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en cueillir de nouvelle, que la provifion tire à fa fin: dans cet intervalle, il peut furvenir un bon rayon de foleil, ou de tems ferein; & fi cette reffource manque, on a celle de couper des branches de mûrier, des émondures, ou ce qu'on retranche fans-endommager l'arbre, & de les fufpendre à l'air, ou dans l'attelier, loin d'une fumée trop épaiffe, pour les cueillir enfuite quand tout est bien fec.

De plus, on fe rassûre pour l'avenir lorfque ces pluyes arrivent au commencement de l'éducation & qu'elles ont été affez abondantes pour que le tems fe foit refluyé; on peut fe promettre qu'elles ne reviendront pas dans la vieilleffe des Vers, ou bien, qu'elles ne perfévéreront pas affez, pour les incommoder, ou pour ôter aux Magnaguiers le loifir de cueillir de la feuille féche.

Enfin la pluye qui tombe de bonneheure procure un avantage réel en favorifant à propos la végétation de la feuille, qu'elle attendrit, qu'elle développe & qu'elle rend plus abondante.

Les Magnaguiers font dans un tout autre embarras, lorfqu'il vient à pleuvoir au tems de la vieilleffe, ou de la grande freze des Vers, où les befoins font plus preffans; ils le font bien plus encore, s'ils font furpris, ayant à peine la provifion d'un jour; fi la pluye dure fans relâche un jour & demi, ou au-delà; la reffource des branches coupées feroit infuffifante, à moins de vouloir tout mettre à bas ; ce qui feroit fujet encore à des difficultés; il vaut autant cueillir la feuille fur l'arbre, quoique mouillée; mais comment la faire fécher ?

La feuille de mûrier eft une de celles qui retiennent le plus la meilleure: s'il en falloit peu, on viendroit bien-tôt à bout de la fécher, en l'éparpillant beaucoup, en la retournant de tems à autre, en la remuant enfin dans un drap élimé qui en abforbât les gouttes d'eau; mais il faut des repas abondans à une grande chambrée; les appartemens les plus fpacieux fuffiroient à peine pour étendre, comme il faut, plufieurs quintaux de feuille; quel parti faut-il pren

dre?

Donnera-t'on aux Vers de la feuille toute dégouttante d'eau ? Mais elle a fouvent fait crever les trois quarts d'une chambrée. Les fera-t'on jeûner? Mais fi le jeûne ne leur nuit pas, il allonge au moins inutilement leur vie, & occafionne plus de dépense; manquent un repas, fur trois ou quatre qu'on a coutume de leur donner, ils feront retardés d'un jour de plus; que fera-ce fi l'on retranche tous ceux d'un, ou deux jours.

s'ils

Pour répondre à ces difficultés; je dis que les Vers à foie font dans ces circonftances, ou maladifs, ou bien, qu'ils jouiffent d'une fanté vigoureufe; & l'on reconnoît ce dernier état, fi l'on ne voit que peu, ou point de gras, ou d'autres malades & s'ils ont promptement achevé leur faire des reftes.

repas, fans

Dans

faut-il

ou refu

Dans le premier cas il y en a y en a pas quelle de doute qu'il faut les faire jeûner, occafion quelque retard que cela doive appor- donner ter; ils ne réfifteroient pas à l'épreu- fer aux ve de la feuille mouillée, de la plumême, la plus pure: le jeûne loin la feuil

ye,

Vers à

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le mouillée.

de leur nuire, eft plutôt capable de les remettre & de les tirer de l'état de langueur : j'ai fait jeûner des Vers à soie pendant deux jours au fortir de la quatriéme mue, qui ne s'en font pas plus mal-portés. Mais lorsqu'on eft réduit à ces extrêmités, on fe contente de boucher les portes & les fenêtres & l'on ne fait que peu, ou point de feu dans l'appartement des Vers: on les laisse à la température naturelle, toujours fraîche dans des tems pluvieux: ils fe morfondroient à la chaleur qu'on a coutume de leur donner dans ces occafions, elle ne feroit qu'irriter les organes de la nutrition, en excitant un appétit qu'ils ne peuvent point fatisfaire.

Si, au contraire, les Vers à foie font robustes, & dans le grand appétit de la freze, il n'y a pas de rifque de leur fervir de la feuille mouillée de la pluye de Marin; en retardant cependant le repas de quelques heures, pour leur donner le tems de fe vuider & pour éguifer d'avantage leur appétit. Il y a des exemples fans nombre de

repas

repas donnés dans ces circonftances avec de la feuille qui dégouttoit de toute part, fans que les Vers à foie en reçuffent la moindre incommodité; la force de leur tempérament, jointe à la chaleur des feux de flamme, qu'on allume aux quatre coins de l'attelier, fuffifent pour faire transpirer l'humeur furabondante que les Vers ont avalés. On a foin auffi dès-que le repas eft achevé; d'en lever la litiere; foit pour diminuer l'humidité des tables; foit pour empêcher que la litiere, qui en eft ellemême furchargée, ne fe corrompe fous les Vers à foie.

Ce n'eft, au refte, qu'à la freze, comme je l'ai dit, qu'on peut fans conféquence donner de la feuille mouillée, & je ne confeillerois pas de le hazarder immédiatement avant, ou après la mue: heureusement que les Vers à foie ne font point alors en appétit. Si cependant, au lieu de les faire jeûner, l'on fe détermine à leur jetter quelques

repas; il faut fi peu de feuille, qu'il

eft aifé d'en avoir de féche; il n'y a qu'à en charger un drap qu'on tient III. Partie

D

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