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Mais un profane doit se taire.

Sa cour dit qu'il s'occupe à faire
Une famille de héros,
Ainfi qu'ont fait très-à-propos
Son aïeul & fon digne père.
Daignez pour moi remercier,
Votre ministre magnifique :
D'un fade éloge poétique
Je pourrais fort bien l'ennuyer;
Mais je n'aime pas à louer;
Et ces offrandes fi chéries
Des belles & des potentats,
Gens tous nourris de flatteries,
Sont un bijou qui n'entre pas
Dans son baguier de pierreries.
Adieu; faites bien au Saxon
Goûter les vers de l'Italie,
Et les vérités de Newton;
Et que votre muse polie

Parle encor fur un nouveau ton,
De notre immortelle Emilie

!

RÉPONSE

A MONSIEUR LE CARDINAL QUIRINI

A Berlin, ce 12 Décembre 1752..

QUOI,

voi, vous voulez donc que je chante
Ce temple orné par vos bienfaits,
Dont aujourd'hui Berlin fe vante!
Je vous admire, & je me tais.
Comment fur les bords de la Sprée,
Dans cette infidelle contrée
Où de Rome on brave les loix,
Pourrai-je élever une voix
A des cardinaux confacrée ?
Éloigné des murs de Sion,
Je gémis en bon catholique.
Hélas! mon prince eft hérétique,
Et n'a point de dévotion.
Je vois avec componction,
Que dans l'infernale sequelle
Il fera près de Cicéron,
Et d'Ariftide & de Platon,
Ou vis-à-vis de Marc-Aurèle.
On fait que ces efprits fameux
Sont punis dans la nuit profonde;
Il faut qu'il foit damné comme eux,
Puifqu'il vit comme eux dans ce monde.
Mais fur-tout que je fuis fâché
De le voir toujours entiché

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Moi chambellan très-inutile 90
D'un prince endurci dans le mal',
Et profcrit dans notre évangile ?
Vous dont le front prédestiné
A nos yeux doublement éclate,
Vous dont le chapeau d'écarlaté do
Des lauriers du Pinde eft orné;
Qui marchant fur les pas d'Horace,
Et fur ceux de Saint Auguftin,
Suivez le raboteux chemin ?!
Du paradis & du parnaffe
Convertiffez ce rare efprit;
C'est à vous d'inftruire & de plaire;
Et la grace de JESUS-CHRIST
Chez vous brillé en plus d'un écrit,
Avec les trois graces d'Homère,

A

A MADAME DE GONDRIN,

DEPUIS

MAD. LA COMTESSE DE TOULOUSE,

Sur le péril qu'elle avait couru ent: averfant la Loire en 1719.

SAVEZ

Ce

AVEZ-VOUS, gentille douairière,
dans Sulli l'on faifait,

que

'I

Lors qu'Eole vous conduifait
D'une fi terrible manière ?
Le malin Perigni riait,
Et pour vous déjà préparait
Une épitaphe familière,«
Difant qu'on vous repêcherait
Inceffamment dans la rivière,
Et qu'alors il obferverait
Ce que votre humeur un peu fière
Sans ce hafard lui cacherait.
Cependant l'Espar, la Valière,
Guiche, Sulli, tout foupirait;-
Rouffi parlait peu, mais jurait,
Et l'abbé Courtin qui pleurait,”

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En
voyant votre heure dernière,
Adreffait à DIEU fa prière,
Et pour vous tout bas murmurait
Quelque oraifon de fon bréviaire,
Qu'alors, contre fon ordinaire,
Dévotement il fredonnait,

Dont à peine il se souvenäit,

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Et que
même il n'entendait guère.
Mais quel fpectacle ! j'envisage
Les amours, qui de tous côtés
S'oppofent à l'affreufe rage
Des vents contre vous irrités.
Je les vois : ils font à la nage,
Et plongés jufqu'au cou dans l'eau
Ils conduifent votre bateau,
Et vous voilà fur le rivage.
GONDRIN, fongez à faire usage
Des jours qu'amour a confervés;
C'eft pour lui qu'il les a fauvés;
Il a des droits fur fon ouvrage.

VARIANTE.

Après ce vers, Il a des droits fur fon ouvrage. Il y avait encore,

Daignez pour moi vous employer

Près de ce duc aimable & fage
Qui fit avec vous ce voyage,
Où vous penfâtes vous noyer,
que votre bonté l'engage

Ει

A conjurer un peu l'orage

Qui fur moi gronde maintenant,
Et qu'enfin au prince régent

Il tienne à-peu-près ce langage.

Prince dont la vertu va changer nos deftins,
Toi, qui par tes bienfaits fignale ta puissance,
Toi, qui fais ton plaifir du bonheur des humains,
Philippe, il eft pourtant un malheureux en France.

1

Du

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