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Ainsi parlait Armar..... Déjà la nuit obscure.
Rend le repos à toute la nature;

Et cependant l'ami des malheureux,
Le Sommeil, échappe à ses yeux;

Il veille, tourmenté des pensers les plus sombres,
Quand le soleil a dissipé les ombres,
Armar, les yeux fixés sur le champ de la mort,
Fait un pénible effort,

Et s'arrachant de la fatale plaine,
Il regagne à pas lents sa chaumière lointaine.

A. B...

......

A MONSIEUR DELILLE,

LES RHÉTORICIENS DE L'ÉCOLE SECONDAIRE D'AVALLON
Pour Pinviter à traduire les Bucoliques.

IL voit le jour enfin ce chef-d'œuvre nouveau (1),
Qui, long-temps attendu, n'en paraît que plus beau !
Quels sons harmonieux ! est-ce encore Virgile?
Ah! sans doute c'est lui, sous les traits de Delille,
Qui, dans une autre langue, et dans d'aussi beaux versi
Vient encore une fois enchanter l'univers !

Qui pourrait, en voyant cette métamorphose,
Se montrer incrédule à la métempsycose?

Virgile et son génie, et ses plus heureux fruits,
De nos jours, par Delille, à nos yeux reproduits,
Prouvent la vérité qu'enseigna Pythagore.

Le chantre de Didon renaît, revit encore :
Ce n'est point sa copie, ou son heureux rival;
C'est bien lui-même ; à lui, lui seul peut être égal.
Le cygne de Mantoue au cygne de la Seine
A transmis ses talens et sa sublime veine;
C'est son pinceau, son style, et son charme divin,
Et sa force et sa grace, et tous ses traits cafin.

(1) Sa traduction de l'Enéide.

O toi, vivant portrait du plus parfait modèle, Rends-nous le tout entier, en tout sois-lui fidèle. Tu chantas ses héros, ses essaims, ses vergers; Il ne te reste plus qu'à peindre ses bergers. Jusqu'aujourd'hui fidèle à ta première gloire,

Jusqu'au bout, de Virgile honore la mémoire. NAKON A
De ton culte pour lui, de ton attachement,

De ta reconnaissance, encor ce monument.
Tu sus monter sa lyre, emboucher sa trompette,
Veuille, veuille essayer sa flûte et sa musette
Et, comme lui savant à varier tes sons,

Après ses chants guerriers, redis-nous ses chansons.
Est-il rien désormais que ton goût n'exécute?
Celui qui de Virgile a soutenu la luite,

Peut-il dans l'art des vers craindre quelques rivaux ?
Gresset, devant les tiens, brisera ses pipeaux.
A ton auteur chéri rends ce dernier hommage.
Va, Tityre t'appelle, achève ton ouvrage;
Son unique héritier, reçois son dernier bien.
Au flambeau de Virgile allume encor le tien,
Sans cesser de briller de ta propre lumière;
Tu traduis, et ta gloire est à toi toute entière...
Mais où vont s'égarer de jeunes nourrissons,
Qui, pleins de tes beautés, formés à tes leçons,
Osent te présenter un téméraire hommage?
Pardonne à leur audace en faveur de leur age (1),
De l'antique Virgile, et du moderne épris,
Savoir vous admirer, c'est avoir tout appris (2).
Nos cœurs reconnaissans, avec leur juste offrande,
Te portent le tribut d'une juste demande;
Daigne agréer ces vers, et sourire à nos vœux.
Tels, sensibles et bons, se mêlant à ses jeux,
Et le sage d'Athène, et celui de Judée,
Jadis encourageaient l'enfance intimidée:

(1) Delille, Georg., livre II, vers 417.
(2) Le même, Enéid., liv. VIII, vers 736.

Tels on a vu les Dieux accueillir en tous temps,
Et le denier du pauvre, et son modique encens.

ENIGM E.

MINERVE se promène en ma rase campagne;
Je suis le confident de ses vers accomplis.
Ses ennemis souvent souillent mon teint de lys,
En grimpant vainement sur la double montagne.
Les rivages de l'Inde et du fleuve d'Espagne,
De riches raretés ne sont pas si remplis.
Dans l'oubli les héros seraient ensevelis,
Sans l'immortalité qui me sert de compagne.
Partagé des couleurs de la nuit et du jour,
Interprète des cœurs et confident d'amour,
J'exprime ses desirs par un muet langage;
Et quand les libertins corrompent ma candeur,
Je fais souvent rougir l'innocente pudeur;
Ce papier ne doit pas en dire davantage.

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Le mot de l'Enigme du dernier numéro est Bonheur. Celui du Logogriphe est Corail, où l'on trouve cor, or, ail, Lia, cil et arc.

roc, Celui de la Charade est But-or.

Septième livraison du Répertoire du Théâtre Français (1), ou Recueil de toutes les tragédies et comédies restées au théâtre, depuis le Venceslas de Rotrou, pour faire suite aux éditions in-8°. de Corneille, Molière, Racine Regnard, Crébillon, et au théâtre de Voltaire; avec des notices sur chaque auteur, et l'examen de chaque pièce, par M. Petitot; dessins de M. Périn, impression de Didot l'aîné.

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(Nous avons pris l'habitude de n'accorder d'éloges à cet ouvrage, qu'en le citant; nous continuerons, en prenant dans cette livraison la Notice sur Marivaux ; elle prouvera que le travail des éditeurs ne se sent point de la fatigue qu'on remarque assez ordinairement à la fin des collections volumineuses.)

«

Notice sur Marivaux.

PIERRE CARLET DE MARIVAUX naquit à Paris en 1688. Son père, d'une famille ancienne dans le parlement de Rouen, avait été long-temps directeur de la monnaie à Riom : il ne négligea rien pour l'éducation de son fils auquel il avait peu de fortune à laisser. Marivaux fit de rapides progrès dans ses premières études, et se livra de bonne heure à son goût pour les lettres. Il se maria en 1721, et perdit deux années après son épouse dont il conserva toujours un tendre souvenir: il n'eut

(1) Cette livraison forme les tomes 19, 20, 21, et contient les comédies en trois actes et en un acte de Lesage, Lafont, Marivaux, Dallinval, Poisson, Fagan, Destouches, Boissy, Saint-Foix. La livraison suivante sera la dernière, et n'aura que deux volumes. Prix : fr. le vol., et 14 fr. pap. vélin, gravures avant la lettre. Paris, chez Perlet, libraire, rue de Tournon, no. 1133, et le Normant, etc.

qu'une fille qui se fit religieuse. Ainsi les événemens parurent s'arranger pour le ramener à ses goûts qui l'éloignaient de toute occupation sérieuse et lucrative. La pureté de ses mœurs, la sagesse de ses principes, l'aménité de son caractère, lui firent des amis sincères; ses talens et son respect pour la religion lui donnèrent des protecteurs utiles. Il avait une pension sur la cassette de Louis XV, il en touchait une autre plus considérable qui lui fut exactement payée jusqu'à sa mort, et il ignora toujours à qui il la devait. Sans luxe, sans aucun besoin dispendieux, il aurait vécu dans une douce aisance s'il avait été en son pouvoir de résister aux cris de l'infortune; mais ses soins et son argent étaient à tous les malheureux: délicat dans sa ma nière d'obliger, il cachait les privations personnelles que lui coûtait sa générosité; et lorsqu'il manquait lui-même des choses nécessaires, il ne s'en apercevait que par l'impossibilité où il était de donner. La bienfaisance fut sa seule passion: nous la caractérisons ainsi parce qu'il est vrai qu'il ne sut jamais en régler l'usage; mais qui oserait blâmer l'excès de cette vertu d'autant plus admirable chez lui qu'il n'affecta jamais de la prêcher dans ses ouvrages? sa modestie ne lui aurait pas permis de s'offrir pour modèle, ou de s'ériger en apôtre de philantropie. Cette observation nous conduit naturellement à remarquer que cet écrivain n'a eu rien de commun avec les philosophes dont il vit la naissance, les progrès, et dont les principes lui parurent toujours dangereux et ridicules; mais, sans déguiser son opinion à cet égard, il evita avec eux toute querelle qui aurait pu annoncer une animosité étrangère à son caractère. On sait qu'il ne voyait dans la prétendue universalité des talens de M. de Voltaire que la perfection des idées communes: il le disait parce qu'il le pensait,

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