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Clarendon. Des cas semblables pourraient encore se reproduire, et M. le comte de Buol n'admet pas qu'une intervention effectuée par suite d'un accord établi entre les cinq grandes Puissances puisse devenir l'objet des réclamations d'un Etat de second ordre.

M. le comte de Buol applaudit à la proposition, telle que lord Clarendon l'a présentée, dans un but d'humanité; mais il ne pourrait y adhérer si on voulait lui donner une trop grande étendue, ou en déduire des conséquences favorables aux gouvernements de fait et à des doctrines qu'il ne saurait admettre.

Il désire, au reste, que le congrès, au moment même de terminer ses travaux, ne se voie pas obligé de traiter des questions irritantes et de nature à troubler la parfaite harmonie qui n'a cessé de régner parmi les plénipotentiaires.

M. le comte de Cavour déclare qu'il est pleinement satisfait des explications qu'il a provoquées, et qu'il donne son adhésion à la proposition soumise au congrès.

Après quoi MM. les plénipotentiaires n'hésitent pas à exprimer, au nom de leurs gouvernements, le vœu que les Etats entre lesquels s'élèverait un dissentiment sérieux, avant d'en appeler aux armes, eussent recours, en tant que les circonstances l'admettraient, aux bons offices d'une Puissance amie.

MM. les plénipotentiaires espèrent que les gouvernements non représentés au congrès s'associeront à la pensée qui a inspiré le vœu consigné au présent protocole.

(Suivent les signatures.)

PROTOCOLE N° XXIV.

Séance du 16 avril 1856.

Présents: les plénipotentiaires de l'Autriche, de la France, de la Grande-Bretagne, de la Prusse, de la Russie, de la Sardaigne, de la Turquie.

Le protocole de la précédente séance est lu et approuvé.

M. le comte Orloff annonce qu'il est en mesure, en vertu des instructions de sa cour, d'adhérer définitivement au vœu consigné à l'avant-dernier paragraphe du protocole n° XXIII.

Il est donné lecture du projet de déclaration annexé au protocole de la dernière réunion; après quoi, et ainsi qu'ils l'avaient décidé, MM. les plénipotentiaires procèdent à la signature de cet

acte.

Sur la proposition de M. le comte Walewski, et reconnaissant qu'il est de l'intérêt commun de maintenir l'indivisibilité des quatre principes mentionnés à la déclaration signée en ce jour, MM. les plénipotentiaires conviennent que les Puissances qui l'ont signée, ou celles qui y auront accédé, ne pourront entrer à l'avenir, sur l'application du droit maritime en temps de guerre, en aucun arrangement qui ne repose à la fois sur les quatre principes objet de ladite déclaration.

Sur une observation faite par MM. les plénipotentiaires de la Russie, le congrès reconnait que la présente résolution, ne pouvant avoir d'effet rétroactif, ne saurait invalider les conventions antérieures.

M. le comte Orloff propose à MM. les plénipotentiaires d'offrir, avant de se séparer, à M. le comte Walewski, tous les remercîments du congrès pour la manière dont il a conduit ses travaux. « M. le comte Walewski formait, dit-il, à l'ouverture de notre » première réunion, le vœu de voir nos délibérations aboutir à >> une heureuse issue; ce vœu se trouve réalisé, et assurément l'esprit de conciliation avec lequel notre président a dirigé nos » discussions a exercé une influence que nous ne saurions trop » reconnaître, et je suis convaincu de répondre aux sentiments » de tous les plénipotentiaires en priant M. le comte Walewski d'agréer l'expression de la gratitude du congrès. »

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M. le comte de Clarendon appuie cette proposition, qui est accueillie avec un empressement unanime par tous les plénipotentiaires, lesquels décident d'en faire une mention spéciale au protocole.

M. le comte Walewski répond qu'il est extrêmement sensible au témoignage bienveillant dont il vient d'être l'objet; et, de son

côté, il s'empresse d'exprimer à MM. les plenipotentiaires sa reconnaissance pour l'indulgence dont il n'a cessé de recueillir les preuves pendant la durée des conférences. Il se félicite avec eux d'avoir si heureusement et si complétement atteint le but proposé à leurs efforts.

Le présent protocole est lu et approuvé.

(Suivent les signatures.)

ANNEXE D.

Protocole des dispositions concertées à Constantinople, le 15 février 1856, à l'égard des Principautés Danubiennes.

ART. 1.

Les traités conclus entre la Sublime Porte et la Russie, relativement à la Moldavie et à la Valachie, ayant cessé d'être en vigueur par suite de la guerre, leurs règlements organiques qui en découlaient ne seront plus la loi fondamentale de ces deux pays.

Dans cet état de choses, la Porte confirme de nouveau les priviléges et immunités dont lesdites Principautés ont joui sous sa suzeraineté, depuis les capitulations qui leur ont été accordées par les sultans Bajazet Ier et Mahmoud II.

Elle veut leur en assurer la jouissance d'une manière équitable et solide, en les mettant complétement en harmonie avec le progrès du temps, les besoins et les vœux de toutes les classes de la population, et les rapports établis dans un intérêt commun avec l'Empire Ottoman.

ART. 2.

La Valachie et la Moldavie, dont les territoires respectifs font partie intégrante de l'Empire Ottoman, auront chacune, comme par le passé, une administration séparée et indépendante, sous la suzeraineté de Sa Majesté Impériale le Sultan. Les Hospodars seront nommés à vie parmi les familles les plus distinguées du pays. Leur pouvoir sera entouré d'institutions propres à maintenir le bon ordre dans les Principautés et à fixer sur des bases convenables le bien-être de toutes les classes.

ART. 3.

Les Principautés seront indépendantes de tout protectorat

étranger, et, dans leurs relations avec les Puissances étrangères, elles ne seront représentées que par la Sublime Porte.

ART. 4.

Les traités conclus par la Sublime Porte continueront d'être exécutoires dans les Principautés.

ART. 5.

Les Principautés entretiendront par des kapoukeayas ou agents nommés par les Hospodars, révocables à leur volonté, et agréés par la Sublime Porte, des rapports directs avec le cabinet impérial,

ART. 6.

La Valachie et la Moldavie payeront chacune annuellement au gouvernement impérial un tribut déterminé qui sera fixé à une somme équitable et modérée. Par contre, elles ne seront soumises à aucune autre charge de quelque espèce que ce soit, ni astreintes à des livraisons en nature par voie de réquisition ou d'autre sorte.

ART. 7.

Les Principautés auront le droit d'entretenir les forces qui leur paraîtront nécessaires pour assurer la police et le maintien de l'ordre public. Elles fixeront, d'accord avec la Sublime Porte, la quantité de leurs troupes militaires proprement dites, et le chiffre de l'armée, une fois arrêté, ne pourra être augmenté sans une nouvelle entente. Aucune Puissance d'ailleurs n'aura qualité pour s'opposer à l'exécution des mesures défensives que la Sublime Porte et les Principautés croiront devoir combiner pour la sécurité commune de l'Empire.

ART. 8.

Les bâtiments moldaves et valaques continueront à naviguer librement sous le pavillon privilégié qui leur a été accordé par la Sublime Porte.

ART. 9.

Dans le cas où l'ordre viendrait à être troublé, il n'appartiendra qu'à la Sublime Porte de le rétablir; mais elle ne recourrait à une intervention armée qu'après s'en être entendue avec les Hautes Parties contractantes quant au mode et à la durée de cette intervention.

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