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rences, et les raisons.irrésistibles de ses capi tchoadars, assistés des intrigues de Mehemet chérif, firent que l'ordre qui le concernait fut commué, de façon que Véli et Mouctar furent acceptés pour remplacer leur père à l'armée, pour la campagne dont l'ouverture était indiquée au mois d'avril,

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Prise de Leucade par les Anglais. Politique double d'Ali à ce sujet.. - Il dépouille l'agent qu'il avait envoyé à Londres. Résolution irrévocable du sultan contre le satrape de Janina. Départ de ses fils pour l'armée. Leur lâcheté. - Projets des Anglais contre Corfou déjoués. — Excommunication lancée contre Napoléon, propagée jusqu'en Turquie. Mort d'Aden bey; nouvelles fureurs de - sa mère Chaïnitza. Destitution de Véli pacha. Prise et captivité d'Ibrahim pacha, Attentat du satrape contre. le pavillon français. -Suites de cette affaire. Arrivée d'une foule d'émissaires anglais à Janina, et de Hudson Love.Mouctar nommé beglier-bey de Bérat. Prise d'Argyro Castron; de Cardiki. Entretien d'Ali avec' — - le consul de France. Entrevue d'Ali avec sa sœur Chaïnitza. — Massacre des Cardikiotes. Supplice des ôtages. Apostrophe du cheïk Jousouf contre Ali, qu'il attaque. en face. Ses malédictions.

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TANDIS ANDIS qu'Ali pacha expulsait de Bérat, le beaupère de ses fils, ses alliés les Anglais, qu'il avait invités dès l'année 1807 à porter leurs armes contre les હૈ

sept îles, ayant fait insurger Cérigo, Zante, Céphalonie et Ithaque, s'en étaient emparés et les gouvernaient avec le titre spécieux d'iles affranchies (isole liberate), qu'elles ont depuis si cruellement expié sous leur joug de fer. Cette conquête, à laquelle Ali était digne d'avoir contribué, puisqu'elle était le résultat de la trahison, lui donnait une importance que le secrétaire d'état de S. M. B. chargea ses émissaires d'entretenir et de fomenter, parce qu'on avait besoin plus que jamais de l'assistance d'Ali pour délivrer également Leucade du pouvoir des Français, qui rendaient cette île heureuse. Le nom de Castlereagh prenait ainsi date dans les annales de l'Orient, où sa mémoire sera inséparable à jamais du souvenir des calamités de la Grèce.

On eut les premiers avis des projets de l'Angleterre contre Leucade, dès le mois de janvier 1810, au moment où un mécontentement sourd agitait la Sicile, à laquelle W. Bentinck voulait imposer une charte et des lois, au mépris de l'autorité souveraine de son roi légitime. Le gouvernement de Corfou, informé de ce qui se tramait, écrivit en France pour proposer de faire, du côté de Messine, une diversion capable de le dégager sur le point où il était directement menacé; on donna l'éveil partout où il convenait; mais on com prit qu'on ne pourrait sauver Sainte-Maure des efforts d'une puissance maîtresse de la mer. Persuadé qu'Ali se compromettrait entièrement dans cette circonstance, le consul français résolut de le suivre pied à pied, et de venger, s'il était possible, l'humanité du

plus cruel de ses ennemis, Le tyran avait perdu toute retenue, et son fils Mouctar, rentré à Janina sans congé, savait si peu dissimuler, que toute la ville était imbue par ses discours des desseins ambitieux de son père, qui n'allaient à rien moins depuis l'envahissement de Bérat, qu'à s'emparer de Scodra, et à donner pour frontière au sultan le cours de l'Hèbre. La fortune qui avait corrompu la famille de Tébélen, l'entraînait à sa perte; son existence était un long délire, parce que, oubliant non-seulement que celui-là se trompe qui croit pouvoir faire quelque action ignorée de Dieu (1), elle ne gardait pas même les convenances politiques attachées à son rang.

La gravité de l'histoire ne permet pas de rapporter les manœuvres honteuses employées pour corrompre la fidélité des Leucadiens; ce qu'on dirait n'ajouterait qu'une série de perfidies de plus au triste tableau des siéges entrepris depuis l'origine des guerres. Il suffit de présenter les Anglais abordant aux plages de Ste.Maure; l'évêque, comblé de nos bienfaits, faisant insurger les paysans des montagnes en faveur de l'ennemi; les Armatolis abandonnant nos drapeaux; un bataillon italien, formant partie de la garnison du château, refusant de se battre, et la défense de cette place en mauvais état reposant sur soixante canonniers et trois cent soldats français pour donner l'idée d'un évènement qui serait sans importance,

(1) Ει δὲ θεὸν ἀνήρ τίς ἔλπεἰταί τι λασέμεν

s'il

Ερδων, ἁμαρτάνει.

Pindar. Olymp. 1.

ne servait à faire connaître de plus en plus Ali pacha.

Je me trouvais avec lui à Prévésa; nous assistions en quelque sorte aux combats, et l'allié prétendu du ministère anglais ne manqua pas, dans cette circonstance, de donner des preuves de sa loyauté aux nobles amis qu'il souhaitait avoir pour voisins. Par son entremise, je fis entrer M. le colonel du génie Baudrand, dans la place assiégée, tandis qu'il retenait à souper le général anglais, qui était venu lui faire une visite, avec M. Spiridion Foresti, ministre de S. M. B., auxquels il protestait de son dévouement inviolable. Il m'aida également, en les trompant, à procurer des approvisionnements, des signaux de reconnaissance aux assiégés, et il offrit même, si je voulais engager notre général à évacuer la citadelle, de l'occuper et de faire cause commune avec nous contre les Anglais. Mais on n'avait pas encore donné à l'Europe le coupable exemple d'une ville civilisée, livrée aux Turcs, comme cela a eu lieu depuis, par rapport à Parga. L'idée d'une action qui mettait une population chrétienne, quoique reprochable à notre égard, à la discrétion d'Ali pacha, me fit repousser ses propositions (quoique j'eusse carte-blanche pour agir sans respon sabilité), et je laissai courir les évènements selon leur marche naturelle. Sainte-Maure, assiégée, bombardée, au moment de voir écrouler une façade entière de ses remparts, capitula, et le général Oswald, après en avoir pris possession, vint, de la meilleure foi du monde, recevoir les félicitations du visir et le

remercier publiquement d'avoir contribué au succès de son entreprise.

J'ignore si le canon de la Tour de Londres annonça la victoire du général Oswald, mais l'excursion imprudente qu'il fit à Prévésa, où il triompha au bruit des salves de mousquetterie des Albanais, fut pour leur visir Ali une visite fatale. Le souvenir des lauriers de Miltiade, ne fut jamais aussi sensible à la pensée de Thémistocle, que les égards témoignés par les Anglais au satrape de Janina, le devinrent au successeur des Caliphes, Mahmoud II; la renommée, qui grossit tout dans la bouche des orientaux, ne parlait pas seulement d'un parc assez ordinaire d'artillerie, que le ministère britannique lui avait envoyé; c'était un arsenal entier, et de plus, des trésors immenses qu'il avait fait verser dans son épargne. L'ame avide du sultan s'enflammait à l'idée de l'or donné à Ali, et il disait comme son aïeul Abdolhamid au baron de Tott, qui lui vantait les présents faits par la Russie à Krim Gueray, et on ne me donne rien à moi; sans penser que la gloire seule est l'apanage d'un roi. Ali plus heureux, et non moins rapace, n'avait pas manqué de faire rendre compte à son envoyé Seïd Achmet de Salone, non pas des détails diplomatiques de sa mission qui ne l'intéressaient qu'accidentellement, mais des cadeaux qu'il avait reçus, dont il le dépouilla, sans lui laisser la moindre des bagatelles que les ministres du roi Georges lui avaient données; prétendant qu'un esclave ne put exploiter une mine qu'au profit de son

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