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faire vendre ce que j'y avois, je me suis habitué ici, ou, sous le nom d'Anselme, j'ai voulu m'éloigner les chagrins de cet autre nom qui m'a causé tant de traverses.

HARPAGON, à Anselme, ·

ANSELME.

--

Oui.

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C'est là votre fils?

HARPAGON. Je vous prends à partie pour me payer dix mille écus qu'il m'a volés.

ANSELME. - Lui! vous avoir volé ?

HARPAGON.

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VALÈRE. Qui vous dit cela?

HARPAGON. Maître Jacques.
VALÈRE, à maître Jacques.
MAÎTRE JACQUES.

HARPAGON.

déposition.

C'est toi qui le dis?

Vous voyez que je ne dis rien.

Oui. Voilà monsieur le commissaire qui a reçu sa

VALÈRE. Pouvez-vous me croire capable d'une action si lâche? HARPAGON.-Capable ou non capable, je veux ravoir mon argent.

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SCENE VI. HARPAGON, ANSELME, ÉLISE, MARIANE, CLEANTE, VALÈRE, FROSINE, UN COMMISSAIRE,

MAITRE JACQUES, LA FLÈCHE.

CLEANTE. Ne vous tourmentez point, mon père, et n'accusez personne. J'ai découvert des nouvelles de votre affaire; et je viens ici pour vous dire que, si vous voulez vous résoudre à me laisser épouser Mariane, votre argent vous sera rendu.

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Ne vous en mettez point en peine. Il est en lieu dont je réponds; et tout ne dépend que de moi. C'est à vous de me dire à quoi vous vous déterminez; et vous pouvez choisir, ou de me donner Mariane, ou de perdre votre cassette.

HARPAGON. N'en a-t-on rien ôté?.

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Rien du tout. Voyez si c'est votre dessein de souscrire à ce mariage, et de joindre votre consentement à celui de sa mère, qui lui laisse la liberté de faire un choix entre nous deux. MARIANE, à Cléante. Mais vous ne savez pas que ce n'est pas assez que ce consentement, et que le ciel (montrant Valère), avec un frère que vous voyez, vient de me rendre un père, (montrant Anselme) dont vous avez à m'obtenir.

ANSELME. Le ciel, mes enfans, ne me redonne point à vous pour être contraire à vos voeux. Seigneur Harpagon, vous jugez bien que le choix d'une jeune personne tombera sur le fils plutôt que sur le père allons, ne vous faites point dire ce qu'il n'est point nécessaire d'entendre; et consentez, ainsi que moi, à ce double hyménée.

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-

deux mariages?

ANSELME.

HARPAGON.

faire un habit.

ANSELME.

Il faut, pour me donner conseil, que je voie ma

Vous la verrez saine et entière.

Je n'ai point d'argent à donner en mariage à mes

Hé bien! j'en ai pour eux; que cela ne vous in

Vous obligerez-vous à faire tous les frais de ces

Oui, je m'y oblige. Êtes-vous satisfait?

Oui, pourvu que, pour les noces, vous me fassiez

D'accord. Allons jouir de l'allégresse que cet heureux jour nous présente.

LE COMMISSAIRE. Hola! messieurs, holà! Tout doucement, s'il vous plaît. Qui me payera mes écritures?

HARPAGON.

Nous n'avons que faire de vos écritures.

LE COMMISSAIRE. Oui! mais je ne prétends pas, moi, les avoir faites pour rien.

HARPAGON, montrant maître Jacques.

Pour votre payement,

voilà un homme que je vous donne à pendre.

MAÎTRE JACQUES.

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Hélas! comment faut-il donc faire? On me

donne des coups de bâton pour dire vrai; et on me veut pendre pour mentir.

ANSELME.

posture.

HARPAGON.

ANSELME.

mère.

--

Seigneur Harpagon, il faut lui pardonner cette im

Vous payerez donc le commissaire?

Soit. Allons vite faire part de notre joie à votre

HARPAGON. Et moi, voir ma chère cassette.

FIN DE L'AVARE.

GEORGE DANDIN,

OU

LE MARI CONFONDU.

COMÉDIE EN TROIS ACTES'.

PERSONNAGES ET ACTEURS.

GEORGE DANDIN, riche paysan, mari d'Angélique. MOLIÈRE. ANGÉLIQUE, femme de George Dandin, et fille de Mlle MOLIÈRE.

M. de Sotenville.

M. DE SOTENVILLE, gentilhomme campagnard, père } DU CROISY.

d'Angélique.

Madame DE SOTENVILLE.

CLITANDRE, amant d'Angélique.
CLAUDINE, suivante d'Angélique.
LUBIN, paysan, servant Clitandre.
COLIN, valet de George Dandin.

HUBERT.
LA GRANGE.
Mile DE BRIE.

LA THORILLIERE.

La scène est devant la maison de George Dandin, à la campagne.

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Ah! qu'une femme demoiselle est une étrange affaire! et que mon mariage est une leçon bien parlante à tous les paysans qui

1. George Dandin fut représenté pour la première fois à Versailles, le 18 juillet 1668, dans la fête d'été que le roi y donna pour célébrer le traité d'Aix-la-Chapelle.

La fable de George Dandin est empruntée à deux nouvelles de Boccace, qui lui-même l'avait empruntée à un ouvrage indien, le Dolopathos, publié cent ans avant Jésus-Christ, et traduit dans toutes les langues.

2. Demoiselle, c'est-à-dire noble. Demoiselle, entendu dans ce sens, était proprement le féminin de gentilhomme.

veulent s'élever au-dessus de leur condition, et s'allier, comme j'ai fait, à la maison d'un gentilhomme! La noblesse, de soi, est bonne; c'est une chose considérable, assurément; mais elle est accompagnée de tant de mauvaises circonstances, qu'il est très-bon de ne s'y point frotter. Je suis devenu là-dessus savant à mes dépens, et connois le style des nobles, lorsqu'ils nous font, nous autres, entrer dans leur famille. L'alliance qu'ils font est petité avec nos personnes. C'est notre bien seul qu'ils épousent; et j'aurois bien mieux fait, tout riche que je suis, de m'allier en bonne et franche paysannerie, que de prendre une femme qui se tient audessus de moi, s'offense de porter mon nom, et pense qu'avec tout mon bien, je n'ai pas assez acheté la qualité de son mari. George Dandin! George Dandin! vous avez fait une sottise la plus grande du monde. Ma maison m'est effroyable maintenant, et je n'y rentre point sans y trouver quelque chagrin.

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GEORGE DANDIN, à part, voyant sortir Lubin de chez lui. Que diantre ce drôle-là vient-il faire chez moi ?

LUBIN, à part, apercevant George Dandin. — Voilà un homme qui me regarde.

-

Il ne me connoît pas.

Il se doute de quelque chose.

GEORGE DANDIN, à part.
LUBIN, à part.
GEORGE DANDIN, à part.
LUBIN, à part.

de là dedans.

GEORGE DANDIN.

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Ouais! il a grand'peine à saluer.
J'ai peur qu'il n'aille dire qu'il m'a vu sortir

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GEORGE DANDIN.

LUBIN.

Bonjour.

Vous n'êtes pas d'ici, que je crois?

Non; je n'y suis venu que pour voir la fête de demain. GEORGE DANDIN. Hé! dites-moi un peu, s'il vous plaît: vous venez de là dedans?

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GEORGE DANDIN. Quoi donc ?

LUBIN. - Motus! Il ne faut pas dire que vous m'ayez vu sortir de là.

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LUBIN. Doucement. J'ai peur qu'on ne nous écoute.

GEORGE DANDIN.

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C'est que je viens de parler à la maîtresse du logis, de

la part d'un certain monsieur qui lui fait les doux yeux; et il ne faut pas qu'on sache cela. Entendez-vous?.

GEORGE DANDIN. . Oui.

LUBIN. Voilà la raison. On m'a enchargé de prendre garde que personne ne me vît; et je vous prie, au moins, de ne pas dire que vous m'ayez vu.

GEORGE DANDIN.

Je n'ai garde.

LUBIN. Je suis bien aise de faire les choses secrètement, comme on m'a recommandé.

GEORGE DANDIN. C'est bien fait.

LUBIN.

Le mari, à ce qu'ils disent, est un jaloux qui ne veut pas qu'on fasse l'amour à sa femme; et il feroit le diable à quatre si cela venoit à ses oreilles. Vous comprenez bien?

GEORGE DANDIN.

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Il ne faut pas qu'il sache rien de tout ceci.

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LUBIN.

Le mieux du monde.

- Si vous alliez dire que vous m'avez vu sortir de chez lui, vous gâteriez toute l'affaire. Vous comprenez bien? GEORGE DANDIN. Assurément. Hé! comment nommez-vous celui qui vous a envoyé là dedans?

LUBIN.

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C'est le seigneur de notre pays, monsieur le vicomte de.... chose.... Foin! je ne me souviens jamais comment diantre ils baragouinent ce nom-là. Monsieur Cli.... Clitandre.

GEORGE DANDIN. Est-ce ce jeune courtisan qui demeure?... Oui; auprès de ces arbres.

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GEORGE DANDIN, à part. — C'est pour cela que depuis peu ce damoiseau poli s'est venu loger contre moi. J'avois bon nez, sans doute; et son voisinage déjà m'avoit donné quelque soupçon !

LUBIN. Tétigué c'est le plus honnête homme que vous ayez jamais vu. Il m'a donné trois pièces d'or pour aller dire seulement à la femme qu'il est amoureux d'elle, et qu'il souhaite fort l'honneur de pouvoir lui parler. Voyez s'il y a là une grande fatigue, pour me payer si bien; et ce qu'est, au prix de cela, une journée de travail, où je ne gagne que dix sols?

GEORGE DANDIN. Hé bien! avez-vous fait votre message?

LUBIN. Oui. J'ai trouvé là dedans une certaine Claudine, qui, tout du premier coup, a compris ce que je voulois, et qui m'a fait parler à sa maîtresse.

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Ah! coquine de servante! Morguienne! cette Claudine-là est tout à fait jolie : elle a gagné mon amitié, et il ne tiendra qu'à elle que nous ne soyons mariés ensemble.

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