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plus grande influence en ces matières; c'est lui qui fixe en dernier lieu la valeur des produits, en proportion de ses goûts et de sa fortune1.

La Estafeta de Madrid. Empruntons lui quelques données sur la frappe des pièces d'or, d'argent et de bronze en Espagne, depuis la fin d'octobre 1868 (loi nouvelle), jusqu'en juin 1896. Pièces d'or de 10 francs (ou 10 pesetas), 20 francs et 25, en tout 43.081.655 pièces valant 1.046.933.070 francs. Monnaies d'argent, pièces de 20 et 50 centimes, de 1,2 et 5 pesetas (francs), 288.020.612 pièces valant 947.996.275 fr. 90. Monnaies de bronze, 1.055.169.565 pièces de 1, 2, 5 et 10 centimes, valant 58.722.212 fr. 96. Pour un pays qui à la réputation d'être pauvre comme l'Espagne, une somme totale de plus de 2.053 millions ne semble pas déjà si faible.

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El Economista mexicana du 12 septembre 1896 annonce qu'à partir du 16 du même mois le système métrique des poids et mesure entrera « vigoureusement » en vigueur. Ces changements ne sont pas sans jeter quelques troubles dans le commerce de détail, aussi les feuilles locales cherchent à les prévenir en donnant les explications nécessaires. C'est en tout cas un progrès.

Sur la répartition de l'impôt nous trouvons dans ce journal un tableau indiquant quelle est la cote moyenne par tête dans chaque province; voici d'abord les cinq provinces (ou divisions politiques. où la charge fiscale est la plus faible: Aguascalientes, 0,26 dollars; Guerrero, 0,28 dollars; Durango, 0,41; Veracruz, 042; Puebla, 0,47; voici où la charge est le plus élevée: Sonora, 2 dollars 61; Morellos, 2,66; Hivalgo, 2, 89; Yucatan, 3.09; San Luis Potosi, 3,15.

Prenons, pour terminer, le curieux renseignement suivant dont on a calculé les chiffres pour 1896 (nous remplaçons les derniers chiffres par des zéros). Il existe actuellement sur la terre 67.254.000 chevaux, 8.865.000 ànes et mulets, 312.055.000 bètes à cornes, 511.390.000 bêtes à laine, 102.969.000 porcs, 31.992.000 chèvres. Il y a dans ces nombres des fluctuations, assez sensibles même, d'une année à l'autre, puisqu'en ces trois dernières années le nombre des bêtes à laine a diminué de 20 millions.

MAURICE BLOCK.

1 Nous faisons ressortir ce point de vue dans la 2e édition de notre Progrès

de la Science économique, qui paraîtra en février prochain.

LA RÉPARTITION

DE LA RICHESSE EN FRANCE

Le refrain favori des contempteurs de la civilisation moderne consiste à dire que les riches deviennent de plus en plus riches, et les pauvres de plus en plus pauvres.

Les antithèses plaisent aux esprits superficiels, mais les hommes sérieux doivent, surtout en si grave matière, en appeler aux faits. C'est ce que nous nous proposons de faire sommairement, en donnant les chiffres de la répartition actuelle de la richesse en France. Commençons par la propriété foncière.

I

Les rapports des contributions directes donnent pour 14 millions de cotes foncières, 8.500.000 propriétaires; pour la propriété non bâtie, 6 millions 1/2.

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Je suppose, dit M. Yves Guyot, qu'il y ait double emploi, que le même propriétaire le soit des propriétés non bâties et des propriétés bâties: nous éliminons donc les 6 millions 1/2 de propriétaires de propriétés non bâties. Il reste 8.500.000 propriétaires de propriétés bâties. Un chef de famille, en France, représente 4 personnes. Par conséquent, si vous multipliez 1.500.000 par 4, vous trouverez 34 millions de personnes sur 38 millions qui sont propriétaires ou directement ou indirectement; on peut donc dire que tout le monde, en France, est propriétaire dans une mesure plus ou moins grande (1). »

Le plus grand nombre de ces propriétaires ne possèdent, dit-on, que « des haillons de propriétés », des parcelles insignifiantes. Il ne tient qu'à eux de les agrandir par leur travail et leur économie. C'est le premier sou qui coûte le plus à épargner; quand le premier pas est fait dans la voie de la propriété, les autres se font plus facilement. Il n'y a donc pas de précipice entre la petite propriété et la grande : les riches et les pauvres se coudoient.

1 Protectionnisme et Socialisme, p. 17.

II

La propriété mobilière est-elle plus inégalement répartie que la propriété foncière? Voici ce qu'on trouve à ce sujet dans un mémoire lu récemment à l'Académie des sciences morales et politiques par M. Alfred Neymarck sur le morcellement des valeurs mobilières :

« Les rentes françaises sont représentées par 5.096.811 inscriptions. La moyenne de chacune d'elles forme 159 francs de rentes, soit un capital de moins de 5.500 francs. Sur l'ensemble des inscriptions de rentes 3 1/2 p. 100 et 3 p. 100, on compte plus de 80 p. 100 de titres de 2 à 3 francs et ne dépassant pas 50 francs de rentes! Le nombre des porteurs de rentes est d'environ 2 millions, ce qui représenterait pour chacun d'eux 403 francs de rentes en moyenne, soit un capital de 13 à 14.000 francs. En tenant compte des rentes appartenant aux Caisses d'épargne, caisses publiques, départementales, communales, Légion d'honneur, rentes de cautionnement, etc., cette moyenne serait encore de beaucoup trop élevée.

« Les actions de la Banque de France appartiennent à 28.358 actionnaires possédant moins de 5 actions, soit un capital de 17.500 francs. « << Les actions du Crédit foncier appartiennent à 40.339 actionnaires : la moyenne des titres possédés par chacun d'eux est de 9, représentant un capital de 6.345 francs.

« Sur les 3.913 millions d'obligations foncières et communales du Crédit foncier, 819 millions sont au nominatif,divisées en 208.953 certificats.

«Les actions et obligations des six grandes compagnies de chemins de fer, qui représentent, au total, un capital de 20 milliards, appartiennent à plus de 700.000 familles, soit plus de 2 millions de personnes; ce qui représente, pour chacune d'elles, un capital d'une dizaine ou quinzaine de mille francs tout au plus. Cette évaluation est confirmée par le nombre de certificats nominatifs d'actions et d'obligations de ces compagnies, par leur extrême division dans les portefeuilles.

« Sur 3.059.000 actions de chemins de fer, 1.501.000 sont au nominatif, divisées en 108.945 certificats, soit une moyenne, por certificat, de 12,82 actions, ou un capital variant de 11 à 26.000 francs.

« Sur 30.106.577 obligations, 21.488.106 sont au nominatif. Le nombre des certificats est de 686.090; la moyenne des obligations inscrites sur chacun d'eux est de 32,59 soit un capital de 15.000 francs.» De ces chiffres nous pouvons donc conclure, avec M. Neymarck, qu'il n'y a pas de féodalité financière, comme on le dit, mais une véritable démocratie financière.

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On dit encore que le capital exploite le travail, que les patrons ne donnent aux ouvriers que tout juste le salaire suffisant pour les empêcher de mourir et qu'ils gardent pour eux la «< plus value » du « surtravail ». Soumettons encore cette assertion à l'épreuve des faits.

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Depuis cinquante à soixante ans, dit toujours M. Neymarck, le taux de l'intérêt a baissé de 5 et 6 p. 100 à moins de 3 p. 100, soit une diminution de 50 p. 100. Il faut aujourd'hui un capital double pour avoir le même revenu qu'autrefois.

« Dans la même période, les salaires des travailleurs de la grande et de la petite industrie, ceux des ouvriers mineurs, les gages des domestiques, ont augmenté de 50, 60, 75 p. 100. »

On sait que le prix des denrées est loin d'avoir augmenté dans la même proportion. Il y a donc eu, dans cette période, diminution de bien-être pour les riches et augmentation pour les pauvres, contrairement à l'antithèse susdite.

Ce qui le prouve d'une manière encore plus palpable que les faits précédents, c'est le mouvement des Caisses d'épargne.

«Il existe plus de 8.600.000 livrets dans les Caisses d'épargne pour un capital de 3.900 millions, soit une moyenne par livret de 455 francs, alors que les fonds déposés à la Banque et dans les grands établissements financiers, en comptes de chèques, et que l'on peut considérer comme le fonds de roulement des banquiers, commerçants, industriels, capitalistes et rentiers plus riches que les déposants dans les Caisses d'épargne, s'élèvent à environ 1 1/2 milliard pour 250 à 300.000 comptes.

Comment les paysans et les ouvriers peuvent-ils se soustraire à la fameuse loi d'airain pour remplir ainsi les Caisses d'épargne?

IV

De tous ces faits, et de beaucoup d'autres que nous négligeons, car faut se limiter, il ressort : 1° que, bien loin de s'accroître, l'inégalité des fortunes diminue; 2° que le travail n'a jamais été moins exploité par le capital qu'aujourd'hui.

Et pourtant, disent les socialistes, le travail est loin de recevoir la part qui lui revient légitimement dans les produits qu'il contribue à fabriquer. Où passe donc la différence ? »

Il n'est pas difficile de répondre à cette question.

Il n'entre que deux facteurs en cause dans la production de la richesse travail (y compris talent) et capital; mais il en intervient un troisième dans la répartition du produit: l'Etat, le fisc. Ne serait-ce pas ce dernier qui prend de plus en plus la part du lion? Jugez-en.

Depuis 1830, les impôts directs ont passé de 260 à 541 millions; les impôts indirects de 466 à 1.991; le produit des monopoles et exploitations industrielles de l'État s'est élevé de 105 à 657 millions. Les ressources totales du budget étaient de 962 millions en 1830. Le total des recettes prévues pour le budget de 1896 montait à 3.507.877.743 francs et le total des dépenses à 3.507.554.983.

Ajoutez à cela les dépenses extraordinaires, les emprunts à jet continu, et je pense que vous ne serez plus étonné que l'ouvrier ne reçoive pas sa part intégrale dans les produits qu'il fabrique et que l'égalisation des fortunes ne se réalise pas plus rapidement, dans la mesure où elle est réalisable.

Ce n'est donc pas le capital, qui reçoit de moins en moins, que l'on doit accuser de la misère relative du travail, mais bien l'État, qui prélève de plus en plus sur la masse.

V

A mes heures de loisir, j'aime à lire de vieux livres pour me reposer des jeunes; or, je parcourais dernièrement un bonhomme de bouquin publié en 1846 par Isidore Debrie et intitulé: Des Prolétaires et de l'amélioration de leur sort par la liberté du travail et la libre con

currence.

Couvrez-vous la face, socialistes de toutes sectes, à l'aspect de cet apologiste de l'infame concurrence, mais prêtez un peu l'oreille à ce qu'il dit on le croirait écrit de ce matin.

« Il faut à nos ministres, dit Debrie, des êtres complaisants; aux êtres complaisants, des électeurs corrompus; aux électeurs corrompus, des députés productifs. Or, une partie de l'argent de la France est consacrée à donner des places, des pensions, des entreprises aux électeurs et aux députés, à leurs fils, gendres, neveux et cousins.

«En 1830, l'on avait réduit les chiffres de certains gros appointements; l'on en a augmenté d'autres depuis. Le clergé a conquis de nouveaux évêchés et archevêchés, et sa milice s'est accrue.

« Dans une seule administration, celle des finances, le nombre des employés, qui était en 1830 de 59.930, s'est augmenté, en 13 ans, de 10.811; l'armée financièce formait,en 1843, un effectif de 70.740 employés dont l'entretien ne coûtait pas moins de 76.884.014 francs; elle est encore plus forte aujourd'hui.

« Les députés allouent aux ministres les fonds nécessaires pour la création de nouvelles places, et les ministres passent ces places aux députés, à leurs fils, gendres, neveux, cousins et amis. Pour ne citer qu'un exemple, il y avait, en 1830, 20 conservateurs des eaux et forêts, il y en a 32 aujourd'hui; 83 inspecteurs, aujourd'hui 131; 357 gardes

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