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rendit, après une très-courte mais solennelle discussion, l'arrêté d'exécution armée dont Bâle-ville, Neuchâtel et les Rhodes-intérieures repoussèrent pour leur compte les conséquences. Cet arrêté, admirablement motivé, est rédigé comme suit:

La Diète fédérale,

<«< Considérant que, par l'arrêté du 20 juillet de cette année, l'alliance séparée des sept Etats de Lucerne, Uri, Schwytz, Unterwald, Zug, Fribourg et Valais a été déclarée incompatible avec les dispositions du Pacte, et dissoute en conséquence; que les dits cantons ont été déclarés responsables de l'observation de cet arrêté et que la Diète s'est réservée, si les circonstances l'exigent, de prendre des mesures ultérieures pour le faire respecter;

«< Considérant que les députations des cantons du Sonderbund ont déclaré déjà, en date du 22 juillet; qu'elles ne reconnaissent pas cet arrêté ;

« Considérant que les dits cantons, déjà avant le 20 juillet ainsi qu'après, ont fait des préparatifs militaires extraordinaires, élevé des fortifications de campagne et tiré de l'étranger des armes et des munitions, évidemment dans le but de résister, même par la force des armes, à l'exécution des décisions prises par la Diète;

« Considérant que les mêmes cantons n'ont pas non plus observé l'arrêté du 11 août qui les engageait sérieusement à s'abstenir de tout ce qui pourrait troubler la paix du pays, mais, au contraire, ont agi contrairement aux décisions de la Diète en établissant des retranchements et en continuant leurs préparatifs extraordinaires, après ce décret, comme avant;

« Considérant qu'il a été refusé aux représentants fédéraux nommés par la Diète de paraître devant les autorités instructionnelles et les landsgemeindes des cantons intéressés, qu'il a été défendu presque partout de répandre la proclamation conciliatrice et amicale et que même dans le canton de Lucerne cela a été menacé de peine comme un crime;

« Considérant que les propositions de conciliation faites depuis ont été repoussées par les sept mêmes Etats, et que

les efforts pour les ramener par les voies amiables à reconnaître et à remplir leurs devoirs fédéraux à teneur de leur serment, sont restés sans succès ;

<< Considérant que les députés de ces cantons ont quitté le 29 octobre la Diète et la ville fédérale, et que par cet acte, combiné avec les déclarations données en même temps et les mesures militaires prises depuis, ils se sont placés en état de guerre ouverte vis-à-vis de la Confédération;

<< Considérant qu'après tout cela il importe à la Confédération, et il est du devoir de la Diète de faire respecter les arrêtés pris par celle-ci conformément aux prescriptions du Pacte, et d'employer tous les moyens que le Pacte autorise pour faire cesser un état de choses qui menace la sûreté intérieure et extérieure de la Confédération;

« Vu les articles 1, 6 et 8 du Pacte fédéral ;

ARRÊTE CE QUI SUIT :

« ARTICLE 1er. L'arrêté de la Diète du 20 juillet de l'année courante, ordonnant la dissolution de l'alliance séparée conclue entre les cantons de Lucerne, Uri, Schwytz, Unterwald, Zug, Fribourg et Valais doit être exécuté par la force des armes.

« ART. 2. Le général en chef des troupes fédérales est chargé de l'exécution du présent arrêté.

« ART. 3. La Diète se réserve de prendre les mesures nécessaires ultérieures.

« ART. 4. Le Directoire fédéral est chargé de communiquer immédiatement le présent arrêté au général en chef des troupes fédérales, au Conseil fédéral de la guerre et aux Gouvernements de tous les cantons. »>

L'assemblée adopta aussi dans cette séance une proclamation à l'armée et une déclaration au peuple suisse en réponse au manifeste du Sonderbund. Tout en récapitulant ce qui s'était passé jusqu'au 29 octobre entre la Diète et la Ligue, cette proclamation énergique, sortie de la plume de M. Druey, attendait des soldats qu'ils sauraient relever le gant jeté par la Ligue à la Confédération suisse et faisait un appel à tous leurs sentiments généreux par ces nobles paroles :

« Soldats! Le militaire s'est de tout temps signalé par sa discipline exemplaire. Vous saurez conserver en tout cette réputation. Vous obéirez à vos chefs et leur accorderez toute votre confiance, tout comme vous saurez fermer l'oreille aux bruits semés par la malveillance.

« Officiers, sous-officiers et soldats, militaires de toutes armes et de tous grades! La Suisse et le monde ont les yeux fixés sur vous. La nation place une confiance illimitée en votre courage et votre dévouement. Au fanatisme de vos adversaires, vous opposerez ce sang-froid, cette énergie calme, cette vaillance qui se possède, cette sérénité de l'enthousiasme que donne le sentiment d'une bonne cause et la conscience éclairée du devoir.

« Vous prouverez aux contemporains et à la postérité que vous n'avez pas dégénéré de vos valeureux ancêtres, qui étaient aussi braves que ceux de vos adversaires. En vous illustrant sur le champ de bataille, vous ajouterez un nouveau fleuron à la couronne de gloire qui enceint le front de la patrie et vous inspirerez à l'étranger un salutaire respect pour la Suisse et son armée.

« Vous vaincrez ceux qui vous résisteront les armes à la main ou qui auraient l'audace de vous attaquer. Mais, tout en obéissant aux inexorables lois de la guerre, vous saurez allier la magnanimité aux nécessités du combat, vous n'oublierez jamais que ce sont, pour la plupart, des hommes égarés, des Confédérés, des frères que vous devez faire rentrer dans le devoir.

« Votre drapeau est celui de l'autorité de la Confédération, de l'intégrité d'une commune patrie qui abrite les cantons et leur souveraineté, de la nationalité suisse, en un mot, avec la liberté, l'ordre et la sécurité. C'est pour abattre l'étendard de la séparation que vous êtes accourus sous la bannière rouge et blanche de la Suisse, marquée de la croix fédérale, bannière qui est le symbole de la foi, de l'union et de la bravoure ; c'est pour éteindre les torches incendiaires de la discorde et sauver la Suisse de l'anarchie que vous vous êtes levés en masse; c'est pour assurer aux vingt-deux cantons une paix durable que vous avez pris les armes.

« La patrie reconnaissante récompensera vos services et prendra soin des veuves, des enfants et des parents des braves qui auront versé leur sang pour elle.

« Que le Dieu des armées veille sur vous, qu'il fortifie vos cœurs, éclaire votre esprit, aguerrisse votre corps et vous soutienne dans le combat.

« Que Dieu protége la Suisse et bénisse notre cause! »

Pendant qu'on attendait l'arrêté d'exécution armée, les différentes divisions de l'armée fédérale s'organisaient, les contingents des cantons arrivaient dans leurs cantonnements respectifs et un cordon de troupes se formait autour du Sonderbund depuis le mont Cheville jusqu'à l'extrémité orientale du district schwytzois de la Marche du côté de Glaris, cordon immense qui, en se resserrant, devait finir par étouffer la contre- révolution. N'ayant pas les mêmes raisons que d'autres cantons, celui de Vaud ne mit des troupes sur pied que le 25 octobre. Ce jour là le Conseil d'Etat ordonna la levée de tout le contingent fédéral et de cinq bataillons de réserve; ces forces militaires furent réparties dans les districts limitrophes des cantons du Valais et de Fribourg. En même temps avait lieu l'école des sous-lieutenants qu'avait précédée celle des officiers d'état-major. Cinq jours plus tard se fit une nouvelle levée des bataillons d'élite des 7me et 8me arrondissements, des compagnies de carabiniers no 3, 4, 7 et 8, et des bataillons de réserve du 3me arrondissement. L'ordre fut aussi donné d'organiser définitivement les compagnies de dépôt. Le 2 novembre, le Conseil d'Etat, obtempérant à l'invitation de la Diète, procéda à l'organisation des troupes encore disponibles, consistant en neuf bataillons d'infanterie, trois compagnies et demie de carabiniers, sept batteries d'artillerie, une compagnie de sapeurs du génie et une compagnie de cavalerie, outre les volontaires et le dépôt? Plus tard, d'autres troupes furent encore levées sur la réquisition de l'autorité militaire 1. La première division, dont M. Rilliet avait pris le commandement à la fin d'octobre et dont le quartier-général fut à Lausanne, avant l'entrée

4 La ville de Lausanne prit un aspect guerrier pendant quelques semaines, quoiqu'elle fût en dehors du théâtre des événements. Elle eut une garnison.... d'une compagnie d'hommes du dépôt et de volontaires; plus, un état-major de la place complet, mauvaise plaisanterie dont la caisse de l'Etat a payé les frais.

en campagne, avait ses cantonnements comme suit dans les premiers jours de novembre:

Première brigade. Colonel Rusca. Etat-major à Vevey. Bataillons d'élite Monachon, à Vevey; Chappuis, à Mézières, et Reymond (bataillon genevois), à Lausanne.

Compagnies de carabiniers d'élite: Delarageaz, à Corseaux et Jongny, et Jeannin, à Palézieux.

Deuxième brigade. Colonel Bourgeois. Etat-major à Moudon. Bataillons d'élite Audemars, à Echallens; Chausson, à Moudon, et Reymond, à Lucens.

Compagnies de carabiniers d'élite: Recordon, à St.Cierges, et Chevalley, à Froideville.

Troisième brigade. Colonel F. Veillon. Etat-major à Yverdon. Bataillons d'élite Grandjean, à Yverdon; Bolens, à Orbe, et Kehrwand, à Mollondins.

Compagnies de carabiniers d'élite: Eytel, à Belmont sur Yverdon, et Bornand, à Yvonand.

Compagnies de cavalerie Juat, à Lausanne, et De la Rottaz, à Hermenches.

Artillerie. Compagnies Haubenreiser, à Villeneuve ; Valette, à Lausanne; Creux, à Moudon; Pavid, à Echallens; Gautier, à Bex, et la batterie genevoise, à Yverdon. Compagnie de parc Boudry, à Moudon.

Cette artillerie était divisée en deux brigades sous les ordres des majors fédéraux Wenger et Borel.

Compagnie de sapeurs du génie Dürr, à Cheseaux.

Brigade détachée. Colonel Nicollier. Etat-major à Aigle. Bataillons de réserve Visinand, à Aigle; Roud, à Bex; Vincent, à Villeneuve; Wenger, à Noville, et Cœytaux, au Chatelard.

Compagnies de carabiniers d'élite: Moreillon, à Aigle; Jaquiéry, à Gryon, et celle de réserve Bertholet, à Bex.

Bataillons hors de ligne. Briod, à Payerne, et Déglon, à Curtilles.

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