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grés de force, d'élafticité & de tenacité des fers, par des poids fufpendus aux extrémités d'une barre de fer en équilibre, par des efforts avec des viffes, ou par des fils calibrés auxquels on fufpend des poids jufqu'à ce qu'ils rompent.

En réfumant ici le but de l'ouvrage de M. Bergman & de mes obfervations, qui eft de connoître les caufes originaires des variétés du fer, j'observerai que quoique j'aie combattu en plufieurs points l'opinion de M. Bergman, je lui dois la juftice d'avouer que je lui ai la plus grande obligation, en mon particulier, des nombreuses expériences qu'il a faites, toutes auffi ingénieufes qu'elles font lumineufes ; & fi elles n'ont pas porté toujours un caractère d'évidence dans les résultats, ni concouru au but de l'auteur c'eft qu'elles ont été faites peut-être à trop petites doses: mais elles m'ont confirmé dans le fentiment que j'ai déja développé dans le traité fur l'acier que je publierai inceffament, lequel fentiment eft fondé sur la matière de la chaleur & du phlogistique qui feu's opèrent les différentes variétés du fer, fans rejeter les parties étrangères qui peuvent être combinées avec le fer, & peuvent feulement modifier quelques-unes de fes propriétés.

Je ne crois pas qu'aucun favant avant moi, ait avancé ces principes dont M. Bergman n'eft pas éloigné; je les développerai & les porterai au point de la conviction dans l'ouvrage dont je viens de parler. Ce que j'en ai dit dans cet Appendice, fuffit pour mettre fur la voie, & pour rendre mon fentiment au moins vraisemblable.

En relifant ma correfpondance avec le célèbre Alexis-Fréderic Cronstedt, Intendant des mines de Suède, je trouve dans deux lettres datées d'Aveslad, des 14 mai 1760 & 2 février 1761, des obfervations qui ont un très-grand rapport avec l'objet des recherches de M. Bergman, Mij

Dans la première, après avoir approuvé ma manière de chercher à connoître les parties conftitutives du fer, plutôt que de s'attacher aux couleurs, aux angles & aux facettes des criftaux, ce favant me parle de la matière blanche qui fe trouve au fond des fourneaux, que j'avois démontrée & analyfée, laquelle il juge être analogue à la fleur du fer; » que l'on peut » imiter & en faire fur la poitrine, ( manière de s'ex> primer en Suède) comme on dit ailleurs, (in vold »manus), la revivifier & la rendre attirable à l'aimant, même à la flamme d'une chandelle. »

Dans fa feconde lettre, M. Cronstedt parle des expériences de MM. Rinman & Quift qui ont ob fervé qu'une furabondance de phlogistique rend le fer infufible, ce qui pourroit fervir à diftinguer le fer de la fonte & de l'acier, quand même on regarderoit comme une erreur populaire, qu'il entre plus de phlogiftique dans l'acier que dans le fer.

Il parle plus particulièrement d'une matière noire, écrailleufe & foyeuse qui fe forme dans les fourneaux des forges, quand la proportion du charbon furpaffe celle du minerai. C'est cette fubftance noire dont j'ai parlé dans mon mémoire fur les métamorphofes du fer en 1761, fous le nom de limaille, & dont j'ai fait mention dans cette traduction.

M. Cronstedt dit qu'il a trouvé un grand rapport entre cette fubftance & la molybdène, & avec les fcories d'un bitume brûlé qui fe trouve dans les mines de fer de Suède (mine de fer spéculaire); que les expériences que M. Quift a faites fur cette molybdène, font affez remarquables, & qu'il a obfervé que cette molybdène eft indeftructible au feu, lorsqu'elle eft en contact avec les charbons; mais, que fi on l'expofe au feu de calcination, elle s'envole & fe fublime fous une forme cotoneufe, qui fe détruiten étincelles; que fi on peut raffembler de ces flocons, on reconnoît que ce font des fils ou des criftaux ; qu'il croit

que c'eft un compofé de foufre & de fer, mêlé de tant foit peu d'étain. Nous affurons que ce n'eft point du foufre qui conftitue cette espèce de molybdène, puifqu'elle ne détonne pas avec le nitre.

Il ne faut pas que le terme de molybdène faffe ici équivoque fur le mot, parce que M. Cronstedt s'eft fervi du même terme pour exprimer & la molybdène proprement dite, & la plombagine qu'il a rangée dans deux ordres de minéraux ; & c'eft avec toute juftice de cause que M. Bergman lui reproche dans cette differtation, cette bigamie de nom. J'avois de même prévu cette amphibologie, lorfque M. Cronstedt m'envoya le plan de fa minéralogie qu'il fit imprimer en allemand, fous l'anonyme, parce qu'il attaquoit de front le systême du Chevalier Linné; mais il n'étoit plus temps de rectifier cette erreur de mots. Il n'en eft pas moins conftant que cette plombagine que M. Bergman a retirée du fer dans fes divers états, a la plus grande analogie avec cette prétendue plombagine de M. Cronstedt, fur laquelle M. Quift a fair des expériences, & que j'ai apperçue dès que je me fuis occupé du fer. Je l'ai démontré à l'académie des fciences, en 1761, dans mon mémoire fur les métamorphofes du fer, que je n'ai fait imprimer qu'en 1775, pour le réunir à mes différens mémoires académiques.

L'observation de M. Bergman n'en a pas moins de mérite; elle confirme des faits avancés & démontrés, que des fubftances qui peuvent le féparer de la fonte, peuvent auffi se perpétuer dans les diverfes variétés du fer qui en procèdent. Je fuis bien perfuadé que ce favant pouffera plus loin fes recherches fur cet objet.

Je m'impofe de mon côté, au premier moment de loifir, l'obligation de m'occuper très-ferieusement de cette matière étrangère & accidentelle au fer, mais qui ne procède pas moins d'un principe ferrugineux, uni à la fubftance talqueufe: elle a même beau

coup d'analogie avec les mines de fer fpéculaires, réduite en fchlich par la nature.

C'eft entre ces deux fubftances que je me propofe de partager mon attention & de faire un travail comparatif. J'invite d'autres favans à s'en occuper, pour raffembler un plus grand faisceau de lumière fur la phyfique du fer, qu'il eft temps de faire fortir de l'enfance & de la barbarie.

L'or & l'argent ne font que trop connus par ceux qui en abusent; le fer ne l'eft pas encore par ceux qui en ont befoin.

Pendant l'impreffion de cet ouvrage, j'ai lu dans le journal des favans du mois d'octobre 1782, un extrait fort fuccint de la differtation de M. Bergman dans lequel l'auteur qui ne s'eft pas fait connoître obferve judicieusement que la théorie que M. Bergman fonde fur fes expériences, eft bien contraire aux principes établis par M. Crawford, qui croit que plus une fubftance contient de phlogistique, moins elle contient de principe de la chaleur.

Je regrette de n'avoir eu aucune connoiffance des ouvrages de M. Crawford; mais quoi qu'il en foit, tous les principes que j'ai pofés fur la théorie de la chaleur & du phlogiftique, font conformes à celui qu'il paroît que M. Crawford a adopté; & l'on verra par le tableau que je préfente de ces proportions de la chaleur & du phlogistique qui caractérisent les différentes variétés du fer, qu'elles font d'accord à cette doctrine , pag. 176.

Les moyens que M. Bergman a employés pour mefurer & pefer les quantités refpe&ives de ces principes conftitutifs du fer, ne paroiffent pas fuffifans pour les développer; car, d'après la théorie de ce favant, il faudroit croire que la chaux du fer foumis à la diffolution dans l'acide nitreux, ne contiendroit plus de la matière de la chaleur, ce qu'il n'eft pas poffible de préfumer.

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MÉMOIRE

Sur les Moyens de perfectionner le travail des Ancres de Marine,

Lu'à l'Académie des Sciences le 20 décembre 1780.

Par M. Grignon, Chevalier de l'ordre du Roi.

AYANT eu occafion de jeter un coup d'œil fur les travaux des forges de Guerigny & de Cofne, dans lefquelles on fabrique les ancres pour la marine royale, j'ai cru appercevoir la néceffité & les moyens de perfectionner ce travail.

Une ancre eft une maffe de fer fouvent énorme dans fes diverfes proportions; elle doit opposer au vaiffeau une réfiftance fupérieure à l'impulfion qu'il reçoit des vents, des courans & des lames.

Si les molécules des métaux fondus, & particuliè rement de la fonte de fer, avoient la même adhérence entre elles que celles des métaux forgés & foudés, l'on préféreroit fans doute la méthode de couler des ancres à celle de les forger; parce que des ancres coulées d'un feul jet, feroient compofées d'une maffe plus pleine & fous une forme plus regulière que celle de fer forgé; elles auroient même l'apparence de comporter moins de ces défauts extérieurs qui font inévitables dans le forgéage des groffes pièces; mais elles feroient plus fragiles, parce que l'action du feu dans la fufion des métaux, opère une forte de diffolution des parties conftitutives, & y introduit une fub

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