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ments littéraires et scientifiques placés en dehors de l'université proprement dite, et de l'emploi des fonds consacrés à l'encouragement des sciences et des lettres.

Il n'y a qu'un seul moyen d'être utile à l'Institut de France, c'est de lui fournir l'occasion de s'honorer par de nouveaux services. La révolution de juillet avait rétabli l'Académie des sciences morales et politiques, supprimée en 1803; pour achever ce grand acte de réparation, auquel je suis fier d'avoir concouru, j'ai voulu mettre la nouvelle académie au niveau de toutes les autres, en la chargeant d'écrire l'histoire des sciences qui forment son domaine depuis 1789, comme chacune des académies de l'Institut l'avait fait pour les sciences diverses qui leur sont confiées. L'Académie a noblement répondu à cet appel; déjà les travaux des différentes sections sont commencés, et je me flatte que l'ordonnance du 20 mars 1840 fera naître un ouvrage digne d'être placé à côté des beaux rapports de Dacier, de Delambre et de Cuvier, une grande page de l'histoire de l'esprit humain dans une de ses époques les plus agitées et les plus fécondes.

Quand je suis venu demander à la chambre des députés un modeste crédit de 5,000 francs pour la création d'une chaire nouvelle au Collège de France, consacrée à l'enseignement de la langue et de la littérature slave, je rencontrai des objections de plus d'un genre. Où sont-elles aujourd'hui, devant le savant et brillant enseignement de M. Mickiewitz 1? En donnant à la France une chaire de slave et M. Mickiewitz, je crois avoir rendu à la France et aux lettres un double service. Mon dessein, je ne le dissimule pas, et M. de Gérando, à la chambre des pairs, m’a déjà un peu trahi, mon dessein était de demander, à la

'Qui depuis, mais alors.....

session prochaine, un nouveau crédit de 5,000 francs pour établir à ce même collège de France une nouvelle chaire de langue et de littérature germanique; et je n'étais pas sans espérance de séduire M. Grimm, comme j'avais fait M. Mickiewitz.

Pour les souscriptions, ma règle a été bien simple: n'en accorder sous aucun prétexte qu'à des ouvrages sérieux, honorables au pays, onéreux à leurs auteurs. Le Moniteur a toujours fait connaître les ouvrages auxquels j'ai appliqué les souscriptions du gouvernement.

Les encouragements aux savants et aux gens de lettres se divisent en deux classes: les simples secours une fois donnés et les indemnités qui autrefois s'appelaient indemnités annuelles, et qu'on appelle aujourd'hui indemnités éventuelles, de peur de leur donner le caractère de pension, quoiqu'elles se renouvellent ordinairement, sauf des cas très-rares. J'ai suivi la vraie maxime en cette matière, celle qu'avait rappelée l'honorable rapporteur du budget à la chambre des pairs, M. d'Audiffret: moins de secours, et plus d'indemnités sérieuses pour des titres sérieux. J'ai repoussé l'idée de détruire arbitrairement ce qu'avaient fait mes prédécesseurs et de porter le deuil ou l'effroi dans l'âme de tant de personnes estimables en les frappant subitement, parce qu'elles n'avaient peut-être pas toute l'illustration ou toute la misère requise; j'aurais reçu cet ordre que je ne l'aurais pas exécuté, je le déclare ici hautement. J'ai donc respecté le passé, qui n'était pas mon ouvrage; mais j'ai voulu que l'avenir pût braver tous les regards, et, depuis le 1er mars jusqu'au 29 octobre 1840, je n'ai accordé ni une indemnité ni même un simple secours qu'au grand jour et en publiant moi-même ce que je faisais dans le Moniteur. On y trouvera les noms des personnes qui ont reçu de pareils encouragements. On verra que je

me suis surtout proposé, dans l'intérêt de la dignité des lettres, d'accorder très-peu d'indemnités à titre gratuit et de les attacher à des missions ou à des travaux, en sorte que ces encouragements soient à la fois une dette envers ceux qui les reçoivent et les méritent, et un service envers le public par les ouvrages qu'ils favorisent et dont ils sont la récompense anticipée.

A l'égard de la Légion-d'Honneur, cette grande et nationale institution affaiblie par tant de prodigalités, et qu'il importe de relever, soit par une mesure législative, soit du moins par un sobre et sévère usage de la prérogative royale, si la loi sortie des débats provoqués par la noble proposition de M. Mounier n'a point été sanctionnée, je me suis fait un point d'honneur de la pratiquer en ce qui concernait mon département. Le journal de l'Instruction publique a publié toutes les nominations qui ont été faites le 1er mai 1840, et les motifs sur lesquels reposent ces nominations. Nulle nomination isolée n'a eu lieu, et toutes ont été fondées sur cette maxime que j'ai tant de fois répétée ou de très-longs services ou des services trèséclatants.

Mais il est temps de terminer ce compte déjà trop long d'une administration qui a si peu duré. J'ai cru le devoir à mon pays, à l'université, à moi-même. J'ai voulu placer les réformes que j'ai entreprises sous la protection de l'opinion des juges compétents en France et en Europe. Pourquoi ne le dirais-je pas? Je suis, je l'espère, au-dessus de tout soupçon de regretter le pouvoir; mais en achevant ce récit, en posant ici la plume, il me semble que je quitte de nouveau, et avec un sentiment que je n'essaie pas de dissimuler, ce corps illustre qui est pour moi une seconde patrie dans la grande patrie, où je suis entré comme simple élève de l'école normale dans les premiers

jours de 1811, où j'avais conquis lentement un avancement légitime, auquel depuis dix années, comme membre du conseil royal et directeur de l'école normale, je rapportais presque toutes mes pensées, que j'ai un moment dirigée avec ce sérieux dévouement qui sert et ne flatte pas, et que j'aimerai et continuerai de servir pendant toute ma vie, dans toutes les fortunes que me fera la divine providence.

A la Sorbonne, 20 janvier 1841.

INSTRUCTION PRIMAIRE.

ÉCOLES PRIMAIRES SUPÉRIEURES.

Dans la discussion du budget du ministère de l'instruction publique, la chambre des députés exprima le vœu que toutes les écoles primaires supérieures, décrétées par la loi du 28 juin 1832, fussent complétement organisées. Aux termes de cette loi, il doit y avoir au moins une école primaire supérieure dans chaque ville dont la population excède 6,000 âmes ou qui est chef-lieu de département. Un grand nombre de villes ont rempli cette obligation, et même beaucoup de communes qui n'y sont pas obligées ont créé des établissements de ce genre; mais toutes ces écoles sont loin de remplir le but que la loi s'est proposé.

Le ministre de l'instruction publique, convaincu que les écoles primaires supérieures peuvent rendre les services les plus utiles à cette partie de la population qui n'aspire point à l'instruction secondaire, et qui a besoin de s'élever au-dessus de l'enseignement élémentaire, a voulu faire apprécier les bienfaits de cette institution, en s'attachant d'abord à former quelques établissements modèles dans un certain nombre de grandes villes.

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