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la main des tiers, et ne peuvent les revendiquer, ni agir contre les tiers, sauf le cas de fraude dont ces derniers seraient complices. (Nous avons vu précédemment une exception à ce principe, en faveur du locateur). Seulement si le prix n'a pas été payé, ils peuvent demander qu'ils soient distribués entr'eux par ordre d'hypothèque. Sic jugé à Douai, le 3 janvier 1815. (SIREY, 1816, 2o partie, page 46.) Mais si le débiteur s'est fait payer le prix, le créancier pourrait-il le faire condamner par corps comme stellionataire? Non, ce n'est pas là le cas de stellionat (Article 2059); et la disposition qui y est relative, étant pénale, ne peut être étendue. Seulement, le créancier peut faire déclarer la créance exigible, pour cause de diminution des sûretés (Article 1188). Il peut en outre faire condamner le débiteur en ses dommagesintérêts; et s'ils excèdent 300 francs, la contrainte par corps peut être prononcée. (Procéd., art. 126.)

Nota. L'on a jugé avec raison à Douai, le 5 janvier 1815, et en Cassation, le 4 février 1817 (SIREY, 1817, 1re partie, page 359), que le curateur à une succession vacante n'avait pas pu préjudicier aux droits des créanciers, en détachant des objets mobiliers, immeubles par destination, et en les vendant séparément comme meubles; et en effet, dès que la succession était vacante, elle était censée en état de faillite, et en conséquence les droits des créanciers étaient irrévocablement fixés du moment du décès.]

Pour traiter avec ordre la matière des hypothèques, nous verrons,

1o. Combien il y a de sortes d'hypothèques, et de quelle manière chacune d'elles peut être établie;

2o. Quels biens peuvent être soumis à l'hypothèque ; 3o. S'il y a plusieurs hypothèques, quel est l'ordre à suivre entr'elles.

4°. Quel est, en général, l'effet des hypothèques ; 5o. Comment elles s'éteignent;

6o. Enfin, nous verrons, comme nous l'avons an

noncé, dans un chapitre particulier, quels sont les droits du Trésor Royal sur les biens des comptables, et pour le recouvrement des frais de condamnation en matières criminelle, correctionnelle, etc., ainsi que pour le recouvrement des contributions directes.

CHAPITRE PREMIER.

Des diverses sortes d'Hypothèque.

L'hypothèque est légale, judiciaire ou conventionnelle. 2116.

SECTION PREMIÈRE.

De l'Hypothèque légale.

1

L'hypothèque légale est celle qui résulte de la loi seule, 2117. sans aucune stipulation particulière.

Elle a lieu, 1o au profit de l'État, du trésor de la couronne, et des établissemens publics, sur les biens des receveurs et administrateurs comptables. [Ainsi, il ne suffit pas d'être administrateur; il faut en outre être comptable, c'est-à-dire, toucher les deniers. Ceux qui ne font que surveiller les recettes, ne sont pas comptables, ni conséquemment sujets à l'hypothèque légale. (Voyez, au surplus, ci-après, chap. VI, ce qu'on doit entendre par comptable.)

Nota. 1o. Un arrêt de Besançon, du 19 février 1811, rapporté dans SIREY, 1815, 2o partie, page 177, a jugé qu'un acquéreur de bois nationaux, qui n'a pas payé le prix de son acquisition, doit être regardé comme un comptable. Il me semble que c'est un peu outrer le sens du mot comptable. On entend ordinairement et proprement par là celui qui a touché des sommes dont il doit compte ; et d'ailleurs, dans tous les cas, l'article dit :

administrateurs comptables. Or, un acquéreur de bois nationaux n'est pas un administrateur.

Nota. 2°. L'article 155 du décret du 15 novembre 1811, Bulletin, no 7452, a décidé que l'article 2121, relatif à l'hypothèque légale au profit des établissemens publics, était applicable à l'Université. ]

2o. Au profit des mineurs et interdits, sur les biens de leurs tuteurs. [Voyez, ci-après, les notes 4o, 5o, 6o et 7o, du rang des hypothèques entre elles.]

3o. Au profit des femmes mariées, sur les biens de leurs 2121.maris. [Voyez également, ci-après, les notes 8 à 15° du même chap.]

Com. 4°. Au profit de la masse des créanciers du failli, sur les 500. immeubles de ce dernier. [Cette hypothèque pourrait être

regardée comme judiciaire, puisqu'elle résulte du jugement de déclaration de faillite; cependant, comme ce jugement ne porte aucune condamnation, il m'a semblé plus naturel de dire qu'elle était donnée par la loi seule. Seule. ment, comme la loi ne la donne que quand il y a faillite, il faut que la faillite soit constatée par un jugement, pour que l'on puisse prendre inscription. Ce n'est donc pas le jugement qui donne l'hypothèque; il est seulement la preuve de l'existence de la condition exigée par la loi pour qu'il y ait hypothèque.]

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5o. Enfin, la loi accorde une hypothèque simple aux créanciers privilégiés sur les immeubles qui, à défaut d'observation des formalités requises, ont perdu leur pri2113. vilége.

Ces diverses hypothèques diffèrent, en ce que celles du mineur, de l'interdit, et de la femme mariée, n'ont pas besoin d'être inscrites, ainsi que nous le verrons au cha2134. pitre III, tandis que les autres n'ont de rang que du jour 2135.de l'inscription.

SECTION II.

De l'Hypothèque judiciaire.

[Cette hypothèque est fondée sur ce que l'on a cru devoir assurer, autant que possible, l'exécution des jugemens. L'on ne peut cependant se dissimuler que l'effet de cette disposition ne soit un peu entravé par la nécessité de l'inscription; car plusieurs créanciers, vrais ou simulés, peuvent s'inscrire dans l'intervalle qui s'écoule nécessairement entre la condamnation et l'inscription prise par la partie qui l'a obtenue. Celle-ci peut d'ailleurs ignorer où sont situés les biens de son débiteur, et avant qu'elle ait pris les informations nécessaires, ces biens peuvent être grevés au delà de leur valeur. Enfin, c'est un moyen d'éluder la loi qui défend de consentir une hypothèque générale sur les biens présens et à venir. Un débiteur, d'accord avec son créancier, lui fera un billet antidaté, qui sera supposé échu. Le créancier obtiendra un jugement qui lui procurera une hypothèque générale, qu'il n'aurait pu obtenir par l'effet d'une convention; mais ces inconvéniens sont inséparables de la chose même. On ne pouvait refuser l'hypothèque aux jugemens; et alors il n'était pas possible de la spécialiser.]

L'hypothèque judiciaire est celle qui résulte des jugemens rendus par les tribunaux français.

Des jugemens [de première instance ou d'appel, et même des condamnations et contraintes, émanées des administrations, dans les cas et pour les matières de leur compétence (Avis du Conseil d'État, approuvé le 24 mars 1812, Bulletin, no 7899), et arrêt de Rouen, du 22 mai 1818, rapporté dans SIREY, 1818, 2° partie, page 250.] Cette hypothèque résulte, non-seulement des jugemens de condamnation, contradictoires ou par défaut, définitifs ou provisoires, mais encore des simples reconnaissances ou vérifications, faites en jugement [mais non en conciliation, comme il est dit dans la note suivante. Quid, des reconnaissances devant notaires? Elles n'emporteraient hypothèque

qu'autant qu'elles seraient revêtues de toutes les formes requises pour la validité de l'hypothèque conventionnelle] des 2123. signatures apposées à un acte obligatoire sous seing-privé. [L'article 155 du Code de Procédure dit, que les jugemens par défaut ne peuvent être exécutés qu'après huitaine, à compter de la signification à avoué, s'il y a avoué en cause, ou à personne ou domicile, dans le cas contraire. De même, l'article 450 porte que l'exécution des jugemens de première instance, contradictoires, mais non exécutoires par provision, est suspendue pendant la huitaine durant laquelle il est défendu d'interjeter appel. Or, comme l'inscription est une espèce d'exécution du jugement, en doit-on conclure qu'on ne peut s'inscrire, dans les deux cas, qu'après le délai de huitaine? Je ne le pense pas; cela entraînerait trop d'inconvéniens. D'ailleurs, qu'entend-on par un acte d'exécution? C'est un acte de contrainte, qui a pour fin immédiate de forcer la partie d'exécuter le jugement. Or, l'inscription n'est pas un acte de ce genre; car, si celui sur lequel on s'inscrit, ne cherche point à faire rayer l'inscription, rien ne le forcera, d'ailleurs, à exécuter le jugement. L'inscription est donc moins un moyen d'exécution, qu'un acte conservatoire; et ce qui prouve la différence qui existe entre l'inscription et l'exécution, c'est qu'aux termes de l'article 551 du Code de Procédure, on ne peut faire aucune saisie, en vertu d'un titre, même exécutoire, si l'objet de la condamnation n'est pas liquide; tandis qu'on peut faire inscrire une créance non liquide, sauf à l'évaluer dans l'inscription. C'est ainsi qu'il a été jugé en Cassation, le 21 août 1810 (SIREY, 1811, 1re partie, page 29 bis), qu'on avait pu prendre une inscription en vertu d'un jugement qui condamnait à rendre compte. Au surplus, la jurisprudence paraît confirmer l'opinion que l'on n'est pas obligé d'attendre le délai de huitaine pour prendre inscription. (Voir un arrêt de la Cour de Cassation, du 19 décembre 1820. SIREY, 1821, 1. partie, page 369.) On a même jugé, à la même Cour, le 21 mai 1811 (Ibid., page 261), qu'on avait pu s'incrire valablement en vertu d'un jugement par dé

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