Aux disciples, en cercle assemblés pour l'entendre, Montrait du doigt ce monde, où notre âme doit tendre Et que voit la Raison. L'un d'eux, tout enivré des paroles du maître, Pour finir un tourment que chaque instant prolonge Par un désir moins pur, par un moins beau délire, Au livre d'ici bas, Charles, sans espérer là-haut un meilleur monde, Sous mille traits charmants il s'était peint la vie Mais il comprend enfin, il raille sa chimère, Sa main, du bien, du mal, n'a point pesé la somme : L'œil bon de l'Éternel, veillant d'en haut sur l'homme Comme sur un enfant, N'est pour lui qu'un œil morne, une éteinte prunelle Où jamais n'a brillé de l'âme paternelle Un rayon échauffant. Il n'a point de son être entendu le mystère; Implacable remord, Sphynx caché qui punit une erreur comme un crime, Pour un sens mal compris le condamne à l'abîme Et le pousse à la mort. Il y va; mais, du roc près d'atteindre la crête, Il se tourne pour voir, monte encor, puis s'arrête, En ces lieux tant maudits un charme se révèle ; Derrière un voyageur, s'arrondit et s'incline Après qu'on l'a franchi, l'âpre sentier s'efface, L'aspect du mal souffert repose l'âme usée; Le passé s'adoucit aux yeux de la souffrance, Un ciel plus pur déjà s'est entr'ouvert pour Charle; L'autan fougueux n'est plus qu'un zéphyr qui caresse; Un Génie a passé sur ce désert sauvage; L'Océan au soleil se dore d'étincelles, Et d'écume il blanchit sous les mille nacelles Mais Charles toujours monte et s'avance à l'abîme'; : La mer, les cieux, les bois, Il hésite un moment; puis, s'asseyant au faîte, Ce n'est pas un regret, un espoir qui l'enchaîne ; Qui le retarde encor. Le cygne va partir, son aile se déploie; La brise, recueillant les trésors de la plage, Et devant lui, pareils à des ombres chéries, Plus d'un, près du rocher, tout en passant, l'appelle, Et, d'en bas lui lançant une gaîté cruelle, Le convie au bonheur.... Jouissez du bonheur, vous que le Ciel protége, Il est pour les humains d'effroyables pensées; La vie en est gâtée, et chaque heure trop lente On n'a plus qu'à mourir. Charles sourit d'en haut à la folie humaine; Telle une sœur mourante, à l'agonie en proie, Cependant, à la fin, quelque vapeur légère, Le soleil un instant voilera son visage, Ce sera l'heure alors.... Et quand, d'un flot docile Les joyeux promeneurs regagneront la terre, LE SONGE. Quand autrefois dans cette arène, Des Muses belliqueux élève, Partout vainqueur, amant, poëte, Et mes ennuis jusqu'au tombeau ? La destinée à ma jeunesse Il a fui, mon rêve éphémère.... Tout s'éveille, et, lui, dort encore; Déjà pourtant il n'est plus nuit; L'aube blanchit devant l'Aurore; Sous l'œil du Dieu qui la dévore, L'Aurore rougit et s'enfuit. Il dort son sommeil d'innocence; Un voile couvre sa prunelle O coule, coule, onde nouvelle, Que j'aime ce front sans nuage, |