Images de page
PDF
ePub

bre d'une cour d'appel ou du ministère public près d'une cour d'appel, à raison d'un crime ou d'un délit commis en dehors de l'exercice de ses fonctions'; 5o des demandes en renvoi pour suspicion légitime ou sûreté publique,

Code de procédure, aux termes duquel la prise à partie formée contre un juge de paix, un tribunal de première instance ou de commerce, ou un de leurs membres est portée à la cour d'appel du ressort (Voy. suprà, § 33). Sauf cela, l'article 60 de la loi du 27 ventôse an VIII est encore en vigueur. Il est vrai que le sénatus-consulte du 28 floréal an XII a transporté les attributions de la cour de cassation en matière de prise à partie à une haute cour composée des princes, des hauts dignitaires et grands officiers de l'Empire, du grand-juge, de soixante sénateurs, des présidents de section au conseil d'Etat, de quatorze conseillers d'Etat et de vingt membres de la cour de cassation (Art. 101-7° et 104, et que l'article 509 du Code de procédure se réfère à ces dispositions; mais la haute cour n'a jamais fonctionné. Le sénatus-consulte annonçait qu'il serait pourvu ultérieurement au surplus des dispositions relatives à son organisation et à son action (Art. 133; or, quand le premier Empire tomba, ce sénatus-consulte était encore à faire, et il fut, en 1811, impossible d'exécuter l'ordre donné par Napoléon de traduire devant cette juridiction le général Dupont qui avait capitulé à Baylen le 22 juillet 1808. L'archichancelier Cambacérès exposa, dans un rapport adressé à l'empereur, que la constitution de la haute cour était incomplète, que l'acte annoncé par le sénatus-consulte du 28 floréal an XII n'était même pas préparé, que la réunion de la haute cour était impraticable dans de pareilles conditions, et qu'en l'ajournant jusqu'à la promulgation d'un nouveau sénatus-consulte on s'exposerait au reproche de juger d'après une loi nouvelle des faits antérieurs à cette loi. Le général fut traduit devant une commission d'enquête composée arbitrairement, et qui le condamna tout aussi illégalement à une détention indéfinie (Bibliographie universelle, vo Dupont). Quant à la haute cour de la République de 1848 et du second Empire, elle avait des attributions exclusivement politiques (Const. 4 nov. 1848, art. 91; const. 14 janv. 1852, art. 54), et il en est de même aujourd'hui du Sénat constitué en cour de justice aux termes de la loi du 18 juillet 1875 (Art. 12; voy., sur la procédure à suivre dans cette hypothèse, L. 10 avr. 1889, art. 1 et suiv.). Il suit de la qu'aucun texte postérieur n'a abrogé, sur ce point, l'article 60 de la loi du 27 ventôse an VIII, et que la cour de cassation est demeurée compétente pour connaitre des prises à partie dirigées contre une cour d'appel, une chambre de cour d'appel ou une cour d'assises (Merlin, Répertoire, vo Prise à partie, § II; Chauveau, sur Carré, Lois de la procédure, t. IV, no CCCCXVI; Bioche, op. cit., vis Cassation, no32, et Prise à partie, no 45; Boitard, Colmet-Daage et Glasson, op. cit.. t. II, no 758; Rodière, op. cit., t. II, p. 141; Tarbé, op. cit., p. 310: Godart de Saponay, Manuel de la cour de cassation (Paris, 1832, p. 75; req. 17 févr. 1825, D. A. v° Prise à partie, no 46; req. 6 juill. 1858, D. P. 58. 1. 279; req. 8 août 1859, D. P. 59. 1. 460). On a cependant soutenu : 1° que la création de la hauté cour avait supprimé, ipso facto, la compétence de la cour de cassation en matière de prise à partie, et que celle-ci ne pouvait connaître de ces demandes avant qu'une nouvelle loi fût rendue (Pigeau, La procédure des tribunaux de France, 5e éd. (Paris, 1835), t. I, p. 793); 2o que les attributions de la haute cour en cette matière avaient passé, en 1814, à la Chambre des pairs Poncet, Des jugements Dijon, 1821), t. II, no 600). Ces deux opinions n'ont pas prévalu: l'une, par la raison qu'il était inadmissible que le cours de la justice fût suspendu ; l'autre, par ce motif que la charte du 4 juin 1814 ne contenait aucune disposition sur ce point.

C. instr. crim., art. 542. Dans ce cas, à la différence des précédents, elle ne prononce pas elle-même et renvoie l'affaire à une cour d'appel (C. instr. crim., art. 482).

insuffisance de juges ou d'avoués, récusation ou abstention volontaire et légitime de tous les juges, si la juridiction dont on décline ainsi la compétence ou qui se trouve dans l'impossibilité de juger est une cour d'appel, si la demande de renvoi s'applique à tous les tribunaux du ressort d'une cour d'appel, ou si elle est formée en matière criminelle'; 6o des demandes en révision d'arrêts ou de jugements rendus au criminel; 7o des affaires disciplinaires qui sont de sa compétence, ainsi qu'il sera expliqué aux §§ 154, 277 et 282.

§ 96. La cour de cassation se réunit en assemblée générale dans les mêmes circonstances que les cours d'appel1; quant aux affaires qui lui sont soumises, elles sont portées tantôt devant ses chambres réunies en audience solennelle, tantôt devant l'une d'elles. La réunion des trois chambres n'a lieu que dans des cas exceptionnels, pour juger : 1° les pourvois formés après une seconde cassation par les mêmes moyens et entre les mêmes parties procédant en la même qualité; 2o les affaires disciplinaires. Les chambres de la cour statuent presque toujours séparément, et il existe, à cet égard, une différence importante entre les affaires civiles et les affaires criminelles. Celles-ci sont portées directement devant la chambre criminelle qui statue sur l'admission ou le rejet du pourvoi, et prononce elle-même, en cas d'admission, la cassation du jugement ou de l'arrêt qui lui est déféré; au contraire, les affaires civiles sont, d'abord, soumises à la chambre des requêtes, qui statue seulement sur l'admission ou le rejet du pourvoi, et le renvoie en cas d'admission à la chambre civile, pour qu'elle prononce, après un nouvel examen, le rejet définitif du pourvoi ou la cassation du jugement ou de l'arrêt attaqué. La chambre des requêtes n'existait pas

5 C. instr. crim., art. 444. Dans les autres cas, la demande en renvoi est sounise aux cours d'appel (Voy. suprà, § 33).

§ 96. Voy. suprà, § 82.

2 L. 1er avr. 1837, art. 1 (Voy. suprà, § 93). Si le second pourvoi est fondé sur de nouveaux moyens, la cour statue dans la forme ordinaire Civ, rej. 26 nov. 1890, D. P. 91. 1. 345, S. 91. 1. 204; crim. cass, 5 déc. 1891, S. 92. 1. 537. 3 Voy. infra, §§ 154, 277 et 282.

L. 27 vent. an VIII, art. 60.

sous le décret des 27 novembre-1er décembre 1790, qui se bornait à établir un bureau des requêtes composé de vingt juges du tribunal de cassation, et renouvelé tous les six mois : ce bureau prononçait l'admission ou le rejet des pourvois à la majorité des trois quarts des voix; si cette majorité ne pouvait se former, la question d'admission était portée au tribunal tout entier qui la tranchait à la simple majorité. Dans le premier cas, la partie dont le pourvoi avait été admis par la majorité du bureau des requêtes pouvait retrouver, parmi les juges appelés à statuer définitivement sur ce pourvoi, quelques-uns de ceux qui l'avaient rejeté et qui ne pouvaient manquer d'y être défavorables; dans le second cas, le tribunal tout entier, appelé à statuer sur l'admission du pourvoi, avait ainsi pris parti avant que l'affaire revint devant lui pour recevoir une solution définitive, et n'était pas disposé à rejeter la demande qu'il avait commencé par accueillir. On ne tarda pas à s'apercevoir du danger de soumettre le recours en cassation à deux épreuves successives devant les mêmes juges, qui n'abordaient le second débat qu'avec un esprit prévenu, et liés jusqu'à un certain point par l'opinion qu'ils avaient précédemment émise: un décret du 2 brumaire an IV 'créa la chambre des requêtes qui existe encore aujourd'hui, et qui remplace avantageusement le bureau des requêtes : les conseillers qui la composent sont attachés exclusivement à ce service, l'admission du pourvoi épuise leur juridiction, et ils ne prennent part à l'arrêt de la chambre civile que dans le cas très rare où ils sont désignés pour la compléter, à défaut des conseillers de la chambre criminelle qu'on appelle de préférence à eux, précisément parce qu'ils sont restés jusqu'alors tout à fait étrangers à l'affaire.

§ 97. Deux motifs ont porté le législateur à faire passer les pourvois civils par cette double épreuve, et à subordonner la cassation d'un jugement ou d'un arrêt rendu en matière civile au jugement successif de deux chambres. 1o On a voulu réserver le plus de temps possible à la chambre civile

Tit. I, art. 6 et suiv.

Tit. I, art. 3.

pour l'examen des affaires très délicates qui lui sont confiées, et, pour cela, ne laisser venir devant elle que les pourvois qui reposent sur des moyens sérieux. 2o On a rendu l'abord de la cour plus difficile et diminué les chances de cassation, pour ne pas encourager à plaider indéfiniment les parties qui n'y sont que trop disposées, et ne pas affaiblir par des annulations trop fréquentes le respect de la chose jugée. Des raisons contraires ont empêché d'établir une chambre des requêtes en matière criminelle : 1o l'humanité commande, quand la vie, l'honneur ou la liberté des citoyens sont en jeu, de leur ouvrir largement un recours qui doit être le dernier; 2o le jugement de ces affaires exige une célérité que ne comporte pas une double épreuve. L'institution de la chambre des requêtes a été vivement critiquée, et sa suppression proposée à diverses reprises; mais la cour de cassation ne s'est jamais montrée favorable à cette idée, et, quand le Gouvernement l'a consultée en 1834 sur un projet de réforme judiciaire, elle s'est prononcée presque unanimement pour le maintien de cette chambre'. On lui reproche, avec quelque raison, d'éliminer trop facilement des pourvois très sérieux — d'examiner à fond des questions qui devraient être réservées pour la chambre civile de s'être quelquefois montrée plus ou moins sévère en fait d'admission, suivant que le rôle de celle-ci était plus ou moins chargé de se faire même sur certaines questions une jurisprudence opposée à celle de la chambre civile, et d'écarter ainsi des pourvois qui triompheraient devant cette dernière, si quelque circonstance particulière les y faisait renvoyer3, en sorte qu'il faut quelquefois, pour obtenir une cassation, avoir pour soi la jurisprudence de ces deux chambres. A vrai dire, ces griefs s'adressent moins à l'institution qu'à la manière dont elle est comprise et appliquée, mais peut-on

[ocr errors]

§ 97.1 Tarbé, op. cit., p. 96. Aj., sur cette question, Reverchon, La chambre des requêtes de la cour de cassation (dans la Revue pratique de droit français, t. XI, 1861, p. 305 et suiv.).

2 On peut supposer qu'il se rencontre dans le jugement ou dans l'arrêt attaqué une autre erreur de droit, ou un vice de forme qui a rendu l'admission du pourvoi inévitable.

3 Les critiques qu'on peut adresser à l'institution de la chambre des requêtes ont été résumées par MM. Valette et Hérold dans la commission d'organisation judiciaire de 1870 (Procès-verbaux, p. 168 et suiv.).

attendre de magistrats égaux en lumières et en dignité à leurs collègues qu'ils s'abstiennent de toucher au fond des questions que les pourvois font passer devant eux, et qu'ils se bornent à préparer le travail d'une autre chambre? Aussi a-t-on proposé de remplacer celle des requêtes par un bureau composé de maîtres des requêtes sous la présidence d'un conseiller', ou encore solution acceptable en théorie, mais souvent difficile à appliquer, et probablement féconde en conflits de compétence -de supprimer simplement le débat préliminaire sur l'admission du pourvoi, et d'établir deux chambres civiles qui auraient des pouvoirs égaux avec des attributions distinctes, et entre lesquelles les affaires se partageraient suivant leur nature.

[ocr errors]

§ 98. La règle d'après laquelle les affaires civiles traversent successivement la chambre des requêtes et la chambre civile souffre deux exceptions tantôt la chambre des requêtes donne à l'affaire une solution définitive, au lieu de la renvoyer à la chambre civile; tantôt la chambre civile est saisie de prime abord, sans que l'affaire ait passé par la chambre des requêtes.

A. La chambre des requêtes juge définitivement: 1o les demandes en règlement de juges qui ressortissent à la cour de cassation'; 2o les demandes en renvoi qui sont de sa compétence2; 3o les demandes formées par son procureur général, à fin d'annulation des actes par lesquels les juges ont excédé leurs pouvoirs; 4o les plaintes formées contre les membres des cours d'appel ou du ministère public établi auprès d'elles, à raison de crimes par eux commis en dehors de leurs

Odilon Barrot, op. cit. (dans les Comptes-rendus de l'Académie des Sciences morales et politiques, t. XCVI, 1871, p. 299. Varambon, Proposition de loi tendant à la réforme de l'organisation judiciaire, déposée à la Chambre des députés le 27 janvier 1880 (Impressions, 2o législature, no 2243).

Goblet, Proposition de loi sur l'organisation judiciaire, déposée à la Chambre des députés le 27 janvier 1880 (Impressions, 2e législature, no 2242). Odilon Barrot raconte qu'il avait fait rejeter cette idée par l'Assemblée constituante de 1848 (Op. cit., dans les Comptes-rendus de l'Académie des Sciences morales et politiques, t. XCVI, 1871, p. 299).

§ 98. L. 27 vent. an VIII, art. 60 (Voy. t. II, § 740).

2 Ib.

3 Ib., art. 80 (Voy, infrà, § 200).

G - I.

12

« PrécédentContinuer »