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ni sa femme. Vous ferez alliance avec les brutes mêmes, qui sont pourvues d'intelligence, d'dme, de raison et d'immortalite. Il ne faut pas leur dire des mots de colère, ni les frapper du fouet, ni leur mettre des mors. Soyez justes envers elles, alors

Et les loups dévorans sortiront des forêts,

Et la chèvre et l'agneau se coucheront auprès;

Et de tout ce qui vit la sagesse infinie

Rétablira d'Eden la première harmonie! (P. 89.)

Il ne faut ni juges ni rois; il ne faut ni loi ni tribunal pour punir celui qui fait du mal.

Quand du bien et du mal tout cœur à la science

Le juge et le bourreau sont dans sa conscience 1. (P. go.)

C'est là ce que M. de Lamartine appelle les divines lois.
Sur le mal; qu'il n'existe pas; négation de la chute originelle.
Le sage en sa pensée a dit un jour : Pourquoi,

Si je suis fils de Dieu, le mal est-il en moi?...
La fin justifia la voie et le moyen;

Ce qu'il appelait mal fut le souverain bien,

La matière, où la mort germe dans la souffrance,
Ne fut plus à ses yeux qu'une vaine apparence,
Un mode d'existence, à l'autre contrasté.

............

Et le sage comprit que le mal n'était pas,

Et dans l'oeuvre de Dieu ne se voit que d'en bas

Après avoir appris à ces enfans cette fameuse dogmatique, le

Voltaire avait dit aussi en parlant de la Loi :

Le bon sens la reçoit, et les remords veugeurs,

Nés de la conscience, en sont les defenseurs, Id.

? Or nous venons de voir dans la paraphrase du Pater, que le vieillard demandait à Dieu :

Mais toi-même prêtant ta force à nos combats,

Fais triompher du mal tes enfans d'ici bas.

Mais est ce que M. de Lamartine a besoin de se souvenir de ce qu'il a dit! ses lecteurs apparemment ne valent pas cette peine : même désordre de pensées sur les notions du juste et de l'injuste; il dit en effet plus loin: La justice aujourd'hui, peut être erimo un jour. (P. 76.)

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vieillard désire mourir. Alors on voit apparaître dans les airs'un navire céleste (un ballon), qui vient aborder sur le seuil de l'antre. Trois hommes en sortent l'épée nue; ils s'avancent vers Adonaï, et lui demandent le livre ou la vie; celui ci refuse; les étrangers le suspendent à une corde sur l'abîme, prêts à l'y jeter s'il ne reconnaît leurs dieux. Le vieillard tient ferme; la corde est coupée, et son corps se brise sur les rochers. Puis ils vont à Daidha qu'ils garrottent, et s'apprêtent à la transporter dans leur navire. — Cédar, cependant, Cédar, ce grand pourfendeur de géans, ce démolisseur de murailles, ce vainqueur d'une myriade d'hommes, que faisait-il ? Ecoutez : ́

Cédar, qui les prenait pour un pouvoir céleste,
D'un homme foudroyé gardait pour eux le geste,
Et, le front sur le roc à leurs pieds prosternė,

Attendait sans parler qu'ils l'eussent enchaîné. (P. 99.)

Comme ce geste n'était pas très-effrayant, ils l'enchaînèrent en effet, puis le ramassant avec sa femme et ses enfans, les déposèrent dans la nacelle. Après quoi ils reprennent leur navigation aérienne. Parmi les fantasmagories du poëme, on doit voir que celle-ci n'est pas la moindre; c'est se mettre à l'aise avec les vraisemblances.

IX VISION.

Après un voyage décrit avec ce papillotement de mots qui empêche de se faire une image claire du spectacle ou de la scène que le poète veut représenter aux yeux, l'esquif aborde dans la ville des dieux et des déesses. Les géans descendent et remettent au roi des dieux le couple et les enfans. Etonnement des géans. - Troisième description des épaules, du sein, des hanches de Daidha.

X VISION.

Les géans racontent alors comment ils ont puni Adonaï, brûlé le livre, et enchaîné ces célestes créatures. Nemphed, le roi des dieux, pour tout remercîment, frappe du pied; cinq géans auxquels on a arraché la langue, sortent d'une trappe, tuent les cinq voyageurs, et les jettent par-dessus les créneaux. Puis Nemphed ordonne de porter Cédar dans le palais des esclaves, pour l'y rendre eunuque et muet; de donner les enfans

à allaiter en attendant leur mort, et de conduire Daidha dans le harem.

Or, Nemphed, parvenu de bassesse en bassesse au rang suprême, avait pour principal confident une femme de douze ans, Lakmi; Lakmi (description de ses épaules, etc., etc., etc.), flétrie déjà par la prostitution, pleine de beauté et de méchanceté, était le génie mauvais qui avait autorité dans ce palais.

Description fantastique et lubrique du palais des géans, et d'une orgie qu'ils y célèbrent. Tout ce qu'une imagination usée de débauches peut inventer de luxure et d'images obscènes, y est décrit avec des détails plus dégoûtans que voluptueux. Ainsi, dans la salle du banquet, ce sont des enfans qui servent de corniches et de chapiteaux; des femmes nues montées les unes sur les autres recouvrent les colonnes. Les lits où sont assis les géans sont faits avec les cheveux enlevés à de jeunes filles de 16 ans; pour coussins, pour marche picds, des femmes, des hommes nus; si les dieux s'appuient, c'est sur un enfant nu, qu'ils étouffent ou écrasent. Les spectacles et les drames les plus sanglans y sont joués au naturel, avec accompagnement de coup de poignards, des corbeilles pleines d'aspics, de scorpions, etc. C'est dans ces ignobles images, toutes écloses de son cerveau, et qu'aucun fait historique n'autorise, que le poète supposo que les dieux trouvaient leur plaisir.

XIC VISION.

Nemphed, qui craint que le pouvoir ne lui échappe, pense alors à éblouir les peuples en leur faisant croire que Cédar et Daidha sont descendus des cieux, et à les leur offrir en adoration, Daidha comme la beauté des dieux révélée aux mortels, Cédar comme le symbole de leur majesté; et en même tems, pour que la race de Baal se perpétue, il propose Daidha à la jalouse convoitise des géans.

Revue et dénombrement des peuples asservis. - Description dégoûtante et sans respect des vieillards. Hommes faits, qu'il dit faussement être de grands artistes, et pourtant dégradés jusqu'à ne plus lever les yeux au Ciel. Les vierges impudiquement désiguées aux fils des dieux.-Puis un troupeau d'en

fans qui ne peut connaître ni père ni mère. — C'est à la suite de cette fausse et moqueuse description, qu'il dit :

Voilà ce qui restait de cette race neuve

Dont le bassin du monde avait été rempli! (P. 216.)

Et il ne se souvient plus qu'il a dit qu'il y avait d'autres tribus éparses; que la mère d'Adonaï est venue d'autres contrées où les peuples connaissaient Dieu. Mais aussi nous avons averti que le poète se met à l'aise avec ses pensées comme avec ses lecteurs.

XI VISION.

Un des géans, Asrafiel, symbole de la force, voulant posséder Daidha sans partage, pense à renverser Nemphed, et à jeter aux vautours sa carcasse divine. Poussé par la débauche à la sédition,

Dans la salle sonore il marchait à grands pas,
En redressant le buste et balançant les bras.....
Sans pouvoir s'assoupir dans sa veille farouche,
Son corps impatient se tordait sur sa couche.

Couchée aux pieds divins de Nemphed endormi,

Que faisait cependant la perfide Lakmi? etc. (P. 227.)

▲ son tour clle s'était laissée fasciner par un seul regaid de l'époux de Daidha. Or, aspirer et saisir était sa devise. Elle arrache donc l'anneau royal du doigt du roi des dieux, et avec ce talisman, elle se dirige vers la prison de Cédar,

D'abord elle arrête l'exécution des ordres barbares donnés par le maître, puis elle pénètre dans le cachot du prisonnier. Elle lui offre la liberté, et même de le faire le roi des dieux s'il veut seulement la prendre pour esclave. Cedar lui demande de lui rendre Daidha, et lui dit qu'à cette condition,

pourvu

à la

Tes dieux seront mes dieux! Cédar sera ton frère. (P. 245.) Il faut convenir que le vieil Adonaï avait bien conservation du nom de Dieu ! et il avait pu mourir tranquille!!! Mais il ne suffit pas à Lakmi que Cédar renonce à son Dieu. Pour le tenter, elle lui insinue que Daidha, objet des attentions des dieux, prend son malheur en très-grande patience.-Cédar

lui raconte sa vie.

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XII VISION.

Amour furieux de Lakmi, qui toutes les nuits vient visiter Cédar, et essayer de lui faire oublier Daidha, mais en vain. Aussi elle prépare son triomphe et sa vengeance.

Nemphed avait appris le complot tramé par les géans contre lui; il projette de les convier à une orgie divine, et de les y perdre tous. Lakmi devient confidente et complice de ses desseins; elle le trompe, et décide avec Asrafiel la mort du tyran.

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Elle visite Daidha, qui n'avait aucune nouvelle de son époux et de ses enfans, et comme elle lui dit que ceux-ci sont couchés sur la pierre nue, la mère coupe ses cheveux, et lorsqu'elle en a fait tomber sur le sol jusqu'à ses genoux, elle les donne à Lakmi qui les emporte. Lakmi va dans le cachot de Cédar lui annoncer qu'il y aura dans le palais une grande confusion, que Nemplied sera assassiné, et que tandis que tous les dieux prenant part au combat, le laisseront sans garde, il pourra sortir par une porte ouverte, et que là une esclave le conduira dans un bois de cyprès où il trouvera Daidha, qu'il l'emporte, sans lui parler toute la nuit, jusqu'à un endroit où, au point du jour, ellemême viendra le rejoindre avec les deux enfans.

XIV VISION.

Description du festin - orgie; Lakmi, en faisant semblant d'embrasser Nemphed, le perce d'un stilet; elle s'échappe, se pare des cheveux de Daidha, et va attendre Cédar dans le bois de cyprès. Cédar, trompé, la prend pour Daidha, et l'emporte, traverse dans sa course un quart de royaume, et la dépose au sycomore convenu. Mais quand il fait jour, l'erreur et la ruse sont reconnues; alors, au lieu de se punir lui-même d'avoir été infidèle à Daidha, il tourne sa rage contre Lakmi, l'écrase du genou, et la précipite dans la mer. Puis il revient à la ville des dieux. Grande fureur, qu'il aurait dû montrer plutôt au moment où l'on enchaîna Daidha sur la montagne. De retour à la ville, il assemble le peuple, et lui annonce qu'il veut le délivrer. A sa voix un million de glaives se lèvent. Discours contre la

tyrannie et les tyrans.

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