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et avec Jésus-Christ, Jésus-Christ, offrant à Dieu son corps par le ministère des prêtres, lui offre aussi en même temps son Église et tous les membres qui la composent. Et quand les fidèles offrent le corps de Jésus-Christ par les mains du prêtre, ils s'offrent aussi eux-mêmes avec Jésus-Christ, parce qu'ils sont les membres du corps de Jésus-Christ. Et c'est, ajoute le même saint Augustin1, ce que l'Église pratique tous les jours dans le sacrement de l'autel, qui est connu des fidèles, et où il lui est marqué que dans l'oblation qu'elle présente elle est elle-même offerte 2. »

L'Observateur dira sans doute qu'il parle d'après Labroue, dont il vient de rapporter quelques paroles. Voyons donc ce que Labroue pense :

« Si les pécheurs sont exclus d'offrir le sacrifice de l'autel avec le prêtre et avec Jésus-Christ, qui est le principal prêtre, à cause de l'état de péché qui les empêche d'être un même corps avec lui, ils peuvent assister utilement à la messe en une autre manière, non comme prêtres qui offrent le sacrifice avec le prêtre, mais comme fidèles pour qui le sacrifice est offert 3. » Et ailleurs : « Il y a une manière d'assister à la messe qui demande des dispositions presque semblables à celles qu'il faut apporter à la communion.

1. De Civit. Dei, l. X, c. vI.

2. Confér. du diocèse de La Rochelle, 3. Lettre à Basville.

P. 141.

C'est sur ce fondement que les anciens croyaient que ceux qui n'étaient pas en état de participer à l'eucharistie n'étaient pas dignes d'assister à la célébration des saints mystères. Mais comme la messe est un sacrifice qui n'est pas seulement offert par les fidèles, auquel cas il demande les dispositions de foi, de désir et d'amour que demandent les sacrements, mais encore un sacrifice offert pour les fidèles et pour les fidèles pécheurs, auxquels il profite, non comme les sacrements à ceux qui les reçoivent, mais comme les prières à ceux pour qui on les offre, il faut, ce me semble, faire une grande différence de l'assistance à la messe à la participation des sacrements.

« La messe est, à l'égard des pécheurs pour lesquels on l'offre, une sorte de prière, mais une prière incomparablement plus excellente que les autres, dans laquelle Jésus-Christ, immolé mystiquement par la parole du prêtre, s'offre lui-même en cet état à son Père et intercède envers lui pour les pécheurs. Or, comme on n'a jamais pensé qu'il y eût aucune irrévérence d'obliger les pécheurs d'assister aux prières que l'on fait pour eux, il semble qu'il n'y en peut avoir davantage à les obliger d'assister à un sacrifice que l'on offre pour eux. Il y en aurait sans doute, si on voulait les obliger à offrir eux-mêmes avec le prêtre et avec Jésus-Christ, qui est le principal prêtre, le sacrifice de la messe, ce qui est sans contredit la meilleure manière

d'y assister, mais manière qui ne peut convenir qu'aux fidèles qui, étant par la charité unis à Jésus-Christ comme à leur chef, sont en état de s'offrir en lui et par lui comme ne comprenant avec lui qu'un même corps, ce qui fait qu'ils sont appelés prêtres par saint Pierre et par saint Jean1. »

Je reproduis les termes de l'Observateur: « La doctrine mystique sur le sacerdoce entendu lato sensu est celle-ci tout fidèle uni à Jésus-Christ par la foi et la charité agit en lui; il s'offre en Jésus-Christ, qui est l'unique prêtre; il s'immole en lui comme victime, et il remplit ainsi par Jésus-Christ la fonction sacerdotale par excellence, qui est le sacrifice. »

Ce sacrifice dont parle l'Observateur est celui du fidèle et non point celui de Jésus-Christ, et la fonction sacerdotale ne consiste nullement pour le fidèle à offrir Jésus-Christ, mais à s'offrir soi-même. Visiblement l'Observateur tronque Labroue. Il lui prend la seconde moitié de la dernière phrase, et la condition que Labroue pose à l'exercice du sacerdoce, l'Observateur la donne comme le sacerdoce même. C'est ainsi encore qu'il entend les auteurs, en nous reprochant avec tant d'assurance de ne pas les comprendre!

Arrêtons-nous ici un instant. On a vu l'Observateur nier que l'effet des sacrements soit dû aux prières des

1. Autre lettre à Basville.

justes, et soutenir contre les textes les plus formels que Nicole et Legros ne leur attribuent que la disposition de l'âme à recevoir cet effet; on l'a vu nous reprocher de confondre le sacerdoce intérieur avec le sacerdoce extérieur, alors que les distinguer est le fondement de la théorie des pouvoirs régénérateurs que nous avons exposée; on l'a vu déclarer que le sacerdoce intérieur n'est point un véritable sacerdoce, et néanmoins dire que les fidèles en l'exerçant offrent JésusChrist, ou bien dire seulement qu'ils s'offrent en JésusChrist et dès lors enseigner qu'ils peuvent s'offrir en Jésus-Christ sans offrir Jésus-Christ même.

Pour réfuter un auteur, il faut le comprendre et se comprendre soi-même. Sans doute l'Observateur trouve plus piquant de ne savoir ni ce que nous disons, ni ce que lui-même il dit. C'est par là que d'un bout à l'autre il brille dans l'accusation d'hérésie qu'il a jugé à propos de nous intenter. Mais il remplit une mission que nous lui expliquerons à la fin de cet écrit1.

1. L'explication n'a pu être donnée par l'auteur : voir notre Vie de Bordas, chap. v. ÉD.

CHAPITRE IV

* LE SACERDOCE INTÉRIEUR, OU POUVOIR PRÉCATOIRE, PROUVÉ PAR LA FORME DES SACREMENTS.

Les personnes qui désirent des éclaircissements demandent sans doute ici pourquoi deux pouvoirs et d'où que le ministre a besoin de concours.

vient

« Saint Augustin, observe Nicole, distingue deux manières de conférer le baptème, et l'on peut en dire autant des autres sacrements: l'une, de les conférer par autorité, en agissant immédiatement sur l'âme et en opérant l'effet de chaque sacrement; l'autre, de les conférer en qualité de ministre.

« C'est en ce dernier sens que l'administrent ceux qui agissent selon l'ordre de l'Église, et il n'y a que Jésus-Christ qui le puisse donner en la première manière. Notre-Seigneur Jésus-Christ, dit saint Augustin1, n'a voulu donner son baptême à personne, non pas afin que personne ne fût baptisé du baptême du Seigneur, mais afin que l'on reconnût que c'était toujours lui qui baptisait, et non pas les ministres. Il s'en est retenu la puissance et ne la communique à personne.

4. Traité V sur saint Jean.

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