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bien grands orages s'élèvent parmi les sécheresses et stérilités; et alors il faut constamment combattre les tentations, car elles ne sont pas de Dieu; mais il faut souffrir patiemment les sécheresses, puisque Dieu les a ordonnées pour notre exercice; 4o que nous ne devons jamais perdre courage entre les ennuis intérieurs, ni dire, comme le bon Geoffroy Jamais je ne serai joyeux; car, au sein de la nuit, nous devons attendre la lumière; et réciproquement, au plus beau temps spirituel que nous puissions avoir, il ne faut pas dire: Je ne serai jamais triste; non, car, comme dit le Sage: Aux jours heureux, il se faut ressouvenir du malheur; il faut espérer dans les épreuves, et craindre dans la prospérité; et tant en l'une des occasions qu'en l'autre, il faut toujours s'humilier; - 5° que c'est un souverain remède de découvrir son mal à quelque ami spirituel qui puisse nous soulager.

Enfin, pour conclusion de cet avertissement, qui est si nécessaire, je remarque qu'ici comme partout, notre bon Dieu et notre ennemi ont des vues toutes contraires, car Dieu nous envoie des épreuves pour nous conduire à une grande pureté de coeur, à un entier renoncement de notre intérêt propre, en ce qui concerne son service, et à un parfait dépouillement de nous-mêmes; mais le malin nous suscite des peines pour nous faire perdre

courage, pour nous faire retourner du côté des plaisirs sensuels, et enfin nous rendre à charge à nous-mêmes et aux autres, afin de décrier et diffamer la sainte dévotion. Mais, si vous observez les enseignements que je vous ai donnés, vous accroîtrez grandement votre perfection en l'exercice de ces afflictions intérieures, dont je veux vous dire un mot encore avant de terminer. Quelquefois les dégoûts, les stérilités et sécheresses proviennent de l'indisposition du corps, comme quand, par l'excès des veilles, des travaux et des jeûnes, on se trouve accablé de lassitudes, d'assoupissements, de pesanteurs et autres infirmités semblables, lesquelles, bien qu'elles dépendent du corps, ne laissent pas d'incommoder l'esprit, à cause de l'étroite liaison qui existe entre eux. Or, en ces occasions, il faut toujours se souvenir de faire plusieurs actes de vertu, avec la pointe de notre esprit eti volonté supérieure; car, encore que toute notre âme semble dormir et être accablée d'assoupissement et lassitude, les actions de notre esprit ne laissent pas d'être fort agréables à Dieu. Nous pouvons dire en ce temps-là, comme l'épouse sacrée : Je dors, mais mon cœur veille. Et comme j'ai dit ci-dessus, s'il a moins de goût à travailler de la sorte, il y a pourtant plus de mérite et de vertu. Mais le remède en cette occurrence, c'est de retremper les forces du corps au moyen d'une

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honnête récréation. Ainsi saint François ordonnait à ses religieux qu'ils fussent tellement modérés en leurs travaux, qu'ils n'accablassent pas la ferveur de l'esprit.

Et à propos de ce glorieux père, il fut une fois attaqué et agité d'une si profonde mélancolie d'esprit, qu'il ne pouvait s'empêcher de le témoigner en son extérieur; car, s'il voulait converser avec ses religieux, il ne pouvait le faire; s'il s'en séparait, c'était pis encore; l'abstinence et macération de la chair l'accablaient, et l'oraison ne le soulageait nullement. Il fut deux ans en cet état, tellement qu'il semblait être entièrement abandonné de Dieu; mais enfin, après avoir humblement souffert cette rude tempête, il recouvra en un moment une heureuse tranquillité. C'est pour dire que les plus grands serviteurs de Dieu sont sujets à ces secousses et que les moindres ne doivent pas s'étonner s'il leur en arrive quelques-unes.

FIN DE LA QUATRIÈME PARtie.

Intr.

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CHAPITRE I.-Qu'il faut chaque année renouveler les bons propos par les exercices suivants.

E premier point de ces exercices consiste à bien reconnaître leur importance. Notre nature humaine déchoît aisément de ses bonnes affections, à cause de la fragilité et des mauvaises inclinations de notre chair, qui appesantit l'âme et la tire toujours en bas, si elle n'a soin de s'élever souvent en haut à force de résolution, à la façon des oiseaux qui retombent soudain

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