par les quatre coins & la faire fauter en l'air, comme fi l'on donnoit la berne; il en tombera peu-à-peu à chaque fois fur le carreau, que je fuppofe bien balayé, & lorfqu'on fera las de cet exercice & que la feuille fera toute répandue à terre, elle sera suffisamment féche.

De la feuille mouillée de Rofée.

Ce que nous venon's de voir fur les qualités de la feuille mouillée, d'eau de pluye, convient à tous égards à celle qui l'eft de rosée.

Ce météore eft une vapeur qui s'exhale de la terre > comme celle qui forme la pluye d'orage & qui s'éleve de même, mais feulement à quelques toifes; beaucoup plus dans les fonds, que dans les endroits élevés & aërés: celle qui rencontre fur fon chemin les feuilles des arbres, s'y attache également deffus comme deffous; le refté, s'il vient à être condensé, retombe peu-à-près fur l'endroit même d'où il étoit forti, à moins que le

vent ne l'emporte au-de-là.

La rofée de certains pays, paffe conftamment pour n'être pas malfaifante, parce que ce n'eft peut-être que de l'eau pure; elle l'eft plus ou moins dans d'autres, felon le climat, le terroir & le degré de chaleur qui l'éléve: telle eft celle qui produit le goëtre aux brebis qu'on méne paître trop matin; & celle qui caufe des ophthalmies fur des yeux délicats, qu'on expose au ferein, ou à la rofée du foir.

De-là, il n'eft pas étonnant que la feuille mouillée d'une certaine rofée, tue les Vers qui en mangent; tandis qu'une autre ne les incommodera pas: l'une eft plus mêlée ou moins pure que l'autre & contient probablement des molécules ou falines, ou huileufes, qui fe joignent à l'eau dont la rofée eft principalement compofée. J'ai fait perir un grand nombre de Vers à foie en jettant fur la feuille de leurs repas des infufions de fel, que je réduifois en rofée, en les foufflant avec la bouche. Une expérience que je fe

feuille

rier ta

chée.

fois dans une autre vûe, mais de la même façon que celle-ci, avec du vin foufflé fur la feuille, produifit fur tous les Vers à foie qui en mangerent, un effet tout pareil. Il eft aifé d'éviter tous les rifques, que les Vers à foie pourroient courrir de ce côté : il n'y a qu'à cueillir la feuille, lorfque le foleil, ou le vent en ont diffipé toute l'humidité.

Les qualités de certaines rofées & De la probablement de celle qui eft saline de ma fe manifeftent par leurs effets, nonfeulement fur les Vers à foie qu'elles tuent; mais fur la feuille elle-même qu'elles tachent, en defféchant les endroits qui en ont été touchés. J'ai produit artificiellement des taches pareilles en jettant fimplement de l'urine fur un mûrier; lorfqu'elle n'eft pas promptement defféchée, qu'elle féjourne & que le tems eft chaud, les fels de l'urine mis en jeu par la chaleur, percent, déchirent le tiffu intérieur de la feuille, qui féche par cela même, à l'endroit de la petite goutte où la feve ne fe porte plus.

Il reste fans doute quelques molé

cules falines fur la feuille, après que toute l'humidité en a été diffipée ; & c'eft pour cela, au moins je le conjecture, que les Vers qui ont été nourris de feuille tachée, ne font

pas commu

nément auffi fains que les autres ; quoiqu'ils ne rongent pas d'ailleurs à l'endroit même de la tache.

y

Les brouillards produisent de même quelquefois des taches féches & noirâtres fur la feuille de mûrier ; & comme ils font plus fréquens dans les fonds & au voifinage des Etangs & des Rivieres; les feuilles de ces endroits font auffi plus exposées à être tachées. Certains mûriers font auffi plus fujets que d'autres, indépendamment de leur expofition; telle eft la feuille du mûrier colomba dont le fruit est noir; la feuille, au contraire du mûrier à mûres grises, ou d'une foible nuance pourpre, tache moins que les autres. J'ai eu occafion une fois, de voir ces deux fortes de feuilles fur un même pied de mûrier, qui portoit deux greffes différentes; l'une de mûrier à mûre grife, qui n'avoit aucune

tache; tandis que les feuilles de l'autre en étoient toutes couvertes: ce qui peut venir d'un tiffu plus délicat dans ces derniers, que dans celles qui n'avoient point de taches.

Enfin les mûriers plantés dans l'intérieur des Villes & à quelque distance au-dehors, ne font pas fujets à être tachés ce privilége s'étend plus ou moins loin, felon l'étendue des Villes, ou Villages & felon qu'ils font plus ou moins habites; il eft certain que l'Athmofphére de ces endroits eft plus chaude de trois ou quatre degrés que l'air de la plate Campagne : cet excès de chaleur raréfiant d'avantage la vapeur des rofées, la diffipe au loin probablement, ou la defféche fur la feuille, avant qu'elle y puiffe faire quelque impreffion. [a]

(a) Les taches qui furviennent à la feuille paffent avec raifon pour être une dégradation qui la déprife; auffi les particuliers qui en ont acheté & à qui cet accident arrive après l'achât, ou la convention, font en droit de demander une indemnité au Propriétaire des mûriers; tout comme pour la feuille brouye