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De la

INTRODUCTION.

guerre déclarée par les Tyrans révolutionnaires, à la Raison, à la Morale, aux Lettres et aux Arts. -Discours prononcé à l'ouverture du Lycée, le 31 décembre 1794 (1).

AVERTISSEMENT.

L'EFFET que ce Discours produisit devant l'assemblée, la plus nombreuse qu'on eût encore vue au Lycée, mérite d'être remarqué, et le fut alors généralement. L'orateur fut écouté avec une sorte de silence sombre et inquiet qui ressemblait encore à la ter

(1) Si le Discours sur l'état des Lettres, quoique fait et prononcé deux ans après celui-ci, se trouve placé auparavant dans cet ouvrage, c'est qu'il était à sa place naturelle, à la tête du siècle de Louis XIV, auquel il sert comme d'ouverture dans ce Cours, et qui était alors l'objet que l'auteur devait traiter dans l'année 1797. Celui-ci, au contraire, pouvait être placé indifféremment, ne tenant à aucune partie dans l'ordre de ce Cours, et n'y servant qu'à tracer une époque de l'histoire littéraire.

reur: il semblait l'on eût que

peur d'entendre ce qu'il n'avait pas peur de dire; et quand les acclamations rompaient le silence, c'étaient les cris de l'indignation soulagée.

Si le fond des idées se retrouve nécessairement dans cette foule d'ouvrages publiés depuis sur un sujet qui semble absorber toutes les pensées, et qui sera long-temps inépuisable, on n'oubliera pas sans doute la date de ce Discours, où je n'ai rien changé; et l'on avouera peut-être, avec les auditeurs du Lycée, qu'à cette époque personne n'avait parlé de la même manière. D'ailleurs, quel que soit le mérite de plusieurs écrits qui ont retracé des faits avec une énergie que personne n'apprécie plus que moi, la comparaison ne saurait nuire beaucoup, ce me semble, à un discours d'un genre différent, qui offre en résumé général ce que d'autres n'ont montré qu'en partie.

DISCOURS

PRONONCÉ A L'OUVERTURE DU LYCÉE LE 31 DÉCEMBRE 1794 (1).

QU'ELLE est douce et consolante, la première

idée qui se présente à moi au moment où je reparais devant vous! Qu'il est frappant, le contraste de ce que j'y ai vu et de ce que j'y vois ! et combien cette solennité annuelle, consacrée depuis dix ans dans cet asyle des sciences et des lettres, a pris, d'une année à l'autre, des caractères différents! Si l'imagination, long-temps flétrie par des souvenirs douloureux, se reporte involontairement vers le passé qu'elle accuse, avec quelle satisfaction elle revient se reposer sur le présent qui la ranime et l'épanouit ! N'oublions point l'un, ne l'oublions jamais, afin que jamais il ne revienne : nous en goûterons mieux l'autre, et nous apprendrons à le consolider et

(1) Il ne faut pas oublier que l'auteur parlait à une époque où les évènements du 9 thermidor avaient donné des espérances qui semblaient devoir se réaliser.

à le perpétuer. C'est dans ce même lieu qui nous rassemble, c'est à cette même époque que nous célébrons, que l'on vit ce qui ne s'était pas encore vu, une inauguration du temple des arts devenue en effet la prise de possession des Barbares. Il me semble les voir encore, ces brigands, sous le nom de patriotes; ces oppresseurs de la nation, sous le nom de magistrats du peuple, se répandre en foule parmi nous avec leur vêtement grotesque, qu'ils appelaient exclusivement celui du patriotisme, comme si le patriotisme devait absolument être ridicule et sale; avec leur ton grossier et leur langage brutal qu'ils appelaient républicain, comme si la grossièreté et l'indécence étaient essentiellement républicaines; avec leur visage hagard et leurs yeux troubles et farouches, indices de la mauvaise conscience, jetant de tous côtés des regards à la fois stupides et menaçants sur les instruments des sciences dont ils ne connaissaient pas même le nom, sur les monuments des arts qui leur étaient si étrangers, sur les bustes de ces grands hommes dont à peine ils avaient entendu parler; et l'on eût dit que l'aspect de toute cette pompe littéraire, de tout ce luxe innocent, de toutes ces richesses

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