Mon dessein.... TARTUFFE. ORGON. Ces discours ne sont plus de saison : Il faut, tout sur-le-champ, sortir de la maison. TARTUFFE. C'est à vous d'en sortir, vous qui parlez en maître · Quel est donc ce langage? et qu'est-ce qu'il veut dire ? ORGON. Ma foi, je suis confus, et n'ai pas lieu de rire. Comment? ELMIRE. ORGON. Je vois ma faute, aux choses qu'il me dit; Et la donation m'embarrasse l'esprit. La donation ELMIRE. ORGON Oui. C'est une affaire faite. Mais j'ai quelque autre chose encor qui m'inquiète. Et quoi? ELMIRE ORGON. Vous saurez tout. Mais voyons au plus tôt Si certaine cassette est encore là-haut. Que l'on doit commencer par consulter ensemble ORGON. Cette cassette-là me trouble entièrement. Cette cassette est donc un important mystère ? ORGON. C'est un dépôt qu'Argas, cet ami que je plains, CLÉANTE. Pourquoi donc les avoir en d'autres mains lâchés? ORGON. Ce fut par un motif de cas de conscience. J'allai droit à mon traître en faire confidence ; De lui donner plutôt la cassette à garder, Afin que pour nier, en cas de quelque enquête, A faire des sermens contre la vérité. CLÉANTE. Vous voilà mal, au moins si j'en crois l'apparence; Sont, à vous en parler selon mon sentiment, On peut vous mener loin avec de pareils gages: Le pousser est encor grande imprudence à vous, ORGON. Quoi! sur un beau semblant de ferveur si touchante Hé bien! ne voilà pas de vos emportemens! Et toujours d'un excès vous vous jetez dans l'autre. SCÈNE II. ORGON, CLEANTE, DAMIS. DAMIS. Quoi! mon père, est-il vrai qu'un coquin vous menace? ORGON. Oui, mon fils; et j'en sens des douleurs nonpareilles. DAMIS. Laissez-moi, je lui veux couper les deux oreilles. C'est à moi, tout d'un coup, de vous en affranchir; Voilà tout justement parler en vrai jeune homme. SCÈNE III. MADAME PERNELLE, ORGON, ELMIRE, MADAME PERNELLE. Qu'est-ce? J'apprends ici de terribles mystères ! ORGON. Ce sont des nouveautés dont mes yeux sont témoins, Dont le viennent d'armer mes bontés trop peu sages, Et me réduire au point d'où je l'ai retiré ! MADAME PERNELLE. Mon fils, je ne puis du tout croire Qu'il ait voulu commettre une action si noire. Comment? ORGON. MADAME PERNELLE. Les gens de bien sont enviés toujours. ORGON. Que voulez-vous donc dire avec votre discours, MADAME PERNELLE. Que chez vous on vit d'étrange sorte, ORGON. Qu'a cette haine à faire avec ce qu'on vous dit? MADAME PERNELLE. Je vous l'ai dit cent fois quand vous étiez petit: ORGON. Mais que fait ce discours aux choses d'aujourd'hui ? MADAME PERNELLE. On vous aura forgé cent sots contes de lui. ORGON. Je vous ai dit déjà que j'ai vu tout moi-même. MADAME PERNELLE. Des esprits médisans la malice est extrême. ORGON. Vous me feriez damner, ma mère. Je vous di MADAME PERNELLE. Les langues ont toujours du venin à répandre; ORGON. C'est tenir un propos de sens bien dépourvu. MADAME PERNELLE. Mon Dieu! le plus souvent l'apparence déçoit : J'enrage! ORGON. MADAME PERNELLE. Aux faux soupçons la nature est sujette, Et c'est souvent à mal que le bien s'interprète. ORGON. Je dois interpréter à charitable soin Le désir d'embrasser ma femme! MADAME PERNELLE. Pour accuser les gens, d'avoir de justes causes; ORGON. Hé! diantre! le moyen de m'en assurer mieux? MADAME PERNELLE. Enfin d'un trop pur zèle on voit son âme éprise; |