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étroit et peu décoré, des deux côtés duquel s'étendaient, au premier étage, de grandes chambres aux murs nus, qui se répétaient dans les autres ailes du château, desservies çà et là par de petits escaliers à

vis.

M. Houdard a indiqué la distribution des logements vers 15481550; il dresse même la liste des personnages y ayant droit. II faut suivre chez lui cette description, qui fournit en même temps une reconstitution de l'entourage royal et de la vie de cour. Les appartements du Dauphin et de la Dauphine se trouvaient au premier, à l'ouest du grand escalier, entre cet escalier et le donjon ; ceux du Roi à l'est, jusqu'à l'angle de la face orientale. Puis venaient ceux de la Reine, se prolongeant dans l'aile du sud. L'entresol et le deuxième étage étaient réservés aux personnages de la maison royale. A l'ouest du château existait, depuis Charles V sans doute, une grande cour, la basse-cour, occupant plus que l'espace de la place actuelle, où l'on avait installé les différents services des communs, et mème des appartements pour des gens de quelque importance.

La grande salle, dite au xvr siècle salle de bal, établie au premier étage du bâtiment ouest, longue de 40 mètres, large de 11, haute de 12 (l'étage supérieur étant supprimé), était voûtée en arcs brisés, qu'épaulaient de vigoureux contreforts et que consolidaient des tirants de fer. Construite encore d'après les traditions gothiques, elle offrait dans la simplicité de sa décoration autant d'ampleur que d'harmonie.

Des annexes du château, nous ne signalerons que la chapelle de Saint-Michel, élevée par Philibert de l'Orme à l'entrée de la forêt et dont M. Houdard a retrouvé la représentation dans un dessin de Du Cerceau. C'est un petit édifice d'un galbe assez lourd et qui se ressent du style habituel à son auteur.

Saint-Germain apparaît ainsi comme un des modèles les plus remarquables de l'architecture nationale, au temps où une heureuse conciliation entre le style du passé et la nouvelle théorie classique

Houdard, t. II, p. 28-40.

(2) Houdard, t. II, p. 47-48. Nous ne pouvons parler ici du château de la

SAVANTS.

Muette construit au nord dans la forêt, entre 1541 et 1555. On en trouvera la description dans le t. II, p. 49-58.

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permettait encore, favorisait même l'originalité dans la conception et la liberté dans l'invention. Chose curieuse et bien significative du moment, cet édifice bâti sur des constructions antérieures donne plus que beaucoup d'autres l'impression d'un monument conçu d'un seul jet, sans effort. Il y en a peu où l'on trouve aussi bien appliquées les lois supérieures de l'ordonnance et qui présentent une aussi harmonieuse unité dans le cadre de nature dont ils sont enveloppés.

(La fin à un prochain cahier.)

HENRY LEMONNIER.

L'HISTOIRE DE LA PERSE.

Lieut.-Col. P. M. SYKES, C. M. G., C. I. E. A history of Persia. Vol. I, xxvi-544 p.; vol. II, xxп-564 p.; with maps and illustrations. London, Macmillan and C, 1915.

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Cyrus fut un grand conquérant, un roi heureux : Kūpos, daiμwv vip, a dit Eschyle (Pers., 768). Il fut surtout un roi bon, et c'est ce qui lui a valu une reconnaissance éternelle de la part du peuple juif, et un peu aussi de tous les peuples chrétiens, dont la Bible est le premier livre. Au sortir des atrocités qui furent la caractéristique des Assyriens et des Babyloniens, et dont sont remplies leurs annales écrites sur la pierre et la brique, c'était un spectacle nouveau pour l'Orient que ce pacificateur qui groupait dans les limites de son immense empire une foule de peuples très divers. Dès la première année de son règne en qualité de souverain de Babylone, l'une de ses dernières comme roi de Perse, il autorise, par firman, la reconstruction du Temple de Jérusalem; il fait rendre aux Hébreux les vases d'or et d'argent pris par Nabuchodonosor quatre-vingts ans auparavant, et retrouvés dans le trésor de Babel. Son véritable titre de gloire, c'est d'avoir fondé un grand empire, qui dura plus de deux cents ans, et surtout, d'avoir civilisé la Perse et fait, d'un peuple

de montagnards perdu dans le sud-est de l'Asie antérieure, une nation qui, à diverses époques, a dominé moralement le continent asiatique, et qu'on trouve encore aujourd'hui debout, après vingtcinq siècles d'existence.

D'où venait-il? C'était un petit roi de la Susiane, l'ancien Élam, pays de plaines et de marécages, au climat humide et étouffant. Il succédait à une suite de trois princes, dont nous connaissons les noms par les inscriptions cunéiformes des cylindres de Nabonide (" Il était le fils de Kambuziya, nom qu'il devait donner à son propre fils, son successeur son grand-père portait le même nom que lui, Kurach, et son aïeul Chichpich, le Téispès d'Hérodote, appartenait au clan d'Hakhamanich. C'était une dynastie de rois des Parsu, qui par la conquête s'était approprié le territoire d'Anzan, longtemps contesté entre les souverains indigènes d'un peuple qui, par ses attaches linguistiques, semble nous reporter au groupe caucasique, et les rois de Babylone, d'origine incontestablement sémitique. Ainsi le peuple des Parsu, représentant un groupe linguistique aryen apparenté de près aux Mèdes, qui l'avaient précédé dans l'histoire une cinquantaine d'années auparavant, était descendu des montagnes du Zagros et avait choisi pour capitale une vieille cité dont les annales, déjà longues, nous ont été récemment révélées les découvertes de M. J. de Morgan, amorcées par la fructueuse exploration de M. Dieulafoy, et l'heureux déchiffrement du R. P. Scheil. C'est de là que les Perses étaient partis pour la conquête du

monde.

par

Pour la première fois, on vit s'établir et durer un empire qui n'avait pas eu de modèle. Qu'est-ce que les expéditions des Pharaons, les entreprises des rois d'Assyrie et de Babylone, les guerres des Lydiens et des Hittites, au regard de cet immense domaine qui s'étendit depuis le Bosphore jusqu'à l'Indus? Sans doute, les Perses n'avaient aucune civilisation propre, mais ils surent emprunter aux peuples conquis, d'un stade d'évolution bien supérieur, tout ce qui

(Cf. Die Nabonid-Cyrus Chronik, dans Schrader, Keilinschriftliche Bibliotek, t. III, 2 partie, p. 128-131; Inschrift auf dem Thoncylinder des Cyrus, Königs von Persien, id. opus,

p. 124-127; Nabonide, cylindre de Abu-Habba, id. op., p. 96-107. Voir également R. P. Scheil, Mémoires de la Délégation en Perse, t. V, textes. élamites-anzanites, p. XXIII,

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leur manquait. Les scribes araméens, rompus aux difficultés de la lecture des cunéiformes, surent tirer d'un vocabulaire idéographique à l'origine, et qui avait conservé de nombreuses traces de son passé archaïque, un syllabare simplifié, mieux approprié à la transcription des sons d'une langue indo-européenne. Les architectes et les sculpteurs, tirés des peuples subjugués, amenèrent avec eux leur cortège d'artisans ct empruntèrent les motifs de décoration à l'Assyrie, à la Lydie, à l'Égypte. Ce qui distingua surtout les Achéménides, et ce par quoi ils se différencièrent notablement de leurs précurseurs et congénères les Mèdes, ce fut une faculté d'organisation politique vraiment remarquable: ils surent établir les bases d'une monarchie qui, pendant deux cents ans, commanda à des peuples jadis étrangers les uns aux autres, et aurait étendu bien. davantage son expansion vers l'ouest si ses immenses armées n'avaient pas été arrêtées par l'héroïsme des Hellènes.

Tout l'édifice reposait sur la vénération due au souverain, considéré comme un dieu, presque inaccessible aux mortels, qui cependant pouvaient, aux jours d'audience et de loin. contempler sa majesté trônant dans l'apadana de son palais. Les Satrapes, gouverneurs de vastes provinces, étaient de véritables vice-rois; la vénération à l'endroit de l'auguste majesté les retenait dans le devoir, et un espionnage incessant informait la cour de ce qui se tramait dans les contrées lointaines; il y en cut qui se révoltèrent, mais leur audace n'eut jamais d'issue heureuse. Sans doute, ce régime coûtait cher aux populations soumises une fois payé le tribut dù au monarque, il restait encore à satisfaire ses représentants et les délégués de ceux-ci; mais la perception des impôts ne semble pas avoir eu le caractère tracassier du fisc romain. L'argent jouait un grand rôle, fréquemment peu avouable; les espèces monnayées venaient d'être inventées en Asie Mineure, et les dariques servaient à acheter les consciences. L'établissement d'un système de courriers à pied, assurant la transmission rapide des dépêches officielles d'une extrémité à l'autre de l'empire, est peut-être ce qu'il a de plus intéressant; il n'y a pas lieu de croire que les Perses en furent les inventeurs, car depuis qu'il y avait une correspondance officielle, il fallait bien qu'il y cût des gens pour la porter; mais ils paraissent avoir développé et complété un service qui s'étendait sur une aire immense

et dans des pays difficiles, traversés qu'ils étaient par de hautes chaines de montagnes.

Puis vint le Macédonien, et le vieil édifice croula. Les idées hellénistiques, victorieuses d'un Orient empêtré dans sa lourdeur, se répandent en Asie; lorsque tombent les États fondés par les diadoques, monnaie du grand général, l'emprise grecque persiste longtemps encore; le royaume gréco-bactrien maintient en pleine Asie centrale les traditions artistiques de la mère patrie; le Gandhara fournit au bouddhisme les premières ébauches, œuvres de maîtres, de son iconographie; les Arsacides, essayant de relever le vieux royaume abattu, frappent des monnaies à légendes grecques et font représenter des tragédies pour se distraire.

Néanmoins ils luttent contre Rome, parfois avec avantage; ils enrayent la pénétration des légions, qui ne peuvent aller au delà de l'Arménie et de la vallée du Tigre; l'Asie se ressaisit, et se dresse de nouveau en face de l'Europe.

En contact avec l'Extrême-Orient, les arts pénètrent l'Inde et probablement la Chine; le bouddhisme leur sert de véhicule. Il fallut la réaction nationale et religieuse des Sâsânides pour rétablir un État s'appuyant sur les traditions antiques d'absolutisme monarchique, et de vaste envergure.

Les Sasanides n'avaient pas fondé seulement un État militaire; ils s'appuyaient en outre sur un sacerdoce, et celui-ci possédait un livre sacré, l'Avesta. Déjà, sous les Achéménides, les Perses ne pouvaient se passer, pour invoquer la divinité, du ministère des Mages, tribu mède, qui semble avoir conservé les vieilles traditions accompagnant la migration des Aryens depuis les steppes de la Russie méridionale jusque sur les hauts plateaux de l'Iran. Après la conquête d'Alexandre, ces traditions auront été pieusement conservées dans les collèges de prêtres qui avaient maintenu l'adoration d'Ahura-Mazda sous son symbole traditionnel du feu. On cût aimé à croire l'Avesta, avec ses parties anciennes et ses fragments relativement plus jeunes, aurait été rédigé sous les Arsacides, par un grand prêtre qui portait le nom de Zoroastre, c'est-à-dire Zarathustra, appellation d'une étymologic obscure; ce qui empêche d'admettre cette hypothèse, c'est que ce nom célèbre figure déjà dans des documents grecs de l'époque d'Alexandre, et que, si bas qu'on désire le faire descendre,

que

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