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Il faut donc, Philothée, vous résoudre à recevoir désormais toutes les inspirations du Ciel comme vous recevriez des Anges que Dieu vous enverrait pour traiter avec vous d'une grande affaire ainsi, écoutez avec tranquillité ce que l'inspiration vous propose; faites attention à l'amour de Celui qui vous la donne, et recevez-la avec joie; enfin donnez-y votre consentement avec affection; et Dieu, qui ne peut nous avoir aucune obligation, ne laissera pas d'agréer cette fidèle correspondance à son amour. Mais si l'inspiration a quelque chose d'important et d'extraordinaire, suspendez votre consentement jusqu'à ce que vous ayez consulté votre directeur, qui doit l'examiner pour en reconnaître la vérité ou la fausseté; ce qui est d'autant plus nécessaire, que l'ennemi, voyant une âme facile à suivre l'inspiration, lui en propose souvent de fausses pour la tromper; mais c'est inutilement tant que cette âme obéit à son directeur avec humilité.

Quand on a donné son consentement à l'inspiration, il faut exécuter soigneusement ce qu'elle a demandé de nous, et c'est ce qui accomplit l'œuvre de la grâce; car autrement, retenir ce consentement dans le cœur sans en venir à l'effet, ce serait faire comme un homme qui, ayant planté une vigne, ne voudrait pas la cultiver, de peur qu'elle ne portât du fruit.

Remarquez combien la pratique de l'exercice du matin et des retraites spirituelles du cœur,

dont je vous ai parlé, est utile pour tout ceci; car nous nous disposons à faire le bien par une préparation non-seulement générale, mais encore particulière.

CHAPITRE XIX

De la sainte confession.

Notre Sauveur a laissé à son Église le sacrement de pénitence ou de la confession, pour y purifier en tout temps nos âmes des souillures qu'elles peuvent avoir contractées. Ne souffrez donc jamais, Philothée, que votre cœur demeure longtemps infecté du péché, puisque vous avez contre sa corruption un remède si sûr et si facile. Une âme qui se sent coupable d'un péché devrait avoir horreur d'elle-même: le respect qu'elle doit à la divine Majesté l'oblige à s'en purifier au plus tôt. Hélas! pourquoi nous laisser mourir de la mort spirituelle, ayant entre les mains un remède souverain pour nous guérir?

Confessez-vous avec beaucoup d'humilité et de dévotion, tous les huit jours, et même toutes les fois que vous communiez, si vous le pouvez; quoique votre conscience ne vous reproche aucun péché mortel, vous recevrez non-seulement l'absolution des péchés véniels que vous confesserez, mais encore beaucoup de lumières pour en avoir un plus grand discernement, beaucoup

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plus de force pour les éviter, et une merveilleuse abondance de grâces pour réparer les pertes qu'ils auraient pu vous causer. De plus, vous y pratiquerez l'humilité, l'obéissance, la simplicité, l'amour de Dieu; en un mot, plus de vertus qu'en aucun autre exercice de religion.

Ayez toujours une vraie douleur des péchés que vous confesserez, quelque petits qu'ils soient, et une ferme résolution de vous en corriger; car il y a bien des gens qui, ne se confessant des péchés véniels que par habitude et sans nulle attention à s'en corriger, en demeurent chargés toute leur vie, et se privent de beaucoup de grâces nécessaires à leur avancement spirituel. Si donc vous vous accusez d'un mensonge léger, d'une parole tant soit peu déréglée, de quelque affection, ou de quelque faute au jeu, ayez-en un repentir sincère, avec une ferme résolution de vous observer efficacement sur tout cela, parce que c'est un abus de se eonfesser d'un péché mortel ou véniel sans vouloir s'en corriger, puisque la confession n'est instituée que pour cela.

Retranchez de votre confession ces accusations superflues dont plusieurs se font une routine : Je n'ai pas aimé Dieu autant que je devais; je n'ai pas aimé mon prochain comme je devais; je n'ai pas reçu les sacrements avec le respect que je devais, et autres semblables. Vous en voyez bien la raison: c'est qu'en disant cela, ne vous

dites rien de particulier qui fasse connaître au confesseur l'état de votre conscience, et que les hommes les plus parfaits du monde pourraient dire les mêmes choses, aussi bien que tous les saints du paradis, s'ils se confessaient encore.

Examinez donc quel motif particulier vous avez pour faire ces accusations, qui ne sont que géné→ rales; et lorsque vous l'aurez reconnu, accusezvous de votre péché d'une manière simple et naturelle. Par exemple, vous vous accusez de n'avoir pas aimé le prochain comme vous deviez; c'est peut-être parce qu'ayant bien connu le grand besoin d'un pauvre que vous pouviez aisément secourir et consoler, vous avez omis ce devoir de la charité: eh bien, accusez-vous de cette particularité, et dites que vous ne l'avez pas secouru comme vous pouviez, ou par négligence, ou par dureté de cœur, ou par mépris. De même, ne vous accusez point de n'avoir pas prié Dieu avec toute la dévotion que vous deviez; mais laissant cette accusation générale, qui ne sert de rien à la confession, dites simplement que vous avez eu des distractions volontaires, ou que vous avez négligé de ménager le lieu, le temps, la composition extérieure du corps et les autres circonstances nécessaires pour faire dévotement votre prière.

Ne vous contentez pas encore, dans l'accusation des péchés véniels, de bien marquer le fait ; accusez-vous du motif que vous avez eu. Ainsi,

dire que vous avez fait un mensonge qui n'a porté ancun préjudice à personne, ce n'est pas assez ; dites que ç'a été ou par une vaine gloire, afin de vous excuser, ou par une vaine joie, ou par opiniâtreté. Si vous avez péché dans le jeu, dites que ç'a été ou par le désir du gain, ou par le plaisir de la conversation, et observez-vous sur tous les autres péchés.

Il faut encore dire à peu près combien de temps votre péché a duré, puisque pour l'ordinaire la longueur du temps en augmente notablement la malice. En effet, il y a bien de la différence entre une vanité passagère qui se glisse dans l'esprit pour un quart d'heure, et une vaine complaisance dont le secret orgueil du cœur se sera nourri pendant un jour, deux jours, trois jours. Il faut donc, dans l'accusation d'un péché, en bien dire le fait, le motif et la durée; car, bien que, dans la confession des péchés véniels, on ne soit pas communément obligé à une scrupuleuse exactitude, et que même l'accusation n'en soit pas absolument nécessaire, cependant ceux qui veulent purifier leur âme pour parvenir à la perfection de la dévotion, doivent avoir un grand soin de bien faire connaître au médecin spirituel tout le mal dont ils souhaitent la guérison, quelque petit qu'il leur paraisse.

Ne manquez pas de dire tout ce qui sera nécessaire pour faire comprendre tout votre péché, et remarquez encore cet exemple: un homme qui

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