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compte-rendu des actes de son administration, durant laquelle on avait fait de grands efforts pour améliorer le sort des armées. Celle du nord, en particulier, avait reçu en trois mois plus de 250 millions de réaux. Le nouveau ministre, M. Ximenez, réussit mieux dans ses projets d'emprunts: la banque de San-Fernando lui avança cinq millions de réaux.

Cependant la marche des esprits, la récomposition da ministère rendaient inévitable une dissolution des Cortès. Elle eut lieu le 1er juin, et en vertu du même décret, il dut être procédé au renouvellement du tiers des membres du sénat. La nouvelle législature devait se réunir ensuite au 1er septembre. Les élections ne soulevèrent point les collisions qu'on pouvait craindre; il parut cependant que le parti exalté dominerait dans la Chambre des députés. Toutefois, le ministère attendit l'ouverture. Elle eut lieu le 1er septembre, presqu'en même temps que les conventions de Bergara. Dans le discours prononcé à cette occasion (voir l'Appendice ), la reine régente se félicita de ses relations avec les puissances signataires du quadruple traité et avec celles qui avaient reconnu les droits de sa fille. Elle espérait, quant aux autres, que mieux éclairées, elles établiraient bientôt des relations diplomatiques avec son gouvernement. La reine annonçait le retour des rapports d'amitié avec les cantons helvétiques; la résolution qu'elle avait prise d'accréditer un agent diplomatique près de la république du Mexique; enfin, son intention de renouveler, d'une manière digne et conforme aux intérêts de la nation, le traité de commerce avec la Turquie.

L'intérieur ne paraissait pas moins rassurant. Les mesures exceptionnelles, dont quelques provinces avaient dû être l'objet, tendaient, par le rétablissement de l'ordre, à se restreindre chaque jour. La régente rendait comple

avec bonheur des succès obtenus par les armes constitutionnelles à Ramalès, Orduna, Amurrio, Talès, etc.

L'ennemi, disait S. M., divisé et réduit à ses retranchements naturels, a perdu une grande partie du territoire qu'il a tenu long-temps sous sa domination. »

L'annonce de diverses lois d'intérêt civil suivait cet exposé des résultats atteints ou espérés.

· La nation, disait la reine en terminant, a mis en vous ses espérances; et moi aussi j'attends tout de votre prudence et de votre patriotisme... En ce qui me regarde je ne me suis refusée à rien de ce qui a pu contribuer au bien des Espagnols... La gloire pour moi, c'est que mon nom soit inséparablement uni au bonheur de ce peuple héroïque et généreux.

«Nous serons heureux, si par nos efforts combinés, nous voyons dans un délai aussi court que le désire mon cœur, la guerre terminée, la constitution consolidée et raffermie, le trône de mon auguste fille Isabelle Il, au nom de laquelle, je l'espère avec confiance, on triomphera.»

Jamais, en effet, la mère d'Isabelle n'avait si bien augaré de l'avenir. La convention de Bergara arrivait à Madrid, et le 5 septembre, le ministre de la guerre la communiquait à la Chambre des députés. Des démonstrations de joie accueillirent cette lecture. Sur la proposition d'un membre, M. Olozaga, la Chambre, bien que non constituée, décida que son premier acte serait une disposition en faveur des guerriers qui avaient ainsi contribué au retour de la paix.

Une adresse de félicitations à la reine suivit cette première résolution. Tous les députés n'étaient point présents; quatre-vingt-cinq membres seulement la signèrent. La loi des fueros fut présentée le lendemain (4 septembre); c'était, comme on le sait, le complément indispensable et presque essentiel du traité de Bergara. Elle se composait de deux articles seulement le premier proposait la confirmation pure et simple des fueros des provinces Basques et de Navarre; l'autre portait que le gouvernement ausAnn. hist. pour 1839.

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sitôt qu'il le pourrait, soumettrait aux Cortès, après avoir entendu les provinces, les modifications qu'il croirait indispensables pour concilier l'intérêt de ces provinces avec l'intérêt général de la nation et la constitution politique de la monarchie.

Bien que les sentiments parussent partagés, les opinions se turent devant les exigences du moment, et le projet fut adopté (7 octobre) à l'unanimité par les 123 députés présents.

Une loi d'amnistie (1er octobre), présentée quelques jours auparavant, complétait cette résolution.

Ces diverses lois furent portées ensuite devant le sénat qui les discuta avec calme, et leur donna sa sanction.

Cependant le ministère ne triompha pas de même sur d'autres points. L'adresse, en réponse au discours de la couronne, désapprouvait la politique du Cabinet. Dans l'intervalle (22 octobre), les ministres de l'intérieur et de la marine s'étaient démis de leurs fonctions. Dans ces conjonctures, la prorogation des Cortès, prononcée le 31 octobre, ne pouvait être qu'un avant-coureur de la dissolution qui eut lieu en effet. Les ministres démissionnaires furent remplacés (18 novembre); celui de la marine par M. Montès de Oca, et celui de l'intérieur par M. Calderon Collantés.

Les choses étaient donc en cet état. Tous, exaltés et modérés, se préparaient à une nouvelle bataille électorale. Les deux partis recouraient également aux moyens ordinaires : à la presse, à l'organisation de comités dirigeants. Cependant un écrit où le brigadier Linage, chef d'étatmajor d'Espartero, attaquait la conduite du ministère, vint ajouter, non sans raison, aux espérances des exaltés. On pouvait, en effet, considérer cette publication comme l'expression des sentiments du duc de la Victoire.

CHAPITRE IX.

PORTUGAL. Constitution du Sénat.

Premiers travaux législatifs. Adresse. Etat du pays. Nomination d'un 'nouveau ministère. Sa politique. Relations financières avec l'Angleterre.

Clôture des

Cortès. Question de la traite des Noirs. — Difficultés à ce sujet avec l'Angleterre. - Manifeste de la reine aux grandes Puissances.-Situation. - Découverte d'une conspiration migueliste. -Continuation des démêlés avec la Grande-Bretagne. · Complications.- Manifeste du Chute du Cabinet. Administration nouvelle. Espéran

pape.

ces de réconciliation entre la Grande-Bretagne et le gouvernement de dona Maria. - Retards apportés aux négociations par un événement arrivé dans les eaux du Zair. - Etat des relations avec le SaintSiége et la Hollande. - Prise de Remechido et de Miltas.

La session de 1858-59 avait été ouverte par la reine le 8 octobre; mais le Sénat n'étant parvenu à se constituer définitivement que vers la fin de janvier, ce fut alors seulement que commencèrent les travaux législatifs.

Le premier acte de la Chambre des députés devait être la réponse au discours royal, qui était attendue avec autant de crainte par les hommes du pouvoir, que d'espérance par les partis hostiles au gouvernement. La commission de l'Adresse présenta un projet peu favorable au ministère, spécialement sur la question de la politique extérieure. Le paragraphe relatif à la traite des nègres était peu significatif; mais celui qui avait trait aux affaires d'Espagne renfermait une expression de sympathie plus vive que le discours de la couronne ne l'avait lui-même provoquée. Enfin on remarquait dans le projet ces paroles sur le sens desquelles l'administration ne dut pas se méprendre :

▪ La Chambre ne peut dissimuler à votre majesté le profond chagrin dont elle est pénétrée en voyant que l'on viole les principes constitu

ionnels et les premières garanties du système représentatif, par des décrets qui autorisent la perception des taxes votées par les Cortès. »

La discussion fut ardente et animée; et à l'extérieur l'opinion publique en suivit avec anxiété les progrès. La plus grande agitation régnait à Lisbonne, où circulaient maints bruits de conspiration, dont la presse ne craignait pas de se faire l'écho.

On accusait le parti altrà de travailler sourdement à renverser l'ordre de choses existant, et de vouloir recourir aux moyens violents, si le ministère sortait victorieux de cette lutte. On ajoutait même que Franza, Mantos et d'autres chefs du quartier de l'Arsenal, avaient formé un complot révolutionnaire qui devait commencer par l'explosion du magasin à poudre.

Enfin, et c'était là ce qui effrayait surtout les esprits, il paraissait constant que si la reine ne parvenait pas à composer un ministère de coalition pour remplacer l'administration actuelle devenue insuffisante, il y aurait nécessité de dissoudre les Chambres dans lesquelles les trois partis ordeiros, ultrà et chartistes se balançaient avec des pouvoirs presque égaux. D'un autre côté, les hommes influents sur lesquels on aurait pu compter, refusaient le pouvoir plutôt que de faire partie d'une combinaison ministérielle où leurs opinions auraient rencontré des contradicteurs. C'est ainsi que le comte de Villaréal, en rejetant les propositions de la reine, avait protesté plusieurs fois de sa ferme détermination à n'entrer que dans un Cabinet qui serait exclusivement composé de chartistes.

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Cependant le Cabinet obtenait, dans la discussion de l'Adresse, un triomphe d'autant plus éclatant qu'il était inattendu tous les paragraphes de blâme avaient été rejetés. Mais une défaite décisive vint bientôt compenser ce succès. La proposition faite par les ministres d'augmenter l'armée, souleva contre eux une majorité de 20 voix, et

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