Images de page
PDF
ePub

traversent l'étoupe & s'échappent; rien n'eft capable de les arrêter, que la feuille de mûrier. Elle les attire (b) à des distances plus ou moins grandes, felon qu'ils font pouffés par la chaleur;

(b) J'avois fur un papier des Vers à foie nouvellement éclos; un jeûne de vingt-quatre heures les ayant mis en appétit, ils couroient pour chercher à le fatisfaire ; je leur préfentai à quelque diftance de la feuille tendre; ceux qui n'en étoient éloignés que de fept à huit lignes revinrent fur leurs pas pour gagner la feuille; ceux à qui la feuille. fut préfentée de plus loin, ou à un pouce, continuerent tous à s'éloigner; ils n'étoient qu'à la chaleur de l'air extérieur, qui étoit environ au vingtième degré au-deffus de zéro : lorfqu'elle eft plus forte ou que les Vers font dans un âge plus avancé, ils font attirés de plus loin par la feuille & ont plus de fenfibilité l'odorat ou l'organe qui en tient lieu & qu'on ne connoît pas, les dirige vers la feuille dans les plus épaiffes ténébres où la vue leur feroit d'un foible fecours: il eft naturel que cet organe, quel qu'il puiffe être foit plus développé dans un âge plus avancé & qu'il foit plus vivement frappé par les émanations qu'une chaleur plus forte aura excité dans la feuille.

en forte que quoiqu'il y ait de grands vuides entre les bourgeons & que la feuille même en foit flétrie, ils s'y fixent & ne paffent point au-delà.

Les Auteurs de Magnaguerie fe font accordés à dire que fi la feuille de mûrier venoit à manquer, il falloit avoir recours pour nourrir les Vers qui viennent de naître, à celle de l'Orme, du Chêne, du Rofier, de la Ronce, &c. alleguant pour raison une prétendue analogie entre ces arbres & Îe mûrier. Vida l'avoit dit le premier.

Ulmea per filvas & fumma cacumina carpat, His etenim arboribus multùm eft affinis origo.

Il n'en falloit pas d'avantage pour de ferviles Copiftes. Le célébre Malpighi avoit effayé fur la foi de Vida, de nourrir des Vers à foie de ces feuilles, qui leur font étrangères, ils n'y toucherent pas & périrent ; je l'ai tenté depuis, auffi inutilement. Ces feuilles n'attirent ni de près ni de loin nos infectes & s'ils viennent à en tâter comme cela arrive quelquefois, cela ne peut fervir qu'à les amufer deux

12

2] ou trois jours fans les faire croître. J'ai éprouvé d'ailleurs qu'ils pourroient jeû ner tout ce tems-là fans aucun rifque, pourvû qu'ils n'euffent que peu de chaleur mais il y a plus, la feuille de mûrier blanc pouffe tout auffi-tôt que ces autres arbres, fur-tout quand elle eft à un bon abri & qu'on a du jeune sauvageon, toujours plus hâtif; ils ne rifquent pas d'être brouis par la gelée.

Ainfi tout concourt à faire négliger ce prétendu fupplément qui feroit d'un trop foible fecours.

Ön attend pour faire la premiere levée que les bourgeons placés dans la boëte, foient fi garnis de Vers qu'ils en paroiffent noirs; on les prend legerement avec les doigts par quelque bout qui déborde, fans craindre de bleffer les Vers qui s'y trouveroient, & on les place à un pouce de distance l'un de l'autre au milieu d'un carton, d'un crible, ou d'un clayon [c] dont

(c) Nous nous fervons de clayons à rebord, vulgairement dits, Levadou, ou Campanége; c'eft une forte de panier à fond plat & en quarré long, comme l'Eventaire de Paris;

on a couvert le fond de gros papier gris.

Lorfqu'on veut fçavoir de bonneheure files Vers qui viennent de naître profitent, on place à part fur une grande feuille de ce même papier gris, ceux qui font éclos d'une once de graine, qu'on a couvée dans un nouet à part; on releve tout autour les bords de la feuille d'environ deux pouces pour que l'espace de l'aire foit mieux terminé & que les Vers, ni la litiere ne s'étendent point au-delà: l'aire de ces quarrés d'une grandeur connue étant comparée avec les Vers qu'ils contiennent dans un tems déterminé, donnent un rapport (dont nous parlerons ailleurs) qui fait juger de l'accroiffement ou du dépériffement des jeunes Vers.

Quand la couvée n'est que

de trois

il eft fait d'écliffe ou de cotons, c'est-à-dire, de lames minces de gaules de Chataigner ou de Coudrier, refendues & entrelaffées à claire-voie ; notre clayon eft long de trois pieds, large d'un pié & demi, avec un rebord de deux pouces de hauteur.

ou quatre onces; bien des Magnaguiers en placent le produit fur tout autant de ces quarrés, qui les inftruifent fur le champ, par le rapport dont nous parlerons, fi les Vers profitent & fi toute la graine eft venue à éclorre. Nous mettons enfemble & fur un même clayon toutes les levées d'un claffes jour, pour ne pas multiplier les clafdes Vers fes & les foins qu'il faudroit prendre

à foie.

Des

pour éviter de les confondre; il eft bon dans une couvée confidérable de faire autant de claffes qu'il y a de jours de naissance & de conferver jufqu'au bout cette inégalité d'âge , pour n'être pas obligé, lorfque les Vers s'apprêtent à filer, de ramer tout en un jour, ce qui eft fouvent impratiquable, & toujours fujet à de grands embarras. Mais lorsque la couvée n'est que de trois ou quatre onces de graine, ce feroit inutilement allonger les foins & la peine que de multiplier les claffes; il fuffit d'une feule, qui comprennent les levées de deux, ou tout au plus trois jours.

Jai dit, tout au plus trois jours, parce que de bonne graine de même

« PrécédentContinuer »