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m'apperçus que ma graine commençoit à fe flétrir.

Il y a fur cela une chofe remarquable, c'eft que pour peu que la faifon de la ponte & du tems qui la fuit foient plus chauds que de coutume, on voit huit jours après éclorre fur la graine une petite quantité des Vers & il en éclôt jufqu'aux premiers froids de la faint Michel, quoiqu'on ait jufqu'alors gardé les graines à la cave où le Thermométre monte jufqu'au quinzieme dégré il en éclôt une plus grande quantité lorfqu'on néglige de les loger au fraix en Eté & que le Thermométre marque vingt-cinq dégrés audeffus de o, dans fon expofition ordinaire : & peut-être que fi nous n'avions point d'hyver, tout éclorroit à la longue, pendant toute l'année comme il arrive au-delà de l'Afrique à l'Isle de Bourbon.

Cependant tout le refte de la graine qui a été exposé à le même chaleur ne paroît pas du tout altéré & ne fait mine d'éclorre qu'environ dix mois après; & cette même graine dont il

éclôt quelques Vers (b) réfifte aux couvées artificielles des trois expériences dont je viens de parler.

Je ne les pouffai pas plus loin, ces expériences, qu'on pourroit varier de bien d'autres façons; je les avois principalement entreprifes pour effayer, fi une feconde couvée pourroit réuffir en grand & produire dans la même année une feconde recolte : j'en compris la difficulté par cela feul que rien ne pût éclorre à ces deux ou trois couvées que j'avois faites.

Mais quand bien même même, on en viendroit à bout, fi ces couvées duroient autant que celles de mes ex

(b) La coque de ces vers précoces, qui ne fuivent pas la loi commune, étant peutêtre ou plus mince, ou plus poreufe, admet plus facilement la chaleur, ou donne une voie plus libre à la tranfpiration qui aide l'embryon à fe développer & hâte fa naif

fance.

Les Magnaguiers, au refte, ne s'effrayent point de ces naiffances prématurées qui ne tirent pas à conféquence pour le refte; ils en augurent bien au contraire, pour la bonté de la graine qui donne ce figne de fécondité

périences, comme on ne pourroit gue re les commencer qu'à la fin de Juin où les Papillons pondent encore, l'éducation des Vers tomberoit par-là en Septembre ou en Octobre, où l'on auroit peine à leur trouver de la feuille convenable, il faudroit leur choisir la plus tendre, fur la grande quantité de celle qui auroit trop de confiftance; ce qui n'eft tout au plus pratiquable que dans un fort petit effai.

Je fuppofe cependant qu'on peut faire une feconde couvée fuivie d'une éducation en grand; dont l'impoffibilité n'eft pas démontrée, & que les Vers à foie vinflent à réuffir malgré la faifon de l'Automne où les humeurs des animaux tournent aisément à la pourriture, fur-tout ceux qui y ont autant de tendance que les Vers à foie, il en résulteroit cependant un inconvénient pur nos mûriers qui devroit feul y faire renoncer pour ce Pays.

Ces arbres pouffant de nouveaux fcions chaque fois qu'on les cueille, on pourroit, ce femble, les dépouiller

deux fois de fuite dans la même faifon fans leur porter préjudice, fi les derniers fcions, ou ceux du troifieme rejet avoient le tems de s'aoû ter, ou de mûrir & de prendre leur croiffance, fans être expofés à des accidens: mais une feconde éducation, ou une feconde cueillette de feuille renvoye fort loin ce troifieme rejet, ou ce fecond regain; & la gelée furvenant là-deffus, le bout du fcion encore en herbe, fe brouit, ce qui ne manque pas d'endommager le mûrier s'il ne périt pas, il devient au moins abougri, & donne par confér quent moins de feuille les années d'après.

Ce dernier inconvénient mettra tou jours un grand obftacle à une feconde couvée, ou à deux éducations dans la même année; elles conviendroient mieux dans les Pays chauds tels que l'Italie où les arbres fe dépouillent plus tard de leurs feuilles. M. l'Abbé Nollet m'a dit, en effet, depuis la compofition de ce Mémoire, que les Florentins cueilloient fouvent deux F

fois l'année les mûriers, pour deux éducations & qu'on ne fe plaignoit pas que cela préjudiciât aux arbres; le climat favorifant fans doute cette opération.

Je fçai d'ailleurs de très-bonne part que dans la Lombardie, la Romagne & le refte de l'Italie, on s'en tenoit à une feule éducation par an: fi Malpighi fait mention de deux ou trois faites de fuite, ce font des effais en petit d'un curieux qui cherche à s'amufer, plutôt qu'à enrichir le public d'une utile découverte & que ce Scavant avoit eu fans doute occafion de faire, avec ce petit nombre de Vers que nous avons vû éclorre d'eux-mêmes huit jours après la ponte [c].

(c) C'est avec cette forte de Vers, que j'ai vu faire ici jufqu'à trois petites récoltes de cocons dans la même faifon, & dont le produit de chacune, ne paffoit pas au-delà d'une ou de deux livres de cocons, après des foins infinis qu'on y avoit donné; feu Mr. de Gournai Intendant de Commerce ine communiqua une obfervation qui rouloit fur des éducations de cette efpéce dont il comptoit que je pourrois profiter ; j'effayai d'en faire

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