Images de page
PDF
ePub

S 8. DE LA NÉCESSITÉ DES CRADES POUR DIVERSES

PROFESSIONS.

152. Le conseil de l'Université présentera un projet dans

'Depuis 1811, trente-quatre années se sont écoulées, pendant lesquelles l'ardeur de savoir et la nécessité de faire ses preuves sont loin d'avoir diminué, La forme de gouvernement que nous devons à la Charte était merveilleusement propre, au contraire, à faire sentir de plus en plus combien une instruction grave et solide est nécessaire à tous ceux qui veulent dignement servir le Roi et la patrie. Aussi, le conseil de l'Université s'était-il occupé, dès 1814, d'exécuter la disposition qu'on lit ici.

D'ailleurs, l'idée de soumettre à l'obligation de prendre des grades divers états de la société qui supposent un esprit cultivé et une instruction acquise dans un degré remarquable, n'est pas une idée nouvelle. Elle existe dans les statuts de l'Université de Turin: on la trouve dans l'histoire de nos anciennes Universités. Ainsi, en ce qui regarde particulièrement les grades pour les fonctions ecclésiastiques, on lit dans les cahiers des Etats généraux de 1576, cet article, tiré des remontrances des Universités, appuyées par la noblesse: Toutes personnes ayant office ou charge EN L'ÉGLISE OU EN LA JUSTICE, seront graduées du degré >> digne de leur office ou charge. »>

Nous espérons provoquer d'utiles réflexions et håter le moment où les fonctionnaires publics auront un moyen de plus de s'environner de toute la considération qui fait leur force, en reproduisant ici les principales dispositions du projet qui fut présenté au gouvernement il y a trente ans:

Grades en théologie 1.

83. A dater du 1er janvier 1816 2, le grade de docteur en théologie sera nécessaire pour être professeur ou agrégé dans une des facultés de théologie.

Le grade de licencié en théologie sera nécessaire pour être archevêque, évêque, vicaire général, official, promoteur, grand pénitencier, supérieur de séminaire. Le grade de bachelier en théologie sera nécessaire pour être dignitaire de chapitre, curé de ville ou de canton, professeur dans un séminaire, aumônier de l'école normale, des colléges royaux et des diverses écoles royales.

86. Les dispositions des articles précédents sont de rigueur à l'égard des aspirants qui, à l'époque de la publication des présentes, n'auraient pas encore vingt et un aus accomplis; ils ne pourront, à dater du 1er janvier 1816, ni être affranchis de l'obligation de produire les diplômes de ces grades, ni être dispensés du temps d'étude et des autres épreuves requises.

Ceux qui seraient àgés de plus de vingt et un ans, mais n'auraient pas vingtcinq ans accomplis, seront tenus, à dater du 1er janvier 1816, d'être gradués en théologie pour être appelés aux fonctions qui viennent d'être désignées; ils pourront toutefois obtenir du grand-maître de l'Université, d'après l'avis d'une faculté de théologie, la dispense d'une partie du temps d'étude, ou du temps d'intervalle entre les grades.

Quant à ceux qui, à cette même époque de la publication des présentes, auraient vingt-cinq ans accomplis, ils sont dispensés de toute présentation de diplôme de grades; et néanmoins, à défaut de grades, et à compter de 1816, ils ne seront admis à l'exercice de ces fonctions que sur un certificat de capacité, délivré par une faculté de théologie, visé par le recteur de l'académie, et ratifié par le grand-maitre de l'Université.

87. Jusqu'à ce que les facultés de théologie soient établies, les élèves des

1 Nous avons rappelé précédemment, page 49, la loi et l'ordonnance qui exigent cette sorte de grades. Peut-être y aurait-il encore quelque chose à prendre dans le projet du conseil, lorsqu'on préparera ou discutera la loi générale sur l'instruction publique.

a Au lieu de ces dates, qui couvenaient en 1814, on pourrait maiutenant substituer, par exemplo. 1850 à 1816, et ainsi de suite.

lequel il indiquera les professions auxquelles il conviendra

séminaires situés hors des chefs-lieux de ces facultés pourront obtenir le grade de bachelier, en produisant la preuve qu'ils ont étudié trois ans dans un séminaire, à la charge de se présenter ensuite devant une des facultés de théologie, pour subir un examen et soutenir une thèse publique.

88. Les articles ci-dessus, en ce qui est relatif aux professeurs et agrégés des facultés, aux vicaires généraux, aux supérieurs de séminaire, et aux curés, sont applicables, pour les facultés et les églises protestantes, aux professeurs et agrégés de faculté de théologie, aux supérieurs de séminaire, et aux pasteurs.

Grades en droit,

90. A compter de la publication des présentes, il sera nécessaire d'avoir obtenu le diplôme de licencié en droit, pour être appelé à l'exercice des fonctions :

De conseiller d'Etat ou de maître des requêtes, attaché au comité de législation ou à celui du contentienx;

De secrétaire général du conseil d'État ;

De greffier des comités de législation ou du contentieux ;

De président, procureur général, maître ou référendaire de la Cour des comptes;

De conseiller de préfecture;

De notaire de première classe ;

De greffier en chef ou de greffier audiencier de la Cour de cassation, de la Cour des comptes, ou d'une Cour royale;

D'inspecteur ou de directeur de l'administration de l'enregistrement et des domaines;

De chef du contentieux dans une administration publique ;

De secrétaire général ou chef de division de la chancellerie de France;

De secrétaire d'une faculté de droit.

91. Il sera nécessaire d'avoir obtenu le diplôme de bachelier en droit pour

être nommé :

Avoué près une Cour royale ou près un tribunal de première instance, établi dans une ville chef-lieu de département;

Notaire de seconde classe ;

Greffier en chef ou audiencier d'un tribunal de première instance, ou d'un tribunal de commerce.

92. Nul ne pourra être nommé notaire de troisième classe, ni agréé aux tribunaux de commerce, s'il ne justifie qu'il a suivi un cours dans une faculté de droit, et qu'après un examen subi devant cette faculté, il a obtenu un certificat de capacité, visé par le recteur de l'académie, et ratifié par le grand-maître de l'Université.

93. Les dispositions des art. 90, 91 et 92 ne sont pas applicables aux individus qui, au moment de la publication des présentes, seront agés de vingt et un ans accomplis, ou qui, n'ayant pas encore atteint cet age, justifieront que, pendant quatre années antérieures à cette publication, ils avaient travaillé chez un avoué ou chez un notaire de première ou de seconde classe. Néanmoins, ces individus ne pourront être admis à l'exercice des fonctions énoncées dans l'art. 90, qu'après avoir subi deux examens, ou soutenu une thèse devant une faculté de droit, et obtenu de cette faculté un certificat de capacité, visé par le recteur de l'académie, et ratifié par le grand-maitre de l'Université. Ils ne pourront être admis à l'exercice des fonctions énoncées dans les art. 91 et 92, qu'après avoir subi un examen devant une faculté de droit, et obtenu un certificat de capacité, visé et ratifié.

94. Ceux qui, avant la publication des présentes, auront obtenu un certificat de capacité dans la forme prescrite par le décret du 4o jour complémentaire de l'an XII, ne seront tenus que de subir un nouvel examen pour être appelés à l'exercice des fonctions énoncées dans les art, 91 et 92.

95. Les individus compris dans les deux articles précédents ne payeront pour

d'imposer l'obligation de prendre des grades dans les diverses facultés.

(Décret du 15 novembre 1811, art. 187.)

chaque grade que la moitié des rétributions fixées par le décret du 4o jour complémentaire de l'an XII.

96. Il n'est rien innové dans les dispositions :

1 De l'art. 23 de la loi du 22 ventose an XII, et des art. 64 et 65 de la loi du 20 avril 1810, qui exigent le grade de licencié en droit pour l'exercice des fonctions de juge, de suppléant, ou du ministère public dans les Cours et tribunaux ; 2o Du décret du 16 mars 1808, qui porte que les conseillers auditeurs près les Cours royales seront pris parmi les avocats.

L'art. 26 de la loi du 22 ventôse an XII continuera à être exécuté quant aux avoués près les tribunaux de première instance, établis hors des chefs-lieux de départements.

97. Les individus qui obtiendront le diplôme de docteur en droit seront dispensés de deux années du stage pour l'inscription sur le tableau des avocats. Ceux qui obtiendront le diplôme de licencié en droit seront dispensés de deux années du stage, requis pour le notariat par la loi du 25 ventôse an xi. Ceux qui obtiendront le diplôme de bachelier seront dispensés d'une année du stage.

98. Ceux qui auraient pris au moins quatre inscriptions dans une faculté de droit, et qui, n'ayant interrompu leurs études que pour servir dans les armées, rentre raient dans leurs foyers avec un congé en bonne forme, et seraient âgés de vingtcinq ans accomplis, seront dispensés du temps d'études pour obtenir le diplôme de licencié ou de bachelier, mais à la charge de soutenir les examens et les actes publics prescrits par le décret du 4o jour complémentaire de l'an XII, et en vertu des présentes.

101. Les diverses dispositions de l'art. 31 du décret du 17 mars 1808 sont appliquées et modifiées ainsi qu'il suit:

Les maîtres de pension du premier ordre restent assujettis à l'obligation d'être bacheliers dans les lettres et les sciences. Les directeurs des écoles secondaires ecclésiastiques seront aussi bacheliers dans les lettres et dans les sciences. Les maitres de pensions du second ordre ne seront tenus que d'être bacheliers és lettres.

Les agrégés des colléges royaux et les régents des collèges communaux devront être bacheliers és lettres et ès sciences. Ceux des régents qui enseigneront la rhétorique ou la philosophie seront au moins licenciés dans la faculté des lettres. Les principaux de colléges communaux seront licenciés dans les lettres et bacheliers dans les sciences.

Les proviseurs de colléges royaux seront docteurs és lettres et bacheliers dans les sciences.

Les censeurs seront licenciés dans les lettres et bacheliers dans les sciences. Les professeurs de quatrième, cinquième et sixième dans les colléges royaux seront bacheliers dans les lettres; les professeurs de troisième et de seconde seront licenciés; les professeurs de rhétorique ou de philosophie seront docteurs. Les professeurs de ces trois ordres seront en outre bacheliers dans les sciences.

Les professeurs des sciences physiques et mathématiques dans les colléges royaux seront licenciés dans les sciences.

Les professeurs et les agrégés dans les facultés des sciences et des lettres seront docteurs dans les sciences ou dans les lettres, suivant la nature de leur enseigne

ment.

102. Les secrétaires d'académies et les secrétaires de facultés seront au moins bacheliers és lettres et és sciences.

103. Il faudra être pourvu du grade de bachelier és lettres :

Pour être nommé conservateur d'une bibliothèque publique ;

Pour être reçu imprimeur ou inspecteur de la librairie.

Cette dernière disposition ne sera exécutée, pour les imprimeurs, qu'à dater de 1820.

105. A dater du 1er janvier 1818, les architectes experts et les arpenteursjurés ne seront admis à l'exercice de leurs fonctions qu'après avoir subi, devant

une faculté des sciences, un examen sur les principes de leur art, et obtenu d'elle un certificat de capacité.

107. Les anciens maltres és arts ne pourront requérir que le grade de bachelier; mais ils auront droit au diplôme de bachelier dans les sciences et les lettres; et ils ne payerout que les droits de diplôme '.

Les vœux exprimés par le conseil royal ont été réalisés en partie. Dès le 26 decembre 1809, l'empereur avait voulu que cette garantie des grades universitaires fût exigée des jeunes gens qui sera ent admis à participer, comme auditeurs, aux travaux du conseil d'Etat. Ceux, dit le décret, qui aspireront au titre d'auditeur au conseil d'Etat devront être licenciés en droit ou licenciés és sciences, et subir, avant leur prestation de serment, uu examen de capacité devant trois membres du conseil d'Etat commis par nous. Plusieurs administrations ont suivi cet exemple.

On aura peut-être remarqué avec quelque étonnement que, parmi les emplois pour lesquels il a paru convenable d'exiger la garantie d'un premier grade dans les lettres et dans les sciences, se trouve celui de directeur d'une école secondaire ecclésiastique. Mais un peu de réflexion sur le but important de ces grades, comme aussi sur l'esprit du siècle et sur les dispositions actuelles de la plupart des hommes par rapport à la religion et à ses ministres, doit dissiper cette premiére surprise. Plus que jamais, la religion doit être montrée conforme à la raison, au-dessus et non pas contre, comme Pascal le dit et le prouve. Plus que jamais, par conséquent, les ministres de la religion doivent s'efforcer de joindre à la science des choses divines l'instruction dans les lettres et dans les sciences humaines, afin de prouver d'autant mieux qu'eux aussi veulent écouter et suivre la raison, et que plus la raison s'éclaire, s'étend et se fortifie, plus elle s'approche des vérités religieuses, qui sont la raison éternelle et souveraine.

L'ordonnance même du 5 octobre 1814, qui a si impolitiquement retranché de l'Université ces sortes d'écoles, semble inviter les élèves ecclésiastiques à se munir du grade de bachelier és lettres. Il est assez simple qu'on désire une instruction plus étendue et plus complète dans le supérieur de ces mêmes élèves.

P. S. La note qui précède appartient à notre première édition publiée en 1828. Tout ce que nous disions alors, nous le disons à plus forte raison aujourd'hui. Il est plus évident que jamais que l'ordre social a besoin de l'appui de la religion; que la religion a besoin, pour la France surtout, d'un clergé dont l'instruction égale le dévouement et les vertus; que cette instruction des membres du clergé doit se prouver et se manifester au grand jour comme celle des autres hommes destinés à remplir les diverses professions de la société; qu'enfin les grades publiquement et sévérement donnés sont les épreuves communes par lesquelles les ecclésiastiques doivent recouvrer l'antique renommée de science et de lumière dont le clergé français avait su s'environner pour la gloire et le bonheur du pays et pour la civilisation du monde.

N. B. Cette seconde note a paru dans la 2oédition du Code universitaire, en 1835. Nous n'avons pas besoin de faire remarquer combien la polémique plus ou moins ardente, plus ou moins éclairée, qui, depuis trois ou quatre ans, agite les esprits, a dù nous confirmer dans l'opinion que nous avions précédemment émise sur la nécessité d'une vraie et solide instruction dans tous les membres du corps ecclésiastique; et nous n'hésitons pas à le dire: cette polémique irritante, qui à été l'occasion et la cause de beaucoup de mal, aura en définitive produit un grand bien. Tout le monde aujourd'hui veut également deux choses, un clergé savant, des écoles religieuses.

Voir page 6, au titre 1er, de l'Organisation générale, les grades exigés pour les fonctions universitaires.

⚫ Cette disposition du décret vient d'être confirmée par la loi du 21 juillet 1845 sur le conseil d'État.

[merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

I

153. Il sera établi des lycées pour l'enseignement des lettres et des sciences.

Il y aura un lycée, au moins, par arrondissement de chaque tribunal d'appel.

(Loi du 11 floréal an x, 1er mai 1802.)

Le nombre des lycées dans toute l'étendue de l'empire sera porté à cent. Ceux qu'il faudra ériger en conséquence seront établis dans le plus court délai possible, et de manière qu'il y ait au moins quatre-vingts lycées en activité dans le cours de 1812, et les vingt autres dans le cours de 1813.

Le grand maître de l'Université, d'après les renseignements fournis par les recteurs, de l'avis des inspecteurs généraux, et sur délibération du conseil de l'Université, proposera, d'ici au 1er mars, le tableau des colléges qui devront être érigés en lycées, lesquels seront pris parmi ceux des villes les mieux situées, les mieux pourvues de locaux et de moyens, et qui auront montré le plus de zèle pour l'instruction, pour être par nous statué en notre conseil d'Etat et sur le rapport de notre ministre de l'instruction publique.

Les communes dont les colléges seront érigés en lycées continueront à pourvoir aux dépenses de premier établissement et à l'entretien des locaux, en ce qui concerne les grosses réparations.

Les locaux des lycées existants seront, dans le courant de l'année, mis en état de contenir, autant que possible, trois cents élèves. S'il est, à cet effet, besoin de fonds à fournir par les villes on arrondissements, il y sera statué comme il est dit à l'article précédent.

1 En 1814, les lycées ont reçu le nom de colléges royaux.

« PrécédentContinuer »