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tems égal, fur les premiers, que ne feroient les plus habiles ouvriers fur les autres, où ils ne montent même fort fouvent, qu'au péril de leur vie ; comme l'expérience malheureusement répétée toutes les années ne le prouve que trop: indépendamment donc de ce péril, qui fait frémir l'humanité, il y a à gagner pour la main-d'œuvre, dans l'effeuillage, ou la cueillette des Mûriers nains.

En fecond lieu, les Mûriers de cette taille, formés dans bien moins de tems que les autres , rapportent beaucoup plutôt au Propriétaire, qui eft preffé de jouir & de fe dédommager d'une partie des cultures; outre que ces cultures font moins cheres dans ces plantations, où prefque tout le terrein eft mis à profit dès les premieres années par la difpofition des nains, plantés tout près l'un de l'autre.

Il y a plus ; les Mûriers nains greffés de belle efpéce, pouffant tout aufsitôt que la Pouréte, toujours très hâtive, font d'une grande reffource pour les pays chauds où l'éducation des Vers

à foie ne réuffit guere, qu'autant qu'elle eft avancée; c'est pour cela que dans bien des endroits où la plantation principale eft de Mûriers de tige; on a un enclos de mûriers nains bien abriés, qui fournit aux premiers befoins des Vers à foie.

D'ailleurs la féve ayant moins de chemin à faire dans les Mûriers nains & moins d'obstacles à furmonter pour arriver aux branches, doit naturellement s'y porter avec plus de facilité & même avec plus d'abondance, que dans les arbres de tige; les forces étant plus ramaffées dans les premiers, elles y agiffent avec plus d'avantage: auffi les terres les plus maigres, les plus arides, ou les Mûriers de tige languiroient, quoique bien cultivés, ou rapporteroient peu ; ces terres ; dis-je, avec la même culture, fuffifent pour la réusfite des Mûriers nains : c'eft dequoi l'on pourroit fe convaincre à Aubénas en Vivarez, où Monfieur Payan a formé dans le terrein le plus ingrat, une grande plantation de Mûriers nains,qui fait honneur à l'intelligence & au zèle

Patriotique de cet habile Cultivateur : c'est à fon exemple qu'on doit les plantations de cette efpéce, qu'on commence à fubftituer aux anciennes dans nos Cantons.

Enfin l'expérience confirme que la feuille de ces arbres est tout auffi faine pour les Vers à foie, que celle des Mûriers de tige; en obfervant de ne donner à la freze, que celle des plus vieux & de réserver pour les premiers âges la feuille des nouvelles plantations; tout comme le pratiquent ceux qui n'ont que des arbres de tige.

On pourroit douter feulement, que des arbres plantés fi près l'un de l'autre, comme le font les Mûriers dont nous parlons, fuffent de longue durée. On eft généralement porté à croire, que les racines fe croifant de mille manières, doivent fe nuire mutuellement & épuifer bien-tôt les fucs de la terre.

Je puis oppofer à ce préjugé défavorable, deux obfervations capables de le diffiper. Je vois depuis vingt-cinq ans une centaine de Mûriers nains long-tems négligés, & aujourd'hui en

bon état par les foins qu'on en prend : ils font plantés dans une longue bande de terre, d'une toife de largeur, bordée d'un côté par un mur de maçonnerie, & de l'autre par une berge à pic, de terre franche, auffi impénétrable aux racines qui le mur puifle l'être : il y a cependant dans un espace auffi refferé, deux rangées de Mûriers nains, plantés à trois pieds en tout fens l'un de l'autre.

Je fçai d'ailleurs, qu'il y a à Bagnols de vieilles fouches de Mûrier d'un pié de hauteur & de neuf à dix pouces de diametre, qui ne font efpacées entr'elles que d'une toife.

Tout dépend, pour la durée & la beauté des arbres, de la fertilité du terrein, ou de la culture qui fupplée à fa ftérilité & à fon peu d'étendue. Si deux labours ne fuffifent pas, on en donne trois, on en donne quatre; on fume, on émonde, on arrose même s'il eft poffible.

C'est par ces moyens qu'on éléve dans une caiffe étroite les plus beaux Orangers dont les racines entaffées

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en une épaiffe touffe, forment un vo◄ lume moins étendu que celui des branches de cet arbre. Mais fi ces cultures ne font pas praticables en tout ou en partie, pour celui dont nous parlons & qu'il commence à languir, il n'y a qu'à ravaler fes branches de bonneheure & proportionner à peu près leur longueur, fur celle que les racines peuvent prendre; afin qu'il n'y ait pas plus à nourrir de celles-là, qu'il ne peut venir de nourriture de celles-ci; & que la dépense de la séve par les feuilles, n'excéde pas la recette , pour ainfidire, des fucs qui la forment dans les racines, qu'on peut regarder comme l'eftomac de la plante.

Les zèlés partifans des Mûriers nains, prétendent que de deux Champs d'égale étendue & plantés en plein l'un de Mûriers de haute tige, l'autre de nains, aux distances ordinaires c'est-à-dire les premiers clair-femés ou au large; & les nains fort ferrés ; ils afsûrent, dis-je, que ces derniers produiront plus de feuille, que ceux de l'autre champ: mais cela n'eft vrai

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