePub

Le gouvernement décida encore (novembre), que les calculs pour l'importation et l'exportation auraient lieu d'après les mesures adoptées par l'union.

Les relations de bon voisinage n'étaient cependant pas si générales, si amicales, que l'on n'eût à se plaindre du Danemarck pour les entraves que la perception d'un droit excessif sur le Sund, suscitait au commerce. En effet, ce droit s'était élevé de 1 172 à 5 et 7 pour cent. Et le Cabinet de Berlin avait, jusqu'alors, fait de vains efforts pour obtenir du Danemarck une diminution de ce droit. Il n'avait donc pas renouvelé, avec cette puissance, le traité de commerce conclu l'année précédente. Ailleurs, et sur les frontières de la Pologne russe, il fallait en quelque sorte, se retirer devant les mesures prohibitives adop tées par le gouvernement russe à l'égard de la Pologne. Un tel système réduisait le commerce à prendre la direction de l'Est par Riga et Revel; et, lorsque viendrait le moment où le canal de la Vistule et de la Dwina serait terminé, une conséquence inévitable de ce blocus des rives de la Pologne serait de priver de toutes communications extérieures, Thorn, Dantzick et les villes du littoral; la Vistule et le Niémen seraient déserts, et les ports de la Prusse réduits à l'inaction.

Toutefois, ces embarras, nécessairement partiels et momentanés, n'étaient pas de nature à troubler les rapports avec les autres puissances, et on ne paraissait même plus éloigné de reconnaître le gouvernement constitutionnel de la reine d'Espagne.

HANOVRE.

Rien n'était changé dans l'état du royaume, tel que l'avaient laissé les deux années précédentes: la résistance

légale se prolongeait, se traduisant, tantôt en adresses et discussions, tantôt en une inaction systématique. Si, par exemple, le roi invitait les électeurs à remplir leur mission et à se conformer pour cela au mode tracé par la constitution de 1819, l'élection avait lieu peut-être; mais le nombre des votants était si réduit, que souvent un suffrage unique proclamait un candidat unique.

Le gouvernement rencontrait encore cette tiédeur calculée, lorsqu'il réclamait un impôt non légalement consenti. Les dates étaient soigneusement supputées; on était à tel moment de l'année, et le budget n'avait été voté que jusqu'à cette époque par la Chambre prorogée en 1838 (V. l'Annuaire); donc on ne devait plus rien; donc on refusait de payer. Ainsi firent les villes d'Osnabrück (janvier), de Hagen (mars), et d'autres encore. Le nombre des contribuables qui, dans la première de ces deux villes, se retranchèrent ainsi derrière le rempart de la légalité, telle qu'ils l'entendaient, s'élevait, au 21 janvier, à 455! Mais on allait plus loin on s'adressait à des jurisconsuites étrangers et renommés, et souvent les magistrats eux-mêmes, au risque de s'attirer des admonestations sévères, comme il arriva à ceux de la municipalité d'Osnabrück, adressaient au roi une délibération dans le sens de la constitution abrogée. Le refus de l'impôt était tantôt formel et direct, tantôt implicite et dissimulé. C'est ainsi que les avocats de la ville de Hanovre, n'envisageant qu'à son point de vue fiscal la disposition de la loi fondamentale qui soumet au timbre les actes judiciaires, affectaient d'y contrevenir; en d'autres termes, ils refusaient l'impôt.

Cependant, les Hanovriens n'étaient pas seulement forts de leur union à l'intérieur; ils avaient encore la sympathie de ceux des gouvernements de l'Allemagne que régissent

[ocr errors]

des institutions représentatives; ils durent en effet, mouvoir des atteintes portées, chez une nation voisine, à un acte regardé comme fondamental, et lorsque, le 26 avril, le débat fut porté devant la diète de Francfort, ce fut le représentant de la Bavière qui proposa de déclarer que le roi de Hanovre avait violé la clause finale du traité de Vienne, qui garantit aux divers Etats le maintien de leurs constitutions. Les choses étaient donc en cet état villes et gouvernements, interprétant à leur manière le passé, demeuraient également inflexibles. Une nouvelle convocation des Etats devenait nécessaire; elle eut lieu le 15 février; mais l'absence d'un grand nombre de députés (il y en avait 25 seulement, et il en fallait 57 pour délibérer), ne donna à cette réunion qu'une existence absolument nominale.

Le roi adressa à cette ombre de représentation un rescrit où se trouvaient développés les arguments qu'il avait toujours fait valoir contre la constitution de 1833. On y faisait part ensuite, aux Etats, des opérations qu'embrasseraient les deux caisses qui devaient fonctionner dans le système de finances de S. M. (voir l'Annuaire de 1857). Le roi se plaisait, du reste, à annoncer une diminution dans le chiffre de l'impôt. En ce point, le gouvernement persistait dans la voie où il était entré dès le commencement du règne.

Cependant, un autre changement politique avait eu lieu (janvier): c'était le remplacement du conseil-privé par un conseil-d'état, dont les attributions rappelaient celles du même corps politique en France, surtout à l'époque de sa création. Les princes du sang étaient, de droit, membres du conseil. Le roi se réservait de le présider quand il le jugerait convenable. Le corps entier était divisé en plusieurs sections qui se réuniraient sous la présidence d'un membre désigné par le souverain, quand celui-ci ne

dirigerait pas lui-même la délibération. Il était expressément interdit au conseil de s'occuper de l'administration supérieure du royaume, li ne pouvait également pas prendre l'initiative d'une délibération.

Mais quelles étaient les opérations de la Chambre de nouveau convoquée ? Allait-elle résoudre enfin les difficultés? On ne pouvait l'espérer; composée comme elle l'était, sa dissolution devait être, en quelque sorte, spontanée.

Elle fut, en effet, prorogée au 2 mars, et les mêmes phases de résistance se reproduisirent. Une proclamation royale annonça la convocation des Etats pour le 28 mai. « La session, disait le roi, serait de courte durée; il s'agissait seulement de discuter le budget, et une diminution des impôts comme celle qui avait eu lieu déjà. Le rescrit semblait, au surplus, ouvrir la voie à un rapprochement qui, cependant, n'eut pas lieu.

La Chambre du 28 mai ne pouvait pas non plus mériter ce nom. Un grand nombre de députés étaient absents, et les membres présents ne devaient leur mandat qu'à une minorité d'électeurs.

La seconde Chambre avait conscience de sa position comme donnaient lieu de l'entendre les termes mêmes de l'Adresse présentée au roi (11 juin), où il était dit qu'il serait déclaré que les Etats, tout en se bornant à accorder la prolongation du budget, n'ont pas entendu renoncer à la vérification des pouvoirs ou à la nomination des commissaires pour la dette publique ou pour d'autres affaires importantes. Ces affaires importantes étaient toujours les questions relatives à la loi fondamentale. Cela résulte d'ailleurs de la réponse du roi :

<«< Nos Etats, disait S. M., demandent la reprise des né

gociations, pour arriver à un arrangement constitutionnel des différents concernant la constitution du pays... Nous ferons, ultérieurement à notre fidèle assemblée des Etats des propositions qui devront servir de base aux négociations ayant pour but un arrangement consitutionnel. Nous confierons la rédaction de ces propositions à une commission spéciale qui devra peser, avec une égale impartialité, nos droits et ceux de nos fidèles Etats. >>

Le roi accédait donc, il le disait, à des prières ; S. M. inférait de là que la Chambre consentait à prendre pour point de départ la constitution de 1819, alors que'lle n'avait dû s'occuper que du budget.

Ici, commence un autre incident de ce drame politique, et de nature également à fixer l'attention: Un troisième pouvoir se trouvait placé en quelque sorte entre le roi et les Etats, pouvoir mal défini, mais réel, mais puissant : c'était la cité, la municipalité, d'ailleurs si influente en Allemagne, comme partout où la féodalité a implanté ses racines séculaires, en ce sens que presque toujours la municipalité a fait équilibré aux institutions féodales, jusqu'à ce qu'enfin elle les pût absorber. Dans les circonstances actuelles, les villes couraient le danger de perdre tout le fruit de leur longue résistance à l'exécution d'actes qu'elles croyaient entachés d'inconstitutionnalité, si le gou vernement parvenait à les faire sanctionner par une Chambre quelconque, élue et constituée par des moyens quelconques. La municipalité de la ville de Hanovre adressa donc à la haute diète use protestation contre les actes de la seconde Chambre de la prétendue assemblée générale des Etats. Les magistrats, auteurs de cette démarche, déclaraient qu'ils ne reconnaissaient force obligatoire qu'à la constitution de 1855, et invitaient la diète à prendre sous sa haute protection les droits sacrés du pays, que la

« PrécédentContinuer »