Images de page
PDF
ePub

mesure aurait anéanti la liberté d'action que le jury d'admission veut se réserver et le caractère d'honorabilité que la direction tient à mériter. Les mots art et spéculation sont ennemis mortels, et de tout temps il nous a paru odieux d'exploiter les artistes comme on le fait tous les jours! Au théâtre, les auteurs d'une pièce touchent une partie des bénéfices, et les acteurs sont rétribués; par quelle singulière anomalie oserait-on demander au peintre de payer de sa bourse le plaisir qu'il fait éprouver à ceux qui contemplent ses œuvres? Depuis trop longtemps les artistes sont la proie des philanthropes; on dirait que ceuxci veulent épuiser les uns au profit des autres; et, dans toutes les circonstances, l'artiste, qui a tant besoin de l'aide d'autrui, est toujours là lorsqu'il s'agit de prêter la sienne. Depuis dix ans, M. Louis Martinet cherchait un remède à cet état de choses, et sa conviction l'a amené à le trouver dans une Exposition permanente.

Le succès des Expositions du boulevard des Italiens est assuré. Grâce au zèle des artistes de talent, aux encouragements des amateurs les plus distingués, grâce encore à l'approbation de personnages influents, un but important a été atteint: il reste à soutenir l'édifice que des intelligences d'élite ont aidé à élever.

Chaque jour démontre l'utilité des expositions permanentes. On a senti sérieusement la nécessité de tenir toujours ouvert, au cœur de Paris, un local où un certain nombre de toiles choisies, se renouvelant sans cesse, fussent toujours offertes au public. Le Salon doit être le complément, le couronnement d'une série d'expositions préalables. Si un peintre manque un Salon, il est quatre ans sans rien exposer. D'ailleurs, l'artiste qui débute par un envoi au palais de l'Industrie, ignore tout d'abord l'effet que produiront ses œuvres, et il n'acquiert qu'après longtemps l'expérience nécessaire pour obtenir les suffrages du public et du jury appelé à distribuer les récompenses.

« Des peintres éminents ont bien des fois exprimé deyant nous le désir qu'il leur fùt permis de faire subir à leurs œuvres une épreuve préliminaire, de les exposer une première fois pour les retirer ensuite, les retoucher et en modifier certains détails.

<< Il est presque impossible qu'un débutant soit remarqué au Salon, et on le conçoit sans peine. Dans une exposition où le catalogue comprend quatre mille numéros,

et à laquelle chacun n'accorde, le plus souvent, qu'une seule visite, l'artiste a dix-neuf fois moins de chances d'être vu que dans une galerie de deux cents tableaux.

« L'Exposition du boulevard des Italiens est utile, nonseulement aux débutants, mais aux peintres arrivés. Puisque la généreuse initiative des amateurs nous permet d'exposer des œuvres provenant de collections particulières, un artiste pourra souvent puiser d'utiles enseignements en revoyant une de ses premières œuvres, et juger par lui-même s'il n'a pas trop sacrifié au goût du jour, au caprice de la mode, et abandonné ainsi le charme et la naïveté du premier jet; si, enfin, il ne pourrait pas retrouver, dans des ouvrages dont il a presque perdu le souvenir, les éléments des premiers succès auxquels il doit peut-être sa réputation. « A ces considérations, nous ajouterons, bien que le fait soit déjà connu, que l'artiste trouve ainsi l'écoule

ment facile et honorable de ses travaux.

« C'est la première fois, qu'en France, une entreprise privée ait pu, avec une indépendance absolue, servir gratuitement d'intermédiaire entre les artistes et les amateurs, pour des achats s'élevant à une somme très-considérable.

<< Le jury anonyme qui veut bien, avec un louable désintéressement, mettre à couvert la responsabilité du directeur, dans la réception ou le refus des œuvres présentées à l'Exposition, a réussi à conserver le plus complet incognito. Il en est résulté que personne n'a pu songer à exercer ou faire exercer sur lui une influence quelconque et qu'il a échappé aux protections et recommandations, quelles qu'elles fussent; or, de ce qu'on ne pouvait savoir le nom de ces trois membres, quelques esprits forts ont conclu que le jury était un mythe. Mais l'Exposition ne saurait vivre sans un contrôle sérieux sur l'admission des ouvrages, contrôle plus puissant que celui d'une seule personne. Le cas est trop grave pour qu'on puisse s'en rapporter à une décision unique.

« On peut dire que les œuvres dont se compose l'exhibition du boulevard des Italiens témoignent de l'intelligence de ces trois personnes dévouées qui ont consenti à prêter leur appui à M. Martinet et à lui épargner toutes les inimitiés soulevées par les sentiments froissés, l'amour-propre blessé. Ils ont voulu que tous les genres fussent représentés; et, de bonne foi, il suffit de jeter les yeux

sur les noms du catalogue, pour voir combien toute idée de parti pris ou de coterie a été loin de leur pensée; jamais on n'a réuni une collection d'oeuvres d'art présentant des tendances plus diverses et plus tranchées. Seulement, par une mesure qui devait prêter à l'entreprise un intérêt durable en même temps qu'une réputation solide, le jury a tenu rigoureusement à ce qu'il y eût dans toutes les oeuvres exposées sinon un talent acquis, du moins une promesse de talent. Les peintres se divisent en deux grandes catégories : les artistes et... les autres. Pour que le public vienne sans se lasser dans ces galeries, pour que les amateurs sérieux y trouvent des éléments nouveaux de jouissances et d'études, il est de toute nécessité que le jury n'admette que des ouvrages sérieux, exécutés dans d'autres vues que celles de plaire au premier venu. Que les artistes se fassent subir à euxmêmes une première épreuve avant de faire leur envoi, et qu'ils songent qu'autant une œuvre sérieuse peut hâter leur réputation et décider du succès de leur carrière, autant une œuvre médiocre, fût-elle admise, leur causerait de préjudice. Ainsi, c'est dans l'intérêt de tous que la commission anonyme a résolu d'être rigoureuse dans son choix.

«Les peintres qui proposent des tableaux pour l'exhibition du boulevard des Italiens se placent trop souvent au point de vue de la vente, qui, là, ne peut et ne doit être qu'un accessoire. Ils adressent constamment des ouvrages qui ont été vus dans les Expositions et qui, après avoir paru ailleurs pendant des mois entiers, semblent briguer, comme un pis-alier, l'entrée de nos galeries; nous sommes bien obligés de le dire, ce n'est pas là ce qui peut attirer le public et surtout les amateurs. Les artistes ne se rendent guère compte des exigences d'une Exposition qui ne peut recevoir que deux cents ouvrages et dont la réputation d'intérêt toujours renouvelé est une condition sine quâ non de vitalité. Aussi le jury sera-t-il toujours plus disposé à accueillir des tableaux inédits que des toiles ayant fait le tour de la France, et quand il voit des artistes comme MM. Robert-Fleury, Ricard, Troyon, Henrt Lehmann et autres lui donner la primeur de leurs productions récentes, il peut à bon droit demander de lui présenter, non-seulement ce que l'on fait de mieux, mais encore ce qui peut offrir aussi l'attrait de la nouveauté. »>

[blocks in formation]

Même sujet.

Saint-François (L.). Campement arabe.

Doré (G.).

Reynaud.

Id.

Id.

Id.

Harpignies.

Mme Pauline Girardin.

Marabout en Algérie.

Fleurs, aquarelle.

Même sujet.

Paysage, étude; etc., etc., etc.

CHAPITRE V

CONCOURS DIVERS

Académie des Beaux-Arts.- Grands prix de Rome.

L'Académie des beaux-arts a jugé, dans sa séance du 7 septembre, le concours des grands prix de sculpture, dont le sujet était Chryséis rendue à son père; elle a décerné :

Le premier grand prix à M. Samson, élève de M. Jouf froy.

Un premier second grand prix à M. Gauthier, élève de M. Jouffroy.

Un deuxième second grand prix à M. Barrias, élève de MM. Jouffroy, Cavelier et Cogniet.

Une mention honorable à M. Deloye, élève de MM. Lemaire et Jouffroy.

Voici le résultat (séance du 14 septembre) du concours des grands prix de paysage historique (sujet : La marche de Silène).

Premier grand prix à M. Paul-Albert Girard, de Paris, élève de M. Picot.

Second grand prix, à M. Gustave-Achille Guillaumet, de Paris, élève de MM. Picot et Abel de Pujol.

Mention honorable à M. Arthur-Henry Bonnefoy, de Boulogne (Pas-de-Calais), élève de M. Coignet.

Le sujet du concours des grands prix d'architecture, était, cette année, un Etablissement de bains dans une ville d'eaux thermales:

Premier grand prix, à M. Constant Moyaux, d'Anzin (Nord), âgé de vingt-six ans, élève de M. Lebas.

« PrécédentContinuer »