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que l'on connût alors? Cependant bien des Auteurs du tems même avouent, qu'il eut quelque chofe de furnaturel dans la conduite de cette fille: c'est ce qui eft examiné dans le livre de l'hiftoire juftifiée contre les romans.

Sur

CHANT HUITIEM E.

Vers 102. Page 128.

Après ce vers,

Et par Armand détruite aussi-tôt qu'élevée,

On voit dans l'édition de 1723. ce qui fuit.

Sanci, brave guerrier, Miniftre, Magiftrat, &c.

Ur quoi l'Auteur fait une remarque très-curieuse au sujet de Mr. de Sancy.

Nicolas de Harlay de Sancy fut fucceffivement Confeiller au Parlement, Maître des requêtes, Ambaffadeur en Angleterre & en Allemagne, Colonel Général des Suiffes, premier Maître-d'hôtel du Roi, Sur-Intendant des finances; & réunit ainfi en fa perfonne le Ministère, la Magiftrature & le commandement des Armées. Il était fils de Robert de. Harlay, Confeiller au Parlement, & de Jacqueline Morvilliers; il nâquit en 1546. & mourut en 1629.

N'étant encor que Maître des requêtes, il fe trouva dans le Confeil d'Henri III. lorfqu'on délibérait fur les moyens de foutenir la guerre contre la Ligue; il propofa de lever une armée de Suiffes. Le Confeil, qui favait que le Roi n'avait pas un fol, fe moqua de lui: Meffieurs, dit Sancy, puifque de tous ceux qui ont reçu du Roi tant de bienfaits, il ne s'en trouve pas un qui veuille le fecourir, je vous déclare, que ce fera moi qui leverai cette armée. On lui donna fur le champ la commiffion & point d'argent, & il partit pour la Suiffe. Jamais négociation ne fut fi fingulière; d'abord il perfuada aux Genevois & aux Suiffes de faire la guerre au Duc de Savoye, conjointement avec la France; il leur promit de la Cavalerie, qu'il ne leur donna point: il leur fit lever dix mille hommes d'Infanterie, & les engagea de plus à donner cent mille écus. Quand il se vit à la tête de cette armée, il prit quelques places au Duc de Savoye; enfuite il fut tellement gagner les Suiffes, qu'il engagea l'armée à marcher au fecours du Roi. Ainfi on vit pour la première fois les Suiffes donner des hommes & de l'argent."

Sancy dans cette négociation, dépenfa une partie de fes biens; il mit en gage fes pierreries, & entr'autres ce fameux diamant, nommé le Sancy, qui est à présent à la Cou

ronne.

Ce diamant, qui paffait pour le plus beau de l'Europe, avait d'abord appartenu au malheureux Roi de Portugal, Don Antoine, chaffé de fon pays par Philippe II. Don Antoine s'était réfugié en France, n'ayant pour tout bien qu'une felle garnie de pierreries, & un petit coffre dans lequel il y avait quelques diamans. Celui dont il eft question, eft un diamant affez large, qu'il mettait à fon chapeau, & qu'il aimait beaucoup. Ce fut celui dont il fe défit le dermer; il le mit en gage entre les mains de Sancy, qui lui prêta quarante mille francs fur cet effet. Le Roi n'était point en état de rendre cette fomme, le diamant demeura à Sancy, qui fut honteux d'avoir, pour une fomme fi modique, une piéce d'un fi grand prix. Il envoya dix mille écus au Roi Don Antoine, & eût pû même en donner davantage.

Sancy étant Surintendant des finances fous Henri IV. fut difgracié, au rapport de Mr. de Thou, parce qu'il avait dit à la Ducheffe de Beaufort, que fes enfans ne feraient jamais que des fils de P. Il y a plus d'apparence, que le Roi lui ota les finances, parce qu'il s'accommodait beaucoup mieux de Rofni. Sancy même ne fut point difgracié, puifque le Roi en 1604. le nomma Chevalier de l'Ordre.

Il s'était fait Catholique quelque tems après Henri IV, difant qu'il falait être de la Religion de fon Prince. C'eft fur cela que d'Aubigné, qui ne l'aimait pas, compofa l'ingénieufe & mordante fatyre intitulée: La Confeffion Catholique de Sancy, imprimée avec le journal de Henri III. ( Tiré de l'édition de 1723.

Voyez page 142. vers 10e. de la variante-9e.

Frappe le Grand Henri d'une atteinte imprévûe.

Ce vers donne lieu à l'Auteur de faire dans l'édition de 1723. une remarque, qui n'eft point dans les autres éditions, parce que l'on a fupprimé les vers qui y ont donné lieu. La voici cependant.

Ce ne fut point à Ivry, ce fut au combat d'Aumale, que Henri IV. fut bleffé: il eut la bonté depuis de mettre dans fes Gardes, le foldat qui l'avait bleffé.

Le Lecteur s'apperçoit bien fans doute, que l'on n'a pu parler de tous les combats de Henri le Grand, dans un poëme, où il faut obferver l'unité d'action. Ce Prince fut bleffé à Aumale: il fauva la vie au maréchal de Biron à FontaineFrançaise. Ce font là des événemens, qui méritent d'être mis en œuvre par le Poëte; mais il ne peut les placer dans les tems où ils font arrivés: il faut qu'il raffemble, autant qu'il peut, ces actions féparées, qu'il les rapporte à la même époque; en un mot, qu'il compofe un tout de diverfes parties; fans cela il eft abfolument impoffible de faire un poëme épique, fondé fur une hiftoire.

Henri IV. ne fut donc point bleffé à Ivry; mais il courut un grand rifque de la vie, il fut même envelopé de trois Cornettes Walonnes, & y aurait péri, s'il n'eût été dégagé

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par le Maréchal d'Aumont & par le Duc de la Trimouille. Les fiens le crurent mort quelque tems, & jettèrent de grands cris de joie, quand ils le virent revenir l'épée à la main tout couvert du fang des ennemis.

Je remarquerai, qu'après la bleffure du Roi à Aumale, Dupleffis-Mornay lui écrivit : SIRE, Vous avez aller fait Alexandre, il eft tems que vous faffiez le Céfar; c'eft à nous à mourir pour Votre Majefté, & ce vous eft gloire, à vous, SIRE, de vivre pour nous; & j'ofe vous dire, que ce vous eft devoir.

Il n'y a rien fur les IX. & Xme Chants.

FIN DES NOTES HISTORIQUES TIRÉES DE L'EDITION DE MR. L'ABBÉ LANGLET.

HISTOIRE ABRÉGÉE

Des événemens fur lesquels eft fondée la fable du Poëme de la HENRIADE.

LE feu des guerres civiles, dont François II.

vit les premières étincelles avait embrafé la France fous la minorité de Charles IX. La Religion en était le fujet parmi les peuples, & le prétexte parmi les Grands. La Reine Mère, Catherine de Médicis, avait plus d'une fois hazardé le falut du Royaume pour conferver fon autorité, armant le parti Catholique contre le proteftant, & les Guifes contre les Bourbons, pour les accabler les uns par les autres.

pour ,

La France avait alors fon malheur beaucoup de Seigneurs trop puiffans, & par conféquent factieux; des Peuples devenus fanatiques & barbares par cette fureur de parti qu'infpire le faux zèle; des Rois enfans, aux noms defquels on ravageait l'Etat. Les batailles de Dreux, de Saint-Denis, de Jarnac, de Montcontour, avaient fignalé le malheureux régne de Charles IX. Les plus grandes villes étaient prifes, reprifes, faccagées tour à tour par les partis oppofés. On faifait mourir les prifonniers de guerre par des fupplices recherchés. Les églifes étaient mifes en cendres par les Réformés les temples par les Catholiques; les empoifonnemens & les affaffinats n'étaient regardés que comme des vengeances d'ennemis habiles.

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On mit le comble à tant d'horreurs par la journée de St. Barthelemi. Henri le Grand, alors Roi de Navarre, & dans une extrême jeuneffe Chef du parti Réformé, dans le fein duquel il était né, fut attiré à la Cour avec les plus puiffans Seigneurs du parti. On le maria à la Princeffe Marguerite, foeur de Charles IX. Ce

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fut au milieu des réjouiffances de ces nôces, au milieu de la paix la plus profonde, & après les fermens les plus folemnels, que Catherine de Médicis ordonna ces maffacres, dont il faut perpétuer la mémoire, (toute affreufe & toute flétriffante qu'elle eft pour le nom Français, ) afin que les hommes, toujours prêts à entrer dans de malheureufes querelles de Religion voyent à quel excès l'efprit de parti peut enfin conduire.

On vit donc dans une Cour, qui fe piquait de politeffe, une femme célèbre par les agrémens de l'efprit, & un jeune Roi de vingt-trois ans, ordonner de fang froid la mort de plus d'un million de leurs fujets. Cette même nation, qui ne penfe aujourd'hui à ce crime qu'en friffonnant, le commit avec transport & avec zèle. Plus de cent mille hommes furent affaffinés par leurs compatriotes; & fans les fages précautions de quelques perfonnages vertueux, comme le Préfident Jeanin, le Marquis de St. Herem, &c. la moitié des Français égorgeait l'autre.

Charles IX. ne vécut pas longtems après la St. Barthelemi. Son frère Henri III. quitta le Trône de la Pologne, pour venir replonger la France dans de nouveaux malheurs, dont elle ne fut tirée que par Henri IV. fi juftement furnommé le Grand par la postérité, qui feule peut donner ce titre.

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Henri III. en revenant en France, y trouva deux partis dominans. L'un était celui des Réformés, renaiffant de fa cendre, plus violent que jamais, & ayant à fa tête le même Henri le Grand alors Roi de Navarre. L'autre était celui de la Ligue, faction puiffante, formée peu à peu par les Princes de Guife, encouragée par les Papes, fomentée par l'Espagne, s'accroiffant tous les jours par l'artifice des Moines, confacrée én apparence par le zèle de la Religion Catholique, mais ne tendant qu'à la rébellion. Son Chef était le Duc de Guife, furnommé le Balafré, Prince d'une réputation éclatante, & qui

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