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Ces changemens de couleur qui fe terminent à la cendrée, font un figne infaillible de fécondité étant occafionés par la formation progreffive du germe de l'œuf qui s'opére en cinq ou fix jours, plus ou moins, felon que la faifon où le fait la ponte eft ou ou plus chaude ou plus froide.

La graine stérile au contraire garde toujours la même couleur de jonquille, il arrive même le plus fouvent que ces eufs inanimés fe deffechent, ou que la coque s'applatiffe dans quelques jours: & il eft auffi impoffible qu'il vienne des vers à foie d'une pareille graine. (a) que de voir éclorre un pouffin d'un

(a) J'ai connu des Magnaguiers fenfés, mais mauvais obfervateurs, qui affuroient avoir fait éclorre des Vers à foie d'une graine vierge; quoiqu'il foit certain que nos infec tes fuivent en ceci la loi commune à tous les animaux il n'y a qu'un petit nombre d'exceptions qu'on n'a faites qu'après d'exactes & de réitérées obfervations: les Naturaliftes ont eu peine long-tems à croire le témoignage de leurs yeux, lorfqu'ils ont découvert que les Vers de terre, & les limaçons, quelques coquillages, les Pucerons les Polipes d'eau

œuf clair, ou de celui dont la mere n'a point été approchée du coq.

Les Magnaguiers qui ont vieilli dans le métier ne s'arrêtent point à ces minuties; ils s'appliquent à connoître les graines gâtées, telles que celles qu'on appelle morfondues, & les graines fimplement altérées, comme le font celles qu'on a tranfportées fans précaution & celles qui ont été mal hyvernées : il n'éclôt point de Vers des premieres; & ceux qui éclofent des dernières font mal fains; ce qui cft pire.

La graine morfondue eft celle dont le germe a peri: lorfque cet accident arrive parce qu'elle a déjà été mise à une chaleur trop étouffée, elle est ou blanchâtre, ou brune. Dans le premier cas elle est applatie & ne contient endedans aucune humidité : ni l'une ni l'autre ne pétille point fous l'ongle; elles font a legéres qu'elles furnagent

douce, &c. étoient androgynes, ou que chaque individu de ces efpéces avoit les deux fexes, quoique d'une façon différente les uns des autres.

dans l'eau ; & c'est ce qu'on appelle vulgairement & mal-à-propos, de la graine de deux ans.

On ne diftingue pas d'abord auffi aifément une autre forte de graine morfondue dont le germe a peri, pour avoir long-tems été renfermée dans quelque petit vafe bien bouché ; ou bien qui aura été un tems considérable dans un endroit trop humide: cette graine eft pleine & renflée comme les meilleures; elle pétille fous l'ongle, elle gagne même le fond de l'eau ; mais fa couleur eft d'un brun foncé ; & lors qu'on l'écrafe fous l'ongle il en fort une humeur Auide & coulante; au lieu qu'elle eft glaireufe & liée dans la bonne graine.

Du transport des Graines.

Il n'y a point de figne, que je fache, pour connoître les graines altérées dans un long tranfport d'un Pays à un autre, lorfqu'on l'a fait fans précaution: ainfi je me bornerai à indiquer celles que ce transport exige, ceux qui les

ignorent, ou qui les négligent en font les dupes, ou bien ils en font.

C'eft ce que j'ai appris d'un excellent obfervateur que j'aurai quelquefois occafion de citer; c'eft Mr. de la Nux Confeiller honoraire au confeil fupérieur de l'lfle de Bourbon & correfpondant de l'Académie des Sciences de France: il me marquoit il y a quelques années le fuccès des envois des graines Européennes qu'on lui avoit faits dans les Indes orientales. Il en avoit reçu en différens tems dans des boëtes de fer blanc, de grands & de petits paquets & toujours fans fuccès. Le trajet duroit cinq mois; les plus grandes chaleurs que les graines éprouvaffent en paffant fous la ligne n'étoient jamais plus fortes que celles de nos Etés ordinaires, c'eft-à-dire, de 25 dégrés au-deffus de zero, du Thermométre de M'. de Reaumur (a):

(a) C'eft aux dégrés de ce Thermométre que je rapporterai tout ce que j'ai à dire du chaud ou du froid dans la fuite de ces Mémoires. Je n'ai pas prétendu, au refte, en y faifant ufage de cet inftrument d'y affujettir

lorfqu'elles arrivoient à l'Ile de Bourbon & qu'on ouvroit la boëte, on étoit faifi d'une odeur d'aigre, caufée par une effervefcence de la transpirafion de la graine qui avoit croupi tout au tour & qui en annonçoit l'altération.

M'. de la Nux s'avifa d'un expédient qui lui réuffit toujours depuis, će fut de récommander à fes Commiffionnaires de faire pondre les graines fur des morceaux de toile (b) d'un pié quarré, fur chacun defquels il en tenoit quatre onces; on plioit la toile

les Vers à foie comme à une régle dont on ne påt bien fe paffer: mais il n'étoit gueres poffible de déterminer autrement jufqu'à un certain point, ce que j'avois à dire fur la chaleur qui joue un des principaux rôles dans l'éducation de ces infectes.

(b) On fait couver la graine dans les Indes Orientales fans la détacher de la toile ou du papier où elle a été pondue : nous la faifons pondre en Languedoc fur des matières d'où l'on puiffe la détacher aisément, lorsqu'il s'agit de la pefer pour la vendre, ou pour la mettre couver, comme nous le verrons ailleurs.

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