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qu'il ait: 1 satisfait à la condamnation pénale; 2° satisfait aux condamnations civiles et au payement des frais; 3° qu'il s'en soit montré digne par sa conduite ultérieure. La loi règle aussi les formes à suivre.-Les autorités qu'elle appelle à concourir à cette mesure sont l'autorité municipale, par des attestations qui lui sont demandées; l'autorité judiciaire, par un avis de la cour impériale, qui, s'il est négatif, empêche la demande d'aller plus loin; enfin l'empereur, à qui est confié, en définitive, le pouvoir d'accorder ou de refuser la réhabilitation. Quant aux effets, la loi n'y met aucune restriction : le réhabilité rentre dans la plénitude des droits que lui avait retirés la condamnation pénale (art. 634).

1686. Il ne faut pas confondre la réhabilitation de droit pénal avec la réhabilitation commerciale: tel est admis à la première qui peut se trouver exclu de la seconde, aux termes de l'article 612 du Code de commerce. La loi nouvelle a pris soin de s'en expliquer (art. 634). Les incapacités produites par la condamnation pénale cessent alors; mais celles qui sont propres à la législation ou aux coutumes commerciales continuent de subsister. La distinction est bien marquée.

1687. C'est une question qui a été et qui peut encore être agitée, que celle de savoir si par la voie simplement de la gràce, sans observer les conditions ou suivre les formes prescrites par le Code d'instruction criminelle pour la réhabilitation, le chef de l'Etat peut faire remise des déchéances ou pertes de droits résultant de la condamnation. En d'autres termes, c'est demander s'il y a deux sortes de réhabilitation, l'une qui serait soumise aux conditions et aux formes prescrites par le Code d'instruction criminelle, l'autre qui en serait exempte. Dans tous les cas, c'est bien le chef de l'Etat qui accorde la réhabilitation; mais le Code d'instruction criminelle, y met des conditions et des formes, réglementées de nouveau en 1853: il s'agit de décider si ces formes et ces conditions peuvent ou non être laissées de côté. Les idées qui paraissent prévaloir sur ce point, à la chancellerie, comme règle pratique, seraient qu'une telle remise pourrait avoir lieu par simple voie de grace en deux cas : 1 avant l'exécution des condamnations corporelles auxquelles sont attachées, comme accessoires, les déchéances ou pertes de droits, si une telle remise était comprise par une clause expresse dans la

l'avis. Une copie authentique en est adressée à la cour ou au tribunal qui a prononcé la condamnation. Ces lettres seront transcrites en marge de la minute de l'arrêt ou du jugement de condamnation.

» Art. 634. La réhabilitation fait cesser pour l'avenir, dans la personne du condamné, toutes les incapacités qui résultaient de la condamnation. - Les interdictions prononcées par l'article 612 du Code de commerce sont maintenues nonobstant la réhabilitation obtenue en vertu des dispositions qui précèdent. — Aucun individu condamné pour crime qui aurait commis un second crime et subi une nouvelle condamnation à une peine afflictive ou infamante, ne sera admis à la réhabilitation. Le condamné qui, après avoir obtenu sa réhabilita tion, aura encouru une nouvelle condamnation, ne sera plus admis au bénéfice des dispositions qui précèdent, >

grâce; 2o au cas de déchéances ou privations de droits prononcées comme peines principales, ainsi qu'il en arrive quelquefois de la dégradation civique et de la surveillance de la haute police (ci-dess., nos 1606 et 1608). Ni l'une ni l'autre de ces décisions, qui laissent sans doute plus libre l'action gracieuse du chef de l'Etat, ne nous paraissent faciles à faire accorder soit avec le texte, soit avec l'esprit de la loi de 1853 sur la réhabilitation (1). La seconde, notamment, nous semble bien inconciliable avec l'article 620 du Code d'instruction criminelle, tel qu'il a été rédigé par cette loi (voir le texte de cet article, ci-dessus, p. 790, en note).

Cependant, il existe, sans conteste, en vertu de textes de lois, certaines déchéances ou incapacités que le gouvernement a, dans certains cas, le pouvoir de faire cesser, sans qu'il soit nécessaire de recourir aux formes de la réhabilitation. Nous l'avons vu en traitant de l'incapacité de donner ou de recevoir par donation entre-vifs ou par testament, qui accompagne les peines afflictives perpétuelles, et aussi en traitant de l'état des condamnés dans les colonies de déportation ou de travaux forcés (ci-dess., no 1553, 1554, 1557, 1600, 1601 et 1605.-V. également p. 731, en note). 1688. Pour les trois événements que nous venons de passer en revue, la mort du condamné, la prescription, la remise ou abandon du droit, il y a indépendance entière, quant à l'existence, entre le droit d'exécution des condamnations pénales et celui d'exécution des condamnations civiles. Celui-ci, dès qu'il est né par l'effet de la sentence, se trouve toujours séparé de l'autre, et ne se régit plus que par les règles du droit civil privé (C. i. c., art. 642).

(1) La première de ces décisions s'appuie sur un avis du conseil d'Etat, dont nous donnons ci-dessous le texte, intervenu en 1823, à l'occasion d'une question spéciale relative aux pensions des militaires. L'exactitude en était incontestable à l'égard de la mort civile attachée à la peine de mort et aux peines afflictives perpétuelles, puisque cette mort civile n'était encourue que par suite et à compter du jour de l'exécution de la peine principale. Mais aujourd'hui la mort civile est abolie, et toutes nos déchéances ou privations de droit ont lieu ipso jure, par l'effet même de la condamnation devenue irrévocable. (ci-dess., n° 1625).

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Avis du conseil d'Etat, du 8 janvier 1823. Les comités réunis de législation, des finances et de la guerre, du conseil d'Etat, sur la question de savoir si les militaires retraités qui, condamnés à des peines afflictives ou infamantes, ont subi leur jugement ou ont été graciés, doivent justifier de leur réhabilitation légale pour être remis en jouissance de leur pension, sont d'avis: 1o que les pensions perdues par l'effet des condamnations à des peines afflictives ou infamantes ne peuvent être rétablies qu'après la réhabilitation du condamné ; 2o que pendant la durée de ces peines il ne peut être accordé sur ces pensions aucun secours à la veuve ou aux enfants des condamnés; 30 que les lettres de grâce pleine et entière accordées avant l'exécution du jugement préviennent les incapacités légales et rendent inutile la réhabilitation; - 40 la grâce accordée après l'exécution du jugement ne dispense pas le gracié de se pourvoir en réhabilitation, conformément aux dispositions du Code d'instruction criminelle; 5o que les lettres de grâce accordées après l'exécution du jugement ne peuvent contenir aucune clause qui dispense des formalités prescrites par le Code d'instruction criminelle pour la réhabilitation. »

que

JURIDICTIONS PÉNALES.

TITRE PREMIER.

ORGANISATION.

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CHAPITRE PREMIER.

NOTIONS GÉNÉRALES, SUIVANT LA SCIENCE PURe.

§ 1er. Idées d'introduction.

1689. Pour produire un effet quelconque, il faut une force, une puissance; et pour mettre cette force, cette puissance en jeu, un procédé. L'effet à produire, en droit pénal, après le précepte ou la détermination de la pénalité, c'est la mise en application de cette pénalité; la force destinée à produire cet effet, ce sont les juridictions pénales, avec l'ensemble des autorités diverses ou des personnes qui concourent à l'effet voulu; et le procédé destiné à mettre cette force en jeu, c'est la procédure pénale (ci-dess., no 19 et 23).

1690. Voici diverses préventions contre lesquelles il est bon de se prémunir :

Ne pas confondre, comme on le fait quelquefois, même dans les lois et particulièrement dans nos Codes, ce qui concerne les juridictions avec ce qui concerne la procédure. Sans doute il y a un lien intime du procédé à la puissance: suivant que la force à mettre en jeu sera de telle nature ou de telle autre, le vent, l'eau courante, la vapeur, des forces animées, le procédé variera. Mais pour être liées l'une à l'autre, les deux questions ne sont pas identiques Quelle sera la force? quel sera le procédé?

Ne pas mettre, dans la préoccupation des esprits et dans l'étude, la question des juridictions et de la procédure pénales audessous de celle de la pénalité. La juridiction n'est autre chose qu'une partie de la puissance sociale organisée, liée par conséquent au droit politique, tournant dans l'orbite des constitutions, tandis que la procédure tourne à son tour dans celle des juridictions. L'honnête homme, le bon citoyen, peuvent se mettre à l'abri d'une mauvaise pénalité comment se mettront-ils à l'abri d'une mauvaise juridiction ou d'une mauvaise procédure pénale? — Puis, au total, de bonnes juridictions avec une bonne procédure pénale peuvent servir à corriger, en beaucoup de cas, les vices d'une

:

mauvaise pénalité : c'est ce qui s'est vu constamment en Angleterre; mais que sera la meilleure loi pénale avec une mauvaise juridiction et une mauvaise procédure?

Enfin, ne pas s'imaginer que le règlement des juridictions et de la procédure soit chose arbitraire, de droit purement conventionnel, et que l'empire des principes philosophiques, ou, en d'autres termes, des vérités de la science, n'ait rien à у voir.

§ 2. Fonctions auxquelles il est nécessaire de pourvoir; d'où les diverses autorités à créer.

1691. Pour organiser dans chacune de ses actions la force qu'on veut employer, il faut se fixer préalablement sur chacun des effets particuliers qu'il est nécessaire de produire en détail, afin que l'ensemble en vienne aboutir finalement à l'effet général proposé. -Or, dans l'organisation des juridictions pénales et de tout le système des autorités ou des personnes qui doivent concourir à l'effet général voulu, c'est-à-dire à l'application du droit pénal, la fonction correspond à chaque effet particulier à produire, l'autorité ou la personne chargée de la fonction, à chaque rouage de la force à mettre en jeu. Pour savoir quelles sont les autorités à créer, il faut donc savoir préalablement quelles sont les fonctions à faire remplir car c'est pour la fonction qu'est faite l'autorité, et non pour l'autorité la fonction.

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1692. Le premier effet, s'il était possible de le produire, serait de prévenir les délits. Les institutions sociales doivent être dirigées vers ce but; non pas en mettant des gènes oppressives à l'activité de l'homme, car là est le danger de tout système préventif; mais en faisant disparaître ou en atténuant les causes des délits (ci-dess., no 190).-En outre, dans tout ce qui tient à l'exécution, à l'administration, une certaine partie de la puissance publique est chargée, par des mesures prises à propos, par une sollicitude et une surveillance constantes, d'un certain rôle préventif, rôle d'exécution, qui constitue ce qu'on nomme la police administrative (ci-dess., no 612 et suiv.). Ceci n'appartient pas à la mission des juridictions ou autorités de répression.

1693. Cette dernière mission ne commence qu'après le délit commis. Pour arriver en définitive, à l'encontre de tout délit, à l'effet général, c'est-à-dire à l'application du droit pénal, l'analyse et l'observation conduisent à distinguer les quatre effets particuliers qui suivent, comme nécessaires à produire; d'où quatre fonctions essentielles auxquelles, d'une manière ou d'autre, il est nécessaire de pourvoir :

1 Rechercher les délits et les auteurs des délits, recueillir, rassembler les preuves, et livrer le tout à l'autorité chargée de juger. Ce sont ici des opérations préliminaires, qui ont pour but principal de préparer tous les éléments, tous les moyens propres

à instruire le juge, et qu'on nomme à cause de cela opérations d'instruction;

2° Là-dessus, débattre, peser, discuter tout l'ensemble des preuves, et finalement décider : ou opérations de jugement;

3° Mettre à effet la sentence: ou opérations d'exécution;

4o Et, si l'on veut mieux assurer l'accomplissement de ces diverses opérations, pourvoir à une quatrième, qui consiste à veiller à ce que celles-ci s'accomplissent, à provoquer, à mettre en mouvement les autorités qui en sont chargées, à les aiguillonner, à les requérir ou fonction d'action et de réquisition.

De là résulte la nécessité d'une création ou organisation quelconque de ces quatre sortes d'autorités :-Autorités d'instruction, dont les fonctions constituent ce que nous appelons chez nous la police judiciaire ou police de répression, par opposition à la police administrative ou police de prévention; - Autorités de jugement ou juridictions proprement dites;-Autorités d'exécution; - Et enfin autorités d'action et de réquisition, organisées principalement chez nous dans ce que nous appelons le ministère public.

1694. Si l'on fait cette réflexion, que pour les opérations qui consistent principalement à agir, dans lesquelles la promptitude, l'opportunité, l'ensemble sont des conditions nécessaires, la logique veut qu'on recoure à des autorités ou à des personnes agissant individuellement ou sous le commandement de chefs hiérarchiques; car on commande, on donne des injonctions à l'activité, tandis que dans les opérations qui consistent à délibérer, à discuter le pour et le contre, et enfin à décider, la logique veut, pour peu que la question soit grave, le concours de plusieurs intelligences, et ne comporte aucun commandement, aucune pression par voie hiérarchique en cette décision, car on ne commande pas à l'opinion, à la conscience on en conclura que pour les trois autorités, d'instruction, d'exécution, d'action et de réquisition, il faut une organisation telle que les personnes y fonctionnent individuellement, tandis que pour les autorités de jugement ou juridictions, il faut des corps plus ou moins nombreux, suivant l'importance des affaires, délibérant et décidant collectivement. L'unité de juge n'est bonne, comme plus simple et plus expéditive, que dans les affaires d'importance tout à fait inférieure.

§ 3. Rôles divers dans les fonctions de jugement.

1695. Tout n'est pas de pure activité dans le cours des opérations de l'instruction; il peut y surgir des incidents formant question contentieuse, qui réclament l'intervention du rôle de délibérer et de juger. —Mais surtout, quand les opérations de l'instruction sont terminées, ce peut être une garantie de plus pour la société et pour la personne poursuivie, avant de passer outre et de déférer cette personne au juge investi du droit de punir, que de faire décider par une juridiction organisée à cet effet s'il y a lieu ou non

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